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Les robots sexuels : Objets auto-érotiques, fétiches ou nouvelle forme d'objets transitionnels pour adultes ?

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-02497286

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02497286

Preprint submitted on 3 Mar 2020

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Les robots sexuels : Objets auto-érotiques, fétiches ou nouvelle forme d’objets transitionnels pour adultes ?

Bertrand Tondu

To cite this version:

Bertrand Tondu. Les robots sexuels : Objets auto-érotiques, fétiches ou nouvelle forme d’objets tran-

sitionnels pour adultes ?. 2020. �hal-02497286�

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Les robots sexuels : Objets auto-érotiques, fétiches ou nouvelle forme d’objets transitionnels pour adultes ?

Bertrand Tondu

Université Fédérale de Toulouse, INSA, Campus de Rangueil, 31077 Toulouse email : bertrand.tondu@insa-toulouse.fr

Résumé : Comment caractériser le statut objectal du robot sexuel ? Bien que son anthropomorphisme global, fondé sur son hyper-réalisme, lui confère une réalité incontestable, nous cherchons à montrer que son mode d’existence est flottant soit comme dispositif auto- érotique dont le rôle serait de fermer le corps du sujet sur lui-même de manière plus élaborée que par l’usage d’un sex-toy ou d’une sex-machine ; soit, encore, comme fétiche lorsqu’il s’agit d’une sex doll privée de ses organes génitaux, figure muette a-sexuée qui renvoie, notamment, le sujet masculin à ses rêveries de femme inaccessible et donc intouchable ; soit, enfin, comme objet transitionnel, touchable, soignable, ré-confortable mais qui place le sujet dans une zone d’illusion où, selon les termes mêmes de Winnicott, le sujet est mis en danger de démence.

Abstract : How to characterize the object status of the sex robot? Although its global anthropomorphism, based on its hyper-realism, gives it an indisputable reality, we seek to show that its mode of existence is floating either as an auto-erotic device whose role would be to close the subject's body on itself- even in a more elaborate way than by the use of a sex toy or a sex machine; or, again, as a fetish when it comes to a sex doll deprived of its genitals, dumb a-sexual figure which refers, in particular, the male subject to his dreams of an inaccessible and therefore untouchable woman; or, finally, as a transitional, touchable, treatable, re-comfortable object that places the subject in an area of illusion where, according to Winnicott's very words, the subject is in danger of dementia.

Le terme de robot appartient, à la fois, au domaine de la science-fiction, depuis sa

création par Karel Capek et sa popularisation par Isaac Asimov, et au domaine de la technologie

depuis l’apparition des premiers-télémanipulateurs après la seconde guerre mondiale et

l’introduction des robots industriels dans les usines automobiles, notamment, aux alentours des

années 1980. Ces deux réalités, littéraire d’une part, technologique et industrielle d’autre part,

se sont progressivement disjointes avec les avancées de la robotique scientifique. Le concept

de robot sexuel a récemment remis en cause la séparation entre ces deux modalités,

fantasmatique et technique : le robot sexuel peut, en effet, être perçu comme un dispositif

technologique qui réaliserait la fiction de l’amant/amante artificiel/le telle qu’on la rencontre

dans certaines scènes de Barbarella imaginées par Jean-Paul Forest (Fig. 1). Techniquement

parlant, le robot sexuel est encore loin de pouvoir prétendre aux performances dignes des éloges

de l’héroïne Barbarella, mais la technologie robotique est suffisamment présente dans nos

sociétés pour que le fantasme s’installe ; ainsi, au tournant des années 2010, la société

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2 américaine True Companion annonçait, sur son site web de l’époque, avoir conçu Roxxxy, pour sa version féminine, et Rocky, pour sa version masculine, deux robots humanoïdes censés pouvoir devenir de véritables « loving friends » ; « She can even have an orgasm », précisait le site. La présence de Roxxxy au salon Adult Entertainment Expo de Las Vegas, en 2010, a suscité un véritable intérêt médiatique – voir, par exemple, Svensson (2010) – bien que certains experts n’y voyaient que supercherie (Levy, 2013).

Figure 1. Le robot sexuel Barbarella (redessiné d’après l’image originale de la bande dessinée de J.-C. Forest reprise par Jasia Reichardt (1978, page 82).

Toujours est-il que la possibilité d’un tel marché, comme l’apparition, cette fois-ci indéniable, du marché des « sex dolls », dont nous préciserons plus loin les spécificités, ont entraîné de larges débats entre opposants radicaux à cette nouvelle forme de technologie sexuelle, à travers, par exemple, le mouvement féministe anti-robots sexuels initié par Kathleen Richardson (2016) et optimistes béats qui envisagent très sérieusement de pouvoir se marier dans un futur proche avec un robot sexuel (Levy, 2007). Récemment, un certain nombre de philosophes et spécialistes de l’éthique ont abordé la question du consentement entre humains et robots sexuels (Danaher et McArthur, 2018) et les conséquences d’un usage des robots sexuels sur les tendances masculines au viol et à la pédophilie (Danaher, 2014).

Ces études sont, généralement, le fait de non-roboticiens pour qui le robot sexuel est une

machine postulée plutôt que réalisée et même réalisable : David Lévy, l’auteur même du livre

de référence Love+Sex with Robots n’est pas roboticien mais spécialiste du dialogue

homme/robot. Au-delà de la difficulté à prédire le futur d’une telle technologie robotique, les

analyses éthiques proposées laissent de côté toute question psychologique dans la possible

relation humain-robot sexuel du fait, notamment, d’un manque de données de terrain et d’un

certain désintérêt des psychologues pour un domaine encore mal cerné. Cet article a pour

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3 objectif de tenter de définir un cadre d’étude psychologique de ce que l’on pourrait oser appeler une robotique sexuelle à partir de ce qu’elle est actuellement. Pour ce faire, nous proposons de privilégier une lecture analytique de la relation humain/robot faisant appel aux notions d’auto- érotisme, de fétichisme et d’objet transitionnel. Mais, auparavant, du fait d’un certain flottement actuel sur la définition du robot sexuel, nous allons tout d’abord chercher à la préciser.

