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Chapitre II. – Les critères d’inscription au compo

1. La bataille des biens nobles

1.1. Les adversaires de la réfection du compo

Dès que l’arpentage du terroir commence, en février 1661, les possesseurs de biens prétendus nobles manifestent leur hostilité au travail des arpenteurs : « le sieur de Sarrecane et le sieur du Barry, qui prétendent avoir des biens nobles, ont fait intimer des actes pour empêcher l’arpentement »257. Dans un premier temps, la communauté, sûre de son bon droit grâce à l’arrêt

de permission de la Cour des aides, soutient la poursuite des opérations d’arpentage mais tente, avec prudence, de prévenir les procès éventuels en demandant la production des titres justifiant la nobilité de certains biens258. Après quelques mois d’accalmie, le département de la taille le 14 juin

1661 réactive un conflit récurrent sur les biens que les religieuses des Salenques disent posséder noblement dans la juridiction de Montesquieu : l’abbesse fait intimer aux consuls une protestation contre l’imposition de la métairie de la Hillette qu’elle prétend noble. Mais la communauté refuse d’en tenir compte et délibère que « les cotisateurs qui feront le département de la taille cotiseront non tant seulement la métairie de la Hillette et terres en dépendant, mais encore tout le reste de ses autres biens qu’elle possède en notre juridiction »259. Elle confirme cette attitude générale de

fermeté à l’égard des biens prétendus nobles en contraignant les estimateurs à les estimer le 27 juin 1661260 : les délibérations consulaires font alors pour la première fois allusion à la

confection d’un cahier des biens prétendus nobles autorisé par l’arrêt de la Cour des aides.

Dès ce moment se distinguent deux groupes de contestataires de l’arpentage général de la juridiction du consulat : certains membres de la noblesse de Montesquieu d’une part, et les religieuses des Salenques de l’autre. Ils ont en commun de défendre la possession de leurs biens nobles et d’avoir un long passé contentieux avec la communauté de Montesquieu, toujours soucieuse d’élargir l’assiette de la taille, mais l’attitude du corps de ville à leur égard n’a pas été la même en raison des stratégies différentes adoptées par ces deux groupes et de leur différence de nature. Contrairement aux religieuses des Salenques qui sont placées sous l’autorité de leur abbesse, le groupe de la noblesse n’a rien d’homogène, certains nobles participant à la réfection du compoix, d’autres ne se mêlant pas du conflit, d’autres encore choisissant de contester l’arpentage devant les tribunaux, voire par coups de force.

257 ADHG, 2 E 1357, Délibération du 13 février 1661.

258 ADHG, 2 E 1357, Délibération du 13 février 1661 : « les messieurs de consuls et syndic et marguilliers parleront aux messieurs de la noblesse, notamment à ceux qui prétendent avoir des biens nobles dans notre communauté, et leur prie de nous vouloir donner des extraits de leurs actes de nobilité pour voir si on peut se garantir de procès ».

259 ADHG, 2 E 1357, Délibération du 14 juin 1661.

260 ADHG, 2 E 1357, Délibération du 27 juin 1661 : « a été délibéré que les estimateurs estimeront tous les biens de la communauté tant rural que autres prétendus nobles et que autrement, on leur fera signification d’autant qu’ils y sont obligés par leur contrat et que d’ailleurs l’arrêt obtenu par la communauté de la souveraine Cour des aides de Montpellier porte qu’on fera un cahier des biens prétendus nobles pour l’arpentement et estime d’iceux ».

a) Les religieuses des Salenques

L’érudit toulousain Jean Rozès de Brousse relevait en 1937 que, « par une curieuse coïncidence », aucun des grands historiens de Toulouse ne s’était penché jusqu’ici sur l’histoire de l’abbaye des Salenques ; de nos jours, plus de soixante-dix ans après la publication de la brochure des « Toulousains de Toulouse » sur l’abbaye à l’occasion de la cession par la municipalité de son ancienne Maison à la Faculté des Lettres de Toulouse, et à l’exception de quelques articles antérieurs261, la bibliographie sur ces religieuses ne s’est guère développée. Leur histoire nous

intéresse ici car les Salenques possédaient plusieurs biens à Montesquieu-Volvestre, au sujet de la nobilité desquels elles ont été longtemps en procès avec le consulat. Il faut rappeler les circonstances de leur fondation et les événements dramatiques qui les ont éprouvées par la suite pour comprendre l’entêtement qu’elles eurent à défendre, au moment de la réfection du cadastre de Montesquieu en 1662, leurs privilèges fiscaux.

