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Contributions à l' économie de la famille : effet du statut marital sur le comportement des ménages.

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Academic year: 2021

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(1)

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Submitted on 2 Nov 2016

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Contributions à l’ économie de la famille : effet du statut marital sur le comportement des ménages.

Imen Hentati

To cite this version:

Imen Hentati. Contributions à l’ économie de la famille : effet du statut marital sur le comportement des ménages.. Economies et finances. Université de Cergy Pontoise; Université de Tunis, 2015.

Français. �NNT : 2015CERG0800�. �tel-01390595�

(2)

Universit´ e Cergy-Pontoise & Universit´ e de Tunis

TH` ESE

Pour l’obtention du grade de docteur en Sciences ´ Economiques

Soutenue publiquement le 23 f´ evrier 2015 par :

Imen Hentati

Contributions ` a l’´ economie de la famille : effet du statut marital sur le comportement des m´ enages

Jury :

Directeurs : Olivier DONNI Universit´ e Cergy-Pontoise

Adel KARAA Universit´ e de Tunis

Rapporteurs : Olivier BARGAIN Universit´ e d’Aix-Marseille Mohamed Safouane BEN AISSA Universit´ e Tunis El Manar Examinateurs : Fran¸cois GARDES Universit´ e Paris I

Anne SOLAZ INED

Pr´ esident : Olivier BARGAIN Universit´ e d’Aix-Marseille

(3)

L’universit´ e Cergy-Pontoise et l’universit´ e de Tunis n’entendent donner aucune approbation ni improbation aux opinions ´ emises dans les th` eses :

ces opinions doivent ˆ etre consid´ er´ ees comme propres ` a leurs auteurs.

(4)

Remerciement

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je souhaite, par ces quelques lignes, exprimer ma reconnaissance envers les personnes qui ont le plus contribu´ e ` a l’´ elaboration de cette

th` ese.

Toute ma gratitude en direction de mes directeurs de th` ese, Olivier Donni et Adel Karaa, qui ont su me guider durant ce long parcours. Tous les chapitres de cette th` ese

doivent ` a leurs encouragements et ` a leurs critiques.

Je remercie ´ egalement les membres du jury, pour avoir accepter donner leurs commentaires sur une version pr´ eliminaire de cette th` ese, en esp´ erant que le travail

r´ ealis´ e soit ` a la hauteur de leurs attentes.

Je tiens ensuite ` a remercier Bernard Fortin, dont l’enthousiasme et la clairvoyance ont toujours ´ et´ e pour moi de la plus grande utilit´ e depuis mes ´ etudes de Master ` a

l’universit´ e de LAVAL.

Merci aux chercheurs et enseignants de l’Intitut Sup´ erieur de Gestion de Tunis, de la Facult´ e des Sciences ´ Economiques et de Gestion de Tunis et enfin de l’Universit´ e Cergy-Pontoise qui se sont int´ eress´ es de pr` es ou de loin ` a ce travail de recherche.

Merci ensuite au Minist` ere de l’Enseignement Sup´ erieur de Tunisie qui m’ont b´ enifici´ e

d’une bourse lors de mon s´ ejour ` a Paris.

(5)

Finalement, je ne saurais en quelques lignes exprimer toute l’affection que j’´ eprouve pour ma famille, en particulier ` a mes parents, mon mari et mon fils, et les regrets de

ne pas leur avoir consacr´ e suffisamment de temps. Cette th` ese leur est d´ edi´ ee.

(6)

Table des mati` eres

Remerciement 3

Table des mati` eres 5

Liste des tableaux 8

Table des figures 9

1 Introduction g´ en´ erale 10

1.1 Le th´ eorie de mariage . . . . 12

1.1.1 Les raisons ´ economiques du mariage . . . . 13

1.1.2 Le march´ e de mariage . . . . 17

1.1.3 L’´ evolution du march´ e de mariage . . . . 19

1.2 Les d´ ecisions intra du m´ enage : th´ eories . . . . 23

1.2.1 L’approche unitaire et ses fondations . . . . 25

1.2.2 Les insuffisances de l’approche unitaire . . . . 27

1.2.3 L’approche collective . . . . 29

1.2.4 Caract´ erisation de l’approche collective . . . . 33

1.2.5 D´ eveloppements r´ ecents : externalit´ es dans les consommations intra-familiales . . . . 37

1.3 R´ esum´ e de la th` ese . . . . 39

2 Risk attitude and marital status 42 2.1 Introduction . . . . 42

2.2 Risk aversion and behavior . . . . 44

(7)

2.3 Theoretical model . . . . 46

2.3.1 Marital status, preferences and uncertainty . . . . 48

2.3.2 The sharing of private consumption . . . . 49

2.4 Marital status and bargaining risk . . . . 52

2.4.1 The bargaining risk . . . . 52

2.4.2 The propensity to marry . . . . 53

2.5 Marital status and divorce risk . . . . 56

2.5.1 The risk of divorce . . . . 57

2.5.2 The propensity to marry . . . . 58

2.6 Conclusion . . . . 60

3 Contribution of financial reform to children’s expenditures 62 3.1 Introduction . . . . 62

3.2 Previous research . . . . 65

3.2.1 Marital status and parental resources . . . . 66

3.2.2 Marital status and spouses’ preferences . . . . 67

3.2.3 Marital status and cooperation . . . . 68

3.2.4 Marital status and children’s characteristics . . . . 69

3.3 Data and method . . . . 69

3.3.1 Data and sample . . . . 69

3.3.2 Measures . . . . 70

3.3.3 Method . . . . 72

3.4 Results . . . . 73

3.4.1 Descriptive statistics results . . . . 73

3.4.2 Ordinary least squares regression results . . . . 75

3.5 Additional results . . . . 83

3.5.1 Pseudo panels approach . . . . 83

3.5.2 Pseudo panels results . . . . 86

3.6 Conclusion and discussion . . . . 89

4 Children’s cost in collective households : theory and empirical evi-

(8)

dence from the UK. 91

4.1 Introduction . . . . 92

4.2 Theoretical framework . . . . 94

4.2.1 Singles . . . . 94

4.2.2 The Couple decision process . . . . 95

4.2.3 Identification and additional concepts . . . . 99

4.3 Empirical implementation . . . . 102

4.3.1 Functional forms . . . . 102

4.3.2 Data and sample selection . . . . 104

4.4 Empirical results . . . . 105

4.4.1 A First look at the data . . . . 105

4.4.2 Estimation results . . . . 107

4.5 Conclusion . . . . 117

5 Conclusion g´ en´ erale 118

Bibliographie 121

Appendices 140

(9)

Liste des tableaux

1.1 Proportion des couples vivant en union libre . . . . 22

3.1 Descriptive statistics of households with children, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . . 74

3.2 Ordinary least squares regression results : estimates of children’s clothing demand, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . . 77

3.3 Ordinary least squares regression results : estimates of children’s clothing demand of different demographic groups, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . . 78

3.4 Ordinary least squares regression results : estimates of children’s clothing demand by Cross Section, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . 81

3.5 Chow break point test output . . . . 82

3.6 Ordinary least squares regression results : estimates of children’s toys and education demand, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . . . 84

3.7 Pseudo panels regression results : estimates of children’s clothing de- mand, Family Expenditure Survey, 1995-2007 . . . . 88

4.1 Summary statistics of the sample, by family type . . . . 106

4.2 Estimates of clothing’s budget shares . . . . 109

4.3 Wald test for Models . . . . 110

4.4 Expenditure shares . . . . 112

4.5 Estimates of clothing’s budget shares for additional models . . . . 116

(10)

Table des figures

1.1 La fronti` ere d’efficacit´ e . . . . 34

2.1 Spouses’ bargaining power in the second period . . . . 51

4.1 Wife’s share and total expenditure . . . . 114

(11)

Chapitre 1

Introduction g´ en´ erale

“It is argued that marriage is no exception and can be successfully analyzed within the framework provided by modern economics. If correct, this is compelling additional evidence on the unifying power of economic analysis”

G.S. Becker. 1978

La famille constitue un terrain de recherche consid´ erable pour certaines disciplines

scientifiques comme la psychologie, la sociologie ou l’anthropologie. Les ´ economistes

sont venus plus tard apporter leur contribution ` a la connaissance des ph´ enom` enes fa-

miliaux et d´ emographiques. N´ eanmoins, la famille est devenue un sujet d’´ etude ` a part

enti` ere en ´ economie suite aux travaux de Gary Becker ` a partir des ann´ ees 1960. Avec la

publication de “Treatise on the Family”, le mariage, le divorce et la f´ econdit´ e sont deve-

nus des variables ` a expliquer par la science ´ economique au mˆ eme titre que le chˆ omage

ou l’inflation. Le champ de l’´ economie de la famille se focalise notamment sur deux

types de questions : quels sont les d´ eterminants du march´ e de mariage et comment s’ef-

fectuent les prises de d´ ecision une fois le couple est form´ e ? La th´ eorie de mariage ´ etudie

la famille sous plusieurs angles : la division du travail, la consommation jointe, le choix

(12)

du conjoint, le partage du risque, etc. Ces probl´ ematiques g´ en´ erales en am` enent beau- coup d’autres et l’approche choisie par les ´ economistes d´ epend fortement du contexte dans lequel ils se situent. En effet, Becker a mis en avant la croissance rapide du taux de divorce comme principal bouleversement de la famille. De mˆ eme l’apparition d’une nouvelle structure familiale dans laquelle le rˆ ole des individualit´ es est plus fort (concu- binage) peut affecter le comportement du m´ enage.

