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Etude relative à l’applicabilité du contrat de programme pétrole dans le secteur du gaz naturel | CREG : Commission de Régulation de l'Électricité et du Gaz

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Texte intégral

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Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz Rue de l’Industrie 26-38

1040 Bruxelles Tél. : 02 289 76 11 Fax : 02 289 76 99

COMMISSION DE REGULATION DE L'ELECTRICITE ET DU GAZ

ETUDE

(F)080131-CDC-745

relative à

« l’applicabilité du contrat de programme pétrole dans le secteur du gaz naturel »

réalisée en application de l'article 15/14, § 2, 2°, de la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gaziers

31 janvier 2008

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TABLE DES MATIERES

1 ANALYSE DU CONTRAT DE PROGRAMME DANS LE SECTEUR

PETROLIER... 5

1.1 BASES LEGALES...5

1.2 DISCUSSION ARTICLE PAR ARTICLE...6

1.3 ASPECTS LIES AU DROIT DE LA CONCURRENCE...10

1.3.1 La loi du 22 janvier 1945 et la LPCE...10

1.3.2 La loi du 22 janvier 1945 et le droit de la concurrence communautaire...11

1.4 CONCLUSION...14

2 COMPARAISON DES SECTEURS DU PETROLE ET DU GAZ NATUREL... 16

2.1 COMPARAISON DES MARCHES INTERNATIONAUX DU PETROLE ET DU GAZ NATUREL...16

2.2 COMPARAISON DES MAILLONS NATIONAUX DE LA CHAINE DE VALEUR DU GAZ NATUREL ET DU PETROLE...20

2.3 CONCLUSION...21

3 CONCLUSION GENERALE... 23

LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES

Tableau 1 : Principales caractéristiques du contrat de programme pétrole ...15

Tableau 2 : Principaux paramètres d’indexation dans les contrats d’importation à long terme par producteur et par marché (% des volumes contractés)* ...19

Figure 1 : Portefeuille d’approvisionnement de Distrigaz (2006) ...20

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INTRODUCTION

La COMMISSION DE REGULATION DE L’ELECTRICITE ET DU GAZ (CREG) a reçu le 19 octobre 2007 un courrier du Ministre de l’Economie, de l’Energie, du Commerce extérieur et de la Politique scientifique (ci-après : le Ministre) lui demandant de réaliser une étude, en exécution d'une décision du Conseil des ministres restreint (« kern ») du 27 septembre 2007 en vertu de l’article 15/14, § 2, 2°, de la loi du 12 avril 1965 relative au transport de produits gazeux et autres par canalisations (ci-après : la loi gaz).

La mission est décrite comme suit : « Cette étude doit être suffisamment étayée au niveau du droit de la concurrence national et européen, mais aussi au niveau du contenu technique.

Elle doit analyser dans quelle mesure le contrat de programme, en vigueur pour le pétrole, peut aussi s’appliquer au secteur du gaz naturel. »

L'étude demandée doit s’appuyer, conformément au sujet et à l’introduction du courrier, sur l’étude antérieure de la CREG qui avait été transmise au Ministre le 27 juillet (ci-après : l'étude du 27 juillet 2007)1. L’étude du 27 juillet 2007 avait pour but de réaliser une analyse objective destinée à fournir des réponses à la triple demande du Ministre relative à la hausse du prix du gaz annoncée par Electrabel (la pertinence de la raison, les éventuels effets négatifs sur le marché et les mesures destinées à contrer ces effets). Etant donné les compétences limitées de la CREG en matière de contrôle et d’intervention, la finalité de l’étude faisait en sorte que d’autres instances détenant de telles compétences puissent se baser sur les observations et les conclusions de cette étude, et que les décideurs politiques puissent mettre à exécution les recommandations politiques proposées.