L’abbaye des Salenques a des origines prestigieuses : elle fut fondée le 1er septembre 1353 par

Gaston Fébus, comte de Foix, suivant le désir de sa mère Éléonore de Comminges, sur la paroisse de Saint-Félix des Salenques près des Bordes, dans le canton du Mas-d’Azil, dans l’ancien diocèse de Rieux262. Elle reçut le nom de Notre-Dame de l’Abondance-Dieu de Saint-

Félix des Salenques. Soumise à la règle de Cîteaux, elle était placée sous la direction spirituelle de l’abbé de Boulbonne et sous le patronage des comtes de Foix. Elle devait accueillir des jeunes filles issues des familles nobles de la région, comme les abbayes de la Lumière-Dieu à Fabas et de l’Oraison-Dieu près de Muret (instituées vers 1150), qui appartenaient au même ordre et avec lesquelles elle eut des liens étroits. Les quelques vestiges encore visibles aujourd’hui témoignent du caractère imposant du monastère médiéval, dont subsistent les trois baies de la salle capitulaire, le vaste emplacement du cloître et le mur Nord de l’église, percé d’étroites fenêtres trilobées. L’église du cloître mesurait environ 46 m de long.

261 Mgr Clément Tournier, Jean Rozès de Brousse, L’Abbaye des Salenques, Toulouse, Éditions de l’Auta, 1937, 59 p ; F. Pasquier, « Les religieuses des Salenques à Montesquieu-Volvestre après la destruction de leur couvent par les Huguenots en 1574 », Bulletin périodique de la Société Ariégeoise des Sciences, Lettres et Arts et de la Société des Études du

Couserans, 13e vol., 1913, p. 280-283 ; F. Pasquier, « La détresse de l’abbaye des Salenques en 1483 », Bulletin de la

Société Ariégeoise…, 1905, p. 277-298 ; Georges Doublet, « Le Couvent des Dames Salenques de l’ordre de Cîteaux à

Foix, au dix-septième siècle », Annales du Midi, 1896, p. 43-60.

S’y ajoute une notice plus ancienne due à Victor Fons, juge au Tribunal civil de Toulouse, auteur de plusieurs travaux sur les abbayes cisterciennes de femmes de la région toulousaine et d’un recueil sur les usages de la Haute- Garonne : « L’Abbaye royale des Salenques », Revue de l’Académie de Toulouse, t. XXI, 1865, p. 81-98.

Voir également : J.-J. de Lescazes, Le Mémorial historique…, édition Pasquier, Foix, 1891, p. 84-95 ; Chanoine Jean Contrasty, Rieux-Volvestre et ses évêques, Toulouse, 1936, p. 9, 189, 192, 196, 365.

262 L’acte de fondation a été collationné sur l’original par un notaire toulousain en 1692 dans le cadre d’un procès contre les consuls des Bordes-sur-Arize : ADHG, 202 H 75. L’abbaye a été considérée comme une fondation royale à partir de la réunion du Comté de Foix à la Couronne de France en 1607.

Figure 2. – Les vestiges du couvent de Saint-Félix des Salenques : les baies de la salle capitulaire et le mur Nord de l’église de l’abbaye (à droite)

Les Salenques furent richement dotées par la famille de Foix en métairies, moulins, fiefs, rentes, albergues et autres droits dans les lieux de Saint-Félix des Bordes, du Carla, dans les villes de Foix et de Montesquieu-Volvestre ainsi que dans de nombreuses communautés du pays de Foix. À Montesquieu, elles ont acquis plusieurs métairies situées dans la plaine de l’Arize au

milieu du XIVe siècle : « en 1349, Heleonor de Commenge, comtesse de Foix, acheta La Hilete à

noble Raymond de Falguar avec toute justice haute, moyenne et basse, qu’elle donna en dotation à l’abbaye en 1353. Cette métairie n’est pas dans Montesquieu, mais confronte la juridiction de Montesquieu, de Rieux et de Goutevernisse et par conséquent elle compose une juridiction particulière… L’autre métairie appellée La Borie fut achetée par la Comtesse de Commenge en 1343 de Raymond de Carriere, lequel la vendit avec les droits de censives, d’oublies, agriers, lods et ventes et tous autres droits seigneuriaux qu’il avait au lieu de Montesquieu et de Rieux »263.

