Universit´e Pierre & Marie Curie Master de math´ematiques 1
Ann´ee 2010-2011 Module MM020
Th´ eorie des Nombres - DM2 Corps finis
Exercice 1 : L’objectif de l’exercice est de d´emontrer le r´esultat suivant : soit Fq un corps fini, a1, . . . , an∈Fq tous non nuls,d1, . . . , dn∈N\ {0}, on consid`ere l’´equation polynˆomiale
a1xd11 +· · ·+anxdnn = 1
et on noteN le cardinal de l’ensemble des solutions (x1, . . . , xn)∈Fnq. Alors
|N −qn−1| ≤d1. . . dnqn−12
1−1 q
−n
2
. (1)
a) Montrer qu’il suffit de traiter le cas o`udi diviseq−1, pour tout 1≤i≤n.
On supposera donc dans la suite que cette condition est v´erifi´ee.
b) D´efinissonsN(a0, . . . , an) comme le nombre de solutions de l’´equation a1xd11+· · ·+anxdnn =a0
dans Fnq.
i) Montrer que
X
a∈Fn+1q
N(a) =q2n. ii) Montrer que
X
a∈Fn+1q
N(a)2= X
x,y∈Fnq
qn−1+ X
x,y∈Fnq t.q. rg(x,y)=1
(qn−qn−1),
o`u la seconde somme porte sur les vecteursx, y dansFnq tels que la matrice xd11 . . . xdnn 1
y1d1 . . . yndn 1
soit de rang 1.
iii) En d´eduire que
X
a∈Fn+1q
N(a)2≤q3n−1+d1. . . dnqn(qn−qn−1). iv) En d´eduire que
X
a∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2≤d1. . . dnq2n−1(q−1). (2)
c) i) Montrer que siai6= 0, bi6= 0, t6= 0, alors N(1, a1, . . . , an) =N(t, a1bd11t, . . . , anbdnnt).
ii) En d´eduire que dans la formule (2), au moins (q−1)d n+1
1...dn termes de la somme sont ´egaux `a (N−qn−1)2.
iii) En d´eduire le r´esultat souhait´e, `a savoir la formule (1).
1
d) On consid`ere cette fois l’´equation
a1xd11+· · ·+anxdnn = 0,
et on poseδ:= PPCM(d1, . . . , dn). En raisonnant comme dans les questions pr´ec´edentes, montrer que le nombre de solutions N0 de cette ´equation dans Fnq v´erifie
|N0−qn−1| ≤ d1√. . . dn
δ qn2
1−1 q
−n−1
2
.
Solution de l’exercice 1.
a) Pour touti, on noteei := PGCD(di, p−1) : alorsdi =eifi, avecfi premier `ap−1. On consid`ere les deux ´equations suivantes
a1xd11+· · ·+anxdnn = 1, (3) a1y1e1+· · ·+anynen= 1. (4) NotonsN00le nombre de solutions de (4). Notons aussiE3 (resp.E4) l’ensemble des solutions de (3) (resp. de (4)). Alors on a une bijection ϕ:E3 →E4d´efinie par (x1, . . . , xn)7→(xf11, . . . , xfnn).
Cette application est bien d´efinie, elle est bijective puisque pour touti, l’´el´evation `a la puissance fi est un isomorphisme deF∗q (car fi est premier `aq−1). Par cons´equent, on a #E3 = #E4, i.e.
N =N00.
Enfin, puisque pour tout i,ei ≤di, on a e1. . . enqn−12
1−1
q −n
2
≤d1. . . dnqn−12
1− 1 q
−n
2
.
