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AII.1 Contrôle des échanges au niveau de la zone hyporhéique AII.1.1 Nature des échanges

L’eau étant le principal vecteur d'échanges au niveau de la zone hyporhéique, les interactions ont d’abord été largement documentées du point de vue hydrologique (Brunke et Gonser, 1997). Au fil des études, les chercheurs se sont ensuite focalisés sur les éléments échangés.

- Les sels nutritifs en solution : les flux hydriques de surface et souterrains véhiculent des sels dissous dont certains, comme les nutriments, peuvent modifier considérablement le fonctionnement des unités de l’hydrosystème qui les reçoivent. Nitrate, ammonium et phosphates ont été les plus étudiés car ils sont en cause dans les phénomènes d’eutrophisation. Ces éléments nutritifs peuvent être successivement assimilés, stockés, recyclés et relargués vers l’aval.

- La matière organique : elle constitue une source de matière et d'énergie qui sert de base au fonctionnement des écosystèmes. Selon sa nature et son origine, on distingue d’une part les écosystèmes hétérotrophes qui dépendent de sources allochtones de matière organique pour leur fonctionnement et dont le bilan global photosynthèse sur respiration des communautés vivantes (P/R) est inférieur à 1 ; et, d’autre part, les écosystèmes autotrophes qui utilisent des sources de matière organique autochtones et dont le bilan P/R est supérieur à 1 (River Continuum Concept de Vannote et al., 1980).

- Les organismes vivants : leurs déplacements dans la zone hyporhéique et leur activité métabolique peuvent entraîner des transferts de matière et d’énergie (en particulier les invertébrés benthiques).

AII.1.2. Contrôle des échanges

Trois notions permettent de caractériser les processus de contrôle qui se déroulent au niveau de la zone hyporhéique : écotone, connectivité et perméabilité.

La notion d'écotone (Holland, 1988 ; Naiman et al., 1988 ; Gibert et al., 1990) recouvre un grand nombre de termes et de phénomènes tels que interface, bordure, frontière, zone de contact, zone de transition, zone d'échange... Il s’agit de zones d’échanges dynamiques entre au moins deux domaines qui se distinguent par leurs caractéristiques physiques et/ou chimiques. La zone hyporhéique peut donc être considérée comme l’écotone entre le cours d’eau et l’aquifère. La taille et les propriétés des écotones peuvent varier en fonction des échelles de temps et d’espace considérées. Une des caractéristiques les plus importantes de l’écotone est sa perméabilité aux flux (Figure 1.8).

Figure 1.8. Modèle conceptuel des flux de

matière à travers l’écotone eau de surface/eau souterraine (extrait de Vervier et al., 1992).

La perméabilité des écotones est fondamentale pour les processus d’échanges entre les compartiments adjacents. Elle rend compte de l’effet filtre qui peut s’opérer au sein des écotones. Chaque interface peut influencer le fonctionnement global des hydrosystèmes en modifiant l'amplitude et les caractéristiques des flux d’eau, de matière et d'énergie entre les domaines. Certains flux sont perdus pour un domaine, d'autres sont arrêtés et transformés dans l'écotone.

La connectivité est un paramètre désignant la quantité (flux, fréquence…) et la qualité (organismes, eau, matière, éléments dissous…) des échanges intervenant entre les différents domaines de l’hydrosystème. La connectivité spatiale se réfère aux liens structuraux existant entre les différents domaines. La compréhension du fonctionnement d’un système nécessite de bien connaître la connectivité des différents éléments le composant (Amoros et Roux, 1988 ; Stanford et Ward, 1993).

Au cours des différents processus d'échanges, les écotones peuvent donc agir comme puits ou comme source pour les flux (Vervier et al., 1992). Les écotones peuvent ainsi contrôler le fonctionnement des hydrosystèmes fluviaux en modifiant l’amplitude et les caractéristiques des flux de matière et d’énergie entre les systèmes. Dans le cas de la zone hyporhéique, le contrôle des différents flux entre cours d'eau et aquifère a, entre autres, pour conséquence la formation de gradients physiques et chimiques.

AII.1.3. Gradients physico-chimiques dans la zone hyporhéique

Les cours d'eau sont caractérisés par des forces hydrauliques fortes et turbulentes, des temps de rétention faibles, des débits contrastés, des conditions chimiques variées, le transport principalement longitudinal des composés particulaires et dissous et une morphologie du chenal dynamique (Brunke et Gonser, 1997). Au contraire, les conditions environnementales dans le milieu sédimentaire sont plus stables, les écoulements sont plutôt laminaires, les temps de résidence plus longs, la structure des sédiments est peu dynamique dans le temps, l’obscurité est totale et permanente et le ratio de biofilm par rapport au volume d’eau est plus important que dans le cours d’eau. Du fait des contrastes physiques et chimiques très prononcés entre le cours d’eau et le milieu souterrain, d’importants gradients physico- chimiques peuvent donc apparaître dans la zone hyporhéique.

- Lumière et vitesse du courant : les sédiments macroporeux du lit de la rivière ne laissent pas passer la lumière, ce qui prive le milieu souterrain d’énergie lumineuse. La qualité et la quantité des apports nutritifs de surface déterminent donc l’activité biologique au sein de la zone hyporhéique. A ce filtre photique s’ajoute également un filtre physique de diminution de la vitesse de l’eau dès que l’eau s’infiltre dans les sédiments macroporeux. En général, les vitesses d’écoulement dans le milieu souterrain sont environ mille fois inférieures à celles qui sont observées pour l'eau de surface (Brunke et Gonser, 1997). Cependant, elles peuvent varier fortement localement en fonction de l’environnement physique. Le temps de résidence de l’eau dans la zone hyporhéique, plus long que dans la pleine eau, favorise ainsi la mise en place de processus de dégradation biochimique (Findlay, 1995) par les bactéries fixées sur les particules sédimentaires.

- Température : la zone hyporhéique peut agir comme une zone tampon pour la température, en particulier dans les petits cours d’eau. Le gradient de température dans la zone hyporhéique est déterminé par les échanges hydrauliques entre le cours d’eau et l’aquifère. Ce gradient peut être important pour le fonctionnement de l’hydrosystème car le développement des invertébrés et l’activité microbienne dépendent de la température (Ward et Stanford, 1982 ; Hedin et al., 1998).

- Gradient d’oxygène dissous : la concentration en oxygène dissous dans la zone hyporhéique décroit généralement avec la profondeur et la distance à la rivière, jusqu’à atteindre la concentration de l’aquifère (Ponnamperuma, 1972 ; Valett et al., 1990 ; Triska et al., 1993a). Le gradient d’oxygène détermine également le gradient d’oxydo-réduction dans les sédiments et la succession des métabolismes s’y déroulant (Hunter et al., 1998).

- Dioxyde de carbone et pH : au sein de la zone hyporhéique, les variations de teneurs en CO2

sont principalement régulées par les apports de l’eau de surface et par l’activité respiratoire des communautés vivant dans les sédiments (Pusch et Schwoerbel, 1994 ). Le pH, directement lié à la concentration en CO2, peut donc également varier.

- Matière organique et nutriments : les flux hydriques de surface et souterrains véhiculent de la matière organique et des sels dissous dont certains, comme les nutriments, peuvent

AII.2. Le transport des solutés dans la zone hyporhéique