Victor Fons cite en outre l’achat, le 20 février 1360, par Éléonore de Comminges à Jacques de Carrière de la métairie de Carserot dans la juridiction de Montesquieu, pour 2 400 florins d’or ; cette donation fut confirmée par Gaston, son fils, par un acte du 26 avril 1371, retenue par Me Arnaud de Nogareda, notaire public de la ville de Foix264.

Néanmoins, l’abbaye semble avoir été durement touchée au XVe siècle par les conséquences

de la guerre de Cent Ans et surtout par celles de la guerre entre les maisons de Foix et

263 ADHG, 202 H 75, mémoire, s. d.

d’Armagnac : en 1483, d’après Félix Pasquier, elle ne compte plus qu’une dizaine de religieuses qui sont obligées d’inféoder une partie de leurs biens pour se procurer des vivres265. Les guerres

de Religion de la fin du XVIe siècle eurent pour elle des effets encore plus dramatiques : leur

maison et la plupart de leurs biens se trouvent au cœur d’un bastion protestant. Le couvent se trouvait en effet à mi-chemin des Bordes-sur-Arize et du Carla. La destruction de leur maison par les Huguenots, datée du 20 juillet 1574266, pousse les religieuses des Salenques à se réfugier à

Montesquieu-Volvestre, ville restée catholique où elles ont des biens. Ne pouvant reprendre possession de leur monastère à cause de la persistance des troubles, l’abbesse Julienne de Corneilh se résout le 22 juin 1587 à acheter dans la rue Mage, à Montesquieu, une maison moyennant 750 lt dans laquelle elle fit aménager quelques appartements et une chapelle ; elle l’agrandit par l’achat d’un patu le 20 avril 1598 pour 40 lt. Les religieuses occupèrent ce couvent improvisé pendant plus de quarante ans. C’est ce dont rend compte un acte de notoriété du 8 novembre 1599 délivré par les consuls de Montesquieu à la communauté religieuse représentée par l’abbesse Miramonde de Lauriston267. Les notables sollicités attestent en outre que les

religieuses vivent à Montesquieu « comme elles ont pu, du peu de revenu d’une métairie qu’elles y ont de petit labourage, ayant, pendant ledit temps, ladite mettairie d’iceluy et le bestailh, tant de labourage que aultre, esté prins, pulhez et desrobez plusieurs foys »268.

265 Félix Pasquier, « La détresse de l’Abbaye des Salenques au comté de Foix en 1483 », Bulletin de la Société

Ariégoise…, 1905, p. 281.

266 Victor Fons remet en cause la date du 20 juillet 1574 pour la destruction du couvent : il cite un acte du 17 décembre 1570 retenu par Me Pierre Maux, notaire de Daumazan, par lequel les religieuses, souhaitant réparer leur monastère pour y rentrer, vendent à un habitant des Bordes une pièce de terre pour 375 lt. Après avoir énuméré le nom des religieuses venderesses, le notaire ajoute que « lesdites dames assemblées et congrégées dans ladite maison et illec retenues à cause des troubles derniers pendant lesquels le susdit monastère avoit esté bruslé par ceuls de la nouvelle prétendue religion, n’y ayant laissé que les murailhes ». Cet acte est passé à Montesquieu dans la maison de noble Antoine et Pierre Griez, sise à la rue Mage. Probablement s’agit-il de membres de la famille de Griet de Villepinte, qui se sont illustrés comme de fervents défenseurs du parti catholique : le capitaine Ferréol de Griet, sieur de Villepinte, repousse en 1574 les huguenots qui attaquent Montesquieu-Volvestre et son fils devint évêque de Comminges.

