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La question de la réduction des émissions de GES dans le secteur résidentiel doit se comprendre comme la somme d‘actions sur un ensemble de paramètres très différents.

Plusieurs facteurs entrent en jeu dans l‘évaluation des émissions des GES :

- La performance thermique des constructions. Un bâtiment ancien présentera un taux de déperdition énergétique plus élevé qu‘une construction récente, en raison des matériaux utilisés et de leur mise en œuvre. Plusieurs paramètres qui influent sur l‘aire de la surface de déperdition peuvent néanmoins compenser de manière significative cette faible performance thermique constructive : c‘est le cas du taux de mitoyenneté et du taux de surface vitrée. Les mouvements de rénovation, notamment des vitrages, ont également une influence positive sur le parc ancien : un vitrage simple transmet 4 fois plus d‘énergie qu‘un double vitrage haute résistance.

- La morphologie et notamment la compacité du tissu, celle-ci influe positivement sur les émissions de GES en réduisant la surface de déperdition entre le volume protégé et l‘air extérieur, mais peut également agir négativement en augmentant les effets de masques solaires. Les gains par rayonnement solaire direct sont les plus sensibles dans le cas d‘un haut taux de vitrage

- Les équipements et les énergies utilisées : un système de chauffage ancien peut consommer jusqu‘à deux fois plus qu‘un système récent. Les différents vecteurs énergé-tiques utilisés n‘ont pas la même contribution aux émissions de GES.

- Les apports internes et le comportement des habitants : Les modalités d‘occupation du bâtiment font varier les besoins en régulation thermique. Le comportement influe notam-ment sur la température interne moyenne des locaux chauffés suivant la sensibilité des occupants. La durée estimée ou réelle de la période de chauffe (heures où le chauffage est allumé) est un élément impacte directement les consommations énergétiques.

- L‘environnement : les températures extérieures ont une influence directe sur les besoins énergétiques des bâtiments. L‘insolation, qui dépend de la localisation et de l‘orientation des tissus construits influencent les apports passifs dont le bâtiment pourrait bénéficier.

Nous avons choisi de dissocier les paramètres liés à la réalité constructive et morphologique du stock bâti résidentiel à ceux liés à son équipement énergétique. En effet, nous considérons qu‘il s‘agit ici de deux leviers distincts de réduction des émissions GES, et leur analyse doit se faire de manière dissociée. Nous avons donc décidé de mettre en avant les indicateurs morphologiques en analysant dans un premier temps les besoins nécessaires à la régulation thermique des logements. On construit ensuite les variables dont on présuppose l‘influence sur ces besoins en Wallonie. Les consommations énergétiques et les émissions de GES dépendent du croisement des besoins de régulation thermique et d‘un système de production, de vecteurs d‘énergie. Nous n‘intégrons pas les comportements des occupants.

4.1.1 Modélisation des besoins et consommations des stocks résidentiels 4.1.1.1 Revue de la littérature

Comme évoqué ci-dessus, les dépenses énergétiques domestiques sont fonction des caractéristiques du bâtiment, mais pas seulement. Il est également important de tenir compte de la forme du quartier urbain (densité, type de bâtiment), ainsi que d‘autres paramètres non-énergétiques dans l‘évaluation de la performance environnementale du stock bâti. La consommation d‘énergie du stock bâti est sensible à la forme urbaine, ce qui influence de façon significative les émissions de GES totales. Ce rôle de la forme dans la consommation

du stock bâti a été théorisé dans les années 60‘ et 70‘ par Lionel March et Philip Steadman, et a été récemment démontré empiriquement.

L‘efficacité énergétique de la forme urbaine a tout d‘abord été étudiée sous l‘aspect des flux de chaleur naturels. Un bâtiment énergétiquement efficient se définit alors selon le rapport entre sa surface exposée au soleil en hiver et sa surface exposée au soleil en été, selon des projections orthographiques à partir du soleil. L‘ombrage mutuel des blocs est évoqué et sous-entendu comme variable en fonction de la largeur et du tracé des rues. La forme urbaine constructible qui minimise les pertes de chaleur nettes (après déduction des gains solaires), hors maisons mitoyennes, est celle dont l‘image thermique est un cube. Par ailleurs, il est suggéré un agencement des fonctions au sein des blocs en fonction de leur demande/production énergétique (RICKABY 1987). Cependant, il faut signaler que ces impératifs ne tiennent pas compte d‘autres contraintes de localisation des activités au sein d‘un tissu urbain. La surface exposée du bâtiment a par ailleurs été étudiée en fonction du type de logement (maison mitoyenne, individuelle, appartement, etc.), du rapport superficie de murs extérieurs/superficie au sol, de la superficie du toit et de la superficie vitrée (STEADMAN et BROWN, 1987).