La th´ eorie n´ eoclassique d’une fa¸con g´ en´ erale et les mod` eles th´ eoriques de Becker en particulier, se basent souvent sur l’hypoth` ese du “m´ enage unitaire”. Ce cadre d’ana- lyse qui convient ` a l’´ etude d’entit´ es individuelles ne prend pas en compte la plu- ralit´ e des d´ ecideurs ` a l’int´ erieur d’un groupe de personnes comme le m´ enage. Plus sp´ ecifiquement, la fonction d’utilit´ e du m´ enage est unique et les pr´ ef´ erences indivi- duelles sont agr´ eg´ ees en un syst` eme de pr´ ef´ erences sociales. Cette hypoth` ese a le m´ erite de simplifier consid` erablement le comportement du m´ enage et de permettre la mise en place de tests empiriques rigoureux. Le d´ efaut, inh´ erent ` a toute hypoth` ese, est de rendre restrictives certaines mod´ elisations. Il est en effet diffcile d’´ etudier des probl` ematiques telles que l’in´ egalit´ e au sein du m´ enage ou le coˆ ut des enfants ` a partir de cette hypoth` ese.

Confort´ es par le manque de support empirique et l’absence de fondements th´ eoriques, certains auteurs ont d´ evelopp´ e des mod` eles de m´ enages collectifs. Le principe de base de ces mod` eles est de caract´ eriser les pr´ ef´ erences de chaque individu. ` A partir de ce principe fondateur, plusieurs courants ont ´ emerg´ e. Ils divergent par les m´ ecanismes uti- lis´ es pour comprendre la prise de d´ ecision au sein du m´ enage. On peut distinguer deux types de mod` eles : les mod` eles non-coop´ eratifs et les mod` eles coop´ eratifs. Les premiers sont bas´ es sur des ´ equilibres de Cournot-Nash tandis que les seconds prennent pour hy- poth` ese une allocation Pareto efficiente. R´ ecemment, cette seconde cat´ egorie de mod` ele a connu d’importantes avanc´ ees th´ eoriques dans plusieurs directions : identification des pr´ ef´ erences individuelles dans le processus de d´ ecision ainsi que la mod´ elisation des

´ echelles d’´ equivalence.

(13)

Cette th` ese est inspir´ ee des d´ eveloppements r´ ecents des mod` eles de comportement du m´ enage. Ainsi, et apr` es un bref rappel de la th´ eorie de mariage, cette introduction met en ´ evidence l’´ evolution des outils th´ eoriques de la d´ ecision intra-familiale. Ainsi nous reviendrons sur les insuffisances de l’approche unitaire. Puis, nous abordons les deux grandes tendances des approches collectives (coop´ erative et non-coop´ erative). Un r´ esum´ e de la th` ese sera ensuite d´ etaill´ e au niveau de chaque chapitre.

1.1 Le th´ eorie de mariage

Aucun ´ economiste ne pr´ etend que les aspects ´ economiques sont les seuls, ni mˆ eme les principaux ´ el´ ements intervenant sur le march´ e du mariage. Mais les apports des

´ economistes sont loin d’ˆ etre n´ egligeables et ont ´ et´ e souvent int´ egr´ es dans plusieurs champs disciplinaires. Becker a ´ et´ e parmi les premiers ` a mod´ eliser la notion de capi- tal humain. Ses travaux sur la th´ eorie de mariage ont ´ et´ e ` a la base du d´ eveloppement de l’analyse ´ economique du mariage, en influen¸cant ` a la fois juristes et ´ economistes.

Ses travaux ont d´ ebouch´ e sur une meilleure mod´ elisation des comportements humains dans une optique de rationalit´ e. La th´ eorie du mariage se divise en plusieurs parties.

Tout d’abord chaque individu d´ ecide de se marier si son utilit´ e esp´ er´ ee est sup´ erieure

`

a celle de rester c´ elibataire. ˆ Etre mari´ e ou c´ elibataire ne reflette pas une r´ ealit´ e ju- ridique, mais plutˆ ot un comprotement rationnel des agents ´ economique (Browning, Chiappori and Weiss, 2009). Le deuxi` eme probl` eme concerne l’explication du choix des partenaires. Selon Becker, le mariage est une affectation volontaire d’un homme ` a une femme. Sous l’hypoth` ese “d’utilit´ e transf´ erable”, l’´ equilibre du march´ e du mariage re- pose sur la maximisation de la production de l’ensemble des m´ enages mari´ es, parmi toutes les possibilit´ es de marriages. En relˆ achant cette hypoth` ese, l’´ equilibre du march´ e est d´ etermin´ e par l’appr´ eciation des caract´ eristiques individuelles du partenaire retenu.

Enfin, l’analyse ´ economique de la famille explique l’´ evolution de cette institution par

l’´ evolution de ses coˆ uts et de ses b´ en´ efices. La recrudescence des divorces, ainsi que

(14)

la mont´ ee du nombre de familles concubines est profond´ ement li´ ee ` a l’´ evolution des contraintes ´ economiques que subissaient les individus. Cette section est consacr´ ee ` a une rapide pr´ esentation de ces trois axes.

1.1.1 Les raisons ´ economiques du mariage

La famille est une entreprise ou une communaut´ e d’int´ erˆ ets qui offre ` a ses membres des b´ en´ efices de toutes sortes qu’il est difficile de se procurer ` a un prix raisonnable sur le march´ e. Ces b´ en´ efices peuvent ˆ etre au niveau de la production tels que la division du travail, au niveau de la consommation tels que les ´ economies d’´ echelles ou mˆ eme au niveau du partage du risque.

1.1.1.1 Gains li´ es ` a la production : La division du travail

Si chaque membre de la famille dispose d’un avantage comparatif dans une activit´ e, une division du travail entre eux permettra de produire plus ensemble que s´ epar´ ement.

C’´ etait l’un des principaux avantages de la famille mis en avant par Becker (1981), qui se fonde sur la r´ epartition des tˆ aches de la famille traditionnelle dans laquelle chacun peut se servir de son capital ` a une plus large ´ echelle. Par exemple, une femme peut se sp´ ecialiser dans le capital domestique et le mari construire sa carri` ere professionnelle.

Que ce soit sur le march´ e ou ` a la maison, le capital humain est d’autant plus utile qu’il

est utilis´ e intensivement. Il y a diverses preuves de la division du travail au sein des

m´ enages. Les hommes mari´ es travaillent de longues heures sur le march´ e et ont des

salaires substantiellement plus ´ elev´ es que ceux des hommes non mari´ es. Les femmes

mari´ ees ont des salaires plus faibles et travaillent plus ` a la maison que les femmes

c´ elibataires (Gronau, 1987 ; Korenman-Newmark, 1992 et Daniel, 1992). Pour expli-

quer cette orientation sexu´ ee de la sp´ ecialisation, Becker (1981) affirme que les rˆ oles

domestiques des hommes et des femmes ne sont pas interchangeables pour des raisons

(15)

biologiques li´ ees ` a la maternit´ e.

Toutefois, pour Sen (1990), les conceptions des rˆ oles de la femme et de l’homme d´ ependent de la nature de la “technologie sociale”, c’est-` a-dire de l’organisation so- ciale en vigueur (Sen, 1990, p. 129-130). La division du travail entre les sexes rel` eve de constructions sociales et non de dispositions d´ etermin´ ees biologiquement. La ”technolo- gie sociale”, qui pr´ evaut ` a un moment donn´ e dans un pays, peut perp´ etuer les asym´ etries entre hommes et femmes et les in´ egalit´ es de genre en faisant apparaˆıtre comme naturelle et invariable la division sexu´ ee du travail (l’homme chef de famille, principal apporteur de revenu et la femme au foyer ou active mais avec un salaire d’appoint). Pollak (1994), l’un des artisans des mod` eles de n´ egociations, reconnaˆıt que le m´ erite de la critique de Sen est d’avoir montr´ e que les institutions, les pratiques, les normes sociales et les rˆ oles

“convenus” attribu´ es aux hommes et aux femmes sont en r´ ealit´ e endog` enes et influent sur le “jeu” d’un m´ enage donn´ e, mˆ eme si cette critique est de nature qualitative et ne permet vraisemblablement pas de r´ ealiser des tests empiriques.

