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Chapitre 6- Niveau micro : Les étudiants autochtones du Cégep Régional de Lanaudière à

6.5. Éducation souhaitée par les étudiants

Les étudiants sont les principaux intéressés par les questions d’éducation et d’eurocentrisme scolaire. Ils aspirent eux aussi à la décolonisation de l’institution postsecondaire. Ils sont à même de savoir ce qu’ils désirent pour leur éducation postsecondaire. Les étudiants rencontrés au cours de cette recherche étaient ainsi enthousiasmés de partager leur vision d’une éducation qui mettrait en valeur les Autochtones et favoriserait la persévérance scolaire. Les étudiants sont politisés et proposent des recommandations qu’ils souhaiteraient adresser à la direction et parfois aux politiciens. Pour les étudiants autochtones du CRLJ, les changements éducatifs (et de vie scolaire) doivent se faire à plusieurs niveaux. Les étudiants entendent ainsi que tous les acteurs du réseau éducatif (les intervenants, la direction et les politiciens) puissent s’impliquer dans ces restructurations.

De façon plus concrète, le premier élément qui revient constamment est le besoin de profiter d’un lieu de réunion au cégep, d’un espace dédié aux étudiants autochtones, d’un local qu’ils pourraient aménager comme ils le souhaitent afin de le rendre accueillant.

Malgré les nombreuses études (CRPA 1996; Loiselle 2010; Joncas et Lavoie 2015; etc.) qui mentionnent l’importance d’offrir un lieu pour que les étudiants autochtones puissent se rassembler dans les institutions non autochtones (par exemple : un salon étudiant ou un local), le CRLJ ne fournit toujours pas un tel espace. La concrétisation de cet espace physique favorise l’ancrage institutionnel et donne une visibilité aux cultures autochtones. De plus, l’acquisition d’un tel espace est fort symbolique et témoigne d’une certaine reconnaissance institutionnelle des Autochtones, de leur histoire, de leurs réalités culturelles et de leurs défis (Dufour 2015 : 77). L’aménagement d’un espace de rassemblement pour ces étudiants (où pourraient aussi se retrouver les services culturellement adaptés) constitue un atout considérable, pour se sentir à l’aise, confortables et reconnus, pour vaincre l’isolement et atténuer les chocs culturels (Dufour 2015 : 80). Ces espaces permettent de pallier l’absence de réseaux familiaux par la création de nouveaux liens à l’intérieur de l’établissement. Autrement dit, ces lieux font office de refuges, de lieux de ressourcement où l’on peut être soi-même sans avoir à fournir d'effort particulier d'adaptation. Tel que démontré par Joncas, l’absence de ce type de lieu peut expliquer le faible niveau d’intégration sociale et d’appartenance institutionnelle qu’éprouvent les étudiants au sein de l’UQAC (Joncas 2013 :156). Le cas du CRLJ pourrait donc s’apparenter à celui de l’UQAC. Les étudiants se donnent alors rendez-vous dans le bureau de l’agente

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socio-académique lors des activités organisées par le Mikinakw RÉA et y passent souvent leurs pauses faute d’un autre espace.

De même, afin de faciliter la transition de la communauté vers la ville, et afin de permettre de briser l’isolement, les étudiants du CRLJ ont mentionné l’intérêt que pourrait représenter l’établissement de résidences pour les étudiants autochtones.

Des résidences, je trouve que c’est une bonne idée, car c’est un regroupement d’élèves et ils se sentiraient plus à l’aise que laissés à eux-mêmes, tout seul, en plein milieu de la ville où tu ne connais personne (Émilie, novembre 2017).

D’ailleurs, à ce sujet, deux projets sont en discussion en lien avec l’existence de futures résidences. Le premier est une entente entre le CAAL et Manawan afin de construire un « multi- centre de services » pour la communauté autochtone de la ville. Ce centre pourrait contenir, aux dires de certains, une résidence pour des personnes venues à Joliette pour compléter une formation. Un autre projet de résidences pour les étudiantes étrangers est à l’étude au cégep; celles-ci pourraient être utilisées par les étudiants autochtones. Si ce projet devait voir le jour, il reste à voir quelles dispositions seraient prises afin que des chambres puissent être réservées pour les étudiants autochtones.

