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Submitted on 6 Jun 2020
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Présentation du chantier marocain
Thierry Linck
To cite this version:
Thierry Linck. Présentation du chantier marocain. T0 MOUVE Lyon ISARA, 2012, Lyon, France.
pp.14. �hal-02809384�
Mouve T2
action collective
Présentation du chantier marocain
Positionnement par rapport à l'intensification écologique
Une hypothèse générale :
Le pastoralisme est abordé en tant que système intensif en travail qualifié. Il repose sur une logique qui tend à une internalisation
des risques et des coûts environnementaux .
Un pari :
Considérer le pastoralisme de l'arganeraie comme une source d'inspiration pour la conception d'innovations système.
Une question :
Ce pari peut-être porté par les actions collectives engagées dans
une dynamique d'ouverture territoriale ?
L'arganeraie :
Un système productif territorialisé
1Dans ses expressions traditionnelles, profondément ancrées dans l'histoire, les forêts de l'arganeraie sont formées d'une mozaïque de systèmes productifs organisés autour des deux éléments suivants :
Une ressource complexe : l'arbre, la végétation basse et, parfois, les cultures qui lui sont associées ;
Un couple de produits : le chevreau (qui constitue la principale source de protéines animales) et les noix dont on tire une huile pour des usages alimentaires et cosmétiques.
Ces deux éléments consituent la base d'un système structuré autour
de l'arbre : il assure la subsistance des troupeaux et des hommes. Il
structure le système productif.
Les ressources communes
L'agro-écosystème :
L'écosystème,
Les savoirs techniques,
Les savoirs relationnels (le droit coutumier, les représenta- tions collectives...).
Une posture :
Une ressource collective est un bien approprié collectivement.
Des questions :
Quelle configuration de l'appropriation collective (partage des capacités à gérer et des droits d'usage ?
Quelles modalités de construction de l'action collective ?
Quelques hypothèses sur l'action collective
Elle est construite autour d'un projet et de res-sources communes
… qui prend sens dans la production de nouvelles ressources communes.
C'est une séquence de choix collectifs
… qui présuppose et entraîne des apprentissages techniques et relationnels.
La construction de l'appropriation des ressources communes est source de tensions et de conflits
...qui induisent des recompositions et altèrent le sens de
l'action collective et conditionnent ses résultats.
Un système productif territorialisé
2Le système est structuré autour de l'arbre : il assure la subsistance des troupeaux et des hommes. Il s'agit bien d'un système productif.
La forêt de l'arganeraie est un espace aménagé (les arbres peuvent être taillés, ceraines parcelles déffrichées, d'autres sont mises en défens durant plusieurs mois, des parcours sont délimités et, selon leurs modalités
d'appropriation, entretenus) et approppriés, individuellement ou
collectivement selon un régime foncier qui relève du droit coutumier.
Le système est structuré par une organisation du travail cohérente à
l'échelle des communautés domestiques et des douars : il est difficile, à ces niveaux, de dissocier les activités de cueillette de la conduite des
troupeaux et des activités complémentaires (élevage ovin, petits élevages,
productions végétales, trituration des noix, apiculture, etc.).
Un système productif territorialisé
3 Les opérations d'aménagement de l'arganeraie sont organisées dans un cadre qui dépasse les limites des douars et des unités familiales.
Le couple de produits est de longue date associé à des filières de
transformation et de commercialisation locales. La production de chevreau n'a pu se développer qu'en s'appuyant sur les tueries villageoises, les souks et les réseaux de boucheries. La production régionale d'huile dépend pour une large part du souk pour la commercialisation des noix et
l'approvisionnement des unités (domestiques, artisanales ou coopératives) de trituration.
Le chevreau et l'huile sont des éléments structurants de « l'espace social de
l'aliment » (Poulain, 2005) propre aux territoires de l'arganeraie : ils sont
associés à des apprentissages du goût, à des préparations culinaires, à des
rituels et à des usages de consommation qui leur sont spécifiques. Sans
oublier que la sécurité alimentaire en dépend
Une entrée :
la qualification de l'origine
La qualification de l'huile d'argan (IGP acquise en 2007, labellisation Max Havelaar en 2011) et celle du
« chevreau de l'arganeraie » (en examen) s'inscrivent- elles dans la perspective d'une intensification écosystémique territoriale ?
Le couple de produits structure le système productif, les dispositifs de qualification ne concernent qu'un seul produit : la cohérence du système productif est en jeu.
Des intérêts majeurs : les industries et le marché du cos- métique ; les débouchés touristiques et urbains pour le
chevreau.
Un enjeu : L'action collective, la reconstruction des moda-
lités de l'appropriation collective de l'arganeraie.
Et donc aussi :
l'action collective
L'action collective est en quelque sorte «imposée» à la population locale sans implication réelle des acteurs, sans valorisation des savoirs locaux et sans respect pour les dispositifs coutumiers de gestion de l'arganeraie.
Les deux démarches sont descendantes. L'IGP huile d'argan tient à une initiative portée par des notables, l'administration et les industries cosmétiques. Le projet d'IGP sur le chevreau de l'Arganeraie est porté par l'Association Nationale Ovine et Caprine (ANOC) et n'associe que marginalement les éleveurs de l'arganeraie.
Les démarches de qualification ont été engagées de façon radicalement dissociées de telle sorte qu'aux synergies qui liaient la chèvre et l'arbre se sont substituées des relations de concurrence : la chèvre est aujourd'hui diabolisée et considérée comme un prédateur de l'arbre.
Dans les deux cas l'ancrage territorial est faible. Les coopératives de trituration assurent
l'essentiel de leurs approvisionnements en noix au souk. L'IGP n'est donc pas en situation
de peser sur l'organisation de la récolte des noix et l'entretien de l'arganeraie. Le projet de
cahier des charges de l'IGP chevreau ne tient pas compte des pratiques productives, des
modes de conduite des troupeaux et n'est, au final, pas en situation de prendre
efficacement en charge la défense de la chèvre.
De nouvelles formes d'appropriation et de construction des choix collectifs
L'affaiblissement de l'ancrage territorial,
la remise en cause des pratiques et des savoirs locaux, la mise en place de nouveaux circuits de valorisation et
de transformation, la substitution de dispositifs formels au droit coutumier...
nourrissent un processus de déterritorialisation.
Les deux démarches sont dissociatives. Il n'y a plus dans l'arganeraie un couple de produits, mais quatre,
plus ou moins clairement dissociés :
de l'huile destinée aux industries cosmétique, intégrée dans une filière largement pilotée par l'aval :
potentiellement, des chevreaux certifiés, commercialisés hors des
circuits traditionnels et destinés aux touristes et aux classes moyennes urbaines,
de l'huile issue des souks et des triturations domestiques, pour des usages alimentaires et cosmétiques,
des chevraux non certifiés, valorisés dans les circuits traditionnels du
souk et consommés localement.
Arganeraie (collecte et parcours) Autoconsommation,
vente directe
Trituration domestique
Tueries villageoises
Marché international
Souk
Ciruits formels du Chevreau certifié Coopératives