Le partage des rˆ oles et des tˆ aches est diff´ erenci´ e selon les sexes mais aussi selon les pays . Par exemple, la r´ epartition sexuelle des tˆ aches domestiques est plus in´ egalitaire en France qu’en Su` ede : 41% des hommes en couple participent aux activit´ es domestiques du m´ enage en Su` ede contre 32% en France. Par ailleurs, l’´ ecart du temps consacr´ e par les hommes et les femmes au travail domestique est plus r´ eduit en Su` ede qu’en France (Anxo, Flood, Kocoglu 2002, p. 138). Ces r´ esultats sont ` a relier au cadre institutionnel et soci´ etal diff´ erenci´ e dans les deux pays et, d’une mani` ere plus g´ en´ erale, aux relations entre l’Etat, la famille et le march´ e. Une autre composante qui peut affecter les usages du temps au sein du couple, est le “type de contrat marital” entre les sexes. En utilisant les donn´ ees du “German Socio-Economic Panel”, El Lahga et Moreau (2007), montrent que le passage du statut concubin au statut mari´ e peut influencer le nombre d’heures affect´ es au travail domestique et marchand au sein des couples : les r´ esultats montrent que le mariage renforce le degr´ e de sp´ ecialisation des femmes au travail domestique

1

.

1. Outre que la division du travail, le couple peut aussi produire des biens qui ne peuvent pas ˆ etre

(16)

1.1.1.2 Gains li´ es ` a la consommation : Fourniture des biens collectifs et

´ economies d’´ echelle

L’´ economiste Paul Samuelson ´ etablit une classification entre les biens, distinguant biens priv´ es et biens publics. La rivalit´ e et l’exclusion sont les deux principes sur lesquels s’appuie cette taxinomie : la rivalit´ e est un principe en vertu duquel la consommation d’un bien par un agent diminue la quantit´ e disponible de ce mˆ eme bien par un autre agent ; l’exclusion conduit ` a ´ ecarter de la consommation d’un bien un individu, qui ne pourrait pas ou ne voudrait pas payer, pour jouir de la consommation de ce bien. Un bien priv´ e r´ epond ` a ces deux principes, contrairement au bien public pur. Par cons´ equent, les gains de la mise en couple proviennent de l’existence des biens publics et semi-publics

2

. Les d´ epenses pour enfants, le logement et le chauffage en constituent probablement les meilleurs exemples. Si tous les biens ` a l’int´ erieur du m´ enage sont collectifs, les gains dus au mariage sont manifestes. En mettant en commun leurs consommations collectives, les m´ enages compos´ es de plusieurs personnes r´ ealisent des ´ economies d’´ echelles par rapport aux personnes c´ elibataires. ` A niveau de vie identique, les d´ epenses d’un m´ enage de taille “N” sont ainsi inf´ erieures ` a “N” fois des d´ epenses d’une personne seule. L’´ echelle d’´ equivalence associ´ e au m´ enage de taille “N” se d´ efinit comme le rapport entre les d´ epenses d’un m´ enage de “N” personnes et les d´ epenses d’une personne seule , ` a niveau de vie fix´ e. De ce fait, plus les biens collectifs repr´ esentent une part importante de la consommation des m´ enages, plus les ´ economies d’´ echelle sont importantes et plus l’echelle d’´ equivalence est faible.

Dans la litt´ erature ´ economique, les ´ echelles d’´ equivalence souffrent d’un probl` eme important quant ` a leur construction. Selon Browning (1989) et Blundell et Lewbel (1991), les ´ echelles d’´ equivalence sont fondamentalement non identifiables en utilisant

produits seuls : les enfants.

2. En pratique, la plus part des consommations sont interm´ ediaires entre l’individuel et le collectif.

C’est l’usage d’un produit qui d´ etermine, en fait, sa nature. Selon leur usage dans le m´ enage, les

diff´ erents produits peuvent s’ordonner sur un axe opposant les biens collectifs aux biens individuels.

(17)

seulement les d´ epenses de consommation puisqu’on est confront´ e au probl` eme classique de comparaison interpersonnelle d’utilit´ e. Pour calculer les ´ echelles d’´ equivalence, il est n´ ecessaire de faire une hypoth` ese ad-hoc non testable, qui refl` ete en fait un choix nor- matif du chercheur. Historiquement, Engel a fait recours aux d´ epenses alimentaires pour comparer des niveaux de bien ˆ etre en partant de son observation de la concavit´ e des courbes d’expansion du revenu. Pour lui, les m´ enages ayant la mˆ eme part de d´ epenses alimentaires avaient le mˆ eme niveau de vie. Alternativement, Rothbard (1943) a utilis´ e la part des vices (alcool, tabac, etc.) dans les d´ epenses pour comparer le niveau de bien ˆ etre entre m´ enages. Depuis quelques ann´ ees, l’usage est d´ esormais d’utiliser une restric- tion “d’ind´ ependance au choix de la base” pour identifier les ´ echelles d’´ equivalence, ce qui revient ` a supposer que les ´ echelles d’´ equivalence ne d´ ependent pas du revenu

3

.

1.1.1.3 Partage du risque

Les gains attendus d’une assurance mutuelle peuvent ˆ etre tr` es importants. Par exemple, Kotlikoff et Spivak (1981) ont ´ etudi´ e les risques r´ esultant de l’incertitude sur la dur´ ee de vie, en l’absence de syst` eme de retraite. Ils ont estim´ e que les gains qu’une personne seule peut esp´ erer du mariage sont l’´ equivalent de 10 ` a 20% de sa richesse. De mˆ eme, Rosenzweig et Stark (1989) ont montr´ e que les mariages en Inde rurale sont arrang´ es entre des partenaires suffisamment ´ eloign´ es pour que la corr´ elation entre les pr´ ecipitations dans les deux lieux de r´ esidence soit fortement r´ eduite. La mise en couple (mariage ou concubinage) peut offrir aux conjoints un genre d’assurance, n´ eanmoins, il y a une difference entre les deux types d’union : dans le mariage, les restrictions l´ egales incitent les deux conjoints ` a partager le risque d’une mani` ere plus effciente. Cependant pour les cohabitants, et en absence d’engagement, le partage du risque d´ epend du niveau d’altruisme entre les deux conjoints. Grˆ ace ` a leur altruisme, les cohabitants choisissent volontairement de partager le risque alors que les mari´ es, et

3. Les d´ eveloppements r´ ecents des ´ echelles d’´ equivalence seront pr´ esent´ es au niveau du chapitre

suivant.

(18)

sous la pression des restrictions l´ egales, sont oblig´ es de partager le risque efficacement et de prendre soin les uns des autres mˆ eme apr` es le divorce. Nordlom (2004) propose un mod` ele o` u les couples mari´ es sont soumis ` a des restrictions l´ egales qui les obligent ` a agir de fa¸ccon coop´ erative, tandis que les cohabitants, soumis ` a des engagements mo- raux, agissent d’une mani` ere non-coop´ erative. Ses r´ esultats empiriques montrent que le partage de risque est plus faible au niveau des cohabitants qu’au niveau des couples mari´ es.

1.1.2 Le march´ e de mariage

Etre mari´ ˆ e implique une perte d’ind´ ependance et rompre le mariage ne se fait pas sans coˆ ut. Si le mariage n’entraˆınait pas ces difficult´ es, chacun ´ epouserait la premi` ere personne rencontr´ ee. N´ eanmoins, le choix du conjoint et le partage des gains du mariage peuvent ˆ etre analys´ es en termes de march´ e. Dans la litt´ erature des appariements, deux grandes approches sont le plus souvent rencontr´ ees. Ces deux approches se diff´ erencient essentiellement par l’existence ou non d’une utilit´ e transf´ erable ` a l’int´ erieur d’un ma- riage. N´ eanmoins, elles reposent toutes les deux sur un concept d’´ equilibre sp´ ecifique connu sous le nom de “stabilit´ e”. Formmellement, une “affectation” est dite stable si et seulement si : (i) II n’y a pas de personne mari´ ee qui pr´ ef´ ererait ˆ etre c´ elibataire et (ii) II n’y a pas deux personnes mari´ ees ou non mari´ ees qui pr´ ef´ ereraient former une nouvelle union (Weiss, 1994).

1.1.2.1 ´ Equilibre du march´ e avec utilit´ e transf´ erable

Les individus en soci´ et´ e ont plusieurs partenaires possibles. Cette situation cr´ ee

une concurrence sur les gains potentiels du mariage. Le principal int´ erˆ et de cette ap-

proche est de faire ressortir que la d´ ecision de former une union durable est prise par

comparaison avec l’ensemble des choix possibles et non par l’appr´ eciation des m´ erites

(19)

intrins` eques du partenaire retenu. Pour comparer les gains attach´ es ` a divers mariages possibles, il est utile de d´ efinir la mesure d’un produit qui caract´ erise le mariage. En g´ en´ eral, on associe ` a chaque mariage un ensemble de d´ ecisions. Chaque d´ ecision a un r´ esultat d´ efini par des valeurs de l’utilit´ e pour les deux partenaires. Cette simplification est possible lorsqu’il existe un bien qui, en changeant de mains, transf` ere l’utilit´ e d’un partenaire ` a l’autre, ` a un taux d’´ echange fixe. L’information sur le produit attendu des divers mariages possibles suffit ` a la d´ etermination d’un r´ esultat d’´ equilibre. Ainsi, une affectation stable doit avoir un produit total sup´ erieur ` a toutes les autres affectations possibles.