Afin de permettre aux voix autochtones d’être mieux entendues au cégep de Joliette, une étudiante amène l’idée de réserver un siège pour un représentant autochtone sur les instances décisionnelles de l’association étudiante du cégep. Cela permettrait aussi d’encourager le développement d’un leadership politique chez les jeunes et de faire valoir les intérêts autochtones au cégep. Cette idée reprend les propos de Marie Battiste (2013 : 176-177) selon lesquels, afin d’entamer un processus de décolonisation de l’éducation, les Autochtones devraient être impliqués dans toutes les étapes et toutes les phases de la planification éducationnelle et des décisions gouvernementales.

Les cours et les curriculums scolaires semblent être aussi au centre des préoccupations des étudiants autochtones. Pour eux, il devrait y avoir une plus grande place accordée aux visions et aux savoirs autochtones, peu importe la discipline ou le programme de formation. Ainsi, il serait plus stimulant pour eux, mais aussi pour le rapprochement entre Allochtones et Autochtones, d’inclure du contenu autochtone, notamment en philosophie, en littérature, et en psychologie.

Il serait bien de mettre les valeurs autochtones dans les cours, faire des cours comme en philo, y’a beaucoup de questions qui pourraient être abordées sur la manière de penser et de réfléchir autochtone. En français, des œuvres littéraires autochtones il y en a plein. En psychologie ça serait le fun. Bref traiter de plusieurs aspects concernant les Autochtones pour expliquer ce qui se passe et pouvoir mieux interagir ensemble. Ça serait une manière de donner le

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sentiment que les profs s’intéressent à nos réalités, mais surtout de conscientiser les gens. (Alexandra, novembre 2017)

Aussi, les cours d’histoire, au secondaire comme au collégial, préoccupent grandement les étudiants; selon eux, c’est la responsabilité du MEES de s’assurer d’un contenu plus respectueux et inclusif des réalités et savoirs autochtones.

Le cours d’histoire au secondaire et au collégial doit être revu pour faire plus de place à la véritable histoire des Autochtones et leurs rapports au Québec et au Canada. La Loi sur les Indiens doit être enseignée, ses origines, ses impacts afin de briser certains stéréotypes et de faire comprendre aux autres étudiants les réels tenants et aboutissants de cette loi sur les Autochtones (Émilie, novembre 2017)

Pour une autre étudiante, une attention particulière devrait être accordée à la réalité contemporaine des Autochtones. Selon Alexandra, le fait de constamment ramener les Autochtones à une lecture historique peut porter préjudice aux personnes autochtones et ne permet pas aux Allochtones de se construire une représentation vivante et non folklorisée de leurs réalités.

Les étudiants autochtones ont souvent souligné l’apport précieux de l’agente de liaison autochtone dans le cégep :

Le travail de l’agente est énormément aidant pour l’intégration au cégep, le soutien durant le parcours des étudiants. Le fait que la personne-ressource soit elle-même Métis ou Autochtone aide au lien de confiance et au sentiment d’appartenance. Création de réseau d’échange et d’amis (Propos d’un étudiant du CRLJ relevés par FECQ 2017).

Selon eux, les instances gouvernementales devraient garantir la présence d’un agent autochtone dans chaque institution où évoluent des étudiants autochtones. Alexandra aimerait voir se développer davantage d’institutions basées sur le modèle de Kiuna.

En conclusion, à travers ce dernier chapitre, j’ai voulu mettre en lumière l’expérience des étudiants autochtones fréquentant le CRLJ et prendre note de la manière dont ceux-ci vivent, performent et agissent au sein de cet environnement scolaire. Les jeunes autochtones, malgré leur hétérogénéité, vivent des enjeux similaires associés à la scolarisation postsecondaire. Certains ont qualifié ces enjeux d’« obstacles » à la scolarisation postsecondaire pour des raisons d’ordre historique, social, scolaire, géographique, financier, culturel et personnel. Or, j’ai tenté de démontrer que ces obstacles sont aussi une « manifestations de la situation néocoloniale », ceci afin d’inviter les non-Autochtones à reconnaître leur part de responsabilités pour une éventuelle transformation des relations entre les deux groupes. Les jeunes du CRLJ vivent, à plusieurs égards, les impacts de l’histoire et des politiques coloniales, rendant ainsi leur parcours scolaire collégial parfois plus

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difficile. Ces étudiants ne restent toutefois pas passifs devant ces défis et, en tant qu’agents actifs de résistance, ils trouvent des stratégies de motivation pour persévérer dans le système scolaire.

