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Les différentes étapes de la traduction et ses principaux acteurs

1. Introduction

1.1. L’expression génétique et son contrôle chez les bactéries

1.1.2. La traduction bactérienne

1.1.2.1. Les différentes étapes de la traduction et ses principaux acteurs

Le ribosome est un complexe formé de deux sous-unités nommées 50S et 30S en référence à leur coefficient de sédimentation dans un gradient de sucrose (figure 8). La petite-sous unité (30S) est constituée de l’ARN ribosomique 16S associé à 21 protéines (Green and Noller 1997). Son rôle est essentiel dans la fidélité du processus de traduction. En effet, elle contrôle l’interaction correcte entre les codons de l’ARNm et ceux des anti-codons portés par les ARN de transfert. 34 protéines ainsi que les ARN ribosomiques 23S et 5S forment la grande sous-unité (50S). Elle est notamment responsable de la formation des liaisons peptidiques entre la chaîne d’acides aminés (aa) naissante

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13 et l’acide aminé correspondant au codon suivant présent sur la matrice ARNm. Il est intéressant de préciser que chaque protéine ribosomique est présente en un seul exemplaire à l’exception de L7/L12 où L7 est une forme acétylée de L12 à son extrémité N-terminale et qu’il existe deux dimères de L7/L12 dans un ribosome. Enfin L26 est identique à S20 mais elles sont présentes dans des sous-unités différentes.

A partir du début des années 2000, de nombreuses analyses de la structure du ribosome à plus forte résolution ont permis de répondre à de nombreuses interrogations sur le déroulement du processus de traduction (Ban, Nissen et al. 2000; Nissen, Hansen et al. 2000; Noeske, Wasserman et al. 2015). Par exemple, elles ont pu mettre en évidence le rôle fondamental des ARNr dans les étapes d’association des sous-unités, de positionnement de l’ARNt aux sites A/P/E ou encore dans la lecture des codons mais surtout sur la formation de la liaison peptidique (Nissen, Hansen et al. 2000). Les protéines ribosomiques seraient donc surtout présentes pour assurer le repliement correct et complexe des ARNr.

Il existe au sein du ribosome trois sites où peut se positionner l’ARNt (figure 8) :

- Site A : c’est dans ce site que se positionne l’ARNt aminoacylé (associé à son acide aminé spécifique) en entrant dans le ribosome

- Site P : il renferme l’ARNt portant la chaîne polypeptidique en cours de synthèse

- Site E : l’ARNt est présent dans ce site sous sa forme déacylée avant d’être dissocié de l’ARNm et du ribosome

Figure 8 : Structure en cryo-microcopie éléctronique du ribosome d’E. coli associé au facteur EF-Tu à une résolution de 6.7 Å. Cette structure met en évidence les trois sites E, P et A où peut se localiser l’ARNt au cours du processus de traduction. D’après (Villa, Sengupta et al. 2009).

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1.1.2.1.2. L’ARN messager

L’ARNm porte les différents signaux essentiels à la reconnaissance par le ribosome. On peut diviser l’ARNm en trois portions : la région 5’ non traduite (5’UTR : « 5’ Untranslated Region ») contenant le site de fixation du ribosome (RBS : « Ribosome Binding Site »), la phase ouverte de lecture (ORF : « Open Reading Frame ») qui constitue la région codante et enfin la région 3’ non traduite (3’UTR : « 3’ Untranslated Region ») comprenant notamment le terminateur. Le ribosome se fixe sur l’ARNm au niveau du RBS où deux éléments assurent son recrutement et le positionnement du ribosome à ce site. Ces deux éléments sont la séquence Shine Dalgarno (SD) et le codon de démarrage. La séquence SD est complémentaire de la séquence dite « anti-SD » présente en 3’ de l’ARN ribosomique 16S (Shine and Dalgarno 1974). Le consensus défini pour la séquence SD est UAAGGAGGUGA dont les résidus les plus conservés sont marqués en gras (Barrick, Villanueba et al. 1994). Ensuite, entre 5 et 8 nucléotides après le SD se trouve sur le messager le codon de démarrage. Chez E. coli, il existe trois codons de démarrage : AUG, GUG et UUG. AUG est présent chez plus de 90% des messagers alors que GUG et UUG sont retrouvés respectivement dans 8% et 1% des ARNm. On peut noter qu’outre ces trois codons de démarrage canoniques il arrive que des codons alternatifs soient utilisés. C’est le cas du gène infC chez E. coli qui démarre avec un codon AUU. Enfin, il est intéressant de mentionner que la distance entre le SD et le codon de démarrage peut affecter l’efficacité de traduction (Chen, Bjerknes et al. 1994).

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15 1.1.2.1.3. Les ARN de transfert

Les ARN de transfert ont un rôle clé dans le décodage de la matrice ARNm. Ils assurent la reconnaissance et la liaison entre un codon et un acide aminé précis. En effet, l’ARNt possède trois nucléotides complémentaires du codon avec lequel il s’apparie d’où le nom d’anti-codon. Ces ARN non codants d’environ 75 nucléotides sont reconnaissables à leur structure secondaire caractéristique en forme de « feuille de trèfle ». Leur structure tertiaire en forme de « L » est également très conservée. L’extrémité 3’ de l’ARNt qui se termine toujours par un CCA, porte l’acide aminé lorsqu’il est sous sa forme aminoacylé. Spatialement, la boucle anticodon se situe à l’opposé de l’extrémité 3’ de l’ARNt (figure 9).