1.1.2.2 ´ Equilibre du march´ e sans utilit´ e transf´ erable : l’algorithme de Gale- Shapeley

Dans certains cas, il n’y a pas de bien que le couple puisse transf´ erer ` a l’int´ erieur

du mariage. Un mariage g´ en` ere alors un r´ esultat pour chaque conjoint, pleinement

d´ etermin´ e par les caract´ eristiques individuelles de celui-ci. Ce r´ esultat ne peut pas ˆ etre

modifi´ e par un des conjoints avec une compensation pour l’autre, mais un mariage non

d´ esir´ e peut ˆ etre d´ esavou´ e ou remplac´ e par un meilleur. Il n’y a donc pas de possibi-

lit´ e d’un ´ echange au sein d’un couple, mais on peut toujours changer de couple. Gale

et Shapley (1962) ont sugg´ er´ e l’algorithme suivant : chaque homme propose d’abord

le mariage ` a la femme qu’il pr´ ef` ere. Une femme rejette toutes les offres qui ne sont

pas pr´ ef´ erables ` a l’´ etat de c´ elibat, et si elle en conserve ainsi plusieurs, elle rejette

toutes les offres domin´ ees et ne garde que les non domin´ ees. Au tour suivant, chaque

homme rejet´ e propose le mariage ` a la meilleure des femmes qui ne l’ont pas rejet´ e. Les

femmes ´ elimineront toutes les offres domin´ ees. L’´ equilibre est atteint lors qu’il n’y a plus

d’homme rejet´ e. L’objectif principal de Gale et Shapley est de d´ efinir un m´ ecanisme

d’appariement satisfaisant aux exigences de stabilit´ e :

(20)

Gale et Shapley (1962) “Dans tout mod` ele de mariage, quelles que soient les pr´ ef´ erences des individus, il existe un appariement stable. Plus pr´ ecis´ ement, l’appariement r´ esultant de l’algorithme d’acceptation differ´ ee, en faveur des hommes, est stable (et de mˆ eme pour l’algorithme en faveur des femmes)”.

1.1.3 L’´ evolution du march´ e de mariage

L’approche ´ economique de la famille interpr` ete le mariage, le divorce et les relations familiales ` a travers le prisme du comportement de maximisation de l’utilit´ e orient´ ee vers le futur. L’hypoth` ese de base est que lorsque les conjoints d´ ecident de se mettre en couple, d’avoir des enfants ou de divorcer, ils cherchent ` a maximiser leurs utilit´ es en comparant les avantages et les coˆ uts. Donc, ils se mettent en couple s’ils esp` erent vivre mieux qu’en restant c´ elibataires, et ils divorcent s’ils esp` erent am´ eliorer leur bien- ˆ etre. Le choix marital d’un couple (mariage ou concubinage) doit ˆ etre lui mˆ eme un choix rationnel puisqu’il pourrait ˆ etre un ´ el´ ement clef dans toute prise de d´ ecision ` a l’int´ erieur du m´ enage.

1.1.3.1 Analyse ´ economique du divorce

Becker ´ etait parmi les premiers qui s’est int´ eress´ e ` a l’analyse ´ economique du divorce.

L’id´ ee de base est que la probabilit´ e de divorce est inversement li´ ee aux gains anticip´ es

du mariage ainsi qu’` a la variance de la distribution des gains non anticip´ es du mariage

(Silber, 1981). Les auteurs se basent souvent sur la deuxi` eme relation et indiquent que la

majorit´ e des divorces est li´ e ` a l’existence de cette incertitude. L’analyse du divorce copie,

en fait, celle du mariage et les auteurs d´ erivent que les ´ epoux divorcent lorsque la somme

des b´ en´ efices nets anticip´ es au moment du divorce est sup´ erieure ` a celle qu’ils pr´ evoient

au cas o` u le mariage continue. La probabilit´ e de divorce d´ epend alors de plusieurs fac-

teurs. Premi` erement, la qualit´ e de l’assortiment du couple, qui r´ esulte du processus

(21)

de recherche d’un conjoint, peut affecter le gain au mariage. Deuxi` emement, ce mˆ eme processus de recherche puis la recherche d’informations dans le mariage contribuent ` a r´ eduire l’incertitude associ´ ee aux utilit´ es esp´ er´ ees. Ceci justifie le fait que la probabi- lit´ e de divorcer est plus forte en d´ ebut de mariage et pour les conjoints qui se marient jeunes. Troisi` emement, l’accumulation de capital sp´ ecifique au mariage (c’est-` a dire des investissements qui ne sont vraiment utiles que si les ´ epoux restent mari´ es) contribue ` a accroˆıtre le gain au mariage et donc ` a r´ eduire la probabilit´ e de divorcer. Selon Becker, le mariage aura moins de chance d’ˆ etre dissous si les ´ epoux ont effectu´ e des investissements sp´ ecifiques. Parmi ces investissements sp´ ecifiques il convient ´ evidemment d’inclure les enfants. Enfin, la probabilit´ e de divorce d´ epend du coˆ ut associ´ e ` a cet ´ ev´ enement : coˆ uts psychologiques, coˆ uts de proc´ edures, coˆ uts en termes de moindre retour sur investisse- ment en capital sp´ ecifique au mariage. Comme ces coˆ uts financiers et ´ emotionnels sont assez ´ elev´ es, il est probable que les gens opteraient pour un autre mode marital comme le concubinage plutˆ ot que le mariage.

1.1.3.2 Le concubinage

A l’image de la soci´ ` et´ e mouvante qu’est la soci´ et´ e contemporaine, le mod` ele familial des populations s’est transform´ e. La peur de l’engagement et la lib´ eralisation des mœurs ont favoris´ e l’´ emergence de nouvelles formes de vie ` a deux. Parmi ces formes d’union on note le concubinage. Si le mariage est une union solennelle entre un homme et une femme devant un officier d’´ etat civil, le concubinage est une union de fait caract´ eris´ ee par une vie commune pr´ esentant un caract` ere de stabilit´ e et de continuit´ e, entre deux personnes, de sexe diff´ erent ou non, qui vivent en couple

4

. Autrement dit, deux personnes vivant ensemble sans ˆ etre ni mari´ ees ni soumises ` a un pacte civil de solidarit´ e sont consid´ er´ ees comme vivant en concubinage.

4. Article 515-8 du Code civil Fran¸ cais.

(22)

Le concubinage est souvent per¸cu comme impliquant moins de responsabilit´ es aux niveaux l´ egal, ´ economique, voire ´ emotionnel (Bumpass et al., 1991). En cons´ equence, c’est une relation plus facile ` a rompre que le mariage, en particulier quand il n’y a pas d’enfants. R´ ecemment, les conjoints de fait, en Europe du Nord et Am´ erique du Nord, ont demand´ e et obtenu des droits similaires ` a ceux des couples mari´ es aux niveaux de la propri´ et´ e, de l’assurance-sant´ e, des r´ egimes de retraite et de la pension alimentaire, n´ eanmoins, l’union libre demeure moins institutionnalis´ ee que le mariage. Ce manque de normes signifie que les conjoints pourraient commencer ` a cohabiter en ayant des attentes tr` es diff´ erentes concernant la permanence, la coop´ eration et la mise en commun des ressources financi` eres par exemple. Ceci peut ´ eventuellement affecter la disribution des ressources intra m´ enage et diminuer le niveau du bien ˆ etre des enfants. ` A l’inverse, on s’attend ` a ce que la coop´ eration et la mise en commun des ressources financi` eres interviennent pendant le mariage.

Bien que l’union libre ob´ eisse moins aux restrictions l´ egales et ´ emotinnelles, nom- breux sont les couples qui ont choisi de commencer leur union dans un cadre hors mariage. En effet, au Canada, le taux de mariage a atteint un pic ` a 10,6 par 1 000 habi- tants en 1941 avant de r´ egresser ` a 7,1 par 1 000 habitants en 1990, puis ` a 5,0 par 1 000 habitants en 2001. Cette baisse continue du taux de mariage au Canada est confront´ ee ` a une augmentation importante du taux de cohabitation qui a atteint 16 % en 2001. Aux Etats-Unis, le taux de mariage a bondi apr` ´ es la Grande Crise, atteint en 1946 un pic de 16,4 par 1 000 habitants. Il a fluctu´ e depuis dans une tendance baissi` ere pour s’´ etablir ` a 8,9 mariages par 1 000 habitants en 1996 (U.S. Bureau of the Census, 1997). Le march´ e de mariage au Royaume-Uni n’est pas ´ epargn´ e du ph´ enom` ene. En effet, selon les sta- tistiques de l’office national en 2006, 2.3 millions de couples vivent en concubinage

5

. Plus qu’un tiers (36 %) du public en Angleterre et le Pays de galles avaient ´ et´ e dans une relation de cohabitation ` a quelque temps. En 2005, 39 % des individus c´ elibataires, ˆ

ag´ es entre 25 et 34 ans, ont choisi le concubinage comme cadre

5. Sources : Focus on Families 2007, Office for National Statistics ; British Social Attitudes Report

2007/2008, National Centre for Social Research.

(23)

Pays Ann´ ee Proportion de cohabitation en %

Grande Bretagne 2006 36

Su` ede 2000 30

Norv` ege 2000 24.5

Finlande 2000 18.5

Mexique 2000 18.7

Nouvelle-Z´ elande 2001 18.3

France 1999 17.5

Canada 2001 16

Etats-Unis 2000 8.2

Source : Statistique Canada, 2002 et ONS, 2007.

