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Les acteurs, leur rôle et leur pouvoir 1 Le faible rôle des collectivités

analyses monographiques comparatives

3 L'Angleterre : une gestion privatisée sous la stimulation des régulateurs

3.2 Les acteurs, leur rôle et leur pouvoir 1 Le faible rôle des collectivités

Depuis la réforme de 1974, les municipalités ont perdu leurs prérogatives dans le domaine des services d'eau et d'assainissement. Elles sont complètement absentes de la gestion.

Elles n'ont gardé qu'un rôle sur le contrôle de la qualité de l'eau. Des agents municipaux (Environmental Health Officers) sont chargés de vérifier la qualité de l'eau potable et des eaux de baignade.

3.2.2 Le gouvernement : orientation et arbitrage

Formellement, les administrations gouvernementales qui exercent la principale tutelle sur le secteur de l'eau sont le Ministère de l'Environnement et le Ministère de la Santé.

Le gouvernement détient un pouvoir important. Il a d'abord un rôle d'orientation. Ainsi, le gouvernement Conservateur a été à l'origine des réformes qui ont bouleversé l'organisation des services d'eau et conduit à leur privatisation. Il a donc choisi les structures, fixé les objectifs et distribué les responsabilités.

En 1997, le nouveau gouvernement Travailliste a usé de ses prérogatives en organisant un "sommet de l'eau". Dans un plan en dix points, il requiert de la part des compagnies des mesures visant principalement à promouvoir les économies d'eau et améliorer les services aux clients.

Le gouvernement a également un rôle d'arbitrage politique. Il se prononce sur les

propositions, parfois incompatibles, des différents régulateurs (cf. §3.4.2.1, p 121, les controverses entre l'Ofwat et l'EA).

Le maintien de ce rôle garantit un certain contrôle démocratique dans un système par ailleurs largement affranchi du processus électoral.

3.2.3 Les régulateurs puissants

Les services d'eau sont principalement soumis à la régulation de trois administrations :

- Le Drinking Water Inspectorate (DWI) contrôle le respect des normes sanitaires

pour l'eau potable. A la différence des DDASS françaises, il n'effectue pas lui-même de

campagnes d'analyses, mais vérifie le système d'autocontrôle mis en place par les compagnies (laboratoires accrédités, programmes de mesures conformes).

- L'Environment Agency (EA), déjà citée, qui contrôle les aspects liés à la

protection de l'environnement (autorisation des prélèvements et des rejets, police des

eaux dans le domaine industriel et domestique).

- L'Office of Water Service (Ofwat), responsable de la régulation économique des compagnies. Le Directeur Général de l'Ofwat doit s'assurer que les compagnies

disposent des moyens suffisants pour assumer et financer leurs responsabilités sans surtaxer les consommateurs et en se conformant à un niveau minimum de services. Pour cela, il compare les performances techniques et financières des compagnies et fixe des limites de prix. L'instance d'appel pour les décisions de l'Ofwat est la Commission des Monopoles et des Fusions (Monopolies and Mergers Commission, MMC).

La régulation économique est un trait fondamental du système anglais. Elle sera développée p 114 (§3.3).

L'ensemble du dispositif de régulation constitue un système puissant, centralisé, mais disposant aussi de relais régionaux, capables d'influencer notablement les décisions et la gestion des compagnies. De par la loi, les régulateurs disposent d'un pouvoir coercitif sur les compagnies.

Le DWI appartient au Ministère de l'Environnement. L'EA est financée pour partie par le gouvernement et pour partie par des ressources propres. Enfin, l'Ofwat, organisation publique indépendante, est financé par une taxe prélevée sur les compagnies d'eau.

3.2.4 Les compagnies privées : une large part de l'initiative

Les dix grosses compagnies sont d'abord caractérisées par une échelle supra- régionale : en moyenne, les WaSCs desservent 1,7 millions d'abonnés et les WoCs 250 000 abonnés.

Cette structure a permis le développement d'une industrie professionnalisée, compétente et dégageant des effets d'échelle notables. Les gains de productivité ont été importants depuis la privatisation.

Elles appartiennent le plus souvent à des holdings anglaises ou étrangères14. La diversification vers des secteurs non régulés reste limitée et tournée vers des activités proches de l'eau (par exemple, gestion de barrages, fourniture d'eau brute à l'industrie, activités touristiques sur des lacs de retenue...). De même, à l'inverse des grands groupes français, les compagnies anglaises sont encore peu tournées vers le marché étranger en raison de leur statut (les capitaux de l'eau dégagés en Angleterre sont censés rester dans le pays). Toutefois, cette situation pourrait évoluer.

Elles exercent un pouvoir de décision et d'initiative important dans la gestion des services d'eau. En effet, elles programment et financent l'ensemble des projets concernant les infrastructures et les services.

Leur action est toutefois soumise à une triple influence : celle des régulateurs, celle des clients et celle des actionnaires. Les pressions peuvent être contradictoires.

14 En particulier, les grands groupes français sont devenus actionnaires de quelques unes des compagnies anglaises.

Les compagnies privées ont constitué deux principales associations (Water Services Association et Water Companies Association), dont le rôle consiste surtout à promouvoir l'image des compagnies auprès des médias et à exercer un lobbying sur Bruxelles. Elles ne constituent pas réellement un interlocuteur de l'Ofwat. Celui-ci est directement en liaison avec chaque compagnie. Le rôle de ces associations est donc beaucoup moins prégnant que celui du SPDE français.

3.2.5 Les centres de recherche promoteurs de méthodes nouvelles

La recherche est à la fois financée par l'Etat et par les compagnies. Différents programmes font l'objet d'une coordination entre les financeurs privés et publics.

Le Water Research Center est le principal organisme spécialisé dans le domaine de l'eau.

Les centres de recherche développent des méthodes nouvelles comme par exemple la méthode du "niveau économique de fuite" (Economic level of leakage)15 reprise par l'Ofwat et appliquée dans les compagnies depuis quelques années.

3.2.6 Les usagers et leurs associations

Plusieurs associations de consommateurs existent (dont la principale, Friends of Earth). Elles effectuent un travail de lobbying sur les régulateurs et les compagnies. Toutefois, la représentation institutionnelle des consommateurs reste limitée.

Des critiques sur l'absence de prise en compte directe du point de vue des consommateurs commencent à se faire jour (c'est un élément souligné par le récent audit sur le fonctionnement de l'Ofwat, commandé par le gouvernement Travailliste16).