L’idée de pouvoir contribuer au développement des sociétés autochtones semble être au centre des motivations des étudiants du CRLJ. Toutefois, l’éducation, d’une part, est au cœur des luttes pour reprendre le contrôle de leur existence en tant que nation, mais d’autre part, l’éducation postsecondaire implique une rupture (même temporaire) avec les siens et son milieu représentant ainsi un double paradoxe. Ainsi, les jeunes étudiants autochtones, dans une logique de biculturalité, doivent s’approprier les codes de la société dominante pour répondre aux attentes de leur famille ou de leur communauté, et ils doivent également s’identifier comme membres actifs de cette même communauté, et ce, en plus de réaliser leurs propres passions.

Même si certains ont, dans le passé, caché leur identité autochtone auprès de leurs camarades de classe pour éviter la marginalisation, les étudiants autochtones du CRLJ mentionnent aujourd’hui qu’ils sont fiers de leur identité. Ils considèrent qu’ils ont une responsabilité de porte-parole des cultures et des nations autochtones auprès des personnes non autochtones. Le contexte du Mikinakw RÉA s’est avéré une plate-forme considérable, leur ayant permis de faire entendre leurs voix et de valoriser les cultures autochtones. Les étudiants peuvent, dès lors, choisir de définir et de valoriser les aspects de leurs identités autochtones selon ce qu’ils désirent promouvoir aux yeux des Allochtones. L’autochtonie semble d’ailleurs, pour eux, être intimement liée à la territorialité, aux liens familiaux et intergénérationnels, aux valeurs, et à la langue.

Malgré le fait que le Programme Accueil et intégration des Autochtones au collégial représente une occasion non négligeable de faire valoir la présence des Autochtones au CRLJ, les étudiants considèrent qu’ils sont toujours enclavés dans une situation d’invisibilité. Ainsi, ils rêvent eux-aussi à une éducation postsecondaire qui pourrait valoriser leur histoire, leur identité et leur permettre de déployer leur potentiel.

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CONCLUSION

À la suite des recommandations du rapport de la Commission Vérité et réconciliation (2015), les instances gouvernementales et éducationnelles postsecondaires n’ont d’autres choix que de se sentir concernées par les étudiants autochtones. Parmi ces recommandations, certaines demandent aux établissements postsecondaires de faire une plus grande place aux étudiants autochtones et à l’enseignement des réalités et de l’histoire des Premières Nations, Inuit et Métis du Canada (notamment les articles 11, 16 et 62 des appels à l’action). Ces recommandations auront permis que les gouvernements et les établissements d’enseignement postsecondaires développent et consolident les mesures destinées spécifiquement à une meilleure intégration des étudiants autochtones. Toutefois, beaucoup reste encore à faire.

Dans le cadre de ce mémoire, je me suis intéressée à mieux comprendre, d’une part, l’expérience des jeunes autochtones en milieu collégial (soit leur processus de socialisation, leurs attentes, et leurs projets) et d’autre part, la position des établissements collégiaux et des différents intervenants allochtones face aux étudiants autochtones.

En me basant sur les théories de la pratique ainsi que sur l’importance de l’agencéité (capacité d’agir), les jeunes (ici les jeunes autochtones des milieux postsecondaires) sont considérés comme des acteurs sociaux compétents. Tel que le décrit Ortner (2006), ces jeunes, comme agents de changements, doivent être compris dans leurs globalité à la fois dans leur capacité d’agir (agency as power) et dans leur capacité d’élaborer des projets (agency of projects), ces derniers partagés par une collectivité. Cette manière de comprendre l’agencéité ne se restreint donc pas à comprendre une personne en termes du pouvoir dont elle dispose (Ortner 2006 :143-144), mais concerne aussi la résistance, les intentions, les objectifs et les désirs formulés en termes de projets culturellement partagés (Ortner 2006 : 144). Dans ces termes, il faut considérer les jeunes autochtones comme étant motivés par un contexte communautaire, un réseau social, économique et historique. Ces motivations les encouragent à entreprendre leurs projets d’études au niveau postsecondaire.

