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Pour évaluer la capacité d’un patient à tolérer un effort accru en intensité, le test standardisé de tolérance à l’effort est une technique bien reconnue [69]. Ce test peut servir à diagnostiquer diverses problématiques au niveau de la fonction cardiovasculaire ou pulmonaire, en suivre l’évolution ou encore, personnaliser un programme d’exercice propre aux capacités et progrès individuels [69]. Dans cette section du chapitre 2, les indications du test de tolérance à l’effort seront discutées ainsi que les modalités, les protocoles et finalement, les variables obtenues pendant ce test ainsi que l’interprétation que l’on doit en faire.

Indications

Tel que mentionné ci-dessus, le test standardisé de tolérance à l’effort peut être utilisé dans un but de diagnostic, de pronostic, ou dans un but thérapeutique. Dans l’ordre, il serait donc possible d’identifier une réponse physiologique anormale à l’effort, de prévoir ou d’anticiper des détériorations futures de la santé de l’individu ou de mesurer l’impact d’une intervention donnée [69]. Les athlètes sont aussi amenés à effectuer des tests standardisés de tolérance à l’effort dans le but d’identifier les lacunes, d’apprécier les progrès ainsi que de personnaliser les entraînements. L’utilisation du test de tolérance à l’effort a pris de l’ampleur dans les dernières années pour aider les cliniciens à prendre des décisions éclairées quant à la gestion des problèmes de santé rencontrés chez divers types de patients. À titre d’exemple, pour les patients se présentant à l’urgence avec des douleurs rétro- sternales (qui suggèrent une anomalie au niveau cardiaque), certains examens de premier intention (enzymes cardiaques, électrocardiogramme) pourraient ne démontrer aucune anomalie. Dans ces cas, le test de tolérance à l’effort est utilisé comme un outil pratique et sécuritaire pour déterminer si ces patients requièrent des examens plus invasifs. En effet, le test de tolérance à l’effort est sécuritaire et réduit la durée et les coûts du séjour hospitalier [69].

Globalement, le résultat du test de tolérance à l’effort donnera une indication sur la capacité à l’effort du patient. Cette capacité fonctionnelle se base, conséquemment, sur le rang percentile ou la quantité d’équivalents métaboliques (METs) dépensés durant la performance selon le sexe et l’âge [69, 70]. Le statut d’activité physique de l’individu (sédentaire ou actif) est aussi considéré pour classer sa performance sur une échelle de pourcentage [69].

Modalités

Le tapis roulant est la méthode d’examen la plus utilisée en Amérique du Nord [69]. Les lignes directrices de l’ « American College of Sports Medecine » (ACSM) [69] requièrent que l’appareil soit contrôlé électroniquement, que la vitesse et l’inclinaison puissent se rendre jusqu’à 12,8 km/h et 20% respectivement et enfin, qu’il puisse supporter un poids d’au moins 159,1 kg [69]. Bien qu’une main-courante doive être présente de chaque côté pour aider le patient à maintenir son équilibre, son utilisation ne devrait être qu’en cas de dernier recours, comme en cas de perte d’équilibre. Il en est ainsi pour éviter de surévaluer la capacité fonctionnelle ou encore de nuire à la qualité de l’électrocardiogramme [69]. Finalement, un bouton d’arrêt d’urgence devrait être visible et facilement accessible, tant pour le patient que pour le personnel supervisant le test. Le test sur tapis roulant comporte des avantages; il permet au participant de travailler à une plus haute intensité, soit 5-10% de plus que sur le vélo [71]. Il est aussi une alternative de choix pour les sujets n’étant pas en mesure de pédaler sur un vélo suite à un manque de coordination [71].

En Europe, le test avec un vélo surpasse le tapis roulant en popularité. Cette technique présente aussi des avantages, tant au niveau monétaire, de l’espace requis dans le laboratoire et au niveau de l’utilisation auprès d’une clientèle limitée dans sa mobilité. Outres les atouts mentionnés ci-dessous, il est important de considérer que le résultat obtenu à cette forme d’examen peut être limitée par le fait que les individus non-familiers avec la bicyclette souffriront plus rapidement de douleurs musculaires aux jambes (avant que la limite cardiovasculaire ne soit atteinte) ; la performance du participant sera donc

Figure 20 : Échelle d’effort

perçu de Borg Tiré de http://www.sci- sport.com/articles/025.php particulièrement influencée par la motivation [69]. Il n’en demeure pas moins que cette version du test à l’effort permette une diminution des risques de chute et une meilleure qualité de l’électrocardiogramme [71].