1. L’anthropomorphisme global du robot sexuel :

Alors que les dispositifs de satisfaction sexuelle, communément appelés sex toys, se

limitent, généralement, à des outils d’excitation génitale (vibro-masseur, etc…), ou à des

dispositifs mimant les organes génitaux (godemiché, buste moulé incluant un orifice vaginal,

etc…), le concept de robot sexuel se veut être une représentation globale du corps humain et

c’est là sa profonde originalité. On peut, dans ce contexte, opposer un anthropomorphisme

global, propre aux robots sexuels qui prennent l’apparence d’un véritable être humain, de sexe

féminin ou de sexe masculin, à un anthropomorphisme local des sex-toys mimant une sphère

génitale plus ou moins étendue, voire au non-anthropomorphisme d’un certain nombre d’entre

eux, dont le plus marquant est sans doute le vibro-masseur auquel Rachel Maines (1999) a

consacré un livre pour en décrire l’évolution technique tout au long du XXème siècle. Cette

opposition a été, selon moi, trop peu soulignée dans la réflexion sur la nouvelle place que

cherche à prendre la robotique sexuelle au sein des technologies dites sexuelles. Rappelons que

la technologie des machines et, plus particulièrement, celles destinées à remplacer l’homme

dans ses tâches quotidiennes, se sont, pour des raisons d’efficacité, progressivement éloignées

de l’anthropomorphisme : le cas de la machine à laver est particulièrement frappant de ce point

vue là – voir, par exemple, le travail classique de Giedion (1970). Et c’est, d’une certaine

manière, parce qu’il est particulièrement difficile de concevoir une main robotisée que le vibro-

masseur substitue au mouvement de caresse du doigt sur le clitoris un simple système de

vibration, voire une stimulation sans contact avec les nouveaux modèles développés par la

société womanizer avec, pour conséquence, une efficacité qui peut même s’avérer supérieure à

celle de la main humaine (Prause et al., 2012) ; certains dispositifs assurent même des modes

d’excitation difficilement réalisables lors du coït, comme la double stimulation clitoridienne et

vaginale réalisée par le fameux rabbit, popularisé par la série Sex and the City. Ce que l’on

appelle sex-machine est un autre exemple particulièrement intéressant de renoncement à

l’anthropomorphisme pour faire, à moindre coût, mieux que le corps humain. Une sex-machine,

dont nous proposons Fig. 2 un schéma fonctionnel, est, d’une certaine manière, un anti-robot

sexuel : le mouvement de va-et-vient de son godemiché est produit par un système bielle-

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4 manivelle – archétype s’il en est du génie mécanique humain – entraîné par un simple moteur électrique dont la vitesse réglable assure pour son utilisateur/utilisatrice le contrôle du rythme.

Les quelques robots sexuels mâle du commerce, comme le robot Henry de la marque Realbotix (https://www.realdoll.com), ou les robots plus frustes que l’on peut trouver sur le site alibaba, proposent l’usage d’un pénis artificiel en érection mais celui-ci ne peut, pour le moment tout au moins, être animé d’un mouvement coïtal tant un tel mouvement chez l’homme engage en fait tout le système musculo-squelettique pour combiner la maîtrise d’un mouvement d’avant en arrière tout en assurant l’équilibre du corps, chose d’autant plus difficile si la surface des support est mouvante. La sex-machine, en combinant rigidité et précision de son mécanisme rigide avec la souplesse du godemiché, réussit cet exploit d’automatiser à faible coût un mouvement particulièrement intime et lui donne même une vigueur qu’aucun humain ne peut fournir, voir la possibilité de mouvements sexuels non prévus par la nature comme la quasi-surréaliste double pénétration proposée par certaines marques (voir, par exemple, le modèle proposé par la société Américaine Hismith).

Figure 2. Schéma fonctionnel d’une sex-machine : le système bielle-manivelle motorisé génère le mouvement de va-et-vient du godemiché que le sujet peut contrôler manuellement à la manière d’un télé-manipulateur.

D’une certaine manière, le défi de la robotique sexuelle consiste à réintroduire la forme humaine et, notamment, le visage humain au sein même de cette technologie sexuelle. Elle y parvient en tirant parti des possibilités actuelles de moulage de structures souples sur un squelette rigide articulé, dont la mise en position doit permettre de mimer différentes positions sexuelles. Cette variété des positions amoureuses du robot dépend, bien sûr, de la complexité articulaire propre au squelette du robot, qui varie selon les marques, mais, à l’exception de rares

système bielle-machine actionné par moteur électrique

godemiché

contrôle

manuel sujet récepteur

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5 tentatives à l’efficacité douteuse, la motorisation de ces articulations en est toujours à l’état de projet. De ce point de vue, le robot sexuel s’apparente plus, mécaniquement parlant, à un mannequin d’atelier grandeur nature qu’aux robots humanoïdes actuels dont on sait combien il est toujours difficile de les faire marcher sans risque de chute, comme de les munir de mains aptes à mimer la diversité des prises humaines. Il est, cependant, intéressant de remarquer que, bien que le public visé soit essentiellement masculin, la passivité actuelle du robot sexuel peut finalement s’adapter aux deux sexes dès le moment où une position est choisie dans laquelle le robot joue le rôle du partenaire sexuel passif. La différence entre le robot sexuel et le mannequin d’atelier réside alors, d’une part, dans sa pseudo-enveloppe charnelle et, d’autre part, dans l’adaptation à cette enveloppe d’artéfacts d’organes génitaux dérivés de la technologie classique des sex-toys. Quant à l’apparence externe du robot sexuel dérive, elle dérive d’un certain art de la statue hyperréaliste profitant, dans les années 70-80, des nombreuses possibilités de moulage offertes par la diversité des caoutchoucs synthétiques pour mimer les nuances et la souplesse de la carnation humaine (Mat MacMullen, créateur de la société Abyss Creations, à l’origine des premiers robots sexuels Américains, est justement issu de ce courant artistique). Mais, à la différence d’une statue hyperréaliste, le robot sexuel n’est pas destiné – sauf peut-être dans un usage fétichiste que nous aborderons plus loin – à disposer d’un socle. Lourd de plusieurs dizaines de kilogrammes, et ne possédant pas actuellement d’autonomie de déplacement, il est finalement un objet qui, après avoir été monté s’il est livré en plusieurs pièces, ne peut reposer que dans une position avachie dans un canapé, ou allongée sur un lit. Son statut d’objet transitionnel, que nous étudierons également plus loin, ne serait pas sans lien avec ce manque de maintien. Deux approches s’opposent alors dans le développement de ces corps sexués artificiels : une première approche qui fait de cette immobilité la caractéristique essentielle d’un dispositif que l’on dénommera love doll – toujours au singulier – en référence aux love doll japonaises dont Agnès Giard (2016) a récemment fait une remarquable synthèse, une deuxième approche, que l’on pourrait qualifier de véritablement robotique, selon laquelle les difficultés actuelles de la robotique humanoïde finiront par être dépassées pour être adaptées à un robot sexué et qui, faute de pouvoir actuellement motoriser le robot-sexuel, cherche à lui donner la parole. La société Américaine Realbotix, branche de la société Abyss Creations, de MacMullen a été justement créée en 2017 « with the goal of integrating robotic components and artificial intelligence into high ended silicone dolls » (Lindroth, 2019). Harmony est le fruit d’une telle intégration d’intelligence artificielle dans un corps de love doll : présentée au public par son