267 « Trente ans plus sont passés, accause de ceux de la prétendue Religion de la Comté de Foix, la dame abbaisse et les autres religieuses, qui estoient de ce temps audit monastaire, pour sauver leur vie et leur honneur, feurent contraintes quiter et abandonner iceluy et se réfugier en la présente ville de Montesquieu… le bastiment, l’esglise, tout l’enclos de la dicte abbaye feurent bruslés, entièrement rasés, tout le bestailh, tant de labouraige que aultres, ravagez par hostilité de guerre…tous les habitans dudit lieu et des environs, où ladite dame abbaisse souloit prendre et recueillir son reveneu, tuez et massacrez. Pour raison de quoy, les terres dudit lieu des Salenques depuis ledit temps sont demeurées en friche et comme un désert, sans lever aulcun fruit. A cause de quoi, le reveneu de la dite abbaye s’est perdeu sans que la dite dame abbaisse en reçoive aulcun profit, ny comodité du peu de reveneu qu’elle prend dans la jurisdiction de la présente ville, qui consiste en peu de labouraige. Elle nourrit et entretient sept ou huit religieuses, n’estant ledit reveneu suffisant pour ce faire, bien que, par la fondation faicte par le comte de Foix, il y ait trente religieuses oultre l’abbaisse. N’ayant, pour payer les décimes et aultres charges d’icelle abbaye, la dite dame a esté constraincte, pour y subvenir, emprumpter à l’intérest grandes et notables sommes de deniers, dont tous les biens de la dite abbaye, qui sont tous temporels et ruraux, en sont et demeurent obligez et ypothéquez » (USS Toulouse, Bibliothèque de l’Arsenal, ms 221, « Les Salenques. Attestatoire du non valoir des bénéficiers de l’abbaye des Salenques », parchemin, 8 novembre 1599, acte édité par F. Pasquier, p. 282).

268 Ibid., p. 283. Acte expédié par Messire Paul de Commengé, notaire royal et substitut du greffier de la cour de Montesquieu. Me Bertrand Caussade, est notaire et substitut du procureur du roy à Montesquieu.

Figure 3. – Le plan de l’abbaye des Salenques au XVIIe siècle269

Après les derniers soubresauts des guerres de Religion270, elles errent de refuge en refuge tout

au long du XVIIe siècle, faute de retrouver leur prospérité passée : elles quittent Montesquieu

pour revenir en 1630, sous l’abbatiat d’Anne de Noé, dans leur maison des Salenques. Certaines d’entre elles partent à Foix en 1645 pour y établir le prieuré de Sainte-Sophie de Salenques, maison dépendante de l’abbaye mais en 1663, à la suite de difficultés avec l’évêque de Pamiers, elles doivent retourner au couvent des Salenques271. En 1649, l’abbesse doit intercéder auprès du

Parlement de Toulouse pour que son monastère soit mis sous la sauvegarde du roi et de la Cour alors qu’elle est en procès contre – entre autres – des habitants du Carla et des Bordes-sur-Arize qui usurpent les biens de l’abbaye, et contre deux membres de la maison de Foix272. L’abbesse qui

succède à Anne de Noé en 1659, sa nièce Philiberte, supplie en 1667 le prieur de Boulbonne, son supérieur, d’autoriser un certain nombre de religieuses à se retirer provisoirement dans leurs familles ou ailleurs faute de pouvoir les nourrir et les entretenir273. Lorsque le premier père de

l’ordre de Cîteaux, l’abbé de Morimond, visite l’abbaye des Salenques le 30 juin 1668, il constate la présence de sept religieuses de chœur et de cinq sœurs converses, quatorze étant encore absentes ; il insiste surtout sur « l’état déplorable » de la maison sur le plan matériel274.

269 ADHG, 202 H 3, d’après Gérard Pradalié, « Les Salenques et Ligny », volvestre-patrimoine.info, 19 juillet 2012. On reconnaît l’emplacement du cloître ; les bâtiments conventuels au Nord ont aujourd’hui disparu. Le chemin du Carla aux Bordes passe à proximité.

270 Le village des Bordes avait été brûlé le 1er septembre 1625 par les habitants qui se sont retirés au Mas-d’Azil : le maréchal de Thémines, commandant l’armée roayle contre les protestants, assiégea les Bordes défendues par le baron de Léran et une cinquantaine d’hommes.

271 Georges Doublet, « Le Couvent des Dames Salenques de l’ordre de Cîteaux à Foix, au dix-septième siècle »,

Annales du Midi, 1896, p. 43-60.

272 HGL, t. XIII, p. 294.

273 ADHG, 202 H, liasse 42, cité par Mgr Clément Tournier, ibid., p. 17. 274 ADHG, 202 H, liasse 61, cité par Mgr Tournier, p. 18.