Dans l’étude du 27 juillet 2007, il a été conclu que la hausse des prix des carburants ne constituait pas une raison valable pour Electrabel d’augmenter le prix du gaz naturel pour les consommateurs résidentiels et professionnels parce qu'il est déjà indexé sur la base de la formule Gpi. Par contre, à travers l'augmentation de prix du 1er octobre 2007, Electrabel entendait harmoniser la formule Gpi avec la formule tarifaire du contrat gaz naturel du 13 octobre 2006 la liant au fournisseur Distrigaz. En l’absence de collaboration de la part de Distrigaz, la CREG n’a toutefois pas pu constater si le prix facturé par Distrigaz était correct et par exemple, s'il ne cachait pas d’excessive pricing ou de price squeeze ou s’il n’était pas discriminatoire. Sur la base d'informations publiques, la CREG a néanmoins pu constater

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que le coût d’approvisionnement de Distrigaz, sur la base des contrats à long terme et des achats à court terme, n’a subi pendant cette période aucune modification structurelle exceptionnelle et présente une tendance plutôt baissière qu’haussière.

Sur demande expresse du Ministre, plusieurs mesures politiques pouvant être prises en ce qui concerne la hausse des prix ont également été discutées dans le cadre de l’étude du 27 juillet 2007 : régulation des prix sous toutes ses formes, compétences supplémentaires pour le régulateur fédéral de l’énergie sous la forme de mesures pro-compétitives et une accélération de l’exécution des conditions imposées par la Commission européenne dans le cadre de la fusion entre Suez et Gaz de France. Comme mesure politique éventuelle en ce qui concerne la régulation des prix, il a été fait référence aux articles 1 à 3 de la loi du 22 janvier 1945 sur la réglementation économique et les prix en vertu desquels le Ministre aurait signé un contrat de programme visant à déterminer l’évolution des prix en fonction d’une série de paramètres.

La présente étude, composée de 3 chapitres, reprend là où l'étude du 27 juillet 2007 s'était arrêtée. Tout d’abord, le contrat de programme relatif à un régime des prix de vente maxima des produits pétroliers est disséqué et analysé dans l’optique du droit de la concurrence.

Ensuite, une comparaison est établie entre le marché du pétrole et le marché du gaz naturel.

Enfin, le dernier chapitre formule une conclusion générale.

La présente étude a été approuvée par le Comité de direction de la CREG lors de sa réunion du 31 janvier 2008.

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1 ANALYSE DU CONTRAT DE PROGRAMME DANS LE SECTEUR PETROLIER

1.1 BASES LEGALES

1. Le contrat de programme relatif à un régime des prix de vente maxima des produits pétroliers (ci-après : le contrat de programme pétrole) est un instrument de régulation des prix prévu par la loi du 22 janvier 1945 sur la réglementation économique et les prix (ci- après : la loi du 22 janvier 1945). Le principe général de cette loi est le régime des « prix normaux ». Autrement dit, également en l’absence d’intervention du Ministre de l’Economie, il est interdit de vendre à des prix présentant un caractère anormal (anormalement élevé). Il incombe au pouvoir judiciaire de se prononcer sur ce point, compte tenu de l’état du marché, des frais d’exploitation et du bénéfice (cf. art. 1, § 2, de la loi du 22 janvier 1945).

2. En outre, le législateur prévoit que le Ministre de l’Economie peut intervenir dans la fixation des prix de biens et services, notamment par la conclusion de contrats de programme. En application de l'article 1, § 3, de la loi du 22 janvier 1945, le Ministre ayant les affaires économiques dans ses attributions peut conclure des contrats de programme avec des entreprises individuelles ou groupées comportant des engagements relatifs notamment au niveau des prix pratiqués. Ces contrats sont conclus à durée déterminée. Ils peuvent être dénoncés par les parties moyennant le respect du préavis prévu. Ces contrats sont assortis d’une clause prévoyant une indemnité à payer en cas d’inexécution. Les sommes dues en vertu de cette clause sont enrôlées par le Ministre de l’Economie, sur décision motivée. La décision motivée est notifiée au débiteur. Dès réception de cette décision, le débiteur dispose d’un délai de quinze jours pour introduire un recours devant les tribunaux civils. Ce recours est suspensif et la décision est susceptible d’appel. A défaut de recours comme en cas de rejet du recours, l’indemnité qui n’est pas payée volontairement, est recouvrée comme en matière de contributions directes.