« AI/content director », elle apparaît assise, répondant avec application aux questions qu’il lui

pose, en tournant légèrement la tête vers son interlocuteur (idem); Harmony peut aussi tirer la

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6 langue mais elle ne peut pas se lever de sa chaise et encore moins suivre son propriétaire pour poursuivre cette discussion au lit. Le robot sexuel d’aujourd’hui soit donc se mure dans le silence de la love doll à la bouche définitivement close oi, dans l’attente d’être portée au lit, se fait bavarde sans que son interlocuteur-trice sache vraiment qui la pousse à maintenir le dialogue. Il y a dans ces robots sexuels quelque chose de l’Hadaly de L’Eve future (1886) au sujet de laquelle Villiers de l’Isle Adam écrivait, pour justifier les limites de la

“programmation” du dialogue avec son Andréide : “En vérité, tout, je vous assure, peut, absolument, répondre à tout : c’est le grand kaléidoscope des mots humains. Étant donnés la couleur et le ton d’un sujet dans l’esprit, n’importe quel vocable peut toujours s’y adapter en un sens quelconque, dans l’éternel à peu près de l’existence et des conversations humaines”

(page 187). Mais, même si Harmony ou les Japonaises les plus sophistiquées ne sont pas capables d’aller à la rencontre de Lord Ewald dans le parc de la propriété d’Edison pour lui déclarer un amour sincère (chapitre « Par un soir d’éclipse » du livre sixième de L’Eve future), elles imposent néanmoins à leur propriétaire une présence sensible dont l’acceptation – au sens de non-rejet comme un corps vivant ne rejette pas un implant – ne va pas de soi.

2. Au-delà de l’inquiétante étrangeté

C’est aux tous débuts de la robotique scientifique que Masharito Mori (1970) publie, en

Japonais, et dans l’une de ces revues que l’on dit obscures, un texte dont le titre

original « Bukini no tani gensho » est généralement traduit en anglais par « The uncanny

valley » et en français par « La vallée de l’étrange ». Dans ce texte, Mori défend l’idée selon

laquelle la présence d’une machine dont la ressemblance avec l’humain est trop poussée peut

provoquer un sentiment de malaise d’autant plus marqué que l’objet est mobile. Mori exprime

son intuition dans deux schémas qui dessinent, chacun, une « vallée de l’étrange » dont les

fonds sont, respectivement, marqués par deux figures de la répulsion : le cadavre dans le cas de

l’immobilité, le zombie dans le cas du mouvement (voir Fig. 3). C’est à l’occasion de la sortie

des premiers films d’animation entièrement numériques, comme Polar Express en 1984, qui

ont parfois provoquées de fortes réactions de rejet de la part du public comme de la critique,

que les idées de Mori, totalement oubliées jusqu’alors, ont refait leur apparition dans le domaine

scientifique et sont toujours discutées au sein de la communauté des spécialistes de robotique

humanoïde (Ho MacDorman, 2010), (Tondu, 2012). Curieusement, cette question d’un

éventuel sentiment de malaise suscité par la présence d’une structure artificielle hyper-

anthropomorphe ne semble guère avoir été prise en compte par les fabricants de robots sexuels

qui ne mentionnent pas ce risque sur leurs sites commerciaux. Une manière d’appréhender cette

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7 apparente exception des robots sexuels à la théorie de Mori peut consister à rapprocher l’idée Japonaise de « Bukini no tani gensho » de la notion Jentscho-Freudienne d’« unheimliche ».

Nous avons gardé, dans le titre de cette section, l’expression française d’inquiétante étrangeté,

due à Marie Bonaparte, plutôt que l’expression d’« inquiétant » qui a été retenue dans la

nouvelle traduction de l’essai Freudien mais qui rend, selon nous, moins bien compte de cette

rencontre entre la pensée occidentale analytique et l’intuition de Mori. Rappelons l’une des

conclusions de l’essai de Freud (1919, page 184) dans sa nouvelle traduction française: « Notre

résultat s’énoncerait alors : L’inquiétant dans l’expression de vie se produit lorsque des

complexes infantiles refoulés sont ramenés à la vie par une impression, ou lorsque des

convictions primitives surmontées paraissent de nouveau confirmées » et, parmi les formes de

refoulés les plus intimes, la crainte de la mort occupe une place prépondérante : « Ce qui paraît

au plus haut degré inquiétant à beaucoup d’êtres humains est ce qui est en corrélation avec la

mort, les cadavres et le retour des morts, les esprits et fantômes » (idem, page 175). Dans ce

contexte, cadavre et zombie, au fond de la vallée de l’étrange, joueraient le rôle de figures du

refoulé particulièrement effrayantes. Cependant, toujours dans ce contexte Freudien, on

pourrait émettre l’hypothèse que la pulsion sexuelle ne serait pas troublée par le refoulé de la

peur de la mort car, pour l’homme tout au moins, elle serait fondée sur une volonté

fondamentale de transgression, que Freud a presque honte à nous avouer : « Ce que je vais dire

est déplaisant à entendre et au surplus paradoxal, mais on est pourtant forcé de le dire : pour

être, dans la vie amoureuse, vraiment libre et, par-là, heureux, il faut avoir surmonté le respect

pour la femme et s’être familiarisé avec la représentation de l’inceste avec la mère ou la sœur »

(Freud 1912, page 61). La violence subie par les robots sexuels est toujours soulignée avec

étonnement (voir plus loin, le cas de cet étudiant asiatique qui a abimé sa real doll comme s’il

avait voulu mimer une série de crimes sexuels). Le même phénomène se produit dans ce que

Giard appelle des « bordels de poupées » au sujet desquels elle écrit : « Il s’avère que les clients

reviennent rarement. L’état des « filles » les horrifie : elles sont couvertes d’égratignures, voire

pire » (page 105). Le porte-parole de la société Canadienne Aura Dolls, un bordel de poupée

directement inspiré de l’expérience Japonaise, souligne que son établissement est, notamment,

adapté à certains hommes frustrés avec des tendances violentes : « We try to focus on the fact

that since we have this service, for men who have these dark, violent fantasies, instead of putting

out the urge to act aggressively, they can do something like this which is safe for everyone »

(Da Silva, 2018). Celui ou celle qui assouvit sa pulsion sexuelle avec un robot ne serait donc

pas concerné par l’avertissement de Mori ; la transgression suspendrait le risque de retour du

refoulé et, plus particulièrement, celui relatif aux idées de mortalité – elle la suspendrait mais

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8 ne l’annulerait pas comme nous le rappelle ce vers d’Eluard, cité par Xavière Gauthier (1971, page 135) : « En pleine chair je conjuguais sperme et squelette ».