Table 1.1 – Proportion des couples vivant en union libre

de leur premi` ere union. Pour ceux qui sont ˆ ag´ es entre 35 et 49 ans la proportion est ´ egale

`

a 30 %. Le taux de cohabitation au Royaume-Uni est en croissance continue. En effet, entre 1996 et 2006, le nombre de couples concubins a augment´ e de 60% pour atteindre 2.3 millions couples concubins. Selon les privisions de l’office national, ce nombre est estim´ e ` a atteindre les 3.8 millions de couples (presque le double) en 2031

6

. La majorit´ e des jeunes Britanniques commencent leur premi` ere union dans le cadre d’une union libre. C’est g´ en´ eralement dans une telle union que naˆıt le premier enfant. Cependant, plus tard et en particulier apr` es la naissance des enfants, une partie des couples finissent par se marier. En cons´ equence, au moins ` a court terme dans le cycle de vie des jeunes couples, l’union libre reporte le mariage (Wu, 1999).

6. Sources : Cohabitation : The Financial Consequences of Relationship Breakdown, Law Commis-

sion No307 ; Focus on Families 2007 ; National Statistics Online February 2009 - Focus on Families -

Overview of Families ; National Statistics Population Trends No121 Autumn 2005.

(24)

1.2 Les d´ ecisions intra du m´ enage : th´ eories

La th´ eorie du consommateur dote l’agent d’une fonction d’utilit´ e qu’il maximise sous sa contrainte budg´ etaire. C’est ce que l’on appelle “la rationalit´ e individuelle”. Replac´ e dans son contexte familial, l’agent est amen´ e ` a prendre des d´ ecisions qui auront une influence sur le comportement de ses partenaires et r´ eciproquement. D’o` u le probl` eme de la prise en compte de la possible pluralit´ e des centres de d´ ecision au sein du m´ enage.

Une premi` ere r´ eponse a ´ et´ e apport´ ee. Elle consiste ` a agr´ eger les pr´ ef´ erences individuelles en un syst` eme de pr´ ef´ erences sociales. C’est ce cadre th´ eorique que nous qualifions d’ap- proche “unitaire”. Cette mani` ere de proc´ eder, tout en ´ etant tr` es simple, permet d’effec- tuer des tests empiriques rigoureux, de retrouver les pr´ ef´ erences du m´ enage de mani` ere non-ambigue et d’interpr´ eter les r´ esultats empiriques dans la perspective d’´ evaluer l’im- pact sur le comportement du m´ enage des politiques ´ economiques. Ces commodit´ es ex- pliquent largement le succ` es que cette approche rencontre depuis plusieurs d´ ecennies.

Cependant, un cadre d’analyse qui ne prend pas en compte la pluralit´ e des d´ ecideurs dans le m´ enage r´ ev` ele certaines insuffisances. D’un point de vue m´ ethodologique, les

´ economistes ont tent´ e de donner des fondements micro´ economiques au mod` ele unitaire (Samuelson, 1956, Becker, 1974, 1991), cependant, les conditions sous lesquelles les pr´ ef´ erences individuelles peuvent s’agr´ eger sous la forme d’une fonction d’utilit´ e sociale consensuelle ou se r´ ef´ erer ` a la fonction d’utilit´ e d’un chef de m´ enage dictateur altruiste sont hautement restrectives (Bergstrom, 1989). D’un point de vue empirique, les res- trictions induites par le mod` ele unitaire , tel que la propri´ et´ e de mise en commun des ressources (ou “income pooling”) ainsi que les propri´ et´ es de sym´ etrie et de semi-d´ efinie n´ egativit´ e de la matrice de Slutsky, ont ´ et´ e largement rejet´ ees, mettant en cause sa validit´ e th´ eorique et empirique.

Devant un manque de support empirique et l’absence de fondements th´ eoriques

de l’approche unitaire, de nouveaux mod` eles sont apparus que nous qualifierons d’ap-

(25)

proches “pluri-d´ ecisionnelles” de la famille. Ils ont en commun d’affecter ` a chaque pe- sonne sa propre fonction d’utilit´ e et de tenir compte express´ ement la pluralit´ e des sources de d´ ecision au sein du m´ enage. En revanche, ces approches se r´ epartissent en deux grandes cat´ egories, selon l’hypoth` ese faite sur la nature du processus de d´ ecision

`

a l’int´ erieur du m´ enage. Les mod` eles non-coop´ eratifs utilisent la notion d’´ equilibre de Cournot-Nash. En d’autres termes, chaque agent dans le m´ enage est suppos´ e maximiser son utilit´ e, par rapport ` a sa propre contrainte budg´ etaire, en prenant les actions de son partenaire comme une donn´ ee. Un inconv´ enient de ces mod` eles est qu’ils ne m` enent pas n´ ecessairement ` a des solutions qui sont efficaces au sens de Pareto. Les mod` eles coop´ eratifs, au contraire, partent du postulat que le processus de d´ ecision, quel qu’il soit, m` ene ` a des solutions efficaces au sens de Pareto. Cette cat´ egorie de mod` eles inclut, notamment, les mod` eles de comportement du m´ enage bas´ es sur la th´ eorie axiomatique de la n´ egociation avec information sym´ etrique (par exemple, les solutions de Nash ou de Kalai-Smorodinsky). Les travaux r´ ealis´ es dans cette direction d` es la fin des ann´ ees 80 constituent une avanc´ ee importante vers la reconnaissance du rˆ ole des rapports de force dans les d´ ecisions intra-familiales.

Les mod` eles ` a rationnalit´ e collective, ou mod` eles “collectifs”, reposent sur un prin-

cipe ´ el´ ementaire, ` a savoir la Pareto-efficience de la d´ ecision intrafamiliale (Chiappori,

1988, Browning et Chiappori, 1998, Vermeulen, 2002 et Chiappori et Donni, 2004). La

notion de “r` egle de partage” est sans doute la clef du succ` es de ces mod` eles. Cette no-

tion est devenue si populaire que, parfois, elle devient le symbole de toute la litt´ erature

sur les mod` eles collectifs. L’id´ ee est de d´ ecrire la r´ epartition interne des ressources

que les conjoints suivent implicitement quand ils choisissent une allocation Pareto-

optimale particuli` ere (Bourguignon et al,1995). D’une mani` ere g´ en´ erale, la faiblesse du

mod` ele collectif standard vient des difficult´ es de prise en compte des externalit´ es dans

les consommations, de biens ou de temps, ` a l’int´ erieur de la famille. En effet, les pro-

pri´ et´ es d’identification de la r` egle de partage peuvent difficilement ˆ etre maintenues si

l’on autorise toutes formes d’externalit´ es intrafamiliales. Les d´ eveloppements r´ ecents

du mod` ele collectif sont g´ en´ eralement orient´ es dans cette direction.

(26)

Ce chapitre, consacr´ e ` a une rapide pr´ esentation de la mod´ elisation des d´ ecisions intra-familiales, est organis´ e de la mani` ere suivante. La section 2 revient sur les hy- poth` eses du mod` ele unitaire et ses fondements micro´ economiques. La section 3 pr´ esente les insuffisances de l’approche unitaire. La section 4 pr´ esente les approches collectives en terme de jeux, coop´ eratifs et non-coop´ eratifs, du processus de d´ ecision au sein des familles. Le mod` ele collectif, sa caract´ erisation g´ en´ erale et particuli` ere font l’objet de la section 5. Ses d´ eveloppements r´ ecents et extensions sont pr´ esent´ es dans la section 6.

1.2.1 L’approche unitaire et ses fondations

La mod´ elisation unitaire du comportement d’un m´ enage reste assez r´ epandue. Cette approche utilitariste sugg` ere qu’il existe un consensus entre les individus d’un mˆ eme m´ enage quant au meilleur moyen de combiner leur temps, leur production et leur consommation, afin de maximiser leur bien-ˆ etre commun. La question de l’agr´ egation des pr´ ef´ erences individuelles est un probl` eme qui ne dispose pas de solution g´ en´ erale.

N´ eanmoins, les ´ economistes ont cherch´ e sous quelles conditions on pouvait l’imposer.

Dans ce domaine, Paul Samuelson et Gary Becker ont laiss´ e une trace souvent cit´ ee dans la litt´ erature des mod` eles de choix intra-familiaux.

