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2.4 Évolution macroscopique d'une population de bres

2.4.2 Les équations de fermeture

La recherche d'une approximation de fermeture fait partie des problèmes les plus moti- vants concernant la modélisation de l'orientation des bres. De nombreuses méthodes ont été utilisées pour obtenir ces diverses approximations de clôture mais aucune ne s'est avérée susante pour prédire avec soin l'orientation dans des écoulements réels.

Nous allons dans les paragraphes qui suivent passer en revue les diérentes équations de fermeture susceptibles d'être intégrées dans un code de calcul pour prédire l'état d'orien- tation des bres.

Nous avons classé ces équations de fermeture en diérentes catégories et les présentons ci-après :

- les approximations  simples ,

- les approximations obtenues par interpolation des approximations simples, - les approximations utilisant des coecients ajustables.

a ) Approximations simples

Les approximations de fermeture dites simples pour aijklpeuvent être formées par com-

binaisons linéaires des produits de aij et du tenseur unité δij.

Approximation de fermeture linéaire :

Hand [76] fut l'un des pionniers en proposant une équation de fermeture dite linéaire, la plus ancienne. Cette approximation de fermeture est exacte pour une population de bres orientées aléatoirement. Cependant, pour d'autres types d'écoulements, elle peut parfois fournir des résultats non physiques. En eet la solution est parfois un tenseur non déni positif, qui a, dans ce cas, au moins une valeur propre négative, et dont l'interprétation en termes de probabilité n'a évidemment aucun sens. L'équation de fermeture linéaire se traduit par l'équation suivante :

alinijkl = c1 ikδjlijδklilδjk)+c2(aijδkl+aikδjl+ailδjk+aklδij+ajlδik+ajkδil) (2.31) Dans le cas 3d :

c1 = −351 et c2= 17 Dans le cas 2d :

c1 = −241 et c2= 16

Dans le cas particulier où le matériau est supposé incompressible, certains termes de l'équa- tion (2.31) disparaissent et la relation de fermeture linéaire peut s'écrire sous la forme tensorielle suivante : ˙ε : a4 = 2c1 ˙ε + c2 ³ 2 a2 ˙ε + 2 ˙ε a2+ (a : ˙ε) Id ´ (2.32) Approximation de fermeture quadratique :

Hinch et Leal [80] ont mis en place une approximation de fermeture quadratique exacte pour les écoulements qui orientent les bres dans une seule direction. Cette approximation de fermeture, assez simple, prend la forme suivante :

aquadijkl = aijakl (2.33)

L'équation de fermeture quadratique est largement utilisée pour son expression compacte, néanmoins elle ne respecte pas toutes les conditions de symétrie du tenseur d'ordre 4. En eet écrire a1122 = a11a22 ou écrire a1212 = a12a12 donne des résultats très diérents [9]. Par ailleurs, elle est reconnue pour surestimer l'alignement des bres dans la direction de l'écoulement.

b ) Approximations construites par interpolation

Dans l'optique de mettre en place une équation de fermeture ayant un domaine de vali- dité plus large, Hinch et Leal [81] ont cherché une approximation du produit doublement contracté ε(v) : a4, dans le cas d'une distribution isotrope et d'une orientation parfaite- ment unidirectionnelle des bres. Ils proposèrent alors deux équations de fermeture formées par combinaison linéaire des deux approximations de fermeture précédentes. Advani et Tu- cker [3] ont repris les approximations données par Hinch et Leal en les nommant respec- tivement approximations HL1 et HL2. Ils ont également développé une nouvelle équation de fermeture dite Hybride, basée sur l'idée d'une simple loi de mélange. L'approximation de fermeture hybride prends alors la forme suivante :

ahybrideijkl = (1 − f )alinijkl+ f aquadijkl (2.34)

f = 1 − nn det( a2 )

f est un scalaire indépendant du repère, déni à partir des invariants de a2, n désigne ici