Pour les patients ne pouvant pas utiliser leurs jambes pour réaliser l’examen, il existe deux autres formes de tests. Le premier n’implique l’utilisation que des membres supérieurs (arm

ergometry). Les muscles recrutés lors de cet exercice sont moins nombreux, alors le résultat

de VO2max obtenu sera 20 à 30% moins élevé que son comparatif sur tapis roulant. La dernière option est d’effectuer un test pharmacologique de « stress » cardiopulmonaire pour en évaluer la fonctionnalité [69].

Protocole

Développé dans les années 1950 [72], le protocole de Bruce sur tapis roulant est certainement le plus utilisé pour l’évaluation cardiaque [69]. Le protocole de Bruce se distingue par ses étapes d’une durée de trois minutes chacunes (Tableau 4) [69, 71]. À chaque niveau, la vitesse du tapis roulant ainsi que la pente augmentent, ce qui entraîne automatiquement une dépense énergétique et un effort accrus. Le participant effectue normalement le test jusqu’à ce que des symptômes d’épuisement le forcent à arrêter [69]. Ces symptômes subjectifs peuvent être l’essoufflement ou la douleur aux jambes. Le degré d’inconfort doit d’ailleurs être évalué régulièrement pendant le test en utilisant l’une ou l’autre des méthodes reconnues. L’une d’entre elles se nomme l’échelle de perception de l’effort de Borg [70]. L’effort y est numéroté de 6 à 20, soit aucun effort perçu jusqu’à l’effort maximal

(Figure 20). Le patient est alors fréquemment invité à indiquer son propre niveau d’effort perçu en cours de test.

Tableau 4 : Protocole de Bruce

Classe

fonctionnelle Statut clinique METs Paliers Km/h

% Pente Temps (min/sec) Normale (I) En sa n , a ctif 21 6 8,8 20 18/1080 20 19 S éd en ta ire m ais en sa n 18 17 5 8,0 18 15/900 16 15 14 4 6,7 16 12/720 13 12 Lim ité 11 10 3 5,4 14 9/540 9 8 7 2 4,0 12 6/360 II S ym p to m ati q u e 6 5 1 2,7 10 3/180 III 4 3 2 IV 1

Adapté de ACSM’s chap 5, 2014

Tel que mentionné précédemment, la fin du test est déterminée par l’épuisement cardiorespiratoire du patient. Par contre, d’autres indications pourraient entraîner la fin prématurée du test [69]. Sommes toutes, celles-ci concernent :

1. Des réponses anormales de la tension artérielle systolique (diminution importante ou augmentation >250 mmHg);

2. L’angine ou des douleurs importantes à la poitrine;

3. Des symptômes neurologiques tels que des étourdissements ou une syncope imminente;

4. Certaines anomalies de la conduction cardiaque (tachycardie ventriculaire, élévation du segment ST).

Test d’effort sous-maximal vs. maximal

Le choix de l’utilisation d’un test maximal d’effort comparativement à un test sous- maximal revient au clinicien et dépend majoritairement de la justification du test, du niveau de risque du patient et de la disponibilité des ressources humaines et matérielles. Comme le test maximal implique que les participants se rendent aux limites de la fatigue cardiorespiratoire, une surveillance médicale est souvent nécessaire et de l’équipement d’urgence doit être à proximité [70]. Bien qu’il comporte plus de risques cardiovasculaires que le test sous-maximal, le test maximal permet d’évaluer plus précisément la fonction cardiovasculaire chez des adultes asymptomatiques [70].

