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Études énergétiques dans les simulations DEM

2.3 Modélisation de la rupture

2.3.4 Études énergétiques dans les simulations DEM

Bolton et al. [Bolton et al., 2008] ont simulé un des tests d’écrasement d’un grain et des essais triaxiaux, en utilisant le modèle proposé par Cheng et al. [Cheng et al., 2003] (voir paragraphe 2.3.3). Ils ont suivi l’évolution des énergies lors de les essais d’écrasement de grains. Les liaisons cohésives tangentielle et normale sont considérées comme deux res-sorts, de force maximale b et de raideur k. Quand une liaison casse, l’énergie élastique perdue par rupture est considérée égale à δB= b2

k.

- δB : énergie perdue par endommagement du matériau, dans ce cas sous forme de rupture de liaisons

- δF : énergie perdue par frottement et amortissement à cause du réarrangement des particules

avec :

δW = δS + δB + δF (2.31)

δB et δF sont toujours positives par définition, et peuvent être combinées sous un même terme comme dissipation δD= δB + δF. On obtient alors :

δW = δS + δD (2.32)

Après un certain réarrangement, la réponse élastique montre une augmentation parallèle de W (travail conditions limites cumulé) et S(énergie élastique stockée cumulée), typique d’un matériau élastique.

Comme le montre la figure 2.62, à la contrainte maximale, une faible énergie B(énergie dissipée par rupture de liaisons cumulée égale à l’aire gris foncé de la figure) est libérée, tandis que F (énergie dissipée par réarrangement cumulée égale à l’aire gris clair de la figure) augmente à cause du frottement aux contacts rompus.

Une étude quantitative de ces variations d’énergies montre qu’avant la rupture S= 75%W, B= 3%W

et F = 22%W

. Après rupture, B= 10%W

et F= 90%W

.

L’endommagement B joue alors le rôle de déclencheur, en créant de nouveaux degrés de liberté, et est par suite responsable d’une grande partie de la dissipation par frottement F

qui suit.

Figure 2.62 – Processus d’écrasement d’un grain : a) travail aux limites et composantes d’énergie, b) nombre de liaisons cohésives restantes [Bolton et al., 2008]

Dans les essais triaxiaux, l’énergie δS a été simplement calculée comme la somme des énergies stockées au contact (ressorts élastiques).

De même, δW a été calculée (travail du chargement externe), et par suite la dissipation δD déduite.

peuvent pas rompre.

Comme le montre la figure 2.63, ils ont pu remarqué que δBp ne constitue qu’une petite partie de la dissipation totale δBp (∼ 15%). Par contre, cette énergie libérée par la rupture des grains joue un rôle principal en mobilisant les forces de frottements permettant la dissipation δD par réarrangement.

Figure 2.63 – Travail plastique en fonction de la déformation déviatorique [Bolton et al., 2008]

Wang et Yan [Wang and Yan, 2012] ont modélisé les grains sous formes d’assemblages sphériques de petites sphères liées par des liens cohésifs. Un pourcentage de sphères élé-mentaires a été supprimés de façon aléatoire pour simuler la présence de défauts (mo-dèle proposé par Cheng et al. [Cheng et al., 2003]). La figure 2.64 montre l’échantillon de grains soumis à une compression isotrope jusqu’à l’équilibre, puis à un cisaillement plan. Le bilan énergétique à chaque instant de l’essai est :

dW + dWg = dEs+ dEb+ dEf + dEk+ dEd (2.33) avec W le travail externe dû au chargement, Wg le travail de la gravité (nul dans cette étude), Es l’énergie élastique aux contacts, Eb l’énergie de liaison emmagasinée dans les liens cohésifs ou énergie de rupture, Ef l’énergie dissipée par frottement, Ek l’énergie cinétique et Edl’énergie dissipée par amortissement.

La figure 2.65 montre la variation des incréments d’énergie mises en jeu dans l’équation 2.33. Les caractéristiques des différents échantillons sont les suivantes :

- échantillon a : échantillon dense (e0 = 0.6), 10% des sphères sont supprimées de chaque grain, et une contrainte de confinement de 200 kPa est appliquée

Wang et Yan ont trouvé que pour une déformation verticale supérieure à 5%, l’incrément du travail externe dW est égal à l’incrément de la dissipation plastique d’énergie : énergie de rupture dEb, énergie de frottement dEf et énergie d’amortissement dEd; avec l’énergie de rupture dEbétant faible par rapport aux deux autres.

Cela veut dire qu’à 5% de déformation verticale, le système développe une disposition de grains capable de dissiper le travail externe par frottement et par amortissement. Le rôle de la rupture qui dissipe peu d’énergie est de permettre une plus grande liberté de réarrangement des grains, ce qui à son tour permet d’éviter une localisation du cisaillement et de favoriser la dissipation par frottement.

Figure 2.65 – Les incréments des différentes énergies en fonction de la déformation verticale pour les échantillons a, b, c et d de caractéristiques différentes

[Wang and Yan, 2012]

Nguyen et al. [Nguyen et al., 2016] ont étudié la relation entre l’énergie cinétique et le travail du second ordre via des simulations numériques en éléments discrets. En effet, selon Hill [Hill, 1958], un système est considéré instable si une petite perturbation en char-gement peut mener à une déformation qui continue sans aucun apport d’énergie externe. La rupture effective d’un matériau granulaire se manifeste par une transition d’un régime quasi-statique vers un régime dynamique et est liée à une explosion d’énergie cinétique [Nicot et al., 2012].

Du point de vue théorique, en prenant en compte la loi de conservation d’énergie dans les milieux mécaniques continus exprimée en formalisme lagrangien et dérivée par rapport au temps [Nicot et al., 2007, Nicot and Darve, 2007, Nicot et al., 2007], l’évolution de l’éner-gie cinétique peut s’écrire comme suit :

¨

Ec = I2+ Wext 2 + Wint

2 (2.34)

avec ¨Ecla dérivée seconde par rapport au temps de l’énergie cinétique, I2un terme inertiel égal à la moyenne quadratique de l’accélération (terme toujours positif), W2extappelé travail de second ordre externe dépendant du déplacement et des forces externes, et Wint appelé

travail de second ordre interne Wint

2 , exprimant les efforts internes de l’échantillon, n’est plus capable d’équilibrer le travail de second ordre externe W2ext, dépendant du chargement externe, une explosion de l’énergie cinétique se produit, menant à la rupture du matériau.

Figure 2.66 – Validation de la relation entre l’énergie cinétique et le travail de second ordre (équation 2.34) via une simulation d’un essai triaxial [Nguyen et al., 2016]