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Est-il éthiquement acceptable d'autoriser une personne à en tuer une autre même lorsque cette dernière est consentante?

d'euthanasie et de suicide assisté ?

2) L'utilisation de la psychiatrie

3.4 Est-il éthiquement acceptable d'autoriser une personne à en tuer une autre même lorsque cette dernière est consentante?

Autrement dit, existe-il un droit à la mort ?

3.4.1 Le droit à la mort est-il un droit ?

L'étude de l'évolution juridique à travers l'histoire nous enseigne que le développement des législations étrangères sur la question de l'euthanasie n'aura pas été sans conséquence. En effet, lors des Journées Suisses du Congrès de l'Association Henri Capitant de 2009, le responsable du rapport qui avait récolté autant d'arguments favorables et défavorables des discussions concernant la légalisation de l'euthanasie, tirait les conclusions suivantes :

La consécration de l'euthanasie par la Belgique, la Hollande, le Luxembourg et la Colombie est un tournant important. Jusqu'ici le droit de mourir s'analysait simplement comme un simple droit liberté, soit la faculté de mourir en paix, dans le respect de ses propres choix et dans la dignité. La reconnaissance de l'euthanasie active en institue un véritable droit créance. Le médecin qui accepte de participer à cette procédure, lorsque toutes les conditions prévues par la loi sont réunies, a donc désormais, sous réserve de l'objection de

traditionnel du médecin de sauver la vie est désormais remis en cause.K

En effet, depuis longtemps, le droit fondamental à la vie duquel tous les autres droits dérivent, a été unanimement reconnu. Ce n'est que récemment qu'il s'est introduit dans le vocabulaire courant l'expression de « droit de mourir dans la dignité ». Car, en principe, mourir n'a jamais été reconnu comme un droit, encore moins comme un devoir mais comme une nécessité à laquelle personne n'échappe. Selon le philosophe Hans

K l

Jonas , le droit de mourir existerait, si l'on veut, à l'opposé d'un droit d'acharnement thérapeutique qui prétendrait que toute technique de retardement de la mort soit justifiée.

La lutte contre la mort à tout prix rencontre alors des limites et des questions éthiques très délicates se posent. Quelles sont les conditions pour laisser mourir un malade en phase terminale ? Serait-ce le respect de la volonté du patient qui dit qu'il n'en peut plus et qui demande explicitement qu'on abrège sa vie ? La décision des proches du malade ? Le résultat de l'évaluation des spécialistes ou la concertation des trois ? Et ce n'est pas tout. Il s'agit aussi de déterminer par quels procédés « laisser mourir » le patient ? Pour sortir de l'impasse, Jacques Ricot propose ceci :

[...] laisser mourir ne signifie nullement abandonner la personne en fin de vie, mais au contraire traiter sa douleur, l'accompagner et la soulager en proportionnant les moyens curatifs à ce qu'elle peut et veut accepter. Le droit de mourir n'est alors qu'une manière de confirmer le droit du patient à être associé au choix du traitement qu'il reçoit, à consentir ou non aux soins qui lui sont proposés.82

Pour y voir plus clair, Baudoin et Blondeau ont apporté, dans leur ouvrage , une distinction intéressante entre le droit de mourir et le droit à la mort. Le premier consiste dans la possibilité de mourir quand le mourir est installé alors que le second consiste dans la revendication de mourir au moment choisi. Avoir le droit de mourir signifierait plus exactement permettre de mourir et n'aurait rien à voir avec le suicide assisté et

80 Jean-Louis BAUDOIN, Rapport de synthèse, Association Henri-Capitant, Symposium Journées suisses, juin 2009. 81 Hans JONAS, Le droit de mourir, Rivages poches, 1996. Cité par Jacques RICOT, Dignité et euthanasie, p.30. 82 Jacques RICOT, Dignité et euthanasie, op.cit., p.33.

l'euthanasie. Il s'agit en définitive du droit de refuser l'obstination déraisonnable ou l'acharnement thérapeutique. Mourir est un fait inévitable pour tous. La question est de savoir comment on meurt en faisant bien la distinction entre « laisser mourir » et « faire mourir ».

C'est donc le droit à la mort qui serait à l'origine des requêtes d'euthanasie et du suicide assisté. Mais, de fait, le droit à la mort n'existe nulle part. Au contraire, toutes les chartes : Charte québécoise, Charte canadienne, Déclaration universelle des droits de l'homme, Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, reconnaissent le droit fondateur à la vie. La Cour européenne des droits de l'homme a rejeté, le 20 janvier 2011, le droit au suicide assisté.

Compte tenu de la grande confusion entourant le concept droit de mourir dans la dignité évoqué tant pour une mort paisible au moment venu que pour une requête d'euthanasie ou de suicide assisté, nous privilégions le terme droit de mourir par opposition à l'expression droit à la mort. Mais, selon la perspective qu'emprunte le Barreau du Québec, il faut craindre que, par l'euthanasie et le suicide assisté, le droit de facto de mourir dans la dignité n'entraîne le droit à la mort, le devoir de tuer, puis

éventuellement, le devoir de mourir.

3.4.2 Reconnaissance universelle de la dignité

À l'occasion du cinquantenaire de l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme par l'O.N.U, son secrétaire général, M. Kofi Annan, s'exprimait en ces termes :

[..] .pendant trop longtemps, on a considéré les droits de l'homme comme un des aspects des activités de l'ONU alors qu'ils doivent en être la trame, tout comme ils forment la trame même de notre existence. Devant les violations massives des droits de l'homme qui continuent d'être commises un peu partout dans le monde, nous pourrions être tentés de baisser les bras. Mais il est une chose qui doit nous rendre courage : les peuples du monde ont un sens de plus en plus aigu des responsabilités qu'ils ont les uns envers les autres et envers la planète. L'émergence d'une conscience universelle, dont la création de la Cour pénale internationale n'est

l'homme est en train de se faire jour, une culture dans laquelle l'exercice et la défense des droits fondamentaux ne sont pas l'affaire de quelques-uns - diplomates, gouvernants ou militants -, mais celle de chacun d'entre nous.

Depuis la déclaration de 1948, une véritable culture des droits de l'homme a émergé et chacun de nous se sent maintenant interpellé à l'exercice et à la défense des droits fondamentaux. Le préambule de la déclaration s'ouvre sur ces mots:

Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde. » Au cinquième « Considérant », on proclame la foi des peuples des Nations Unies « dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité des hommes et des femmes ». L'Article premier affirme : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. » Et le droit à la vie est formellement énoncé à l'Article 3 : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.

3.4.3 S'appuyer sur la dignité humaine entendue comme qualité de vie contredit la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Comme l'a si bien dit Paul Ricoeur, la dignité humaine s'appuie sur une reconnaissance universelle : « L'exigence a toujours été que quelque chose est dû à l'être

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humain du seul fait qu'il est humain ». Ainsi, la philosophie et les récents textes déclaratifs des droits de l'homme appellent dignité ontologique (ou intrinsèque), la dignité qui tient à l'humanité de l'homme. Le fait d'être humain implique en soi une dignité peu importe l'âge, la race, les titres, ou même la conduite. La dignité, telle qu'entendue ici, ne se perdrait jamais.