Cela assure donc qu’il suffit de montrer le r´esultat pour l’´equation (4). On peut donc supposer que pour tout i,di diviseq−1.
b) i) Pour tout a∈Fnq, on note Pa(X1, . . . , Xn) := a1X1d1 +· · ·+anXndn et pour a0 ∈Fn+1q , on note Pa(X1, . . . , Xn) :=a01X1d1 +· · ·+a0nXndn−a00. On a
X
a∈Fn+1q
N(a) = X
a∈Fn+1q
X
x∈Fnq:Qa(x)=0
1
= #A , o`u
A:=
(a0, . . . , an, x1, . . . , xn)∈F2n+1q :Qa(x) = 0 . Or on a une bijection ´evidente F2nq →A d´efinie par
(a1, . . . , an, x1, . . . , xn)7→(Pa(x), a1, . . . , an, x1, . . . , xn) (il est clair que c’est bijectif). Donc #A= #F2nq =q2n, d’o`u le r´esultat.
ii) On a
X
a∈Fn+1q
N(a)2= X
a∈Fn+1q
X
x,y∈Fnq:Qa(x)=Qa(y)=0
1
= X
a∈Fnq
X
x,y∈Fnq:Pa(x)=Pa(y)
1
,
donc
X
a∈Fn+1q
N(a)2 = X
x,y∈Fnq
#
a∈Fnq :Pa(x) =Pa(y) .
2
Soient x, y∈Fnq. Alors l’´equation Pa(x) =Pa(y), d’inconnues (a1, . . . , an) se r´e´ecrit a1xd11+· · ·+anxdnn =a1yd11 +· · ·+anyndn
i.e.
(xd11 −y1d1)a1+· · ·+ (xdnn −ydnn)an= 0. (5) Deux cas se pr´esentent : soit pour tout i,xdii =ydii, ce qui revient `a dire que rg(x, y) = 1, et dans ce cas l’´equation (5) a qn solutions ; soit il existe unitel quexdii 6=ydii, auquel cas l’´equation (5) d´efinit un hyperplan deFnq, donc admet qn−1 solutions. On obtient donc
X
a∈Fn+1q
N(a)2= X
x,y∈Fnq,rg(x,y)=1
qn+ X
x,y∈Fnq,rg(x,y)6=1
qn−1= X
x,y∈Fnq,rg(x,y)=1
(qn−qn−1)+ X
x,y∈Fnq
qn−1.
iii) On a d’abordP
x,y∈Fnq qn−1 =q2nqn−1 =q3n−1.
Ensuite, si x, y∈Fnq, on a rg(x, y) = 1 si et seulement si pour touti,xdii =yidi, donc
#
x, y∈Fnq : rg(x, y) = 1 = X
x∈Fnq
#n
y∈Fnq :∀i, xdii =yidio .
Or pour tout a∈Fq etd∈Ndivisant q−1, l’ensemble des b∈Fq tels que bd=ad est de cardinal 1 (sia= 0) oud(si a6= 0), puisque l’´el´evation `a la puissancedest un morphisme de F∗q dans lui-mˆeme, dont le noyau est de cardinald. Donc pour touti, pour tout xi ∈Fq,
#{yi ∈Fq :xdii =yidi} ≤di, donc
#
x, y∈Fnq : rg(x, y) = 1 ≤ X
x∈Fnq
d1. . . dn(qn−qn−1) =d1. . . dnqn(qn−qn−1). Par cons´equent, la formule de la question b) ii) assure que
X
a∈Fn+1q
N(a)2≤q3n−1+d1. . . dnqn(qn−qn−1).
iv) On d´eveloppe, pour touta∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2 =N(a)2−2qn−1N(a) +q2n−2, donc
X
a∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2 = X
a∈Fn+1q
N(a)2−2qn−1 X
a∈Fn+1q
N(a) +q3n−1.