3. En vertu de l’article 1, § 4, de la loi du 22 janvier 1945, le Ministre de l’Economie peut également conclure un contrat de programme avec des associations professionnelles. Par association professionnelle, on entend cependant une association d’entreprises actives dans le raffinage, l’importation ou la distribution de produits pétroliers. L’article 1, § 4, deuxième alinéa, de la loi du 22 janvier 1945 stipule en outre que si l’association professionnelle ou plusieurs associations professionnelles avec lesquelles un contrat de programme est conclu,

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consommation en Belgique, le contrat de programme est contraignant pour le secteur entier.

Lorsqu’une association professionnelle du secteur, au nom de ses membres, introduit par lettre recommandée à la poste auprès du Ministre de l'Economie une réclamation motivée contre un ou plusieurs éléments qui font partie du contrat de programme en vigueur, le Ministre de l'Economie prend cette réclamation en considération. Le Ministre de l’Economie entame, dans le mois suivant la réception de la réclamation motivée, une négociation nouvelle concernant cette réclamation dans le cadre du contrat de programme. Le Ministre de l’Economie informe dans les trois mois suivant la réception de la réclamation et par lettre recommandée à la poste l’association professionnelle concernée du résultat de cette négociation. La réclamation motivée n’a pas d’effet suspensif sur le contrat de programme en vigueur.

4. C’est en vertu de l'article 1, § 4, de la loi du 22 janvier 1945 qu’en 1974, après la crise pétrolière de 1973-1974, le contrat de programme pétrole a été conclu entre le gouvernement fédéral et la Fédération pétrolière belge.

1.2 DISCUSSION ARTICLE PAR ARTICLE

5. Le texte coordonné le 1er octobre 2006 du contrat de programme pétrole2 (discuté ci- après sous 1.2.1 et 1.2.2), ainsi que l'annexe technique3 (discutée ci-après sous 1.2.3), sont disponibles sur le site Internet du Service public fédéral Economie.

1.2.1 Préambule

6. L’objet et le moyen du contrat de programme pétrole ressortent clairement de la deuxième considération :

« Considérant qu’il convient, dans l’intérêt général, d’assurer des prix garantissant l’approvisionnement normal du pays en produits pétroliers et que cet objectif impérieux est favorisé par l’établissement d’une formule de structure des prix de vente maxima des produits pétroliers permettant :

– des variations de prix d’une amplitude raisonnable, tant à la hausse qu’à la baisse, pour autant que ces variations tiennent compte à la fois des conditions

2 http://mineco.fgov.be/energy/energy_prices/energy_prices_fr_001.pdf

3 http://mineco.fgov.be/energy/energy_prices/energy_prices_fr_002.pdf

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prévalant à tout moment sur les marchés internationaux et des éléments de coût vérifiables auprès d’entreprises opérant sur le territoire belge ;

– d’aboutir à des prix tendant à refléter les coûts supportés à tous les stades par le secteur pétrolier en vue d’assurer une certaine stabilité d’exploitation de celui-ci. »

7. Parmi les autres considérations de fond importantes, citons le fait que les éléments du contrat de programme ne peuvent conduire à des ventes à perte et que les prix au consommateur doivent être aussi stables que possible et que leur évolution ne doit pas aller à l’encontre de celle du marché.

1.2.2 Principaux engagements

8. A l’article 1 du contrat de programme pétrole, les parties cosignataires s’engagent à tout mettre en œuvre pour assurer l’approvisionnement de la Belgique sans discrimination par rapport à d’autres pays et de leur clientèle traditionnelle et historique, sans distinction, sur le marché national. En outre, le Ministre chargé de l’Energie prend, après concertation avec le cosignataire, toutes les dispositions qu’il juge utiles sur les plans réglementaire et administratif pour assurer l’offre la plus élevée possible de produits pétroliers.

9. L’article 3 commente le champ d’application matériel : prix maxima pour la majorité des produits, d’une part, et négociations libres pour certains produits présentant une part de marché relativement faible, d’autre part. En outre, une marge minimale est garantie aux détaillants de combustibles moteur et aux distributeurs de gasoil de chauffage.

10. Les principaux éléments de la structure de formule des prix de vente maxima des produits pétroliers sont définis aux articles 5 et 6 :

– la valorisation de la tonne de pétrole raffiné ;

– la moyenne mobile de 20 jours de la valorisation de la tonne de pétrole raffiné ; – le rapport entre la valorisation et la moyenne mobile de la tonne de pétrole raffiné ; – les prix de vente maxima des produits visés à l'article 3 ;

– les variations des prix de vente maxima ;

– les limites imposées aux augmentations ou baisses des prix de vente maxima.