la dimension spatiale. f prend pour valeur 1 lorsque les bres sont alignées dans la di- rection de l'écoulement. Nous retrouvons alors l'approximation quadratique. Enn, f = 0 pour une orientation isotrope des bres et nous retrouvons l'équation de fermeture linéaire. Advani et Tucker [2], [3] montrèrent que, pour un certain nombre d'écoulements, les ap- proximations Quadratiques et Hybride ne produisent jamais des comportement physiques inadmissibles, et ils établirent que leur approximation Hybride donne des résultats plus pré- cis que la Quadratique dans l'ensemble des écoulements analysés. Cependant, ces dernières approximations de fermeture peuvent entraîner des erreurs importantes lors du calcul des coecients de a2 ou de a4

c ) Approximations contenant des coecients ajustables

Les réalisations récentes en matière d'approximation de fermeture utilisent des approxi- mations contenant des paramètres ajustables. Le point de départ est toujours l'expression d'une solution particulière, obtenue par des considérations théoriques, pour diérents types d'écoulements. Ces solutions particulières relient le tenseur d'ordre 4 au tenseur d'ordre 2 via un certain nombre de paramètres qui sont par la suite ajustés an de minimiser l'écart entre les prédictions de l'approximation et des résultats signicatifs donnés par le calcul de la fonction de distribution d'orientation.

Cisaillement simple : approximation de Bay :

Bay et Tucker [25] furent des pionniers en utilisant l'expression de Da2

Dt donnée par Hand

(équation 2.10). En simpliant l'expression de Hand, ils aboutissent à une expression qui relie a4 et a2 via certains coecients qu'ils ajustent an de minimiser l'écart avec la solu- tion exacte calculée numériquement en écoulement de cisaillement simple via une méthode utilisant les volumes de contrôle. L'interpolation des paramètres dépend de la valeur du coecient d'interaction CI.

L'approximation de fermeture obtenue donne de très bons résultats en écoulement de ci- saillement simple. Des écarts de 10 % par rapport à la solution exacte apparaissent pour un écoulement combinant élongation et cisaillement.

L'approche de Bay a été reprise par diérents auteurs qui utilisent également des para- mètres ajustables an d'évaluer les performances des approximations de fermeture utilisées. Approximation Naturelle 2D :

Verleye [133] part d'une approche basée sur la mécanique des milieux continus pour mettre en place une approximation Naturelle dans un cas bidimensionnel. L'approximation de fer- meture Naturelle est valable pour des bres ayant un rapport d'allongement élevé (λ = 1) et pour une suspension ne présentant pas d'interaction entre les particules, ce qui se tra- duit par un coecient d'interaction nul (CI = 0). Pour ce faire, Verleye utilise une relation

générale qui traduit la dépendance d'un tenseur symétrique du quatrième ordre à l'égard d'un tenseur du second ordre symétrique et de trace imposée.

Cette relation générale s'écrit :

aijkl = β1S(δijδkl) + β2S(δijakl) + β3S(aijakl) + β4S(δijakmaml)

+ β5S(aijakmaml) + β6S(aimamjaknanl) (2.35)

Notons que S est un opérateur qui transforme un tenseur d'ordre quatre en un tenseur symétrique satisfaisant les conditions de symétrie complètes.

S(Tijkl) = 1 24

X

σ

Tσ(ijkl) (2.36)

σ désignant l'opérateur permutation (sans répétition), S(Tijkl) est ainsi la somme sur

l'ensemble des permutations possibles de ijkl et contient alors 4! termes. Les coecients

βi sont des fonctions du second invariant IIa et du troisième invariant IIIa du tenseur a2. Pour une orientation bidimensionnelle, les coecients β4, β5 et β6 sont nuls, les autres coecients sont alors calculés analytiquement et dépendent uniquement du second invariant de a2. L'approximation de fermeture Naturelle 2D prend alors la forme suivante :

aijkl= 1

6IIa(δikδjl+ δilδjk+ δijδkl) + 1

3(aijakl+ aikajl+ ailajk) (2.37)

IIa= det(a2)

Pour une orientation 3D, Verleye considère que les coecients βi sont des fonctions poly-

nomiales du deuxième et du troisième invariant de a2, ce qui permet d'assurer que l'ap- proximation de fermeture est indépendante du repère choisi. Les coecients ne peuvent plus être exprimés analytiquement, ils sont alors ajustés numériquement an de minimiser l'écart entre le modèle prédictif et la solution obtenue avec la résolution de la fonction de distribution de l'orientation dans le cas particulier où λ = 1 et CI = 0.