Pour évaluer la capacité fonctionnelle, le test d’effort sous-maximal est privilégié, étant plus accessible et facile à effectuer [70]. Ce test est d’ailleurs recommandé pour les patients à risque, comme ceux ayant récemment subi un infarctus du myocarde. Par exemple, quelques jours post-infarctus, le test sous-maximal peut être administré pour évaluer si la réponse à la médication cardiovasculaire est satisfaisante, avant que le patient ait son congé de l’hôpital [70]. En plus des techniques connues (vélo, tapis roulant) pour réaliser le test maximal, il est possible d’effectuer un test sous-maximal sur un terrain (distances à parcourir avec un temps déterminé à atteindre) ainsi que dans des escaliers (nommés « steps » en anglais). Le test sous-maximal s’interrompt généralement lorsque la fréquence cardiaque de l’individu excède le seuil de 85% de la fréquence cardiaque maximale pour son âge [70].

Bien que le test de tolérance à l’effort maximal soit relativement sécuritaire, il comporte tout de même des risques. Ainsi, moins de 4 patients sur 1 000 risqueront de souffrir d’un infarctus du myocarde pendant/suite au test. La mort subite de cause cardiaque ne risque de survenir que chez 1 patient sur 1 000 [69]. Ainsi, en plus d’avoir du matériel d’urgence à proximité, les cliniciens supervisant le test doivent être familiers avec les manœuvres de réanimation cardiorespiratoire [69].

Variables (valeurs normales) et interprétation

Le test de tolérance à l’effort maximal donne une estimation de la capacité du patient à tolérer un effort accru en intensité. Les résultats diffèrent selon l’âge, le sexe, la condition physique, l’IMC (entre autre l’obésité), la prise de médicament ainsi que la présence ou non de maladie cardiorespiratoire ou neurologique chez le patient [73]. Conséquemment, son résultat seul ne peut pas précisément permettre de diagnostiquer une maladie cardiovasculaire. Il en indiquera plutôt la probabilité [73].

Lors du test de tolérance à l’effort, quatre classes de variables peuvent être obtenues. Il convient donc de les quantifier adéquatement pour pouvoir ensuite les utiliser à des fins cliniques. Ces variables sont de nature 1) hémodynamique, 2) électrocardiographique, 3) symptomatique et, 4) énergétique [73, 74].

La variable hémodynamique permet d’évaluer la réponse du cœur et des vaisseaux sanguins à l’effort subi par les variations du rythme cardiaque et de la tension artérielle systolique et diastolique. Normalement, le rythme cardiaque devrait augmenter de façon proportionnelle à la quantité de METs dépensés, en respectant le ratio de 10 ± 2 battements par minute pour un MET (pour les individus sédentaires) [73]. La tension artérielle systolique augmente normalement aussi selon le ratio de 10 ± 2 mmHg pour un MET dépensé avec,

possiblement, un plateau en fin de test. La tension artérielle diastolique, quant à elle, ne devrait pas changer [73].

À l’électrocardiographie pendant l’effort maximal, il est particulièrement important d’observer si le segment ST est dévié. Naturellement horizontal, le segment ST est reconnu pour changer légèrement à l’effort chez l’individu sain [73]. Une élévation ou un sous- décalage impliquant une pente oblique (et un allongement du temps du segment) suggérerait cependant une anomalie du mouvement des parois myocardiques, une sténose des coronaires ou de l’ischémie [73]. Les arythmies de nature auriculaire ou ventriculaire sont aussi à surveiller lors du test de tolérance à l’effort. Ces premières, si isolées, sont communes chez l’individu sain [73]. Les deuxièmes, de nature ventriculaire, sont par contre plus inquiétantes, d’autant plus si elles sont accompagnées de symptômes et ne s’estompent pas rapidement suite à l’arrêt de l’exercice [73].

Les symptômes à observer pendant le test à l’effort concernent surtout l’angine. Ainsi, l’intensité d’une douleur rétro-sternale survenant à l’exercice doit idéalement être cotée sur une échelle à quatre points par le patient [73]. Une douleur de ce type peut-être aussi significative qu’un changement à l’électrocardiogramme pour prédire une maladie cardiovasculaire [73]. Si l’angine survient à l’effort, ceci peut entraîner l’arrêt immédiat du test [73].