Tel que porté par la discipline de l’anthropologie de l’éducation, les milieux scolaires sont compris comme étant des microsociétés où se reproduisent les normes, les savoirs, les valeurs, les comportements sociaux propres à la société majoritaire. Ainsi, j’ai démontré que le système scolaire est fermement teinté d’une hégémonie scolaire et d’un eurocentrisme scolaire. Ces phénomènes amènent les jeunes à vivre un sentiment de double paradoxe par rapport à l’école occidentale. D’un côté, l’école est un agent de colonisation, de contrôle et d’assimilation; d’un autre côté, l’éducation est au cœur des luttes afin de reprendre le contrôle de leur existence en tant que nation. Ainsi, les jeunes étudiants, en tant qu’agents biculturels, vont s’approprier les codes de la société dominante

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pour pouvoir répondre aux attentes de leur famille ou de leur communauté tout en s’identifiant comme membre actif de cette même communauté (en plus de réaliser leurs propres projets). Cette biculturalité, exprimée et vécue à différents degrés par les étudiants, ne concourt pas toutefois à diminuer leur marginalisation au sein des établissements postsecondaires qu’ils fréquentent, ni à amoindrir les nombreux défis qu’ils rencontrent.

L’objectif de cette recherche fut de mieux saisir l’expérience des étudiants autochtones du Cégep Régional de Lanaudière à Joliette (CRLJ), en comprenant comment les discours politiques, les programmes gouvernementaux et les discours sur l’autodétermination autochtone influencent les comportements des intervenants collégiaux et donc l’expérience scolaire des étudiants. Puisque cette recherche ethnographique s’est intéressée aux parcours scolaires des étudiants autochtones, il m’a semblé approprié d’exposer les fondements épistémologiques et méthodologiques associés à une recherche respectueuse des personnes et des communautés autochtones. Les analyses effectuées dans ce mémoire s’appuient sur les données recueillies parmi la littérature et les écrits des instances autochtones, gouvernementales et académiques. Les réflexions critiques s’appuient aussi sur un matériel ethnographique riche recueilli auprès des intervenants du cégep de joliette, auprès de l’agente socio-académique autochtone et surtout auprès des étudiants autochtones du Mikinakw RÉA du CRLJ.

Dans ce mémoire, j’ai tenté de démontrer, par une analyse macro, que les instances autochtones réclament ni plus ni moins qu’une autonomie entière en matière d’éducation. Les instances gouvernementales, quant à elles, semblent être conscientes que le système scolaire ne permet pas l’épanouissement identitaire des jeunes autochtones, mais en aucun cas les discours n’utilisent les terminologies d’autodétermination, d’autogestion ou encore de décolonisation. Les gouvernements canadien et québécois ont mis en place des programmes afin d’appuyer les étudiants et les institutions, soit le Programme fédéral d’Aide à l’éducation postsecondaire (PAEP 1977) et le Programme provincial Accueil et intégration des Autochtones au collégial (1994-1995). Toutefois, tels qu’ils sont construits, ces derniers sont davantage liés à l’idée d’intégration des étudiants autochtones au système scolaire actuel. Or, l’intégration serait plutôt une forme d’assimilation propre à une approche néo- colonialiste. Il s’agit donc d’un processus de normalisation (et donc d’assimilation) où le dominant s’octroie le pouvoir de déterminer si l’intégration est réussie en fonction de ses propres critères normatifs. Les milieux postsecondaires, pour leur part, suivent la lignée des politiques éducationnelles et orientent leurs discussions autour du concept d’« intégration » soutenu par des logiques de « sécurité culturelle », terme avec lequel il faut rester prudent, sans toutefois remettre en question le dit système. L’éducation postsecondaire reste donc, toujours fortement eurocentrique.

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Le Cégep Régional de Lanaudière à Joliette s’inscrit dans la tendance des établissements postsecondaires, en réponse notamment aux recommandations de la CVR, qui ont fait appel récemment à la subvention provinciale qui leur permet de mettre en place des mesures favorisant l’intégration des étudiants autochtones dans leurs collèges. Cette recherche s’est donc attardée à considérer le cégep de Joliette comme objet d’étude afin de comprendre comment se manifeste l’influence des discours politiques et académiques dans la valorisation des personnes et des cultures autochtones.