Le pouillé du diocèse de Rieux, quoique tardif275, donne une idée de l’enjeu que représente le

paiement de la taille sur les biens que les religieuses possèdent à Montesquieu, alors que leur situation financière est extrêmement fragile : les revenus de l’abbaye sont estimés le 29 novembre 1729 à 4 125 lt 10 s ; les charges se montent à 1 606 lt et l’une des plus lourdes, hormis le coût des emprunts, est la taille des biens que les religieuses possèdent à Montesquieu, qui s’élève à 294 lt 8 s et 4 d. On comprend dès lors qu’elles tentent de s’en affranchir par tous les moyens.

Leur contentieux avec la communauté de Montesquieu-Volvestre, notamment au sujet de leurs métairies de La Hillette et de Laborie, remonte au moins au milieu du XVe siècle. Un

mémoire non daté indique au sujet de la première que « les consuls de Montesquieu en 1444 ayant voulu inquiéter les Dames dans le terroir de la Hillete, il fut rendu une ordonnance par le juge de Rieux en faveur desdites Dames. Cette métairie noble fut baillée en emphytéose à un nommé Vaisse, alors on la cotisa à la taille parce qu’elle était possédée par un roturier, mais les consuls de Montesquieu n’avaient pas de droit plutôt que d’autres consuls ; d’ailleurs, cette aliénation qui fut faite par une abbesse sans aucune formalité nécessaire doit être regardée comme une véritable usurpation qui ne peut jamais préjudicier au véritable maître. Après une certaine jouissance, ce particulier ne pouvant pas payer la redevance à laquelle il était obligé, fit un déguerpissement, l’abbaye reprit ce bien qui devait être noble alors comme il l’avoit été auparavant, mais on continua à le mettre à la taille, ce qui a occasionné le procès ». Quant au terroir de Laborie, le même mémoire affirme que « malgré la nobilité de cette métairie qui était incontestable, les habitants de Montesquieu tracassèrent l’abbaye jusqu’à cotiser ladite métairie à la taille, ce qui fut la cause du procès, et obligèrent enfin ces Dames à passer une transaction par laquelle ils declarèrent cette métairie noble et elles de leur côté cédèrent tous leurs droits seigneuriaux et leur remirent tous leurs titres et reconnaissances »276.

La réfection du cadastre de Montesquieu-Volvestre au milieu du XVIIe siècle relance le procès

de la communauté avec les religieuses des Salenques dès qu’il apparaît que la première cherche à imposer, au nom de l’arrêt d’autorisation obtenu devant la Cour des aides de Montpellier, l’arpentage et l’estimation de tous les biens compris dans sa juridiction, y compris les biens nobles. On a vu que lors du département de la taille délibéré en conseil général le 14 juin 1661, la communauté avait imposé la cotisation de tous les biens des religieuses se trouvant dans sa juridiction. L’abbesse des Salenques fait immédiatement appel de cette décision devant la Cour

des aides au nom de la nobilité de ces biens277. Le procureur de la communauté à Montpellier,

275 ADHG, 2 G 158, 1729-1730. 276 ADHG, 202 H 75, mémoire, s. d.

277 ADHG, 2 E 1357, Délibération du 6 juillet 1661 : « a été représenté que madame l’abbesse des Salenques a fait faire intimer un appel de la Cour des Comptes, aides et finances de Montpellier en conséquence de la cottise des deniers royaux et autres imposés cette année sur les biens qu’elle prétend nobles dans notre juridiction…a été

Me Pujol, obtient pourtant une ordonnance favorable au début du mois de septembre 1661278. Le

fermier des Salenques à Montesquieu, Jammes Desbertrands, est emprisonné pour obliger l’abbaye à acquitter la taille : le prêtre qui la représente, Me Pierre Peyrouselle, demande en vain sa libération et cherche à transiger avec les consuls en proposant de faire vérifier les titres détenus par les religieuses à Montpellier279.

La communauté de Montesquieu reste inflexible : elle fait libérer Desbertrands au début du mois d’octobre280 mais ne renonce pas, au printemps suivant, à faire payer la taille à l’abbaye des

Salenques en se fondant sur un arrêt favorable de la Cour des aides et en plaçant à nouveau sous séquestre les fruits de leur fermier281. Le conflit semble alors connaître une période d’apaisement :