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11. L’article 7 stipule qu’en vue du contrôle du respect du contrat de programme pétrole, les entreprises tiennent à la disposition des fonctionnaires du Service public fédéral Economie ou de réviseurs désignés par le Ministre chargé de l'Energie, tous les éléments justificatifs de leur respect de la formule de structure.

12. En vue du calcul de la formule de structure, l’article 8 impose l’obligation aux entreprises de fournir toutes les données relatives aux différents éléments constitutifs des coûts, aux prix maxima et au marché conformément à un schéma uniforme fixé par la Direction générale de l’Energie.

13. L’article 9 contient une obligation de confidentialité dans le chef des fonctionnaires et des réviseurs désignés par le Ministre de l’Energie.

14. L’article 10 fixe la durée du contrat de programme pétrole à 3 ans avec possibilité de reconduction tacite pour la même période. Le préavis est d’un an. Toutefois, les paramètres et les éléments constitutifs des formules de coût et de valorisation peuvent être révisés à tout moment pendant la durée du contrat de programme de commun accord entre les parties signataires.

15. L’article 12 contient une clause de force majeure assortie d‘une procédure de révision du contrat de programme pétrole dans le cas où, après la signature, des circonstances échappant au contrôle des parties cosignataires étaient modifiées de telle façon que l’une ou l’autre de ces parties estime une révision justifiée.

1.2.3 Engagements techniques

16. L’article 2 de l’annexe technique au contrat de programme pétrole mentionne les étapes de calcul des formules de structure des prix de vente maxima :

– Détermination de la valorisation de la tonne de pétrole raffiné ;

– Détermination de la moyenne mobile de 20 jours de la valorisation d’une tonne de pétrole raffiné ;

– Rapport entre les deux étapes précédentes ; – Détermination des prix de vente maxima ; – Variation des prix de vente maxima.

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17. L’article 4 fait référence aux cotations internationales quotidiennes publiées par le

« Platt’s European Market Scan » qui sont utilisées pour le calcul des prix de vente maxima aux différentes étapes de calcul. Il s’agit de prix FOB ou CIF, éventuellement estimés par assimilation avec les prix CIF de produits pour lesquels il existe une cotation FOB internationale quotidienne.

18. L’article 8 stipule que pour la valorisation, les prix sont pondérés suivant la quote-part du produit dans la production belge et l’importation.

19. L’article 11 détermine qu’il est procédé quotidiennement à une comparaison de la valorisation et de la moyenne mobile de la valorisation de la tonne de pétrole raffiné. A cet égard, deux cas de figure peuvent se présenter : la valorisation est inférieure ou supérieure à 120 % de la moyenne mobile de 20 jours de la valorisation de la tonne de pétrole raffiné.

20. L’article 16 définit la marge de distribution allouée aux sociétés pétrolières, ainsi que la formule selon laquelle elle peut être revue en fonction notamment du niveau des salaires horaires et de l'indice des prix à la production industrielle.

21. L’article 22 définit la marge minimale du détaillant-revendeur, ainsi que la formule selon laquelle elle peut être revue en fonction notamment du niveau des salaires horaires et de l'indice des prix à la production industrielle. Cette marge minimale doit s’entendre comme une marge brute garantie au détaillant-revendeur, mais au sujet de laquelle il peut, dans certaines circonstances, être négocié avec le fournisseur pétrolier.

22. L’article 23 définit la marge minimale du détaillant-gérant réalisant un revenu annuel limité, ainsi que la formule selon laquelle elle peut être revue en fonction notamment du niveau des salaires horaires et de l'indice des prix à la production industrielle.

23. L’article 30 stipule que les changements de prix de vente maxima entrent en vigueur à 0h00 le jour suivant le jour où les modifications ont été constatées.