Et, pourtant, Giard, note encore : « il semble en effet que de nombreux clients soient perturbés par la tête de leur love doll lorsque, se réveillant dans la nuit, ils la voient fixer le plafond ou leur visage avec une intensité inquiétante » (page 128). Ce serait, selon elle, pour cette raison que : « Pratiquement, toutes les firmes possèdent en catalogue au moins une poupée surnommée me toji (« aux yeux fermés ») ou tsamuri me (« aux yeux clos ») (page 128).

L’intensité inquiétante dont parle Giard n’est-elle pas celle du cadavre de celui ou de celle qui vient de mourir ? Et il suffirait, alors, de fermer les yeux de ce visage figé pour que la sérénité de celui ou celle, avec qui le robot partage son lit, soit retrouvée. De cette manière, et en dehors de l’acte sexuel, la love doll échapperait encore à la loi de Mori. On pourrait même se demander si, pour certains et dans certaines conditions, la love doll ne serait pas ce point indéfini que Mori trace sur sa courbe avant qu’elle ne plonge dans la vallée de l’étrange (voir Fig. 3).

Figure 3. Courbe de Mori où la love doll pourrait être interprétée comme un maximum local.

Il y a, en effet, une recherche d’optimalité dans la love doll que Giard exprime ainsi : « les fabricants sont unanimes : ils n’essayent pas de reproduire mais de « créer » un humain. […]

Même dotée de grains de beauté, cette enveloppe doit garder l’aspect factice, irréel, d’une créature de rêve » (page 132). « Nos poupées n’ont rien à voir avec les mannequins de cire de Madame Tussauds » rapporte encore Giard lors d’une interview d’un fabricant de love doll et l’on peut imaginer que Mac Mullen dirait de même de sa poupée Harmony. A cet

100%

Ressemblance

Fa mil ia ri té

100%

0

Êtres humains Choses

personne jeune et en parfaite santé

love doll/robot sexuel capable de locomotion ?

cadavre humain

zombie

: choses/êtres immobiles : choses/êtres mobiles

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9 anthropomorphisme sublimé correspondrait ainsi un maximum local de familiarité varaible, cependant, avec l’époque : « Six ans plus tard, écrit encore Giard, Tsuchiya [l’un des responsables de la firme d’Orient Industry] prend conscience qu’au marché des quinquagénaires dont il voulait apaiser les douleurs en 1977 s’est superposé celui d’une nouvelle génération de consommateurs, amateurs de lolitas et de fantaisies, qui ont grandi avec les dessins animés » (page 94). Mais au service de quelle forme d’auto-érotisme rattacher de tels objets ?

3. Le pseudo-érotisme du robot sexuel

Le terme d’autoérotisme est introduit par Havelock Ellis dès 1898, avant que Freud ne le reprenne dans son essai sur la sexualité infantile. Selon Havelock Ellis, l’autoérotisme est l’ensemble des « phénomènes d’émotion sexuelle spontanée produits dans l’absence de tout stimulus externe soit direct, soit indirect » (Ellis, 1898, page 163). Freud reprend le terme, sans le définir précisément, dans son analyse sur le suçotement infantile, exemple type d’activité autoérotique dont « le caractère le plus frappant » est « que la pulsion n’est pas dirigée vers d’autres personnes ; elle se satisfait dans le corps propre de l’individu » (Freud, 1905d, page 104). Et parce que cet auto-érotisme est purement infantile, Freud semble dissocier cette notion de la masturbation comme il l’exprime indirectement dans ce passage célèbre : « Eu égard aux manifestations sexuelles autoérotiques et masturbatoires, on pourrait formuler la thèse suivante : la sexualité des petites filles a un caractère entièrement masculin » (idem, page 162).

Est-ce pour se distinguer d’Havelock Ellis, comme il le fera plus tard avec Jentsch pour le

concept d’« unheimliche » que Freud écarte la masturbation de l’autoérotisme ? Toujours est-

il que, dans leur Vocabulaire de la Psychanalyse, Laplanche et Pontalis incluent clairement la

masturbation dans le « sens large » de l’autoérotisme qu’ils définissent ainsi : « caractère d’un

comportement sexuel où le sujet obtient la satisfaction en recourant uniquement à son propre

corps, sans objet extérieur : en ce sens, on parle de la masturbation comme d’un comportement

autoérotique » (page 42). Or, pour revenir à Havelock Ellis, sa quête pour établir le caractère

universel de la masturbation l’amène à souligner certaines coutumes locales qui se caractérisent

a-contrario par l’usage de dispositifs techniques extérieurs donc au corps du sujet : il prétend

ainsi que « ce sont les Japonaises qui ont porté à son plus haut degré de perfection

technique l’autoérotisme » (page 168) en développant l’usage des balles dites rinnotama que le

roman de Erika Leonard James Cinquante Nuances de Grey a remis au goût du jour sous

l’appellation de boules de geisha. De manière plus générale, l’histoire des techniques nous

révèle qu’il a toujours existé un auto-érotisme masturbatoire masculin comme féminin fondé

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10 sur le recours à l’outil et même que toute machine au comportement répétitif est potentiellement dispositif de jouissance comme la machine à coudre pour certaines ouvrières du XIXème siècle ou la bicyclette largement commentée par Ellis (idem, page 176). Dans ce contexte, on pourrait affirmer que la sex-machine, que nous avons introduite à la section 1, est conforme à la définition initiale de l’auto-érotisme selon Ellis si l’on considère que sa forme neutre ne génère pas de « stimulus externe ». Par opposition, le robot sexuel combinerait l’outil masturbatoire de ses vagins artificiels et godemichés avec la source d’excitation externe de sa plastique faite à l’image de certains canons de beauté censés être particulièrement excitants sur le plan sexuel.

Peut-on alors encore parler d’auto-érotisme dans le cas des robots sexuels ?