1.2.1.1 Le principe de consensus de Paul Samuelson

Dans son mod` ele du consensus, Samuelson rationalise le comportement familial sous

la forme de la maximisation d’une fonction d’utilit´ e unique. Selon lui, les membres

du m´ enage, d’un commun accord, conviennent de maximiser une fonction commune

de bien-ˆ etre de leurs utilit´ es individuelles distinctes, sous une contrainte budg´ etaire

conjointe qui rassemble l’ensemble des revenus des membres du m´ enage. D` es lors, le

m´ enage agit comme un d´ ecideur unique, avec une contrainte de budget commun unique

et une fonction d’utilit´ e repr´ esentative de la consommation et du loisir de tous les

(27)

membres. D’apr` es Samuelson (1956), les fondements ` a l’utilisation d’une fonction d’uti- lit´ e unique pour l’ensemble des membres du m´ enage rel` event d’une question similaire

`

a l’´ elaboration d’une fonction de choix social ` a l’´ echelle d’un pays. N´ eanmoins, l’uti- lisation d’une telle fonction n’est pas toujours envisageable. Samuelson suppose qu’il est possible de mod´ eliser les choix de plusieurs individus comme un seul d´ ecideur si et seulement si la fonction de choix social satisfait la condition de transfert optimal

7

. Bergstrom (1989) rel` eve que pour des fonctions d’utilit´ e transf´ erable, la condition de transfert optimal reste toujours satisfaite ; en d’autres termes, ´ etant donn´ e un niveau de bien-ˆ etre pour le m´ enage, les niveaux d’utilit´ e individuels peuvent ˆ etre redistribu´ es.

Une faiblesse ´ evidente de l’approche est que Samuelson ignore comment est ´ edifi´ e ce consensus sur la fonction commune de bien-ˆ etre, de mˆ eme que le processus par lequel il se maintient. Il semble pourtant ´ evident que les int´ erˆ ets des individus, alors que les ressources du m´ enage sont naturellement limit´ ees, peuvent s’opposer.

1.2.1.2 Le mod´ ele altruiste et le th´ eor` eme de l’enfant gˆ at´ e de Gary Becker

Pour Gary Becker (1974, 1991), la famille est constitu´ ee, ` a la base, d’un agent altruiste (le chef du m´ enage) et de un ou plusieurs agents ´ egoistes (le conjoint du chef de m´ enage et leurs ´ eventuels enfants). L’altruiste se d´ efinit comme prenant en compte de fa¸con positive la fonction d’utilit´ e des autres membres du m´ enage, au sein de sa fonction d’utilit´ e. Ainsi, un chef de m´ enage altruiste prend en compte sa consommation d’un bien agr´ eg´ e ainsi que la consommation des autres membres de m´ enage. Becker suppose que chaque membre du m´ enage va agir comme si il ´ etait effectivement altruiste envers les autres membres du m´ enage, mˆ eme s’il ne l’est pas effectivement. La raison est que l’altruiste va ajuster ses transferts envers les membres ´ egoistes de telle sorte que ceux-ci ne prennent pas d’actions susceptibles d’affecter le bien-ˆ etre des autres membres du m´ enage. En cons´ equence, les individus ´ egoistes vont tous agir de fa¸con

7. Un transfert permettant la pr´ eservation des choix individuels et agr´ eg´ es (Samuelson, 1956).

(28)

`

a maximiser le revenu familial ; une redistribution des revenus entre les membres du m´ enage ne va pas affecter les choix de consommation du chef de m´ enage. Gary Becker (1974) ajoute : “Family’s utility function is the same as that of one of its members not because this member has dictatorial power over other members, but because he (or she) cares sufficiently about all other members to transfer resources voluntarily to them. Each member can have complete freedom of action ; indeed, the person making the transfers would not change the consumption of any member even with dictatorial power ”.

N´ eanmoins, le th´ eor` eme de l’enfant gˆ at´ e, d’apparence assez g´ en´ erale, est soumis ` a un certain nombre de limites. La plupart de ces limites sont li´ ees au fait qu’un seul bien de consommation agr´ eg´ e est pris en compte, ce qui simplifie consid´ erablement le probl` eme d’agr´ egation des pr´ ef´ erences. Pour que le th´ eor` eme de l’enfant gˆ at´ e reste valide en pr´ esence de biens publics ou de consommations de diff´ erents biens, incluant

´ eventuellement des d´ esincitations li´ ees ` a l’effort d’obtention de revenu individuel, Berg- strom (1989) d´ emontre que l’utilit´ e doit ˆ etre transf´ erable.

1.2.2 Les insuffisances de l’approche unitaire

Une premi` ere faiblesse des mod` eles traditionnels est d’ordre m´ ethodologique. Comme

le souligne Chiappori (1992), l’approche unitaire ne satisfait pas un des principes de

base de l’analyse n´ eo-classique, ` a savoir l’individualisme m´ ethodologique. Selon ce prin-

cipe, tous les mod` eles de l’´ economie doivent ou devraient trouver leur justification dans

le comportement individuel des agents. Par cons´ equent, il est pr´ ef´ erable, lorsque l’on

mod´ elise le comportement d’un m´ enage, de caract´ eriser les individus par des pr´ ef´ erences

propres, plutˆ ot que de les agr´ eger dans une unit´ e de d´ ecision collective. Il convient

n´ eanmoins de rappeler que le consensus de Samuelson et le th´ eor` eme de Becker consti-

tuent deux exceptions notables des mod` eles unitaires satisfaisant les pr´ eceptes de l’in-

dividualisme. Cependant, nous devons aussi souligner que les hypoth` eses, sur lesquelles

ces th´ eor` emes sont bas´ es, sont fortement criticables. Une seconde faiblesse, mise en

(29)

´ evidence par Lundberg (1988), est que l’approche unitaire est assez peu adapt´ ee pour

´ etudier certaines d´ ecisions des agents, telles que le choix marital ou le divorce, et plus g´ en´ eralement, pour analyser le comportement de m´ enages de composition diff´ erente. Ce- pendant, la principale critique adress´ ee ` a l’approche unitaire demeure l’absence impor- tante, sinon totale, de support empirique. Les fonctions de comportement du m´ enage, engendr´ ees par la maximisation d’une fonction d’utilit´ e sous une contrainte budg´ etaire, doivent satisfaire au moins deux restrictions qui ont ´ et´ e r´ eguli` erement test´ ees sur des observations empiriques. Tout d’abord, l’hypoth` ese d’agr´ egation des revenus (Income Pooling Hypothesis) ; seul le revenu total du m´ enage, et non sa r´ epartition ex-ante selon son origine, est important pour expliquer les choix du m´ enage. Or de nombreux travaux font apparaˆıtre que les hommes et les femmes ne font pas le mˆ eme usage de leur revenu.

Lundberg et Pollak (1997) montrent, sur donn´ ees britanniques, que la r´ eallocation de

certaines prestations familiales au profit de l’´ epouse, ` a montant global inchang´ e, a mo-

difi´ e les postes de consommation des familles. Dans le mˆ eme contexte, et en utilisant

donn´ ees br´ esiliennes, Thomas (1993) prouve que le revenu aux mains des hommes n’a

pas les mˆ emes cons´ equences sur la demande de biens des m´ enages que le revenu aux

mains des femmes. Ces derni` eres consacrent une plus grande part du budget qu’elles

contrˆ olent ` a des biens li´ es au capital humain. Ces faits empiriques sugg` erent une non

neutralit´ e de la redistribution des richesses au sein des m´ enages dont le mod` ele unitaire

ne peut rendre compte. Ensuite, selon l’approche unitaire, les effets compens´ es des prix

sur les demandes de biens (ou de loisir) doivent ˆ etre sym´ etriques et n´ egatifs, en vertu

de la condition de Slutsky. Cependant, Browning et Chiappori (1998) montrent, en uti-

lisant des donn´ ees canadiennes, que la sym´ etrie est rejet´ ee pour les couples mais non

pour les c´ elibataires. Ces constatations, associ´ ees aux faiblesses th´ eoriques et empiriques

de l’approche unitaire, ont orient´ e les recherches r´ ecentes vers une nouvelle approche :

l’approche collective.

(30)

1.2.3 L’approche collective

Des approches multidisciplinaires ont depuis longtemps attir´ e l’attention sur la mul- tiplicit´ e des niveaux de d´ ecision dans les soci´ et´ es contemporaines. La pluralit´ e des unit´ es de d´ ecision invite ` a la reconnaissance d’individus aux sph` eres d’activit´ es plus ou moins autonomes ` a l’int´ erieur du m´ enage. Le m´ enage n’est pas le lieu d’un consensus dictato- rial ou altruiste, les membres du m´ enage ont des int´ erˆ ets ` a la fois convergents et diver- gents. Cette multiplicit´ e des centres de d´ ecision remet en cause les mod` eles n´ eoclassiques orthodoxes fond´ es sur l’homog´ en´ eit´ e des pr´ ef´ erences des membres du m´ enage. Ainsi, le mod` ele id´ eal serait un mod` ele de l’unit´ e m´ enage d´ ecentralis´ ee dans laquelle les indivi- dus auraient des degr´ es diff´ erents de responsabilit´ e pour les d´ ecisions de production, de revenu et de d´ epense. Or, les mod` eles collectifs permettent d’envisager un tel m´ enage.

L’approche collective a ´ et´ e d´ evelopp´ ee par Pierre-Andr´ e Chiappori et ses nombreux co- auteurs (Chiappori, 1988, 1992 ; Browning et Chiappori 1998 ; Bourguignon, Browning, Chiappori, 2009 ; Chiappori et Ekeland, 2006, 2009). Elle occupe aujourd’hui une place pr´ e´ eminente en ´ economie de la famille. En utilisant la terminologie de la th´ eorie des jeux, nous pouvons distinguer deux mani` eres structurelles de mod´ eliser le comporte- ment d’un m´ enage, soit par un ´ equilibre non-coop´ eratif de Nash, soit par un ´ equilibre coop´ eratif de n´ egociation (bargaining).