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1.3 ASPECTS LIES AU DROIT DE LA CONCURRENCE

24. Ci-après, nous examinons dans quelle mesure les possibilités offertes au ministre par la loi du 22 janvier 1945 en ce qui concerne la réglementation des prix sont conformes au droit de la concurrence européen et belge (respectivement les articles 81 et suivants du Traité CE et la loi sur la protection de la concurrence économique (ci-après : LPCE)).

1.3.1 La loi du 22 janvier 1945 et la LPCE

25. Lors de l’élaboration de la loi sur la concurrence initiale en 1991, le législateur belge a décidé de ne pas toucher au contenu de la loi du 22 janvier 1945. Cette approche n’était pas un choix évident et a été critiquée pendant la préparation parlementaire de la LPCE4. En effet, ces deux lois sont relativement difficiles à concilier. Les mesures que le Ministre peut prendre en vertu de la loi du 22 janvier 1945 peuvent donner lieu à des accords (tarifaires) et des comportements limitant la concurrence, qui sont précisément interdits par la loi sur la concurrence et le Traité CE.

26. La compatibilité des dispositions de la loi du 22 janvier 1945 avec les obligations contenues dans la LPCE et le Traité CE a fait l’objet d’un examen plus détaillé par le Conseil de la concurrence (ci-après : le Conseil) dans un avis du 17 décembre 2001. Plus particulièrement, l’avis, rendu à la demande du Ministre de l’Economie de l’époque, étudiait le contrat de programme relatif aux produits pétroliers au regard du droit de la concurrence belge et communautaire. Comme mentionné ci-avant au paragraphe 4, ce contrat de programme a été conclu sur la base de l’article 1, § 4, de la loi du 22 janvier 1945.

27. Dans son avis, le Conseil s’est montré particulièrement critique à l’égard du contrat de programme. Le Conseil a considéré le contrat de programme comme un contrat civil, qui entrait dans le champ d’application de l’article 2, § 1, LPCE. A cet égard, le Conseil a constaté que « le mécanisme de fixation de prix maxima instauré par le contrat de programme constitue une entente sur les prix des produits pétroliers qui peut favoriser leur hausse avec la fixation de prix-planchers. Il est donc en principe prohibée par l’article 2 § 1 LPCE »5. En l’espèce, le Conseil a également constaté qu’il n’a jamais été saisi d’une demande d’attestation négative ou d’une demande d’exemption individuelle. Seules ces

4 Vandermeersch, Dirk, « De Mededingingswet », Kluwer, Malines, 2007, p.11.

5 Conseil de la concurrence, avis du 17 décembre 2001 sur le contrat de programme relatif à un régime de prix de vente des produits pétroliers, Rapport annuel 2001, annexes, p. 380.

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mesures, qui n’ont jamais été demandées en l’occurrence, peuvent annuler un constat de contradiction avec l’article 2, § 1, LPCE.

1.3.2 La loi du 22 janvier 1945 et le droit de la concurrence communautaire

28. En ce qui concerne le droit de la concurrence communautaire, le Conseil a également été particulièrement critique et a constaté que le contrat de programme tombait dans le champ d'application de l’interdiction contenue à l’article 81, § 1, du Traité CE s’il affecte sensiblement le commerce transfrontalier.

29. A cet égard, le Conseil a déclaré que le contrat de programme pourrait en principe bénéficier d’une exemption s’il satisfaisait aux quatre conditions de l’article 81, § 3, du Traité CE. La chance de pouvoir en bénéficier dans le dossier actuel semble toutefois hautement improbable.

En effet, le Conseil a établi que « la fixation des prix constitue un type d'accord interdit per se. Elle peut concerner une fixation de prix de vente ou d’achat uniformes pour tous les concurrents, de prix seulement indicatifs, des augmentations des prix (montant, moment et durée), de la fixation de marges de profit fixes, de la fixation de variations possibles dans une marge donnée, de la fixation des rabais offerts à la clientèle ou de la réduction ou limitation de ces rabais, une exemption ne peut être octroyée »6. La Conseil a également ajouté que les accords horizontaux, même en dessous des seuils « de minimis », étaient injustifiables.

Par conséquent, le Conseil a conclu que « le contrat de programme, pour autant qu’il tombe dans le champ d’application de l’article 81 § 1 ne semble donc pas pouvoir bénéficier d’une exemption sur base de l’article 81 § 3 CE »7.