Pour tenter de répondre à cette question, nous proposons d’en appeler à la définition de l’autoérotisme selon Gillibert pour qui l’autoérotisme serait « un érotisme impliquant ici le moyen de jouir et non l’objet utilisé pour la jouissance » (pages 788-789). L’intérêt de cette redéfinition consiste dans le nouveau statut donné à l’objet dans l’auto-érotisme. Dans son commentaire du texte de Gillibert, Jean Bégoin (1977) rappelle que « la théorie Freudienne de l’auto-érotisme n’implique en rien un état primitif objectal » (page 963) car, citant Laplanche et Pontalis, l’objet externe « sein maternel » a tout simplement précédé dans la pulsion sexuelle

« le suçotement dont Freud fait le modèle de l’auto-érotisme » (page ??). Et, au sujet de ce même suçotement, Jean Bégoin affirme : « celui-ci n’est finalement anobjectal que d’un point de vue extérieur […]. Mais il exprime en fait l’intériorisation de la relation perdue avec cet objet externe » (idem, page 964) que serait le mamelon. C’est cette façon de résoudre le problème objet externe/objet interne propre à l’auto-érotisme qui ferait écrire à Jean Gillibert :

« La question ne se pose plus de savoir si l’auto-érotisme est encore objectal ou anobjectal : il

est les deux » (cité par Jean Bégoin, page 964). Appliqué à la question du robot sexuel, la théorie

de Gillibert conduirait à donner au robot un statut d’objet dont la nature serait flottante : de

même que le pouce de l’enfant peut prendre et perdre instantanément sa nature d’objet auto-

érotique, de même un robot sexuel pourrait pendant son usage se faire oublier en tant qu’objet

et laisser le sujet seul avec son propre corps. Dans un court article sur l’auto-fellation Gillibert

(1968) rapporte le fantasme de certains de ses analysés « durant l’enfance ou l’adolescence,

d’avoir eu l’envie de [se] sucer la verge, de l’avoir essayé » (page 31). Ce fantasme d’auto-

fellation, Gillibert l’interprète comme « un désir de poser le corps comme inaccessible

érotiquement à un autre corps » (idem, page 32). Le recours à un robot sexuel n’a, a-priori, rien

à voir avec un tel fantasme mais l’on peut se demander si ce qui le distingue de l’usage d’un

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11 simple sex-toy ne serait pas justement un désir similaire de « bouclage sur soi » (idem, page 33), rendu possible par l’ambiguité objectale/anobjectale du robot sexuel.

Cependant, l’hyper anthropomorphisme du robot sexuel se fait au prix, nous l’avons vu, d’une prise de poids importante en comparaison, par exemple, avec les poupées gonflables et, même si un jour le robot sexuel existera avec une motorisation qui lui donnera une mobilité d’une grande aisance, sa réalité objectale s’imposera par un « indice corporel » finalement assez proche de celui d’un corps humain de même taille et corpulence. C’est cette nature objectale irréductible qui nous conduit à nous demander si, débordant sa nature autoérotique, le robot sexuel ne pourrait pas aussi acquérir une nature fétichiste.

4. Un fétichisme en accord avec la théorie Freudienne ?

Dans sa récente analyse des fétichismes, Véronique Bergen (2016) émet l’hypothèse selon laquelle : « le fétiche résout le conflit de l’imagination flamboyante et de la perception déceptive en condensant l’alliance d’un imaginaire réalisé, actualisé et d’un réel transi d’imagination magique » (page 46) et elle cite notamment à l’appui de cette thèse le passage suivant du livre que Nicolas Grimaldi (2008) a consacré à Proust : « Cent fois nous avons déjà caractérisé la cause de toute déception. Elle vient à chaque fois de l’irréductible hiatus qui nous empêche de jamais trouver dans la réalité extérieure de ce que nous percevons l’intensité que nous avait fait pressentir ce que nous en avons intérieurement imaginé. […]. Tout le malheur de la conscience vient donc de ce que le monde est aussi inhospitalier à nos attentes que toute perception est irréductible à ce que nous avons imaginé » (Bergen, 2016, page 46). Si, effectivement, « la réalité ne cesse de blesser ou de décevoir, le fétiche indexe la réalité d’une magie qui la transfigure » (idem, page 46) et, en conséquence, le robot sexuel, sous la forme d’un corps dont on a pu choisir tous les attributs peut alors devenir un substitut particulièrement appréciable d’une réalité sociale où l’expérience amoureuse ne peut qu’être décevante. Agnès Giard, dans le dernier chapitre de son livre qu’elle intitule « La thérapie de contact » souligne l’importance pour son propriétaire de la love doll qui « attend » à la maison : « cette présence

‘en attente’, dont la vie reste suspendue aux soins que peut lui apporter son ‘maître’, possède

un pouvoir de guérison tel que l’expression ‘la poupée qui soigne’ (iyashi no ningyô) revient

de façon récurrente sur les sites qui lui sont consacrées » (page 257). Fortement influencé par

la schizo-analyse que Deleuze et Guattari développent dans L’Anti-Œdipe, Véronique Bergen

propose une vision du fétiche qui ne serait plus « ni chose ni objet mais un supra-objet » (page

33). Empruntant les concepts de chose et d’objet à Alain Badiou (2014) qui affirme qu’« une

chose n’est pas encore un objet », ce n’est « rien d’autre qu’une multiplicité » qui doit être

(13)

12

« accompagnée de sa fonction d’identité » pour devenir un « objet du monde », V.Bergen affirme le statut ambigüe du fétiche : « Il est en n’étant ni une chose substituante ni un objet utilitaire » (page 33). Nous retrouverons, dans notre lecture de Winnicott (section 5), cette hésitation dans le caractère véritablement objectal du fétiche sous la forme, cette fois, d’un objet transitionnel mais notons que nous venons de souligner le caractère d’existence flottante du robot sexuel en tant que dispositif auto-érotique dont l’utilité est, en outre, discutable quand le sujet est capable de se masturber avec sa main. Dans ce contexte philosophique, le robot sexuel serait clairement un fétiche.

Une approche alternative, et peut-être finalement plus adaptée pour comprendre l’éventuel statut fétichiste du robot sexuel, consiste à revenir à la définition même du fétiche érotique proposée par Binet (1887) dans son Essai sur le fétichisme amoureux. Selon Binet, tout amour est fétichiste dans le sens où il ne s’intéresse pas à la totalité insaisissable d’une personne mais à un nombre limité de ses caractères : « l’amour normal nous apparaît donc comme le résultat d’un fétichisme compliqué ; on pourrait dire que dans l’amour normal le fétichisme est polythéiste : il résulte, non pas d’une excitation unique, mais d’une myriade d’excitations : c’est une symphonie » (page 126). Le passage de l’amour normal à l’amour pathologique n’est, selon Binet, qu’une question de rupture d’harmonie : « Dans la perversion sexuelle, nous ne voyons apparaître en somme aucun élément nouveau ; seulement l’harmonie est rompue ; l’amour, au lieu d’être excité par l’ensemble de la personne, n’est plus excité que par une fraction » (page 127). L’approche systémique de Binet vise à donner un cadre à un certain nombre de pratiques dites « fétichistes » qui sont rassemblées, à l’époque, dans les éditions successives du Traité de Pathologia Sexualis de Kraft-Ebing revu par Moll : si certaines pratiques fétichistes nous parlent encore, comme le fétichisme de la chaussure ou celui de la chevelure, d’autres nous semblent désormais bien étranges comme celui dit des « coupeurs de natte » (pages 327 à 332).

