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Préparer et mettre en oeuvre des projets de recherche en histoire : les premières expériences de la Maison de l'histoire de l'Université de Genève

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Préparer et mettre en oeuvre des projets de recherche en histoire : les premières expériences de la Maison de l'histoire de l'Université de

Genève

GRANDJEAN, Michel

Abstract

Première évaluation de la Maison de l'histoire, dans ses activités de fédération des historiens de l'UNIGE et de stimulation de la recherche, notamment transdisciplinaire.

GRANDJEAN, Michel. Préparer et mettre en oeuvre des projets de recherche en histoire : les premières expériences de la Maison de l'histoire de l'Université de Genève. In: Iseli, M. Für eine neue Kultur der Geisteswissenschaften? : Akten des Kongresses vom 30.

November bis 2. Dezember 2011, Bern = Pour une nouvelle culture des sciences humaines? : actes du congrès du 30 novembre au 2 décembre 2011 . Bern :

Schweizerische Akademie der Geistes- und Sozialwissenschaften, 2012. p. 27-33

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:25134

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Préparer et mettre en œuvre des projets de recherche en histoire. Les premières expériences de la Maison de l’histoire de l’Université de Genève

Michel Grandjean

Les stéréotypes opposés du physicien travaillant en équipe à la recherche d’un probable boson de Higgs et de l’historien perdu dans un abîme de solitude alors qu’il déchiffre un manuscrit médiéval relèvent à l’évidence de l’image d’Epinal. Il n’em- pêche que les sciences humaines en général et l’histoire en particulier présentent une certaine tendance à la recherche individuelle. Historiennes et historiens s’inscrivent dans des réseaux internationaux, mais demeurent – pour toutes sortes de raisons par ailleurs fort honorables – essentiellement solitaires.

L’une des conséquences négatives de cette manière de faire est souvent la méconnaissance des recherches menées par des col- lègues très proches institutionnellement ou géographiquement.

C’est là l’un des constats qui ont présidé, en 2008, au lance- ment de la Maison de l’histoire de l’Université de Genève.

Cette instance existe depuis quelques années à peine, mais on a déjà oublié qu’un historien économiste pouvait naguère igno- rer la présence, dans sa propre université, d’une unité d’his- toire de la médecine et que l’historien du christianisme aurait été bien en mal de donner le nom de ses collègues travaillant dans le champ de l’histoire de l’éducation.

Renforcer la recherche, visibiliser, soutenir la relève, fédérer…

Structure nouvelle, la Maison de l’histoire a dès l’origine reçu une impulsion décisive du recteur Jean-Dominique Vassalli, lui-même chercheur en médecine fondamentale. Les premières années de son existence ont été consacrées d’une part à son insertion dans l’organigramme universitaire – ce qui a soulevé des difficultés de divers ordres mais ne présente ici qu’un inté-

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rêt marginal – et d’autre part à la définition de ses objectifs et activités. La Maison de l’histoire est aujourd’hui largement reconnue en tant qu’unité de recherche, selon une articulation avec les Facultés (ou «unités principales d’enseignement et de recherche») qu’il a fallu définir avec attention. Elle constitue l’un des neuf pôles de développement stratégique de l’Univer- sité de Genève, à côté d’autres comme l’environnement, les relations internationales, les neurosciences et sciences affec- tives, «finance et société», «langage et communication», «vul- nérabilité et vieillissement».1

La Maison de l’histoire, qui est la seule instance discipli- naire de l’Université de Genève regroupant des chercheurs de provenances aussi diverses, entretient des relations privilé- giées avec le Département d’histoire générale de la Faculté des lettres. Son Comité scientifique comprend une quinzaine de membres provenant de la Faculté des lettres (histoire générale, sciences de l’Antiquité, langues et littératures vivantes); de la Faculté des sciences économiques et sociales (Institut Paul Bairoch); de la Faculté de théologie; de l’Institut d’histoire de la Réformation; de la Faculté de droit; de la Faculté de psycho- logie et des sciences de l’éducation; de la Faculté de médecine;

enfin de la Faculté des sciences.2

Alors qu’on la portait sur les fonts baptismaux, la Maison de l’histoire s’est donné trois buts essentiels: renforcer la recherche; rendre mieux visibles les travaux menés par les his- toriennes et historiens de Genève (diffusion d’informations, présentation de livres, manifestations publiques); soutenir la relève grâce à des projets FNS ou autres et grâce à des subsides (déplacements scientifiques, publications, etc.). Sans avoir vocation à constituer un lieu d’enseignement parmi d’autres, la Maison de l’histoire a pris depuis deux ans l’option de venir régulièrement en appui des diverses unités, essentiellement par l’invitation ponctuelle de professeurs extérieurs.