Au niveau énergétique, plusieurs variables peuvent servir à mesurer l’intensité de l’effort. Parmi celles-ci, la consommation d’oxygène par les tissus (VO2) et l’équivalent métabolique (MET) sont des valeurs utilisées en clinique suite au test d’effort [75]. Le VO2 représente la consommation absolue d’oxygène par les tissus de l’organisme [76]. Le VO2 de repos équivaut à 3,5 mL d’oxygène consommé par kilogramme de poids, par minute [74]. À l’effort maximal, il est possible de déterminer le VO2max, qui peut se situer entre 30,0 et 45,0 mL/kg/min chez un adulte (18-65 ans) dont la performance se situe dans la

moyenne. Chez les athlètes, le VO2max peut s’élever jusqu’à 100 mL/kg/min (100e percentile) [70]. Une façon plus conviviale de mesurer l’intensité de l’effort se fait en transformant la valeur du VO2max en son équivalent métabolique, le MET. Ce dernier représente l’estimation de l’intensité de l’activité physique [75]. Un MET équivaut à 3,5 mL par kilogramme de poids par minute [74], soit le coût énergétique de l’organisme au repos. Plus une activité est intense, plus sa valeur en METs augmentera. Par exemple, la marche à basse vitesse sur le terrain de sa demeure peut être interprétée comme une activité légère, ou inférieure à 3 METs. Par contre, la marche rapide (>7 km/h) peut équivaloir à plus de 6 METs [75]. Il est possible de mesurer directement les échanges gazeux du sujet à l’effort. Il est d’ailleurs recommandé de calculer la moyenne des valeurs rapportées de VO2max sur une durée de 20 à 30 secondes avant la fin du test lorsque mesuré directement [77]. Dans l’éventualité où l’équipement ne serait pas disponible, il faudrait donc estimer les échanges gazeux pour obtenir des valeurs de consommation maximale d’oxygène à l’effort (VO2max). Les variables respiratoires permettent d’évaluer plus précisément les causes de l’intolérance à l’exercice [73].

Tel que mentionné au début de cette section, il est possible de déterminer le pronostic de l’individu en colligeant les résultats obtenus suite au test de tolérance à l’effort [73]. Pour les patients chez qui une maladie cardiovasculaire est suspectée ou diagnostiquée, le nomogramme de Duke est utilisé. Il comporte principalement trois variables puis cinq étapes pour estimer le pronostic d’un individu ayant subi ce test (Figure 21). Ces variables sont :

1. L’ampleur de la déviation du segment ST à l’effort (mm); 2. La présence et l’impact de l’angine à l’exercice;

3. La quantité de METs dépensés.

La première et la deuxième étape consistent à déterminer la valeur de la déviation du segment ST et de l’angine. Troisièmement, il s’agit de tracer une ligne reliant les valeurs estimées. Le point situé à l’intersection de ce trait et de la ligne de lecture de l’ischémie doit être noté. Quatrièmement, la quantité totale de METs dépensés à l’effort doit être inscrite sur la ligne concernant la capacité à l’effort. Enfin, il suffit de relier le point de la ligne de

lecture de l’ischémie et celui de la capacité à l’effort. Ce dernier trait rencontre l’échelle du taux de survie à 5 ans et de la moyenne annuelle de mortalité, soit le pronostic (Figure 21) [73].

1

2

3

4

5

Application clinique :

1. Le segment ST du patient déviait de 1 mm à l’effort;

2. Le patient n’a pas eu d’angine à l’effort;

3. Le point est noté sur la ligne de lecture de l’ichémie et est relié à 4;

4. Le patient a dépensé 8 METs à l’épreuve d’effort;

5. L’intersection de 3. et 4. nous indique un pronostic d’environ 90% de

chances de survie à 5 ans et un risque de mortalité annuelle légèrement supérieur à 2%. Déviation du segment ST Ligne de lecture de l’ischémie Angine Pronostic

Survie 5 ans Moyenne annuelle de mortalité METs 0 mm 1 mm 2 mm 3 mm 4 mm 0,55 Limitant à l’effort Non limitatif Aucun 0 5 7 10 13 17 20 0,70 0,75 0,80 0,85 0,90 0,93 0,95 0,96 0,99 0,2% 0,4% 1% 1,5% 2% 3% 4% 5% 6% 9%

Figure 21 : Nomogramme de Duke

Chapitre 2.6 : Interventions préventives et curatives de l’obésité et du syndrome

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