1.2.3.1 Les mod´ eles non coop´ eratifs

Plusieurs auteurs ont utilis´ e l’approche non coop´ erative, bas´ ee sur le crit` ere de meilleures r´ eponses mutuelles de Nash, pour mod´ eliser les individualit´ es du m´ enage.

Chaque membre a sa propre fonction d’utilit´ e et d´ efinit ses actions ind´ ependamment

de celles prises par son conjoint en maximisant son utilit´ e sous sa propre contrainte

budg´ etaire (ou celle du m´ enage selon les mod` eles), en prenant les actions de l’autre

comme donn´ ees. Les issues stables ` a ce type de jeu sont des ´ equilibres de Nash (1951) et

(31)

doivent correspondre aux meilleures r´ eponses mutuelles de l’homme et de la femme. La premi` ere application connue d’un mod` ele non coop´ eratif aux d´ ecisions intra-familiales est due ` a Leuthold (1968). Cette derni` ere mod´ elise la d´ ecision jointe d’offre de travail d’ un m´ enage compos´ e de deux agents ´ egoistes avec un bien public (la consommation du m´ enage) et deux biens exclusifs (le loisir de chaque individu). ` A l’´ equilibre, chaque individu maximise son utilit´ e par rapport ` a la contrainte budg´ etaire du m´ enage en choisissant son offre de travail et la consommation publique. Leuthold montre qu’une augmentation des transferts sociaux conduit globalement ` a une diminution de l’offre de travail du m´ enage (du moins si le loisir est un bien normal). Plusieurs autres variantes th´ eoriques se sont inspir´ es par la suite de l’article de Leuthold (1968), nous pouvons citer comme principales r´ ef´ erences : Ashworth et Ulph (1981), Bourguignon (1984), Ulph (1988),Woolley (1988), Kooreman et Kapteyn (1990) et Carter et Katz (1997).

Cependant, la non efficacit´ e des allocations d’´ equilibre au sens de Pareto demeure l’in- conv´ enient majeur des mod` eles non coop´ eratifs ; la solution de Cournot-Nash parait insatisfaisante dans l’´ etude du comportement des m´ enages (Chiappori et Donni, 2006).

1.2.3.2 Les mod´ eles coop´ eratifs

Contrairement aux mod` eles non-coop´ eratifs qui supposent que les membres de m´ enage prennent leur d´ ecision de fa¸con simultan´ ee et non coordonn´ ee, les mod` eles coop´ eratifs fixent ` a priori une structure plus pr´ ecise aux processus d’allocation des ressources intra m´ enages. Ces mod` eles repr´ esentent les d´ ecisions du m´ enage comme le produit d’une n´ egociation entre les membres du m´ enage. Ils utilisent ainsi les outils de la th´ eorie des jeux coop´ eratifs. Pour comprendre un mod` ele m´ enage coop´ eratif, on doit d’abord d´ ecrire la situation de chaque conjoint avant l’union. Cette situation est d´ eterminante pour comprendre la r´ epartition interne d’un m´ enage. En effet, la solution de Nash est la solution coop´ erative d’un jeu ` a deux personnes o` u le point de menace

8

de chaque

8. De fa¸con plus simple, le point de menace correspond ` a la revendication minimale de l’individu,

c’est-` a -dire ` a ce qu’il obtiendrait seul, ` a l’ext´ erieur du m´ enage. Toutes choses ´ egales par ailleurs, plus

(32)

individu influence la n´ egociation. Dans la litt´ erature sur la n´ egociation entre conjoints pendant le mariage, deux types de point de menace sont le plus souvent rencontr´ es : la situation en cas de divorce et la situation en cas de non coop´ eration entre conjoints.

a- Mod` eles coop´ eratifs avec divorce comme point de menace : Manser et Brown (1980) ainsi que McElroy et Horney (1981) ont appliqu´ e le mod` ele coop´ eratif de choix intra-familial au probl` eme sp´ ecifique du mariage. Consid´ erant un couple mari´ e, et conditionnellement ` a cette donn´ ee, ces auteurs font l’hypoth` ese que chaque acteur a le choix entre rester mari´ e et divorcer. Les gains potentiels au mariage se r´ epartissent selon un mod` ele de n´ egociation aboutissant ` a une solution sym´ etrique de Nash (1950, 1953), tandis que les points de menace correspondent ` a la situation de chacun en cas de divorce. En toute g´ en´ eralit´ e, les points de menace peuvent d´ ependre de l’ensemble du syst` eme de prix, des revenus individuels et du revenu global du m´ enage. N´ eanmoins, d’autres facteurs, ext´ erieurs aux pr´ ef´ erences, peuvent influencer ce point de menace, ces variables sont couramment d´ enot´ ees variables environnementales extra-familiales

9

. McElroy donne une liste d´ etaill´ ee de ces facteurs. Il peut s’agir de l’´ etat du march´ e du mariage et du remariage (c’est-` a-dire le ratio homme-femme de l’ˆ age appropri´ e), de la possibilit´ e de retourner dans sa famille d’origine (richesse parentale) ; des restrictions impos´ ees ou des facilit´ es procur´ ees par l’appartenance ` a des r´ eseaux sociaux ou reli- gieux (interdiction ou non du travail ` a l’ext´ erieur de l’exploitation) ; de la l´ egislation concernant les droits de propri´ et´ e, les divorces, les pensions alimentaires, les alloca- tions familiales ; des modifications du bar` eme des impˆ ots selon la situation maritale . L’apport de ces param` etres ext´ erieurs remet ainsi en avant l’importance des d´ ecisions d’ordre l´ egislatif dans la mise en oeuvre d’un d´ eveloppement plus ´ equilibr´ e qui revalorise la situation des membres les plus d´ efavoris´ es du m´ enage.

la situation d’un individu est bonne ` a l’ext´ erieur du m´ enage, plus cet individu est en position de force pour obtenir le partage des gains du m´ enage en sa faveur.

9. Ce sont des ´ el´ ements qui modifient les points de menace sans affecter les prix et les revenus non

salariaux auxquels font face les individus mari´ es.

(33)

Bien que McElroy (1990) d´ etaille les conditions de l’´ evaluation empirique d’un tel mod` ele

10

, rares sont les travaux pr´ esentant une application ´ econom´ etrique. En effet, la d´ etermination des points de menace est loin d’ˆ etre ´ evidente. La situation en cas de divorce n’est pas observ´ ee et peut difficilement s’inf´ erer th´ eoriquement.

b- Point de menace associ´ e ` a un jeu non coop´ eratif : Ulph (1988) et Woolley (1988) sugg` erent l’utilisation de l’issue d’un jeu non-coop´ eratif comme point de menace.

En particulier, Lundberg et Pollak (1993) monternt que, dans certaines conditions et notamment lorsque le point de menace est interne au marriage, un mod` ele coop´ eratif peut ne pas aboutir ` a la neutralit´ e du b´ en´ eficiaire d’une allocation sur le comportement du m´ enage.

En l’absence de coop´ eration, les auteurs supposent que les partenaires se consacrent aux tˆ aches qui leur sont attribu´ ees par les normes sociales ou la tradition. Dans ce cas, les points de menace ne seront pas n´ ecessairement affect´ es par des param` etres en- vironnementaux extra-familiaux mais pourront ˆ etre influenc´ es par d’autres variables exog` enes internes au m´ enage. De cette fa¸con l’´ equilibre non-coop´ eratif va correspondre

`

a une r´ epartition sexu´ ee des rˆ oles. Lundberg et Pollak ajoutent “In a noncooperative marriage, a division of labor based on socially recognized and sanctioned gender roles emerges without explicit bargaining ”. De ce fait, l’homme peut s’occuper de ramener l’argent dans le couple, tandis que la femme se consacrera ` a l’essentiel des tˆ aches domes- tique et, en particulier, ` a la garde des enfants. L’issue d’un tel jeu noncoop´ eratif permet de distinguer des couples “modernes” o` u les tˆ aches sont distribu´ ees de mani` ere efficaces en respectant les avantages comparatifs de chacun et des couples ”traditionnels” o` u la distribution des tˆ aches est le r´ esultat de normes sociales et culturelles

11

. Cependant,

10. McElroy et Horney (1981) d´ erivent une matrice de Slutsky g´ en´ eralis´ ee dans le cas o` u les points de menace d´ ependent de variables environnementales extra-familiales. Ces auteurs proposent un test de validit´ e du mod` ele unitaire contre un mod` ele coop´ eratif avec divorce comme point de menace.

11. En pr´ esence de deux points de menace : divorce et sph` eres s´ epar´ ees de comp´ etence, le point de menace maintenu sera le plus cr´ edible, c’est-` a-dire, celui qui fournit l’utilit´ e indirecte la plus ´ elev´ ee(

Couprie, 2004).

(34)

ce mod` ele n’explique ni comment les normes sont d´ etermin´ ees, ni pourquoi les sph` eres masculines et f´ eminines sont s´ epar´ ees. Martin Browning, Pierre-Andr´ e Chiappori et Val´ erie Lechene (2010) r´ epondent partiellement ` a cette question en montrant que les couples qui ne collaborent pas ont int´ erˆ et ` a diviser les tˆ aches en sph` eres disjointes.

