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Article pp.75-76 du Vol.26 n°279 (2007)

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Texte intégral

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BIOFUTUR 279 • JUILLET-AOÛT 200775

Quelques pages

par Maël Knoll

m.knoll@lavoisier.fr

Le climat : jeu dangereux Dernières nouvelles de la planète

Jean Jouzel, Anne Debroise Éditions Dunod, 2007 978-2-10-050987-4 19,90

Après le GIEC, faut-il présenter Jean Jouzel, le vice- président responsable du Groupe I, Sciences du climat et de la biosphère, alors que le présent ouvrage a déjà trouvé un grand nombre de lecteurs ?

Les climats passés parlent de l’avenir et ils ont beau- coup à dire : le XIXesiècle avait déjà décelé l’aptitude des gaz à absorber puis renvoyer dans toutes les direc- tions la chaleur dégagée par la terre. Les annales gla- ciaires de la paléoclimatologie n’ont fait que confirmer leur qualité d’archives : la glace, matériau hypersen- sible, très pur en livrant sa composition isotopique*1 demeure un formidable outil de base.

Malgré cette saisissante reconstitution du temps qu’il faisait il y a 50 millions d’années, en plein effet de serre, avec une température moyenne de 6 °C supérieure à celle d’aujourd’hui, l’auteur nous met en garde contre sa valeur projective : la configuration des continents n’est plus la même. L’homme sur le banc des accusés ? À n’en pas douter, en 2007. Pour preuve : la compo- sition isotopique du CO2d’activité humaine et natu- relle est différente.

Convenons que, coincés dans la mince atmosphère, sous

« l’entrepôt » de la troposphère qui régit les courants aériens, les gaz à effet de serre (GES) piégés par le sol nous protègent du froid paralysant, mais des 7,2 GtC*2 émises chaque année, 4 restent dans l’atmosphère.

Les modèles, outils de diagnostic et de prévision, four- nissent à la demande les équations, mais dans la réa- lité, les mouvements de l’atmosphère ou de l’océan ne fonctionnent pas en vase clos. Jean Jouzel nous laisse entrevoir une dense intersection de données. La clima- tologie est une boulimique de calculs, sans compter l’existence de paramètres arbitraires.

C’est vrai, les anciennes périodes chaudes se sont ter- minées naturellement. Mais un tel espoir est aujour- d’hui inconcevable. Les aérosols naturels, particules microscopiques en suspension dans l’air censées refroi- dir l’atmosphère en aidant la formation de nuages comptent peu à côté des 300 millions de tonnes d’ori- gine humaine grosses d’effets inverses.

Le GIEC s’est vu investi d’une lourde mission : ima- giner l’avenir. Ce faisant, il se heurte à l’inertie des sys- tèmes climatiques et au fait que le carbone existe sous diverses formes : dans l’atmosphère, sous les continents en combustibles fossiles, en surface, et dans l’océan en carbonates des matières organiques, autant de com- partiments en permanent échange, avec l’homme peu respectueux des temps d’assimilation des réservoirs.

Les prévisions de réchauffement du GIEC ne peuvent faire mieux qu’une fourchette de 1,1 % à 6,4 %.

Curieusement, la fonte de la banquise n’a aucun effet sur le niveau des mers. La glace s’écoule à l’intérieur d’un glacier. La perte de glace se fait dans la seule zone d’ablation*3. Les images spectaculaires de la fonte de la calotte antarc- tique n’inquiètent pas les climatologues.

Pire : il reste un stock d’énergie gigantesque, que les progrès des techniques d’extraction devraient rendre disponibles dans les décennies à venir ! « La rareté des combustibles fossiles ne sera pas un facteur significatif dans la lutte contre le changement climatique» !

Mais au chapitre de la biodiversité, il y a de quoi s’émouvoir en raison de la désynchronisation générale des écosystèmes. Et c’est bien là le tra- gique de l’affaire : la situation ne présente

«rien d’insurmontable au XXIesiècle pour les pays développés».