À travers une analyse méso de la situation scolaire autochtone, j’ai démontré que les défis sont nombreux afin d’implanter le Programme Accueil et intégration au cégep de Joliette. Durant les deux dernières années, les efforts déployés par l’agente socio-académique ont été considérables afin d’accompagner et de valoriser les étudiants dans leurs parcours scolaires et de renverser cette situation d’invisibilité des Autochtones auprès de la population collégiale. Dans la très grande majorité, les enseignants, membres administratifs et employés de soutien aux étudiants allochtones ont une connaissance minimale des réalités des Premiers peuples. Dès lors, les intervenants reproduisent des stéréotypes à l’égard des personnes autochtones et encouragent, eux aussi la logique, intégrationniste. Toutefois, la majorité des enseignants rencontrés lors de mon terrain semblaient avoir à cœur que leurs étudiants autochtones réussissent académiquement, qu’ils puissent développer une attitude positive envers l’école et qu’ils soient en mesure de performer dans le système scolaire. Les intervenants scolaires croient, pour la plupart que la réussite est d’abord liée à une bonne intégration dans le milieu scolaire. De manière individuelle, plusieurs intervenants mettent donc en place des projets afin d’aider les étudiants dans leur parcours scolaire. Ces initiatives ponctuelles sont toutefois effectuées en parallèle les unes par rapport aux autres et sont rarement soutenues de manière concrète par les membres de la direction du cégep. Ainsi, l’administration est réfractaire à la création de nouvelles ressources et encourage plutôt les étudiants autochtones à utiliser celles déjà disponibles pour les étudiants étrangers. Cela peut aussi s’expliquer par les contraintes budgétaires avec lesquelles l’administration du cégep doit composer. Quoiqu’il en soit, la présente démarche d’analyse a permis de constater que ces réflexes sont aussi représentatifs de la difficulté des directions à négocier avec la présence autochtone dans leur établissement. Les membres de la direction ne semblent pas encore voir l’intérêt de mettre en place des mesures de discrimination positive. Selon eux, par principe d’égalité, on ne devrait pas favoriser un type de population au détriment d’autres étudiants qui vivent aussi des défis d’ordre social ou académique. Les membres de la direction sont toutefois ouverts à permettre une valorisation des « cultures autochtones » dans l’établissement et sur l’intégration de contenus autochtones dans les cours. Par contre, ceci a parfois pour effet de donner à voir une vision folklorisée des cultures autochtones. Les étudiants autochtones sont ainsi impliqués dans ces

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représentations, et on les invite à mettre en valeur ces aspects parfois essentialisant de leur identité. Le système scolaire quant à lui est difficilement remis en question. Les jeunes autochtones se retrouvent donc toujours pris dans une logique d’intégration où l’issue est de se conformer aux exigences scolaires eurocanadiennes.

Les étudiants autochtones se retrouvent donc au centre de ces dynamiques politiques (macro) et institutionnelles (méso). J’ai en effet démontré, grâce à une analyse du point de vue micro, que ces étudiants autochtones qui décident d’entreprendre des études postsecondaires, vivent des obstacles (Loiselle 2010) qui sont aussi des « manifestions de la situation néocoloniale ». Le système scolaire (et le contexte néocolonial) fait donc en sorte que seuls les déficits et les retards de l’étudiant seront mis de l’avant. Ainsi, aucune des compétences et acquis du jeune, comme la langue atikamekw, les habilités sur le territoire, les valeurs communautaires et autres ne seront pris en compte, puisque différents de la culture dominante, et considérés comme non pertinents dans la logique et les normes d’une formation postsecondaire.

Les étudiants que j’ai rencontrés au CRLJ sont toutefois un exemple de persévérance. Ces derniers résistent aux pressions exercées par la situation néocoloniale, par le système scolaire et par les attitudes discriminantes de certaines personnes dans l’établissement collégial. À travers les relations développées avec ces derniers, j’ai pu documenter les facteurs qui leur permettent de compléter leurs études. Les étudiants sont motivés par leur entourage familial et par les aspirations et les espoirs que ces derniers entretiennent à leur égard. Ainsi, ces jeunes aspirent à être des modèles

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