Deux modèles anglais sont destinés à l‘estimation de la consommation d‘énergie à l‘échelle urbaine (BERNAL 2007) : Solar Energy Planning (SEP), logiciel développé par l‘université de Montfort, Barnet Council et BDSP Partnership et le modèle Energy and Environmental Prediction Model (EEP), qui a été développé par l‘Université de Cardiff et l‘Engineering and Physical Science Research Council avec la collaboration de l‘Université de Monfort.

Ce dernier modèle estime la consommation énergétique et les émissions de CO2 sur base de données fournies par un Système d‘Information Géographique. Il est subdivisé en cinq sous-modèles (usages de l‘énergie domestique, non-domestique, industriel, pour le transport, et pollution et santé) dont celui destiné à l‘estimation de la consommation du secteur résidentiel utilise les logiciels testés par le BRE (Building Research Establishment), créateur de la méthode BREEAM évoquée plus haut. La méthode a été appliquée sur la ville de Leicester (JONES et al., 2001). Après collecte des informations existantes et leur complétion par des enquêtes de terrain, les bâtiments ont été classés en fonction de leur consommation d‘énergie, qui dépend de :

- leur forme : surfaces du rez-de-chaussée, de la façade, rapport des surfaces murs/fenêtres, nombre et hauteur des étages, surface exposée, type de maison (isolées, semi-isolées, d‘extrémité et mitoyennes) ;

- leur âge : avant 1919, 1919-1944, 1945-1964, 1965-1980 et après 1980.

En ce qui concerne le sous-modèle non-domestique, les bâtiments ont aussi été classés selon leur usage (bureaux, hôpitaux, hôtels, écoles, etc.). Les déperditions de chaleur sont ensuite calculées d‘après la géométrie (dérivée des variables de forme) et le coefficient de transmission U des parois (dérivé de l‘âge du bâtiment). Les hypothèses de calcul sont que tous les logements ont des chaudières à gaz, que l‘énergie électrique est utilisée pour l‘éclairage et les appareils ménagers, et que cette dernière est estimée sur base de moyennes nationales (JONES et al., 2001).

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4.1.1.2 Les approches bottom-up récentes

Typologie de quartiers et consommation énergétique – étude de cas : l’Île-de-France (MAÏZIA 2008):

En 1995, une typologie des quartiers urbains a été réalisée spécifiquement pour la région Île-de-France (BORDES-PAGES 1995). Ces derniers sont caractérisés par trois valeurs : La hauteur moyenne (exprimée en nombre de niveaux), le Coefficient d‘Emprise au Sol (CES) : (Il peut être assimilé au rapport entre la superficie bâtie au sol et la superficie totale de l‘îlot) et la densité (la densité se calcule ici en multipliant le CES par le nombre de niveaux). Les résultats ont montré que la densité ne permet pas à elle seule de classer chacun des échantillons dans une catégorie précise, et que les trois indicateurs chiffrés décrits ci-dessus ne traduisent pas la qualité et la diversité des caractéristiques propres à chaque quartier (BORDES-PAGES 1995).

Sur la base de ces travaux typologiques, remis à jour par l‘APUR en 2006, les travaux de l‘équipe de recherche dirigée par Maïzia (MAÏZIA 2009) ont pu développer une approche des besoins thermiques et des consommations du stock bâti parisien. Les deux volets (besoins et consommations) sont clairement dissociés, afin de mettre en avant premièrement les impacts thermiques des caractéristiques physiques des tissus puis les impacts des systèmes de production d‘énergie. Ces deux volets sont en effet deux leviers distincts d‘action.

Les échantillons des travaux de l‘APUR ont fait l‘objet d‘études de cas poussées, afin d‘en caractériser les morphologies physiques des édifices et urbaines des tissus. La datation des bâtiments a permis, sur la base des recherches d‘Energie-demain, d‘appliquer des performances thermiques typiques à chaque tissu. Ces performances sont différenciées suivant le type de parois. L‘impact de la forme urbaine en termes de masque solaire, les déperditions par ponts thermiques et par ventilation sont également informés par l‘analyse des échantillons.

Cette recherche se base sur les données de l‘INSEE pour caractériser le stock bâti global de la région parisienne. Les statistiques INSEE peuvent en effet être analysées à l‘échelle des logements. Des enquêtes de terrains menées par l‘INSEE permettent de procéder à une validation par échantillonnage des réponses des recensés. Il faut souligner que le parc parisien est essentiellement composé de bâtiment collectif.