Bref, comment alerter décisivement, alors qu’il reste encore dans l’atmosphère du CO2émis au début de l’ère industrielle ? L’essoufflement des puits de carbone, tant biosphériques qu’océaniques, est sensible : d’ici quelques années, l’océan, les sols et les forêts pour- raient bien produire plus de carbone qu’elles n’en absorberont.

En France, les GES ont diminué de 18 % en 2005 par rapport à 1990. Si l’effort pouvait s’adosser aux secteurs résidentiel, industriel et aux transports, la France serait au rendez-vous de Kyoto en 2012, grâce à l’instauration de normes écologiques de consommation.

Il existe certes beaucoup de créativité dans les solu- tions d’ingénierie climatique… Mais les « secteurs gour- mands » subsistent. Demeure-t-il vraiment des énergies palliatives, excepté les énergies d’appoint*4? Certai- nement : la géothermie, le nucléaire, la force maré- motrice, le stockage du CO2de rejet en sous-sol s’il est capturé dès son point d’émission, puis comprimé sous forme liquide.

Restons réalistes : « les résultats de la plupart des modèles indiquent que des solutions technologiques connues pourraient conduire (…) à la stabilisation du CO2atmosphérique (…) mais leur mise en œuvre exigerait des transformations socio-économiques ou institutionnelles. »

L’ouvrage de Jean Jouzel a le mérite et l’idéale maîtrise de montrer que tout se tient, dans une vaste spirale de continuité, sinon d’inéluctable.

«... faire feu de tout bois» !!! paraît une conclu- sion incendiaire.

Le climat : jeu dangereux

Dernières nouvelles de la planète

*1L’atome d’oxygène se pré- sente sous deux formes princi- pales (16, le plus courant, 8 protons et 8 neutrons).

L’oxygène lourd (8 protons et 10 neutrons) se trouve dans les foraminifères (restes de coquillages marins) dépendant de la température de l’eau.

Les premières carottes sédi- mentaires ont été prélevées au fond des océans. La pluie contient de l’oxygène 16, mais dans deux cas sur 1000, l’oxygène est remplacé par l’isotope 18.

*2Milliards de tonnes de carbone par an.

*3Partie où la fonte importante provoque la diminution de l’épaisseur (dans la zone d’accumulation compensante, les précipitations de neige se transforment en glace ou neiges éternelles, la zone de transport est la partie du glacier où la fonte est limitée et où le glacier est le plus épais, érosion glaciaire maximum).

*4Éolienne, solaire, hydro- électrique, biomasse, carburants verts en manque de surface.

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Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur biofutur.revuesonline.com

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BIOFUTUR 279 • JUILLET-AOÛT 2007 76

Sauvons la biodiversité !

Edward O. Wilson Éditions Dunod, 2007 978-2-10-050988-1 18

«Quelle est la nature de la Nature ? », paraît se demander Edward Wilson ! Conservation international*1définit la planète comme une espace de 10 000 km2dont 70 % disposent encore de leur végétation naturelle. Mais ce kaléi- doscope de terres, d’espèces, «… évolue vers l’humanisé, le simplifié, l’instable».

Par le biais d’une apostrophe à un croyant, l’au- teur tente de repanthéiser la nature. Plutôt chan- ger les institutions que les gènes. L’écart entre l’héritage génétique ancien et la haute techno- logie se creuse : on ne saurait indéfiniment répa- rer une vieille voiture, fût-elle de collection.

Entomologiste de formation (spécialiste des four- mis), l’auteur milite pour une conservation in situdes espèces natives, après la destruction de leur habitat : sans quoi certaines, migrantes, font des ravages, certaines disparaissent sans qu’on sache pour- quoi. Cohérent, il se fait défenseur de deux magni- fiques animaux superprédateurs, le glouton et les fourmis « merveilleuses » (Thaumatomyrmex) :

« on ne peut jamais croiser certains animaux rares (…) mais nous en avons besoin, en tant que symboles (…) L’homogénéisation de la biosphère est doulou- reuse et coûteuse pour notre propre espèce et elle le deviendra plus encore. "

Ce qu’il nomme la sixième extinction serait en cours.