Apparemment, en comparaison avec ces pratiques qui privilégient une caractéristique unique,

physique ou morale, de l’être désiré, le robot sexuel apparaît comme une totalité de

particularités mais, outre le fait que cette totalité se limite à une apparence externe à laquelle on

ajoute une génitalité pseudo-fonctionnelle, elle n’est qu’apparente du fait même qu’elle mime

un corps sans organe ou plutôt un corps qui serait limité à certains signes sexuels primaires et

secondaires. Selon le point de vue de Binet, le robot sexuel aurait donc une nature fétichiste

ambigüe : d’une part, par son mimétisme de l’apparence humaine dans sa globalité, il s’éloigne

des objets fétichistes s’attachant à un détail de la personne humaine mais, d’autre part, il peut

apparaître comme un « habillage » des organes génitaux artificiels qui sont généralement

(14)

13 détachables soit pour pouvoir les laver comme dans le cas du vagin extractible, soit pour pouvoir passer de la nature non érectile du pénis artificiel à un godemiché. Dans le chapitre qu’elle consacre au « vagin en pièces détachées », Agnès Giard parle de « L’énigme du vagin extractible » (page 199) qu’elle résout par une première explication juridique sur la censure touchant les poupées exhibant un vagin avant de mettre en avant une seconde explication plus fondamentale qui serait liée à la culture Japonaise : « Nous les Japonais, nous n’avons pas besoin de voir le sexe. Nous avons besoin de voir le désir » (propos rapportés page 203). Plus prosaïquement, le vagin extractible qu’ont adopté la plupart des fabricants Américains permet bien plus facilement son nettoyage après usage que de porter la lourde poupée jusqu’à la salle de bains. Il y a un autre intérêt au vagin extractible, comme d’ailleurs aux pénis interchangeables : pouvoir choisir et pouvoir changer ; le site de la société Realbotix, dont nous avons déjà parlé, propose à ses clients, à la rubrique « insert options » un choix de 11 vulves différentes au sujet desquelles le site précise : « all insert shown are interchangable with all female RealDoll dolls » (https://www.realdoll.com/options/ #insert). Rien n’empêche donc un amateur d’acheter toute la collection, comme à un autre de se procurer de multiples formes de pénis interchangeables. Un tel collectionneur pourrait rappeler les héros de La cité des femmes de Fellini qui exhibe, dans le hall de sa demeure, une impressionnante collection de godemichés avec, malgré tout, une nuance : les vagins extractibles avec les détails de leurs vulves, comme les pénis détachables sont d’abord des pièces démontables de la poupée avant d’être de possibles objets de collection.

Plutôt que support de fétiches sexuels, il semblerait donc, qu’en tant que fétiche, il faut considérer le robot dans son entier, tout spécialement lorsqu’il est privé de ses organes génitaux artificiels, comme dans le cas des love doll Japonaises sur lesquelles le vagin n’a pas été placé.

Agnès Giard parle de ces Otaku qu’elle définit comme des individus masculins repliés sur eux- mêmes, souvent maniaques, qui ont grandi avec l’avènement des mangas sexuels et

« l’enfermement devant l’ordinateur », et pour qui la love doll représenterait la femme qui

« n’existe pas dans la réalité » (page 213). Agnès Giard cite le témoignage d’un certain Sakai Mitsugi qui, en 2014, alors âgé de 51 ans affirmait : « Le charme des poupées est très différent de celui des femmes. […] La poupée est mieux qu’une femme parce qu’elle n’a pas de personnalité, ni d’idées négatives et qu’elle reste tout le temps près de vous » (page 215).

Kodama, l’un des informateurs de Giard, est plus radical encore : « Plus jeunes, nous rêvions

de l’amour idéal, parce que les filles étaient inaccessibles. Adultes, nous sommes restés attachés

à ce rêve impossible. Ce dont nous souffrions, finalement, n’est pas le manque de vraies

(15)

14 femmes, c’est l’excès d’imagination. Cet excès d’imagination rend le réel inutile. A quoi bon sortir ? Tout est déjà en nous » (page 215). Agnès Giard ne propose pas de lecture psychanalytique de cet amour exclusif pour des love doll dont on ne cherche pas à combler le

« trou » par un vagin mais il apparaît, à certains égards, étrangement proche du fétichisme tel que le décrit Freud dans son essai : « Le fétiche est le substitut du phallus de la femme (la mère) auquel a cru le petit enfant et auquel, nous savons pourquoi, il ne veut pas renoncer » (Freud, 1927, page 134) ; il est la conséquence de « l’horreur de la castration » avec comme corolaire « la stupeur devant les organes génitaux réels de la femme qui ne fait défaut chez aucun fétichiste [et] demeure aussi un stigma indelebile du refoulement qui a eu lieu » (idem, page 135). Ce fétichisme de la love doll renouvellerait alors ce que le XIXème siècle a appelé amour des statues ou agalmatophilia qui est documenté, notamment, chez Ellis et Krafft-Ebing. Dans un article de synthèse qu’ils consacrent à ce sujet, Scobie et Taylor (1975) en proposent la définition suivante : « Algamathophilia is the pathalogical condition in which some people establish exclusive sexual relationships with statues » ; il est intéressant de noter que l’amour des statues est ici considérée comme un attrait sexuel, qui peut aller jusqu’à l’orgasme, avec des statues naturellement privées d’orifices. A la même époque, critiquant cette étude, White (1978) relève la faiblesse des témoignages crédibles sur ce phénomène, qui relèverait plutôt, selon lui, d’un fantasme ou de l’anecdote que d’un comportement véritablement pervers (« behavioral perversion », page 249). L’attrait amoureux pour une love doll, dont le « trou » est laissé vide, tendrait à justifier la possibilité d’un diagnostic d’agalmatophilia.

Une ambiguïté demeure, cependant, dans les données fournies par Giard : les otaku dont elle parle possèdent-ils une ou plusieurs love doll ? Dans son étude portant sur un échantillon de 55 propriétaires Américains de sex-dolls, Sarah Valverde (2012) souligne que 18 d’entre eux, c’est-à-dire 39% de l’échantillon, possèdent deux ou plus de deux sex-dolls (page 31).