30. Le fait que les pouvoirs publics soient une partie contractante et que le contrat de programme ait une base juridique (à savoir la loi du 22 janvier 1945) n’enlève rien aux constats précités du Conseil. Dans ces circonstances aussi, la loi de la concurrence et l’article 81 du Traité CE restent d’application8. A cet égard, il peut être fait référence à la

6 Cf. Conseil de la concurrence, o.c., p. 381.

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jurisprudence de la Cour de justice concernant le rôle non libératoire des pouvoirs publics dans le cadre de l’élaboration de contrats restrictifs. Vandermeersch9 renvoie à cet égard notamment à l’arrêt BNIC/Clair dans lequel la Cour de justice a constaté qu'« un accord fixant un prix minimal pour un produit et transmis à l’autorité publique en vue de faire entériner ce prix minimal, aux fins de le rendre obligatoire pour l’ensemble des opérateurs économiques intervenant sur le marché en cause, a pour objet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché. Quant à l’intervention d’un acte de l’autorité publique, destiné à conférer un effet obligatoire à cet accord vis-à-vis de l’ensemble des opérateurs économiques concernés, même s’ils n’ont pas été partie à l’accord, elle ne saurait avoir pour effet de soustraire celui-ci à l’application de l’article (81), paragraphe 1 »10.

Les entreprises ne peuvent par conséquent pas justifier un accord tarifaire restrictif par une éventuelle intervention ministérielle ou mesure légale, à moins qu’une telle décision de l'autorité publique n’exclut un acte de volonté indépendant des entreprises sur ce point11. Une telle justification juridique ne peut toutefois pas être invoquée en ce qui concerne le contrat de programme, puisqu’il ne présente pas de caractère contraignant. En effet, le contrat de programme contient notamment une clause de révision des prix ainsi que la possibilité de dénoncer le contrat.

31. De même, la Commission européenne s’est régulièrement montrée critique par rapport à des contrats qui fixent directement ou indirectement des prix.

32. Nous pouvons tout d’abord renvoyer à l’avis susmentionné du Conseil de la concurrence, dans lequel le Conseil a constaté que pendant l’audition sur le contrat de programme, la Commission européenne s’est montrée très réservée quant à l’existence d’un contrat de programme qui prévoit un mécanisme réglementé pour la formation de prix12.

33. Plus récemment, la Commission européenne s’est montrée très critique par rapport à l’imposition de tarifs régulés (un prix maximum, notamment comme dans le cadre de programme, est un tarif de fourniture régulé). Dans son rapport sur l’enquête sectorielle13, la Commission européenne a déclaré que, outre des tarifs libres, des tarifs régulés pouvaient être autorisés, mais uniquement à condition qu'ils se situent au-dessus du niveau du marché.

9 Vandermeersch, D., o.c., p. 124.

10 CJCE, 30 janvier 1985, BNIC/Clair, aff. 123/83, Recueil 1985, p. 391, n°22-23

11 Dans ce dernier cas, l’intervention publique viole même éventuellement le Traité CE. Conformément à l’article 10 du Traité CE, les Etats membres ne peuvent en effet pas porter préjudice à l’application pleine et uniforme du droit communautaire, en ce compris les règles de la concurrence.

12 Conseil de la concurrence, o.c., p. 378.

13 http://ec.europa.eu/comm/competition/sectors/energy/inquiry/index.html

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Dans ce cas, des tarifs d'approvisionnement régulés peuvent avoir leur utilité puisque des entreprises peuvent vendre leurs produits à des conditions plus concurrentielles et que les tarifs régulés n’entravent pas l’accès au marché14.15

Toutefois, la Commission européenne souligne à de multiples reprises le risque lorsque les tarifs régulés sont maintenus à un niveau (trop) faible et partant, rendent inattrayants des prix compétitifs basés sur les coûts. Une telle régulation tarifaire exclut les nouveaux venus du marché, la concurrence est étouffée dans l’œuf et les acteurs de marché ne sont plus encouragés à investir dans la capacité, ce qui met en péril la sécurité d’approvisionnement16. La Commission cite à cet égard l’exemple de l’Espagne, où les concurrents ne sont pas en mesure d'offrir des services interruptibles parce qu’ils ne peuvent pas être compétitifs aux conditions proposées dans le cadre du régime tarifaire régulé17.

