Enoncé A557 (Diophante) La séquence d’Archibald
On écrit la séquence des premiers chiffres des puissances entières positives de 5 : 5, 2, 1, 6, 3, 1, 7, 3, . . . On en extrait une sous-séquence quelconque de k termes consécutifs que l’on écrit en renversant l’ordre. Celle-ci apparaît toujours dans la séquence des premiers chiffres des puissances entières de 2. Bizarre, bizarre ? comme l’a dit Archibald.
Démontrer que cette propriété n’a rien de bizarre.
Exemple : la sous-séquence 6,1,2,5 constituée à partir des quatre premiers chiffres de la séquence des puissances de 5 lus de droite à gauche se re- trouve dans la séquence des premiers chiffres des puissances suivantes de 2 : 26,27,28,29 = 64, 128, 256, 512.
Solution de Jean Moreau de Saint-Martin
On ne restreint pas la généralité en supposant (quitte à augmenterk) que la sous-séquence commence au premier terme de la séquence de l’énoncé.
Sur le cercle unité de centre O, je marque un pointL1, puis
– pour j = 2 à 9, les pointsLj tels que (OL1, OLj) = 2πlogj modulo 2π (logarithme décimal),
– pour tout j >0, les points Cj tels que (OL1, OCj) = 2πjlog 5 modulo 2π, et les pointsDj tels que (OL1, ODj) = 2πjlog 2 modulo 2π. Ajdonné, Cj etDj sont symétriques par rapport àOL1.C1 est enL5,D1 enL2,D2
en L4,D3 enL8.
A chaque Cj j’associe le point Lm(j) qui lui fait immédiatement suite sur le cercle : Cj appartient à l’arc [Lm(j)−1Lm(j)[.
Je note ej la mesure de l’arcCjLm(j) etfk = min
1≤j≤kej.
A k donné, je marque sur le cercle le point F tel que l’arc CkF a pour mesure fk.
Cet arc contient un des pointsDj, disonsDa+1. Cela résulte du
Théorème. Siξest irrationnel, la suite (pourm entier>0)mξ− bmξc est dense dans l’intervalle (0,1).
Preuve. Soit (u, v) un intervalle contenu dans (0,1), et q = d1/(v−u)e.
Pour m = 1 à q, je détermine les quantités mξ− bmξc et je les ordonne par valeur croissante ; elles sont toutes distinctes, sinonξ serait rationnel.
Elles divisent l’intervalle (0,1) en q+ 1 intervalles dont le plus petit, cor- respondant aux entiers m1 (limite gauche) et m2 (limite droite), est de longueur
(m2−m1)ξ− b(m2−m1)ξc<1/q < v−u.
Sim1 < m2 =m1+p, les nombres npξ− bnpξc augmentent à partir de 0 par pas constants<1/q et l’un d’eux appartient à l’intervalle (u, v).
Sim1 > m2 =m1−p, les nombresnpξ− bnpξc diminuent à partir de 1 par pas constants<1/q et l’un d’eux appartient à l’intervalle (u, v).
Or log 2 est irrationnel. En effet, si l’on avait log 2 = p/q rationnel, on aurait 2q−p = 5p, égalité d’un nombre pair et d’un nombre impair. Il en résulte que la suite des pointsDj est dense sur le cercle.
Comme Da+1 appartient à l’arc CkLm(k), 2a+1 et 5k ont même premier chiffrem(k)−1 (9 sim(k) = 1).
Comme (OL1, OL2) = (OL5, OL1), une rotation de cet angle transforme l’arcCkDa+1en l’arcCk−1Da+2, contenu dansCk−1Lm(k−1)carfk ≤ek−1; de ce fait 2a+2 et 5k−1 ont même premier chiffre.
Et ainsi de suite, à chaque étape l’arc Ck−jDa+1+j est contenu dans Ck−jLm(k−j), et 2a+1+j et 5k−j ont même premier chiffre, jusqu’à 2a+k et 5, CQFD.