On utilise alors les questions b) i) et b) iii) pour majorer les deux sommes, et on obtient X
a∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2≤q3n−1+d1. . . dnqn(qn−qn−1)−2qn−1q2n+q3n−1 =d1. . . dnq2n−1(q−1).
c) On v´erifie facilement que pour toutai, toutt6= 0, toutbi 6= 0, l’applicationFnq →Fnq d´efinie par (y1, . . . , yn)7→(b1y1, . . . , bnyn) induit une bijection entre l’ensemble des solutions de
(ta1bd11)yd11 +· · ·+ (tanbdnn)ydnn =t et l’ensemble des solutions de
a1xd11+· · ·+anxdnn = 1
(la multiplication parbiest un isomorphisme deFq puisquebi est inversible dansFq). Cela assure que N(t, ta1bd11, . . . , tanbdnn) =N(1, a1, . . . , an).
3
d) Par la question c) i), il suffit de v´erifier que l’ensemble des (n+1)-uplets de la forme (t, ta1bd11, . . . , tanbdnn), o`ut et lesbi d´ecriventF∗q, est de cardinal au moins (q−1)d n+1
1...dn .
Pour cela, on se donne deux (n+ 1)-uplets (t, b1, . . . , bn) et (t0, b01, . . . , b0n) dans (Fq∗)n+1. Alors (t, ta1bd11, . . . , tanbdnn) = (t0, t0a1b0d11, . . . , t0anb0dnn) si et seulement sit=t0 et pour touti,bdii =b0dii si et seulement si t = t0 et
bi
b0i
di
= 1. Par cons´equent, pour tout (t, b1, . . . , bn) ∈ (F∗q)n+1, l’ensemble des (t0, b01, . . . , b0n)∈(F∗q)n+1tels que (t, ta1bd11, . . . , tanbdnn) = (t0, t0a1b0d11, . . . , t0anb0dnn) est de cardinald1. . . dn. Or #(F∗q)n+1 = (q−1)n+1, donc par c) i), il y a au moins (q−1)d n+1
1...dn termes de la somme (2) ´egaux `a (N −qn−1)2.
e) Les questions b) iv) et c) ii) assurent que (q−1)n+1
d1. . . dn
(N −qn−1)2 ≤ X
a∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2≤d1. . . dnq2n−1(q−1).
Donc on en d´eduit que
(N−qn−1)2≤ (d1. . . dn)2 (q−1)n q2n−1, d’o`u le r´esultat en prenant la racine carr´ee.
f) Comme dans la question a), on peut supposer que pour touti,di|q−1. On modifie le r´esultat obtenu dans la question c) i) : la mˆeme preuve assure queN(0, a1, . . . , an) =N(0, ta1bd11, . . . , tanbdnn) pour tout t6= 0, bi 6= 0. Mais on a dans ce cas la situation suivante (analogue de c) ii)) : con- sid´erons le morphisme de groupes multiplicatifsφ: (F∗q)n+1→(F∗q)nd´efini parφ(t, b1, . . . , bn) :=
(tbd11, . . . , tbdnn). Alors on a Ker(φ) = {(t, b1, . . . , bn) ∈(F∗q)n+1 :t = (b−1i )di,∀i}. Or t ∈ F∗q est une puissance di-i`eme pour tout isi et seulement sitest une puissanceδ-i`eme, donc
Ker(φ) = n
(t, b1, . . . , bn)∈(F∗q)n+1 :tpuissance δ-i`eme dans Fq, bdii =t−1,∀io .
On a donc q−1δ choix pourt, et pour chaquet, on a di choix pourbi, pour touti. Donc
#Ker(φ) = q−1
δ d1. . . dn, donc
#Im(φ) = (q−1)n+1
#Ker(φ) = δ(q−1)n d1. . . dn
. Donc dans la somme (2), on a au moins δ(q−1)d n
1...dn termes ´egaux `a (N0−qn−1)2.
On conclut alors en combinant cette derni`ere remarque et la question b) iv), pour obtenir que δ(q−1)n
d1. . . dn
(N0−qn−1)2 ≤ X
a∈Fn+1q
(N(a)−qn−1)2≤d1. . . dnq2n−1(q−1),
d’o`u finalement
N0−qn−1
≤ d1. . . dn
√ δ qn2
1−1
q −n−12
.
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