1.2.4 Caract´ erisation de l’approche collective

1.2.4.1 Caract´ erisation g´ en´ erale de l’approche : le postulat de la Pareto- optimalit´ e

Les mod` eles collectifs reposent sur deux hypoth` eses : chaque individu est dot´ e de sa propre fonction d’utilit´ e et le processus de d´ ecision entre les membres du m´ enage conduit ` a des allocations mutuellement avantageuses c’est ` a dire, collectivement efficaces au sens de Pareto. Cette propri´ et´ e d’efficacit´ e, centrale dans la d´ erivation du mod` ele, n’est pas un r´ esultat, elle est postul´ ee. En d’autres termes, tout ´ ecart par rapport ` a la situation d’´ equilibre obtenu, en ce qui concerne les d´ ecisions prises, quant ` a l’allocation du temps ou ` a la consommation de chaque membre du m´ enage, ne peut permettre une augmentation de satisfaction pour l’un, sans provoquer une diminution de la satisfaction de l’autre conjoint. Cette hypoth` ese est justifi´ ee par l’argument selon lequel les agents sont dans une relation de long terme, de confiance, qui les am` ene ` a prendre des d´ ecisions efficaces ; “... it seems necessary to limit the assumption on the decision process to some kind of minimum minimorum. The obvious candidate is of course Pareto efficiency.

All cooperative concepts lead to Pareto-efficient outcomes ; and it is very doubtful that

a cooperative decision could be considered as rational in any meaningful sense, if it

results in nonefficient outcomes. (Chiappori, 1988, p. 66). Pour comprendre cela, il faut

se repr´ esenter toutes les allocations efficaces au sens de Pareto comme la fronti` ere de

l’ensemble de ses combinaisons d’utilit´ e atteignables par les membres du m´ enage avec la

contrainte budg´ etaire donn´ ee. Cette fronti` ere est repr´ esent´ ee sur la Figure ci-dessous.

(35)

Utilité de la femme

Frontière d’efficacité

Localisation du ménage

Utilité de l’homme Ensemble des utilités

atteignables

Figure 1.1 – La fronti` ere d’efficacit´ e

(36)

Lorsque le pouvoir de n´ egociation de l’un des membres du m´ enage se d´ et´ eriore au profit d’un autre membre, l’´ equilibre se d´ eplace le long de cette fronti` ere. Ainsi, l’hypoth` ese d’efficacit´ e est certainement l’extension la plus naturelle aux groupes d’in- dividus de l’hypoth` ese de rationalit´ e individuelle. On parlera donc ici de rationalit´ e collective.

D’un point de vue empirique, et alors que le mod` ele unitaire implique des restric- tions sur la matrice de Slutsky qui peuvent paraˆıtre difficilement acceptables, le mod` ele collectif autorise une pseudo-matrice de Slutsky, plus g´ en´ erale, incluant le cas unitaire.

Les auteurs d´ erivent les propri´ et´ es de cette pseudo-matrice de Slutsky : celle-ci doit ˆ etre la somme d’une matrice sym´ etrique, semi-d´ efinie n´ egative et d’une matrice de rang 1 au plus. La matrice sym´ etrique refl` ete les effets prix et revenu standards de la fonc- tion de demande Marshallienne, tandis que la matrice de rang 1 au plus regroupera les effets strat´ egiques induits par le comportement collectif du m´ enage. Tout syst` eme qui ne remplit pas ces conditions n’est pas compatible avec le cadre collectif. Notons que pour un m´ enage compos´ e de deux personnes il faut disposer d’au moins cinq biens pour pouvoir tester la sym´ etrie et la condition de rang de la matrice S. En de¸c` a, elle est toujours v´ erifi´ ee (Browning et Chiappori, 1998, p. 1253).

Si l’ensemble de ces conditions caract´ erise le cadre collectif adopt´ e, il n’est cependant pas suffisant pour retrouver le processus d’allocation des ressources et les pr´ ef´ erences individuelles ` a partir de la seule observation des fonctions de demande. D’autres hy- poth` eses doivent ˆ etre pos´ ees afin d’ajouter plus de structure au mod` ele.

1.2.4.2 Caract´ erisation particul` ere : l’approche en termes de r` egle de partage

Dans le cadre du mod` ele collectif, la distribution des ressources au sein du m´ enage a

normalement une influence sur le comportement du m´ enage. Ce processus de distribu-

tion des ressources est repr´ esent´ e par une r` egle de partage “sharing rule”. Cette fonction

(37)

d´ ecrit la r` egle de r´ epartition interne des ressources que les conjoints suivent implicite- ment quand ils choisissent une allocation Pareto-optimale particuli` ere (Bourguignon et al, 1995, p. 14). Selon Chiappori (1988), la n´ egociation se d´ eroulant entre conjoints peut s’interpr´ eter comme une proc´ edure ` a deux temps. Dans un premier temps, les conjoints s’accordent sur le partage de la richesse exog` ene ; ils d´ eterminent une r` egle de partage. Cette r` egle de partage d´ epend, en toute g´ en´ eralit´ e, du vecteur de prix des biens consomm´ es, ainsi que du revenu total du m´ enage. Dans un second temps, chacun choisit ses consommations de fa¸con ` a maximiser sa fonction d’utilit´ e particuli` ere sous la contrainte du budget obtenu apr` es partage. Certes, la possibilit´ e d’´ etudier le processus de distribution des ressources au sein du m´ enage fournit au mod` ele collectif une grande richesse d’interpr´ etation, cependant, les aspects empiriques de cette r` egle de partage restent d´ elicats ` a manipuler, pour des raisons d’identification essentiellement.

Lorsque toutes les consommations priv´ ees sont observ´ ees, l’identification de la r` egle de partage est imm´ ediate, il suffit pour cela de sommer les d´ epenses priv´ ees individuelles observ´ ees. En l’absence d’une telle information, la r` egle de partage peut ˆ etre identifi´ ee

`

a l’aide d’un bien assignable : un bien dont les consommations individuelles sont ob- serv´ ees ` a l’int´ erieur du m´ enage. Dans ce contexte, Browning, Bourguignon, Chiappori et Lechene (1994) identifient les variations de la part du revenu priv´ e du m´ enage obtenue par chaque conjoint grˆ ace ` a l’observation des consommations, assignables, de vˆ etements.

De mˆ eme, Fortin et Lacroix (1997) consid` erent le loisir comme un bien assignable pour d´ eduire des restrictions testables du comportement collectif des m´ enage dans un pro- gramme d’offre de travail. Dans ces applications, les auteurs con¸coivent les difficult´ es li´ ees ` a l’hypoth` ese d’assignabilit´ e d’un bien de consommation non testable lorsqu’un seul type de bien assignable par individu est envisag´ e, qui est d´ ej` a assez difficile ` a trouver.

R´ ecemment, Chiappori, Fortin et Lacroix (2002) proposent de faire d´ ependre la r` egle

de partage de facteurs de distributions. Ces variables sont les analogues des variables

environnementales extra-familiales que l’on rencontre dans les mod` eles coop´ eratifs avec

(38)

solution de Nash. Ainsi, les facteurs de distribution permettent d’expliquer la r´ epartition du pouvoir de n´ egociation au sein du couple sans influencer les pr´ ef´ erences individuelles.

Plus pr´ ecisement, ces facteurs sont donc des variables qui, sans affecter l’ensemble des utilit´ es atteignables, affectent la localisation de l’´ equilibre le long de la fronti` ere (Figure 1.1). Chiappori, Fortin et Lacroix (2002) proposent d’utiliser la l´ egislation sur le divorce et le taux de masculinit´ e (sex-ratio) comme facteurs de distribution, l’id´ ee ´ etant que ces variables influencent la situation en l’absence d’accord au sein de la famille.

La r` egle de partage repr´ esente le processus de n´ egociation intra-familial en forme r´ eduite. Cette notion assez populaire devient le symbole de toute la litt´ erature sur les mod` eles collectifs. N´ eanmoins, l’id´ ee d’introduire des facteurs de distribution de fa¸con ad hoc dans cette r` egle de partage est une mani` ere plus au moins arbitraire puisque l’introduction de ces variables dans la r` egle de partage sera effectu´ ee selon une intuition

´ economique ou sociologique, ce qui pourrait influencer le processus de n´ egociation intra- familial (Couprie, 2004).

1.2.5 D´ eveloppements r´ ecents : externalit´ es dans les consom- mations intra-familiales

Le mod` ele collectif constitue une simplification ` a l’extrˆ eme dans la mesure o` u elle

con¸coit la famille comme un simple agr´ egat de consommations priv´ ees compos´ ee uni-

quement de deux conjoints. Or, les choses sont en r´ ealit´ e plus compliqu´ ees : les m´ enages

ne sont pas toujours des couples, en particulier il ont souvent des enfants qui disposent

d’un ´ eventuel pouvoir sur les d´ ecisions intra m´ enage et qui peuvent affecter le niveau

de consommation des parents. Par ailleurs, la prise en compte de l’influence des enfants

dans les modes de consommation intra-familiaux est essentielle.

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