« Ce qui est sûr, c’est que nous sommes la météorite géante de notre temps, nous qui avons lancé la 6eextinction massive de l’histoire du Phanérozoïque. » La connotation émotionnelle est forte, lorsque E.

Wilson s’attarde sur les risques suicidaires qu’en- court un déni du taux de disparition, type : l’extinction est naturelle, pourquoi avons-nous besoin de tant d’espèces, pourquoi se dépêcher juste maintenant ?

L’inventaire des domaines de la biologie revêt, selon lui deux dimensions : 1) toutes les propriétés connues de la vie obéissent aux lois de la physique et de la chi- mie, constituées de « propriétés émergentes », terme

signifiant que ces propriétés naissent de l’interaction des molécules. En ce sens la cellule elle-même est un écosystème et l’homme un « écosystème bactérien ».

Si elle n’aboutissait pas à la médecine, la biologie n’in- téresserait personne ! 2) tous les processus biologiques et toutes les différences entre les espèces sont le pro- duit de la sélection naturelle.

On peut constater que si l’amorce du constat est bien- veillant, la suite l’est moins. Une nouvelle Encyclo- pédie*2y est considérée comme un besoin, une page électronique extensible.

Écologiquement parlant, on ne peut protéger la nature sans montrer de l’intérêt pour la biologie : «le der- nier préjugé s’est aggravé avec le préjugé assez répandu que la biologie rigoureusement scientifique est celle de la biologie moléculaire, de la neurobiologie et de la recherche biomédicale, et non de la recherche sur l’évolution ou l’environnement.»

Quelques principes pédagogiques : enseigner du géné- ral au particulier ; aller au-delà de la biologie par croissance exponentielle des connaissances sans fossé épistémologique ; et surtout s’impliquer dans une cause qui nous dépasse.

Le goût pour la nature naît durant l’enfance. Il faut considérer l’enfant comme un « chasseur-cueilleur ».

« La biologie est maintenant la première des sciences qui reconstruisent l’image que l’homme a de lui-même.

Elle est incontournable, dépassant les autres disci- plines comme la physique et la chimie par ses décou- vertes et ses débats. Elle est centrale pour la santé humaine et la gestion de tout ce qui vit dans notre environnement. La biologie est aussi le pont logique entre les trois disciplines que sont les sciences natu- relles sociales et humaines.»

Ce livre, parmi d’autres sur la biodiversité, marche ou marchera car il ajoute du mystère et une certaine dose de mythologie à la biodiversité. Son parcours, jalonné d’histoires personnelles, de vagabondage et de récits d’exploration le rend par ailleurs très attractif.

Sauvons la biodiversité

Quelques pages

Écologie et évolution Frédéric Thomas, Jean-François Guégan, François Renaud Éditions De Boeck Université, 2007 978-2-8041-5308-3

• 39 €

LMD cours : Doctorat de biologie, Master de biologie

Reçus également à la rédaction

Biologie, 1reéd. française

P.H. Raven, G.B. Johnson, J.N.Losos, S.S. Singer Trad. fr. J.Bouharmont, P. Masson, C. Van Hove Éditions De Boeck, 2007

978-2-8041-5307-6

• 75 € Biologie végétale,

2eéd. révisée

P.H. Raven, R.F. Evert, S.E. Eichhorn

Trad. fr. J. Bouharmont Éditions De Boeck, 2007 978-2-8041-5020-4

• 85 € Analyse dans un prochain numéro

*1ONG fondée en 1987, avec pour mission de conserver l’héritage naturel de la planète.

www.conservation.org

*2Vrais dessins d’entomo- logistes à l’appui, toujours plus parlants que des photos.

13-livre279 21/06/07 13:10 Page 76

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