Approximations orthotropes :

Les équations de fermeture de type orthotropes sont similaires à l'approximation de fer- meture naturelle, tant au niveau de leur philosophie que de leurs performances. Ce type d'approximations est basé sur les propriétés d'orthotropie du tenseur a4. Le principe de base est le suivant. Le tenseur a2 étant symétrique, il existe (α1, α2 et α3)valeurs propres de a2et (E1, E2 et E3)vecteurs propres correspondants tels que dans la base de ses vecteurs propres ¯a2 se réduit à :

¯ a2 =   α01 α02 00 0 0 α3   (2.38)

Nous considérons que : α1 ≥ α2 ≥ α3. La condition de normalisation du tenseur a2 se traduit par : α1+ α2+ α3 = 1

Il n'y a donc que deux valeurs propres indépendantes. Chaque axe principal, déni par un vecteur propre, est un axe de symétrie pour la population de bres puisque le tenseur est diagonal. Dès lors, le tenseur a2 est toujours orthotrope. L'approximation de a4 recherchée doit respecter les conditions de symétrie contenues dans a2.

Un tenseur d'ordre 4 présentant les symétries majeures et mineures (comme le tenseur a4) présente 21 composantes indépendantes. Nous pouvons réduire ce nombre en adoptant une écriture utilisant la contraction des indices comme indiquée ci-dessous :

valeurs de m ou n notation tensorielle ij ou kl

1 11 2 22 3 33 4 23 ou 32 5 31 ou 13 6 12 ou 21

Tab. 2.1  Contraction des indices

Le tenseur a4 peut s'écrire dans la base des vecteurs propres de a2 sous la forme d'une matrice 6 × 6 comme suit :

¯ A =         ¯ A11 A¯12 A¯13 0 0 0 ¯ A21 A¯22 A¯23 0 0 0 ¯ A31 A¯32 A¯33 0 0 0 0 0 0 A¯44 0 0 0 0 0 0 A¯55 0 0 0 0 0 0 A¯66        

Par ailleurs, l'égalité : aijkl= aij valable dans tout système de coordonnées se traduit par : ¯ A11+ ¯A66+ ¯A55= α1 ¯ A66+ ¯A22+ ¯A44= α2 ¯ A55+ ¯A44+ ¯A33= α3 (2.39)

Ainsi, en utilisant toutes les propriétés de symétrie de a4 ainsi que la condition de norma- lisation, seuls 3 coecients de ¯A sont à déterminer dans la base des vecteurs propres de a2 : ¯A11, ¯A22 et ¯A33

Notons enn que le tenseur a4 se déduit de ¯A en utilisant la matrice de passage ou de

rotation comme suit :

aijkl = RiqRjrRksRltA¯qrst

où aijkl et ¯Aqrst représentent respectivement les composantes du tenseur d'orientation

d'ordre 4 dans le repère classique et dans le repère constitué des vecteurs propres de a2. La matrice de rotation Rij est dénie de la manière suivante :

Rij = Eji

où Eij désigne la ieme composante du jeme vecteur propre de a2.

Il existe dans la littérature diérentes formes d'approximations orthotropes :

- ORS ou  Orthotropic Smooth  qui correspond à une approximation lissée, - ORF ou  Orthotropic Fitted  valable pour un coecient d'interaction CI ≈ 0.01,

- ORL valable pour un coecient d'interaction assez faible : CI≈ 0.001,

- ORT valable pour un coecient d'interaction nul.

Le but des ces approximations est d'exhiber des valeurs de ¯Aiipour un écoulement donné

et pour un coecient d'interaction donné. Le lecteur pourra se référer pour plus de détails à l'annexe située à la n du manuscrit.

Il est possible de développer d'autres relations de fermeture orthotropes à paramètres ajustables en utilisant des écoulements variés pour le calcul de la solution de la fonction de distribution de l'orientation ou en proposant une expression diérente de ¯Amn.

d ) Performances des équations de fermeture

La comparaison des diérentes relations de fermeture a fait l'objet de nombreuses publica- tions [9], [25], [133], [47]. Les performances des diverses approximations de fermeture ont ainsi été comparées à une solution exacte résultant de l'intégration de la fonction de distri- bution de l'orientation. Ces approximations ont souvent été testées pour des écoulements simples tels que le cisaillement ou encore l'élongation comme le montrent les gures (2.11) et (2.12) .