Pour ceux, et celles, qui vivraient avec un robot sexuel unique, devenu substitut exclusif à toute relation amoureuse, se pose alors la question d’une interprétation qui, sans renoncer entièrement à la théorie du fétichisme, se placerait plutôt dans le cadre de la théorie de l’objet transitionnel.

5. Un objet transactionnel qui s’ignore

Myriam Boubli (2012), dans un bel article sur l’évolution du concept de doudou, montre

comment, jusqu’à ce que Winnicott en fasse un objet transitionnel, il fut considéré et désigné

comme fétiche. Si tout le monde trouve normal aujourd’hui l’attachement temporaire de

l’enfant pour son doudou, la question se pose lorsque l’adulte garde le besoin d’une certaine

présence de soft toys dans sa vie quotidienne : « Ne sommes-nous pas, cette fois-ci, dans le

(16)

15 domaine de la perversion ? » questionne M. Boubli (page 126) sans finalement vraiment trancher cette question. Elle rapporte ce témoignage remarquable de l’une de ses patientes, âgée d’une vingtaine d’années « qui maintient le lien à son ‘doudou’ qu’elle continue à utiliser comme un objet consolateur dans ses moments de mal-être » (idem, page 126) : « Au fond, mon ami, dans mon lit, je me demande si je ne me raccroche pas à lui comme à une mère. L’odeur, le toucher… Ca m’auto-suffit. La relation génitale, je l’ai écartée » (idem, page 126). Dans le cas de cette jeune fille, M. Boubli interprète cette approche de la relation amoureuse comme la conséquence d’une angoisse de perte de la relation maternelle et de sa destruction si elle est en concurrence avec un autre attachement. Au-delà des raisons individuelles qui peuvent expliquer la persistance du doudou à l’âge adulte, il est clair, en tous cas, qu’il ne joue pas de rôle sexuel : à l’opposé de l’objet pulsionnel, il serait un objet d’apaisement, de consolation ; mais « ce type d’objet constitué de tout l’envers de la pulsion est, précise M. Boubli, un objet de l’idéalisation, c’est un objet mort, l’objet d’une espèce de commémoration d’une image complètement dévitalisée » (idem, page 127). On peut alors se demander si le robot sexuel, sous sa forme actuellement essentiellement passive, objet solide construit autour d’une structure rigide, mais présentant une véritable souplesse au contact, pour ne pas dire mollesse (voir par exemple, certains films de promotion comme celui-ci : https://fr.xvideos.com/video43617247), ne relève pas, d’une certaine manière, de la catégorie des doudous. Pour tenter de répondre à cette question, revenons au texte même de Winnicott (1951-1953) où il écrit : « J’ai introduit les expressions ‘objet transitionnel’ et ‘phénomène transitionnel’ pour désigner la zone d’expérience qui est intermédiaire entre le pouce et l’ours en peluche, entre l’érotisme orale et la relation objectale vraie […] » (page 110). A la réalité intérieure et à la vie extérieure, il propose « d’y ajouter un autre élément ; car il existe une partie de la vie d’un être humain que nous ne pouvons négliger, la troisième partie qui constitue une zone intermédiaire où la réalité intérieure et la vie extérieure contribuent l’une et l’autre au vécu » (idem, page 111). Le propos de Winnicott est donc particulièrement ambitieux : « Ce que j’étudie ici c’est donc l’essence de l’illusion, celle qui est permise au petit enfant et qui est propre à l’art et à la religion dans la vie d’adulte » (idem, page 111). Le robot sexuel, à la différence d’un sex-toy est justement une illusion, l’illusion d’une femme ou d’un homme idéal, voire d’un être quasi surnaturel dans le cas des love doll aux yeux élargis ou des commandes spéciales faites à la société Américaine Sinthetics (Sinthetics.com) qui se présente d’ailleurs plus comme une sociétés de fabrication de mannequins que de love doll : dans un documentaire que la série Américaine Slutever a consacré en 2016 à cette société, on apprend, par exemple, qu’une cliente souhaitait une

« poupée » inspirée d’un héros fantastique dont elle adressait la photo à la société (Murguia &

(17)

16 Sciortino, 2016). Pour Winnicott, le doudou serait « la première possession non-moi » (idem, page 109), transition indispensable vers la « relation objectale vraie » (idem, page 110), « voué au désinvestissement progressif, de sorte qu’avec les années, il n’est pas tant oublié que relégué dans les limbes » (idem, page 114), et son abandon marque la fin de la « période d’illusion » (idem, page 119). Cependant, et ce pourrait être là une ambiguïté du texte de Winnicott, l’illusion est justement le propre de cette troisième partie de la vie humaine qu’il a lui-même introduite. L’existence d’« illusions » de réconfort, y compris sous la forme de doudous physiques, ne serait alors pas obligatoirement un signe de déséquilibre dans la vie adulte. Selon cette perspective, comme nous avons cherché à l’illustrer sur le schéma de la Figure 4, en nous inspirant des propres schémas proposés par Winnicott, un robot sexuel serait un doudou c’est- à-dire une illusion physique, déguisée en objet de satisfaction sexuelle.

(a) (b) (c)

Figure 4. Le robot sexuel en tant que retour au phénomène d’illusion porté par l’objet transitionnel qu’il représenterait : le schéma proposé en (c) est directement inspiré des schémas (a) et (b) proposés par Winnicott pour illustrer se concepts d’objet et de phénomène transitionnel – reproduit de la figure page 121 de l’article de Winnicott (1951-1953).

Ce statut d’objet transitionnel donnerait tous les droits d’usage par son propriétaire, y compris de le mutiler comme le rapporte Megham Laslocky (2010) au sujet d’un jeune étudiant asiatique d’une université Californienne auquel les parents avaient acheté un robot sexuel pour lui éviter de perdre son temps à draguer (‘chasing women)’ : “Fiero’s [the sex doll “doctor”]

photographs of the damaged doll make me cringe: Her leg was torn off, revealing the steel hardware of her hip joints; an arm hung by an inch of silicone flesh […]. Her vagina was so blown out,” Fiero told me. “I was appalled. I couldn’t believe someone could fuck something like that up so quickly. It blew me away. How could somebody be so callous?” (Laslocky, 2010). Il est également intéressant de noter que le robot sexuel possède plusieurs des particularités de l’objet transitionnel tel que Winnicott en dresse le tableau, dont les

enfant mère

illusion

enfant mère

adulte partenaires

amoureux possibles

Illusion du

robot sexuel

(18)

