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L’essentiel de ces activités est absorbé par l’agriculture et l’élevage. Cultivateurs, éleveurs ou bergers forment donc l’écrasante majorité de la population. Nous avons déjà évoqué plus haut le rôle que peuvent jouer officiers seigneuriaux, magistrats municipaux, ou bien notaires; nous laisserons également de côté le statut

107 Dans les actes 6 (f°2 verso) du registre 3E44/2 et 25 (f°5 verso) du registre 3E44/1. 108 Voir par exemple l’acte 51 (f°12 recto-verso) du registre 3E44/2.

109 Déjà cités p. 29

110 Dans les actes 23 (f°6 recto), 26 (f°6 verso), 68 (f°16 recto) du registre 3E44/2 ; 53 (f°12 verso), 86

particulier des clercs, que nous étudierons plus avant dans notre travail. De même, un certain Peyrot de Pee, «mageste» de Visos apparaît dans un minutier111

. Il s’agit d’un maître: «celui qui enseigne» témoigne-t-il de la présence d’une école dans ce village? Aux côtés de ces personnages, certaines figures particulières apparaissent dans les registres, dont voici quelques exemples112

:

Quelques artisans sont mentionnés, en l’occurrence deux forgerons, l’un de Lourdes et l’autre des Angles113

(donc dans des pays voisins du Lavedan). Ce dernier est également fermier des revenus de l’archidiaconné des Angles, ce qui nous laisse supposer une assez bonne santé financière nécessaire aux opérations de collecte et de versements des revenus seigneuriaux. Le forgeron paraît ainsi mieux loti qu’un paysan lambda, du moins dans ce cas de figure.

Vient ensuite le tailleur, qu’il nous est également permis d’approcher dans deux actes114

. Le premier concerne un certain Ramonet de Sajoos, d’Arbouix, quand le second mentionne Domenge de Bonafont, de Saint Pastous. Remarquons que ces deux villages sont relativement peu éloignés; le fait que deux tailleurs y exercent leur métier n’est-il pas un signe de l’existence de nombreux autres tailleurs lavedanais ? Un contrat d’apprentissage nous révèle des indications très intéressantes sur la formation que peut recevoir un jeune se destinant à ce futur métier. Quatre années complètes d’apprentissage seront nécessaires pour lui enseigner cet office, durant lesquelles son seul salaire sera versé en nature: le tailleur «promet pour sa part de lui enseigner ledit office, de le chausser et de le vêtir convenablement.» Il est intéressant de constater l’extrême sévérité de la peine financière encourue par le jeune homme s’il ne menait pas son apprentissage à son terme et quittait son maître ; il serait en effet tenu de verser 4 écus (de 16 sous chacun) au tailleur par année manquante. La valeur de l’engagement et de la fidélité constitue une vertu indispensable que l’on se fait un devoir d’inculquer à la jeunesse. Mais apprendre ce métier de tailleur représente une récompense réellement gratifiante. En effet, le second acte mentionnant un tailleur en fait le co-fermier des revenus du seigneur de Fontaralha,

111 Dans l’acte 185 (f°49 recto) du registre 3E44/1.

112 Nombre d’artisans nous demeurent inconnus : charpentiers ou maçons sont notamment absents de

nos sources…

113 Dans les actes 11 (f°5 verso) et 66 (f°34 recto) du registre I3852.

«bénéficiaire et collecteur des revenus de Saint Pastous». De même que pour le forgeron des Angles, le tailleur de Saint Pastous est suffisamment aisé pour supporter cette charge qui réclame temps et argent, tout en étant génératrice de revenus et donc promotrice d’ascension sociale.

Un barbier nommé Guilhem-Arramon d’Auga, de Saint Pastous, est cité dans quatres des actes que nous avons étudié115

. On sait qu’à cette époque, les barbiers parfois nommés chirurgiens-barbiers– faisaient office de médecins, et si nos sources ne décrivent pas l’activité de cet homme, ne nous méprenons pas sur ses compétences réelles. Les actes le concernant semblent témoigner d’une aisance matérielle le plaçant au dessus de la plupart de ses besis. Ici, on met en gage une terre en sa faveur, là il vend un bœuf ou encore achète une maison libre de toute redevance (excepté une poule annuelle) à un noble d’Esquièze. Le seul acte que nous connaissons mentionnant une pratique médicale est l’acte 101 (f°25 verso) du registre 3E44/2. Il y est dit que «Bernard du Tornee d’Asson donne à Odet de Saint Martin d’Ouzous tous les biens qu’il possède en Bigorre, cela en raison de l’aide qu’Odet lui a apportée en soignant diverses plaies et blessures qu’il avait à la main et à la jambe.» S’il n’est fait aucune allusion au métier ou à l’activité exercée par ledit Odet, il apparaît clairement que détenir des compétences médicales et soigner ses congénères est le gage d’un enrichissement personnel. Cette remarque peut d’ailleurs s’étendre à tous les exemples que nous venons de citer: tous ceux qui exercent un métier nécessaire à la communauté, dont le savoir-faire est peu répandu parmi ces populations au caractère principalement agro-pastoral, paraissent jouir d’un prestige particulier et d’une richesse supérieure à la majorité de leurs besis.

Une dernière activité est signalée dans nos sources par le biais d’un homme, Garcie-Arnaut de Tostart, marchand de Lourdes. Quatre transactions116

effectués par cet homme nous permettent de mieux définir son activité. Trois actes sont des ventes de draps, dont deux de draps anglais recherchés pour leur spécificité à cette époque: leur couleur rouge ‒ qui sont donc exportés jusqu’en Lavedan, et le quatrième

115 Dans les actes 102 (f°28 recto), 108 (f°30 recto), 109 (f°30 recto) du registre 3E44/1 ; 34 (f°15

verso) du registre I3852.

116 Dans les actes 14 (f°4 recto) du registre 3E44/2 ; 31 (f°7 recto), 34 (f°7 verso) et 152 (f°42 verso) du

n’indique pas le produit faisant l’objet de la transaction. Au-delà de la vente, ces actes viennent authentifier la reconnaissance de dettes de l’acquéreur d’un bien auprès du marchand, qui accepte donc de se faire payer dans un délai défini, s’il est garanti par un acte notarié. Notons enfin que si de nombreuses transactions enregistrées dans les minutiers peuvent se régler en nature, celles concernant ce marchand ne le seront qu’en or ou argent monnayés.

Si nos sources nous ont permis de mieux comprendre cette société agro- pastorale du XVè

siècle, ses richesses et ses productions, ce dernier exemple nous rappelle que ce sont avant tout des échanges que consignent les actes notariés, et ce sont eux qui traduisent réellement l’état de la vie économique d’une société.

II. L

ES ÉCHANGES