Les trois buts de la Maison de l’histoire ne se laissent pas totalement dissocier: le soutien à la relève va très étroitement de pair avec les ressources allouées à la recherche; quant à la visibilité accrue des recherches en histoire, que cette visibilité soit interne à l’Université (diffusion hebdomadaire d’informa- tions, organisation de conférences spécialisées, mise en place de séminaires de recherches destinés aux chercheurs de l’en- semble de l’Université, etc.) ou externe (conférences destinées

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au grand public, participation à des manifestations culturelles comme les Journées du patrimoine ou le Salon du livre et de l’étudiant etc.), elle concourt précisément à stimuler elle aussi la recherche.

La Maison de l’histoire de l’Université de Genève tente de fédérer les historiennes et historiens de toutes les unités en une communauté d’information, de recherche, de fraternité intellectuelle, qui s’identifie non pas à tel ou tel objet d’étude, encore moins à telle période, mais qui se reconnaît dans des démarches scientifiques, dans une rigueur méthodologique, dans une exigence de liberté et, globalement, dans un idéal humaniste. Cela étant dit, elle n’est pas une école historiogra- phique parmi d’autres, même si la question a fait l’objet de débats au moment où nous en avons dessiné les contours.

La Maison de l’histoire: de la plateforme d’échanges à la rampe de lancement

Sur le terrain spécifique de la recherche, la Maison de l’histoire s’est donné pour vocation de lancer et de soutenir des projets à dimension interdisciplinaire. Un projet est en cours de réa- lisation, deux sont en phase d’élaboration avancée. D’autres pourraient voir prochainement le jour.

En 2008 déjà, nous avions identifié quelques possibles objets d’étude. Nous avions fixé que ces objets, de nature inter- disciplinaire, comparatiste et, dans l’idéal, traversant plusieurs périodes historiques, devaient être en lien d’une part avec l’historiographie et les débats contemporains (ce qui n’exclut a priori aucune thématique mais en oriente le traitement) et d’autre part avec les attentes sociales. Sur cette base, nous avions mené une première investigation sur quelques objets, comme la construction des identités (comment se définissent les identités individuelles et collectives? comment élaborer une critique des histoires identitaires?) ou le tolérable et l’in- tolérable (comment s’articulent, dans telle situation historique, le respect de la norme et la liberté de la pensée et de l’action?), ou encore la fabrique des savoirs.

C’est ce troisième objet d’études qui allait prendre son envol, avec une requête présentée début 2009 au FNS (Sinergia), sous le titre «acteurs de la fabrique des savoirs et

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construction de nouveaux champs disciplinaires». Un appel à participation a été largement diffusé au sein de l’Université, appel auquel ont répondu de nombreux chercheurs (certains déjà constitués en équipes). Une première évaluation, interne, a permis de retenir certains projets et de suggérer des regroupe- ments. Au final, le programme soumis au FNS, et intégralement accepté par lui, comprend, sous la direction de Michel Porret (Faculté des lettres) comme requérant principal, six équipes de recherches, qui travaillent en parallèle et organisent régulière- ment des séminaires transversaux (dans lesquels sont souvent invités des intervenants extérieurs). Dirigent ainsi chacun un volet du programme:

– le prof. Philippe Borgeaud (Faculté des lettres), sur la construction d’un savoir pré-académique sur le reli- gieux et sur la naissance de l’histoire des religions, – le prof. Michel Porret, sur le passage des savoirs

diffus aux savoirs constitués dans le cadre des normes judiciaires, médico-légales et politiques au temps de Lumières,

– la prof. Rita Hofstetter (Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation), sur la fabrique des savoirs dans le champ pédagogique (19e-20e siècles),

– le Dr Marc Ratcliff (Faculté de psychologie et des sci- ences de l’éducation), sur la construction du champ psychologique à Genève (1875-1975),

– le prof. Jan Lacki (Faculté des sciences), sur l’émer- gence et le développement des sciences physiques théoriques en Suisse romande (1870-1970),

– la prof. Kristine Bruland (Faculté des sciences écono- miques et sociales), sur la création et l’utilisation des savoirs utiles dans les petites économies européennes en voie d’industrialisation.

Le caractère diversifié de ce programme de recherches ne constitue pas le moindre de ses défis: y travaillent en effet six équipes, qui regroupent des chercheurs de quatre facultés diffé- rentes, ce qui est probablement un cas unique à l’Université de Genève. Il court sur trois ans (2010 à 2012) et a déjà débouché sur plusieurs publications. Une dizaine de thèses sont en outre en préparation, ou ont été récemment soutenues, en lien étroit avec la «fabrique des savoirs».

Michel Grandjean

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Deux autres programmes transdisciplinaires sont aujourd’hui très avancés. Il s’agit en premier lieu d’un vaste chantier (au sens propre comme au figuré) qui s’est ouvert sous la direction du professeur Lorenz Baumer (archéologie classique, Faculté des lettres). Sous le titre «Crotone, cité antique et ville médiévale.