Modélisation des potentiels de diminution des consommations énergétiques du stock résidentiel danois (WITTCHEN, 2006) :

Dans le cadre du programme européen ENPER, l‘objectif de cette recherche danoise est d‘évaluer les potentiels d‘économies de consommation énergétique dans le stock résidentiel.

La méthodologie employée est de type bottom-up.

Les connaissances nécessaires au calcul de ces potentiels d‘économies sont mobilisées à partir de deux bases de données. La première est le registre des constructions (Danish building stock register) qui rassemble pour chaque construction les informations de localisation, de superficie, d‘âge du bâtiment, d‘usage principal, de matériaux de construc-tion, de systèmes et vecteurs énergétiques principaux. Cette base de données est mise à jour par les collectivités et intègre les informations complémentaires fournies par les propriétaires. Elle est à visée d‘imposition. La seconde source est issue des procédures d‘étiquetage énergétique obligatoire des bâtiments existants, exploitées au Danemark depuis 1997 (energy labelling scheme for small building : rapports EM). Les informations disponibles sont relatives aux caractéristiques de l‘enveloppe (coefficient de déperdition des parois type : murs, toits, planchers et fenêtres), aux consommations quantifiées d‘eau et d‘énergie. Les informations tirées de l‘analyse des rapports EM, sur une période de 10 ans, sont utilisées pour créer des modèles de bâtiments pour sept périodes constructives. Chaque modèle est la résultante moyenne des performances de l‘ensemble des bâtiments d‘une typologie par période constructive.

Les sept classes d‘âges sont : avant 1930, 1931-1950, 1951-1961, 1961-1972, 1973-1978, 1979-1998, 1999-2003. Elles ont été bornées suivant l‘évolution connue des modes constructifs d‘une part et les dates de mises en œuvre successives des réglementations thermiques au Danemark d‘autre part. Ainsi, à chaque groupe sont attribués des valeurs de U (parois et toit), les caractéristiques des vitrages, les systèmes de chauffage, les exigences de ventilation et les combustibles utilisés. Les typologies sont au nombre de 4 : maison individuelle, maison en rangée, maisons de ferme, maison multifamiliale de moins de 1500 m².

Cette modélisation se base donc sur une connaissance fortement désagrégée du stock résidentiel. Les résultats obtenus nous semblent extrêmement pertinents par rapport aux objectifs visés par la région wallonne. En effet une telle recherche permet d‘identifier de manière différenciée les leviers d‘actions les plus pertinents pour chaque morphologie résidentielle présente sur le territoire. Ainsi au Danemark réduire les consommations énergétiques du stock ancien se révèle être synonyme d‘amélioration des qualités d‘isolation structurelle, notamment au niveau des murs extérieurs. Autre exemple pour les bâtiments construits entre 1960 et 1970 : les performances énergétiques constructives apparaissent suffisantes. L‘amélioration de l‘isolation ne sera pas le levier le plus pertinent d‘amélioration des consommations énergétiques. En effet le haut taux de consommation énergétique des bâtiments de cette classe d‘âge apparait directement lié à la prédominance du type maison individuelle et donc à la grande superficie chauffée. Une amélioration significative de ce segment se trouve particulièrement dans une diminution de la surface chauffée, ce qui implique un renouvellement immobilier de cette morphologie à favoriser vers l‘immeuble collectif

L‘application des méthodes bottom-up à la région wallonne pose la question des sources à notre disposition. Une évaluation fine et suivie de l‘état des lieux énergétiques du stock bâti, qu‘il soit résidentiel ou non, nécessaire à une évaluation future des impacts d‘une politique de rénovation ou de structuration territoriale nouvelle, doit être soutenue par une volonté de production de données scientifiques à l‘échelle de la région wallonne. Il est sans aucun doute pertinent que les modes de production de ces données soient partagés avec les autres régions. La mise en œuvre récente des étiquetages PEB (performances énergétiques de bâtiment) peut s‘avérer une occasion d‘élaborer un inventaire normalisé du bâti, basé sur un nombre croissant « d‘individus ». Un minimum d‘information doit dans ce sens être récolté. Nous renvoyons ici au bilan proposé par K.Wittchen pour l‘amélioration des bases de données en vue de l‘application des exigences européennes et d‘étiquetage des performan-ces des bâtiments

Figure 23. Evaluations futures des potentiels d’économies d’énergie dans les bâtiments existants, propositions d’indicateurs.

Source: Kim B. Wittchen (2006) Heating energy savings in dwellings, Sbi, Danish Building Research Institute, Danemark

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A DATE DE CONSTRUCTION

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