17 particularités 3 et 4 : « 3. L’objet ne doit jamais changer à moins que ce soit l’enfant qui le modifie. 4. L’objet doit survivre à l’amour instinctuel et aussi à la haine, et, si c’est le cas, à l’agressivité pure » (page 114). Par leur apparence figée dans une jeunesse éternelle, les robots sexuels partagent la propriété 3, y compris dans la mise en place, comme de l’enlèvement, des éventuelles parties sexuelles utilisées ; les love doll Japonaises muettes, non motorisées, partagent plus spécifiquement la propriété 4 en supposant, comme pour le doudou, que toute réintégration d’un élément arraché est possible. La « zone intermédiaire d’illusion » où se développe le lien avec le doudou est, cependant, clairement définie par Winnicott comme une zone propre au développement d’idées démentes : « Nous permettons à l’enfance cette phase de démence et n’exigerons de lui que progressivement de faire une distinction claire entre ce qui est subjectif et ce qui peut être prouvé de façon objective ou scientifique » (Winnicott, 1952, page 103) et, juste après, il ajoute : « S’il faut se montrer particulièrement permissif à l’égard d’un individu quant à cette zone intermédiaire, c’est qu’il y a psychose » (idem, page 103). En fait, selon Winnicott, la zone d’illusion, pour qu’elle demeure acceptable dans le monde adulte, ne doit pas déborder sur la zone de « vie extérieure » c’est-à-dire sociale : « […] si un adulte exige trop de la crédibilité des autres, en les obligeant à admettre qu’ils partagent une illusion qui n’est vraiment pas la leur, c’est un signe de folie » (Winnicott, 1951-1953, page 111) ; et c’est effectivement ce que nous pensons quand nous voyons ces photos montrant ces japonais promenant leur love doll dans un fauteuil roulant, les accompagnant au bord de mer, ou dans un parc (Allen, 2017). Le robot sexuel, illusion physique pour adulte, serait fait pour rester caché. Cependant, même domestique, l’illusion du robot sexuel peut demeurer problématique, preuve réelle d’une impossibilité pour son utilisateur/trice de trouver une solution à son intégration dans la vie amoureuse réelle : la seule femme qui ose se montrer à l’écran dans le film de la série Slutever, dont nous avons déjà parlé, décrit ainsi l’avantage de sa poupée masculine qu’elle vient de tirer péniblement sur son lit : les hommes qui s’intéressent à elle, ses

« copains de baise » précise-t-elle, sont soit trop présents affectivement, soit fuyants après avoir

réalisé le fantasme de coucher avec une héroïne de porno ; un robot sexuel ne présente ni

l’inconvénient des premiers, ni la déception des seconds. Agnès Giard nous parle aussi ce ces

hommes qui, particulièrement engagés dans la relation avec leur love doll, décident un jour d’y

renoncer totalement comme tirés enfin d’un mauvais rêve, et rappelons, pour finir, le projet du

peintre Kokoschka qui, à la suite de sa rupture avec Alma Malher, commanda à un fabricant de

jouets de Stuttgart une poupée de taille humaine dont F. Pacteau (1994) – cité par P. Pulhman

(2008) – nous précise qu’elle fut conçue comme « a composite of different feminine types »

(page 3), « clearly intended to have a ‘sexual’ function » (page 4), mais, finalement livrée, elle

(19)

18 ajoute : « Kokoschka’s disappointement was enormous » (page 4). Le peintre utilisa un temps la poupée, dont P. Pulhman (2008) nous donne une photographie assez saisissante (page 3), comme modèle d’atelier avant de la détruire à l’occasion d’une fête sauvage. Illusion manquée, illusion temporaire, le robot sexuel illustrerait toutes les difficultés à créer et maintenir l’illusion d’un partenaire amoureux au sens d’un objet transitionnel selon Winnicott.

Conclusion

Le robot sexuel, tel qu’il est compris et discuté aujourd’hui, demeure profondément ambigüe. Techniquement, il n’est pas encore au point pour proposer à ses utilisateurs et utilisatrices une démarche attrayant, des caresses même pudiques et encore moins la réalisation des figures de l’Arétin. Quant à sa parole, si elle existe déjà, elle est soumise à toutes les interrogations actuelles sur l’intelligence artificielle et sa possibilité de proposer autre chose qu’un jeu de société à deux, sophistiqué, certes, mais dont il est difficile de savoir s’il n’est pas très rapidement lassant. Le robot sexuel actuel est donc d’abord, et le plus souvent, un superbe artéfact d’humain fortement sexué : au réalisme poussé de ses organes génitaux, il associé un corps à la jeunesse parfaite et surtout un visage tellement soigné qu’il peut en devenir déroutant.

Nous avons successivement tenté de cerner la spécificité du robot sexuel comme un dispositif

auto-érotique, un fétiche ou un objet transitionnel. Ces trois approches s’avèrent finalement

parcourues par une même ambivalence quant à sa nature objectale. En tant que dispositif

masturbatoire, il impose sa lourde et encombrante présence, son anthropomorphisme global qui

s’oppose à l’anthropomorphisme local, voire au non-anthropomorphisme, du sex-toy comme de

la sex-machine, un hyper-réalisme généralisé censé apporter plus de satisfaction sexuelle à son

utilisateur ou utilisatrice ; mais, finalement, cet usage auto-érotique ne conduit-il pas à nier la

relation objectale pour entraîner celui qui s’y adonne dans une fermeture de son propre corps

sur lui-même ? En tant que fétiche, le robot sexuel, privée alors de sa fonction masturbatoire

par rejet de l’installation de ses organes génitaux, n’accèderait pas non plus au statut d’objet ;

pour reprendre la définition du fétiche selon Bergen, « il est en n’étant ni une chose substituante

ni un objet utilitaire » (cité infra dans le texte) ; il ne ferait que justifier cette parole radicale

rapportée par Giard : « Tout est déjà en nous » (cité infra dans le texte). Et, finalement, que le

robot sexuel soit ou non muni de sa génitalité artificielle, il entraînerait ses usagers dans un

monde d’illusion au sens de celui que Winnicott a théorisé pour expliquer l’attachement de

l’enfant à son doudou, monde d’illusion où l’adulte pénètre par l’art ou la religion mais,

justement, un robot sexuel ni une œuvre d’art, ni une représentation religieuse et ce serait là le

véritable danger qu’il ferait courir à l’adulte qui s’y abandonnerait : sombrer, si l’on suit la

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19 théorie de Winnicott, dans une forme de démence. Est-ce cela qui menace celui qui, dans un futur indéterminé, décidera de partager sa vie avec un robot sexuel ou, de manière plus légère, la robotique sexuelle ouvre t’elle une nouvelle forme de badinage amoureux à l’image de l’échange entre Barbarrella et Diktor ?

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