Religion, territoire, environnement», en lien avec l’Office ter- ritorial de Crotone (Calabre), plusieurs axes de recherche sont prévus: la notion de territoire dans les fondations coloniales grecques, l’urbanisme et la culture proto-urbaine (L. Baumer);

l’étude des sites pré- et protohistoriques (prof. Marie Besse, Faculté des sciences de l’Université de Genève); l’histoire culturelle et religieuse de Crotone du début de l’âge du fer à la fin de l’empire romain (prof. Thomas Späth, Université de Berne); la linguistique historique (inscriptions, etc.) (prof.

Rudolf Wachter, Universités de Bâle et de Lausanne). Ce projet, du moins pour l’un de ses principaux volets, vient d’être soumis au FNS.

En second lieu, sous la direction des professeurs François Walter et Matthias Schulz (Faculté des lettres), un programme intitulé «Global Environmental Governance» est également en phase de consolidation (une première partie a déjà été sou- mise). Ce projet se donne comme terminus a quo les origines de la conscience d’une nécessité de gérer au plan international la protection de la nature, dans les années 1910. Il se déploie à la croisée de problématiques très présentes à Genève, l’inter- national et l’environnement. Sont prévues des études de cas de diverses organisations internationales, de la Société des Nations à l’UNESCO, la FAO, le WHO, en lien avec des poli- tologues.

Sans recourir à l’abominable néologisme de «projectisa- tion», la Maison de l’histoire s’est toujours efforcée d’appuyer, tant sur un plan intellectuel que logistique, la mise en œuvre de projets de recherche. Elle a déterminé les lignes directrices du programme «fabrique des savoirs», suscité des contributions, suggéré des synergies mais elle n’intervient en rien, en tant que telle, dans la marche même des travaux: une fois mis sur orbite, un projet de recherche doit pouvoir voler de ses propres ailes.

De la même façon, elle fournit une assistance scientifique et administrative à la réalisation des projets «Crotone» et «Global Governance», par l’intermédiaire d’ajointes scientifiques qui ont pu être engagées à temps partiel pour préparer les dossiers,

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mais elle n’entend pas non plus intervenir, en tant que telle, dans le déploiement des recherches.

Effets bénéfiques?

La structure somme toute très légère dont l’Université de Genève s’est dotée avec la Maison de l’histoire offre de mul- tiples avantages, à commencer par la mise en réseau des cher- cheurs. Ni la «fabrique des savoirs», ni «Crotone», ni «Global Governance» n’auraient probablement pu voir le jour sous cette forme puisque chacun de ces projets met en œuvre, à des degrés divers, une perspective comparative et interdiscipli- naire qu’il aurait été difficile d’envisager sans une plateforme comme la Maison de l’histoire. A titre d’hypothèse, car il est à l’évidence trop tôt pour penser une évaluation approfondie, l’un des premiers effets bénéfiques de cette structure, sur le plan de la conception même des recherches, est probablement la prise de conscience de l’intérêt des «enjeux d’échelles», dans la mesure où les focales de recherche sont différentes:

ainsi, le travail sur des objets en apparence très locaux (comme l’émergence de la psychologie à Genève) enrichit les problé- matiques des équipes qui travaillent sur des objets plus larges.

A l’inverse, il faut reconnaître que, comme c’est le cas aujourd’hui pour toute structure académique occidentale, nous souffrons de l’alourdissement quasi pathologique des procé- dures administratives: quand bien même chacun fait preuve de bonne volonté pour réduire les démarches, chaque dossier implique une masse de travail administratif qui pourrait décou- rager des esprits moins convaincus. Sans un adjoint, employé à plein temps et que les tâches courantes détournent presque entièrement de ses propres activités de recherche, la Maison de l’histoire ne pourrait ni organiser de conférences, ni assu- mer le suivi des engagements (contrats de travail), ni inviter des professeurs extérieurs, ni gérer un budget. Elle ne pourrait donc pas apporter sa contribution à la mise en œuvre de projets de recherches.

Michel Grandjean

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Conclusion

Outil mis au service de la communauté des historiennes et historiens de Genève, et tout particulièrement des jeunes chercheurs, la Maison de l’histoire exerce sur les thèmes et méthodes de recherche une influence qu’il est encore difficile de mesurer. Il se pourrait qu’on lui reconnaisse un jour d’avoir contribué à mettre en place un réflexe interdisciplinaire et d’avoir innové en permettant à des chercheurs de cultures et d’horizons intellectuels variés de s’asseoir à une même table et de défendre, au-delà de leurs divergences d’approches et de méthodes, une identité commune et une même passion.

Notes

1 Cf. Une vision pour 2020. Plan stratégique de l’UNIGE, édition 2011 (brochure, disponible à l’adresse http://www.unige.ch/rectorat/static/plan_strategique.

pdf). Informations complémentaires sur la Maison de l’histoire à l’adresse http://www.unige.ch/rectorat/maison-histoire/index.html.

2 Seule la Faculté de traduction et d’interprétation n’est pas représentée dans ce Comité.

Références

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