Performances des équations de fermeture en cisaillement :

Ces études ont montré que l'approximation de fermeture linéaire peut engendrer des oscil- lations non physiques. En eet, nous rappelons que dans certains cas tel qu'en écoulement de cisaillement (ou d'élongation), cette relation de fermeture peut donner une solution n'ayant pas de sens physique. Les approximations hybrides et quadratiques n'ont pas ces défauts. Les états transitoires et stationnaires sont respectivement fortement et légèrement surestimés. Elles ont donc une tendance à prédire un alignement des bres trop unidirec- tionnel. Les approximations à coecient ajustable n'ont pas ces défauts.

t

.

γ t

.

a11

Ecoulement élongationnel pur a11 γ Ecoulement de cisaillement Linéaire Quadratique Hybride Naturelle 2D Solution exacte

Fig. 2.11  Comparaison des diérentes équations de fermeture dans le cas d'écoulements simples avec CI = 0.01 [133].

Performance des équations de fermeture en élongation :

Tout comme en écoulement de cisaillement, l'équation de fermeture linéaire peut donner des valeurs complètement erronées. Les approximations quadratiques et Hybride sont quant à elles correctes. Elles prédisent correctement les états stationnaires, bien que les états tran- sitoires soient là aussi surestimés. Les approximations de fermeture à coecient ajustable donnent toujours de meilleurs résultats.

t

γ

.

t

γ

écoulement combinant cisaillement et élongation .

écoulement de cisaillement

Fig. 2.12  Comparaison des diérentes équations de fermeture

dans le cas d'écoulements simples avec CI= 0.01 [134]. DFC désigne la solution exacte

e ) Synthèse et conclusion

Le tableau ci-après synthétise les connaissances actuelles en matière d'équations de ferme- ture. Ce tableau met en exergue les domaines d'application de chaque équation de fermeture ainsi que les tendances généralement observées en terme de prédiction.

En guise de conclusion, nous pouvons dire que l'approximation Naturelle, de par sa nature exacte, fournit les meilleurs résultats. Néanmoins, elle n'est valable qu'en dimension deux. Les équations de fermeture de type orthotropes sont réputées donner de très bons résultats comme le suggère la gure (2.12) pour des écoulements de type cisaillement simple, élon- gationnel uni-axial et bi-axial et pour plusieurs écoulements qui combinent le cisaillement et l'élongation.

Cependant, il faut garder à l'esprit que :

 d'une part ces équations de fermeture sont valables pour un rapport de forme des bres inni ce qui peut en partie expliquer les résultats obtenus par Megally et al [99] (approximations orthotropes présentant un comportement non physique pour a1212),

 d'autre part les coecients de ces approximations ont été ajustés de manière à mi- nimiser l'écart avec les solutions exactes. Ces ajustements sont eectués pour des valeurs particulières de λ et de CI. Or, il est dicile, pour une suspension donnée,

d'exprimer la valeur d'un coecient d'interaction et en conséquence de choisir une approximation de fermeture adéquate. La question essentielle est alors :  quelle est la valeur de mon coecient d'interaction ? 

An de mettre en exergue l'importance du coecient d'interaction et de manière à ap- préhender son rôle dans la modélisation de l'orientation des bres, nous lui consacrons le paragraphe suivant.

Approximations Domaine rapport de CI d Tendances

de fermeture d'orientation forme

Linéaire isotrope donne parfois des

résultats non phy- siques

Quadratique alignées mauvaise pré-

diction pour un état d'orientation isotrope

Hybride alignées et isotrope meilleure que qua-

dratique

Naturelle 0 2 exacte

Orthotropes ORS  3 sensible à l'état

d'orientation

Orthotropes ORF 0.01 3 meilleure que ORS,

oscillations non physique pour

CI< 0.01

Orthotropes ORL 0.001 3 meilleure que ORS,

peu précise pour

CI> 0.001

Orthotropes ORT 0 3 très bonnes prédic-

tions

Tab. 2.2  Domaines d'application des équations de fermeture et tendances générales