Figure 9 : Structure d’un ARN de transfert. A gauche de la figure, une représentation schématique de la structure secondaire montrant la forme caractéristique de ces ARN en forme de « feuille de trèfle ». A droite de la figure, la structure cristallographique de l’ARNtfmet d’E. coli met en évidence la structure tertiaire en forme de « L » retrouvée

chez tous les ARNt. La représentation a été faite sur Pymol à partir de la structure 5L4O disponible sur la PDB (résolution 2.8Å).

1.1.2.1.4. Les différentes étapes de la traduction

La traduction est tout comme la transcription un processus en trois étapes : l’initiation ou démarrage, l’allongement et enfin la terminaison.

Le démarrage de la traduction est l’étape clé du processus. Au cours de cette étape, l’ARNt initiateur ou ARNtfmet, l’ARNm et la sous unité 30S s’assemblent pour former le complexe de pré- démarrage puis de démarrage (figure 10). Cette étape requiert l’intervention des facteurs de démarrage IF-1, IF-2 et IF-3. Dans un premier temps seuls IF-1 et IF-3 sont associés à la sous-

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unité 30S. IF1 est localisé au site A du ribosome et empêche a priori la fixation de l’ARNtfmet à cette position. IF3 quant à lui maintient les sous-unités ribosomiques séparées. Ensuite, IF-2 associé à une molécule de GTP (guanosine triphosphate) va reconnaître l’ARNtfmet et permettre son entrée au site P du ribosome. Le complexe formé peut ainsi interagir avec l’ARNm par reconnaissance de la séquence SD et du codon de démarrage. De plus, IF-2 va stimuler l’association de la sous-unité 50S au reste du complexe déjà formé via son activité GTPase. En effet, après la fixation de l’ARNtfmet, la sous unité 50S est recrutée, ce qui occasionne le relargage d’IF1 et IF3. Le GTP fixé à IF2 est hydrolysé et ce facteur quitte le complexe de démarrage. A ce stade l’ARNtfmet est positionné au site P du ribosome et le site A est encore inoccupé.

L’allongement débute avec la fixation au site A de l’ARNt aminoacylé spécifique du second codon de l’ARNm associé avec le facteur EF-Tu et une molécule de GTP. EF-Tu catalyse la fixation de l’ARNt aminoacylé et est relargué sous forme EF-Tu-GDP. La formation de la liaison peptidique est quant à elle catalysée par l’ARNr 23S. S’en suit une étape de translocation, catalysée par le facteur EF-G, afin de libérer le site d’entrée. Ces étapes se répètent pour chaque acide aminé incoporé dans la chaîne. Dès la fixation du second acide aminé l’allongement est lancé et le ribosome va pouvoir catalyser la formation des liaisons peptidiques à une vitesse d’environ 20 acides aminés par seconde. Cette vitesse est évidemment fonction de la concentration en acides aminés disponibles, de celle des ARNt et enfin de la structure de l’ARNm traduit. Ce cycle d’allongement se termine lorsqu’un codon de terminaison occupera le site A du ribosome. Chez E. coli, il existe trois codons stop : UAA, UAG et UGA. Selon le codon ce dernier sera reconnu par un facteur de terminaison qui entraînera la dissociation entre le peptide formé et l’ARNt situé au site P. RF1 reconnaîtra les codons UAA et UAG et RF2 les codons UAA et UGA. Enfin, le ribosome se dissociera sous l’action du facteur de recyclage RRF et du facteur EF-G.

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17 Figure 10 : Les principales étapes de la traduction procaryote. La traduction est initiée par l’assemblage des facteurs de démarrage IF1, IF2 et IF3 avec l’ARNm, la sous-unité 30S du ribosome et l’ARNt initiateur ou ARNtfmet

(fMet-tRNAfMet). L’ARNtfmet se positionne au site P du ribosome et contacte le codon de démarrage pour former le

complexe de pré-démarrage. Ensuite, les facteurs IF1, IF2 et IF3 se dissocient, la sous-unité 50S du ribosome se fixe à son tour pour former le complexe de démarrage. L’ajout séquentiel des acides aminés suivants à la chaîne polypeptidique naissante nécessite la formation d’un complexe ternaire composé de l’ARNt porteur de l’acide aminé à intégrer, du facteur d’allongement EF-Tu et d’une molécule de GTP. Ce complexe entre au site A du ribosome, si la boucle anti-codon de l’ARNt reconnaît le codon présent sur l’ARNm, EF-Tu hydrolyse son GTP et est relâché du ribosome. L’ARNt correct positionné au site A subit une rotation au site P ou accommodation. C’est au site P qu’a lieu la formation de la première liaison peptidique. Pour qu’un nouvel allongement puisse se produire, l’ARNt déacylé doit se déplacer du site P au site E. En même temps, l’ARNm doit se décaler de trois nucléotides pour présenter le codon suivant. On appelle ces deux mouvements coordonnés la tranlocation. Celle-ci est stimulée par le facteur EF- G qui, lorsqu’il se libère, permet à un nouveau cycle d’allongement de débuter. Lorsqu’un codon stop entre au site A, il est reconnu par les facteurs RF1 ou RF2. Ces facteurs vont promouvoir le relargage de la chaîne polypeptidique synthétisée. Le facteur RF3 va ensuite permettre la dissociation des facteurs RF1 et RF2 du ribosome. Pendant la phase dite de « recyclage » les facteurs RRF et EF-G aident à la dissociation des sous-unités 30S et 50S. A ce stade la sous-unité 30S est encore fixée au dernier ARNt et à la matrice ARNm. C’est la fixation du facteur IF3 qui permettra la libération de ces deux éléments. Issue de (Keiler 2015).