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D’OUVER TURE SOCIALE DES GRANDES

ÉCOLES

Ce premier chapitre présente le contexte général dans lequel s’inscrit la pré- sente étude. Il dresse un état des lieux des dispositifs d’ouverture sociale qui ont été mis en place par les grandes écoles depuis le milieu des années 2000 et revient sur leurs justifications à la lumière des évolutions constatées dans l’enseignement supérieur au cours de la période. Ces dispositifs, qui ont pour la plupart été adoptés après la signature en 2005 de la Charte pour l’égalité des chances dans l’accès aux formations d’excellence, se déclinent de plusieurs manières : programmes d’accom- pagnement et de tutorat en amont des grandes écoles, modification des modalités de recrutement, création de voies d’admission parallèle et mise en place de dispo- sitifs de soutien financier en faveur des étudiants boursiers admis dans les grandes écoles.

La première partie décrit brièvement l’organisation de l’enseignement supérieur en France et l’évolution des effectifs inscrits dans les différentes filières proposées après le baccalauréat. La deuxième partie décrit les dispositifs qui ont été mis en

œuvre pour tenter de diversifier le recrutement social des grandes écoles. La der- nière partie revient sur les évaluations auxquelles certains de ces dispositifs ont donné lieu.

1.1

La massification de l’enseignement supérieur

en France

Depuis le milieu du XXe siècle, la France a connu deux grandes vagues de mas- sification de l’enseignement secondaire et supérieur. La structure de l’enseignement supérieur a changé, les effectifs ont augmenté et la durée moyenne des études s’est allongée.

1.1.1

Structure de l’enseignement supérieur

L’enseignement supérieur français se distingue par la diversité des institutions qui le composent. Dans le cadre du processus de Bologne et de l’harmonisation des parcours de l’enseignement supérieur européen, l’architecture des études supé- rieures est depuis le milieu des années 2000 fondée sur l’organisation dite « LMD » : licence, master, doctorat. Jusqu’au doctorat, chaque unité d’enseignement validée en fin de semestre conduit à l’attribution de crédits ECTS (European Credits Trans-

fer System), qui sont comptabilisés pour l’obtention d’un diplôme. Contrairement

à la plupart des pays de l’OCDE, les universités ne sont pas en France les seules institutions à être habilitées à délivrer des diplômes d’État et, avec les instituts universitaires de technologie (IUT), elles ne totalisent qu’un peu plus de 60 % des inscriptions post-bac. Les grandes écoles, qui constituent l’autre grande composante de l’enseignement supérieur, sont également des institutions diplômantes au niveau master et concentrent près de 14 % des étudiants du supérieur (en incluant les étu- diants des classes préparatoires qui mènent à ces écoles). Les sections de technicien

supérieur (STS) – formations sélectives qui préparent au brevet de technicien su- périeur (BTS) en deux ans après le bac – et les instituts paramédicaux ou sociaux complètent le paysage universitaire français (MENESR, 2015).

Historiquement construites comme des voies d’excellence destinées à former les élites et les futurs dirigeants de la nation, les grandes écoles ont des modalités de re- crutement distinctes de celles des universités. Si, jusqu’en 2018 et la mise en place de la procédure Parcoursup, l’admission en première année de licence était non sélective (hormis certaines licences telles que les doubles diplômes)1, l’admission en grande école se fait principalement sur concours. La plupart des étudiants qui intègrent ces institutions passent par les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), qui proposent un cursus de deux à trois ans (bac+2 avec possibilité de redoublement) destiné à préparer les concours d’entrée aux grandes écoles. Depuis le début des années 2000, certaines écoles – principalement d’ingénieurs, de com- merce et de management – ont ouvert des procédures de sélection post-bac et des voies d’admission parallèle pour élargir leur recrutement, en direction notamment des étudiants issus de l’université ou des filières professionnelles et technologiques (CGE, 2012).

1.1.2

De la massification de l’enseignement secondaire...

Au cours du XXe siècle, le système scolaire français a été marqué par deux grandes vagues de « massification » scolaire : la première correspond à la concomi- tance d’un phénomène démographique – la scolarisation des générations du baby- boom – et de l’allongement de la durée des études ; la seconde concerne plus direc- tement l’enseignement supérieur : en 1989, la loi d’orientation sur l’éducation fixa l’objectif de mener 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat, et 100 %

1. La loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants du 8 mars 2018 – dite loi ORE – a modifié les modalités d’inscription dans l’enseignement supérieur. Les formations universitaires en tension ont dorénavant la possibilité de classer les candidats en tenant compte de leurs résultats scolaires. Cette réforme ne concerne pas notre période d’étude.

d’une classe d’âge à un niveau de qualification minimum (CAP ou BEP) à l’horizon de l’an 2000. Dans cette perspective, la création du baccalauréat professionnel en 1985 a concouru à l’augmentation des effectifs du second degré : entre 1985 et 1995, le nombre de bacheliers au sein d’une génération est passé de 36 % à 63 %. La réforme de la voie professionnelle de 2008-2009, qui a réduit la durée de prépa- ration du baccalauréat professionnel de quatre ans à trois ans, a entraîné un regain de croissance au nombre de bacheliers à partir de 2011, ces derniers représentant aujourd’hui près de 80 % d’une génération (voir figure 1.1).

FIGURE 1.1 – Proportion de bacheliers par génération, 1947-2017

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015 Année du baccalauréat

Bac général Bac technologique

Bac professionnel

Lecture : En 2017, près de 80 % d’une génération obtenait le baccalauréat (tous types confondus). Champ : France métropolitaine jusqu’en 2000, France hors Mayotte à partir de 2001.

Sources : MENJS-DEPP.