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CHAPITRE 2 : ÉTUDE DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE

III) DISCUSSION

III.4) Alimentation et devenir du petit

Le point de départ de notre étude était le problème de mortalité des petits et plus précisément la mort de petits retrouvés en mauvais état général sans que des causes précises puissent être mises en évidence. L’hypothèse d’un problème alimentaire est tout à fait valable puisque l’influence de l’alimentation sur la reproduction n’est plus à démontrer.

Les avantages nutritionnels peuvent augmenter la fécondité des femelles 1) en prévenant

l’aménorrhée par le biais des réserves adipeuses corporelles, 2) en raccourcissant l’intervalle entre les naissances par le biais d’une meilleure production quantitative ou qualitative de lait, une croissance plus rapide de l’enfant et un sevrage plus précoce et 3) en augmentant la probabilité de survie et de future reproduction de l’enfant par le biais d’une meilleure santé et d’une taille plus importante pendant les périodes fœtale et néonatale (Whitten, 1983).

Nous avons donc essayé de classer les femelles selon le devenir de leurs petits. Comme nous l’avons déjà mentionné, les résultats sont à interpréter avec précaution puisque ce classement ne représente pas des données nettes et précises superposables à la période d’observation (comme l’âge ou le stade physiologique). Les observations auraient été en faveur de l’hypothèse d’un problème alimentaire si l’on avait constaté que les femelles dont les petits meurent effectuent moins de prises alimentaires que celles dont les petits survivent. Or ce n’est pas le cas. Aucune différence n’est mise en évidence en fonction du devenir du petit. Cependant les femelles dont les petits meurent ont des taux d’observation un peu plus faibles en début de repas et plus élevés vers la fin des observations. Ceci est peut-être en rapport avec le fait que ces femelles soient des femelles dominées ou intermédiaires, toutes situées dans la seconde moitié de la classification hiérarchique, sauf une femelle, Gamine. Pour cette femelle la mort de ses petits est probablement liée aux rejets qu’elle manifeste lors de conflits (cf. pp.187-188). Les femelles dont les petits survivent ont des taux d’observation qui varient

moins au cours du repas. Elles appartiennent à toutes les catégories hiérarchiques mais sont situées dans la première moitié de la hiérarchie pour la plupart d’entre elles. Ces constatations montrent que les femelles dont les petits sont morts-nés ou meurent de mauvais état général sont globalement de rang inférieur à celui des femelles dont les petits survivent. L’étude de Romano (2002) n’a mis en évidence aucune relation entre le rang des femelles et la survie des petits. Cependant le rang est corrélé à la cause de mortalité, les femelles dominées perdant plus leurs petits de mauvais état général et les femelles dominantes étant maltraitantes. Il nous est impossible de savoir si en l’absence de ces maltraitances, les petits des femelles dominantes survivraient plus que les petits des femelles dominées, mais nos résultats semblent aller dans ce sens.

Dans notre étude, nous n’avons effectué des calculs que sur l’alimentation des femelles, les données sur l’alimentation des petits étant trop partielles pour être analysées. Le suivi de l’alimentation des jeunes est très difficile pour plusieurs raisons : leurs caractéristiques individuelles sont beaucoup moins évidentes à différencier, la reconnaissance des individus est donc plus délicate, et devient presque impossible dans des situations où la visibilité n’est pas très bonne; leur niveau d’activité généralement très élevé les rend difficiles à suivre lors des observations; ils se nourrissent essentiellement de restes de l’alimentation des autres individus c’est-à-dire de petits morceaux d’aliments difficiles à identifier; enfin, ils se nourrissent pendant les repas principaux mais également tout au long de la journée en ramassant des restes et bien sûr en étant allaités par la mère. Pourtant l’étude de leur alimentation et de leur croissance serait particulièrement intéressante. En effet, l’étude d’Altmann (1980) en milieu naturel montre que les petits nés à des périodes telles qu’ils atteignent l’âge du sevrage (6 mois) au moment de la meilleure disponibilité des aliments qu’ils sont capables de consommer ont un meilleur taux de survie. De plus, l’alimentation est un facteur majeur influençant la croissance (Knapka et al., 1995). Une meilleure alimentation, en quantité et en qualité, augmente le taux de croissance et le poids final des individus, mâles et femelles, et diminue l’âge auquel le poids final est atteint (Strum, 1991). Un tel suivi est cependant très difficile, notamment en ce qui concerne la croissance car il imposerait des manipulations fréquentes inenvisageables dans le contexte d’un parc zoologique. Toutefois il serait intéressant d’effectuer des mesures sur les cadavres des petits morts de différentes causes et de comparer les mesures relevées sur les petits morts de mauvais état général à celles des petits morts d’autres causes et à celles fournies par la littérature.

Enfin, Altmann (1991) a montré que des variables nutritionnelles (déficit d’énergie et surplus protéique par rapport à l’énergie et à l’apport protéique optimaux calculés théoriquement)

calculées pour de jeunes femelles en période de sevrage (âgées de 30 à 70 semaines) fournissaient une excellente prédiction de la probabilité de survie jusqu’à l’âge adulte d’une part, et du succès reproducteur via la durée de vie de reproduction, le nombre total de descendants engendrés et le nombre de ces descendants survivant jusqu’à l’âge adulte d’autre part. La captivité et le nombre important de femelles au PZP pourraient offrir, bien que non sans difficultés, l’opportunité de réaliser un tel suivi dans le temps des individus.