34. La Commission européenne reconnaît toutefois qu’une régulation de prix ciblée peut être autorisée afin de protéger les consommateurs dans certaines circonstances particulières, notamment pendant la période transitoire vers un marché fonctionnant correctement. Dans ce cas aussi, la régulation des prix doit être équilibrée et ne peut pas compliquer l’accès au marché, créer une discrimination entre fournisseurs, renforcer des inégalités dans la concurrence ou brider la vente18.

35. En outre, la Commission européenne souligne en permanence dans son rapport et ses communiqués de presse que de tels tarifs d’approvisionnement régulés doivent être conformes aux règles en matière de concurrence et d’aide d’Etat.

Ainsi, en avril 2006, la Commission européenne a entamé la deuxième phase de la procédure de mise en demeure19. La Commission a mis en demeure plusieurs pays pour

14 Cf. notamment Energy Sector Enquiry Final Report, paragraphe 610 : « Parallel regimes are no threat to a liberalised supply market and its participants as long as regulated energy prices are comfortably above the level implied by wholesale market price levels. This differential allows for (new) suppliers without any local generation to source on the wholesale market and make attractive supply offers compared to the regulated energy tariff. »

15 De même, l’ERGEG témoigne dans son Position Paper sur la « End-user energy price regulation » d’une très grande inquiétude quant à savoir s'il convient d’instaurer ou de maintenir des prix maxima. L’ERGEG confirme ainsi la position précédemment adoptée par la Commission européenne en ce qui concerne la régulation des prix du marché.

16 Cf. notamment Energy Sector Enquiry Final Report, paragraphe 611 : « Member States could be tempted – especially in periods of rising wholesale prices – to set the supply tariffs below the corresponding wholesale benchmark to ensure lower price levels for customers. Whilst there may be short run benefits to (certain categories of) consumers, such supply tariffs have adverse effects for competition and thus for consumers in the longer run. New suppliers with no access to own generation are effectively squeezed out from the market, as they can no longer market electricity purchased on wholesale markets. Accordingly no competition based on merits can take place for these customers freezing the market position of incumbent operators. Also the tariffs distort the necessary price signals for investment into new generation capacity and are consequently damaging to security of supply. »

17 Cf. Energy Sector Enquiry Final Report, paragraphe 313.

18 Cf. la Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen intitulée « Prospects for the internal gas and

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non-respect de la deuxième directive électricité ou gaz, notamment en raison de l’existence de tarifs régulés dans leur pays.

Les tarifs régulés peuvent notamment enfreindre l’article 3 de la directive gaz. L’article 3 de la directive gaz est une exécution de l’article 86 du Traité CE et permet aux Etats membres d’imposer, dans l’intérêt économique général, des obligations de service public aux entreprises actives dans le secteur du gaz. Par ces obligations de service public, l'on peut, conformément à l’article 3, alinéa 2, de la directive gaz, notamment entendre la qualité et le prix des fournitures. L’article 3, alinéa 3, de la directive gaz stipule en outre que les Etats membres peuvent prendre des mesures adéquates pour protéger les clients finals et garantir un niveau élevé de protection des consommateurs, notamment en ce qui concerne les clients vulnérables.

Les obligations de service public ne peuvent toutefois pas entraver le développement des échanges commerciaux dans une mesure contraire à l’intérêt de la Communauté européenne (cf. article 86 du Traité CE). Le risque est toutefois réel qu’une régulation de prix dans le sens du contrat de programme, déclaré applicable sans autre distinction pour tous les clients et en vigueur pour tous les acteurs de marché, aille à l’encontre de l’intérêt de la Communauté européenne, si les prix maximaux imposés vont au-delà de ce que la Commission européenne autorise en vertu du droit de la concurrence (cf. la discussion ci- dessus aux paragraphes 33 et 34).

36. Enfin, nous pouvons noter que la régulation des prix peut impliquer une violation des règles relatives aux aides d’Etat. Dans ses enquêtes officielles contre la France et l’Espagne, la Commission européenne examine actuellement dans quelle mesure leur régime de tarifs régulés comporte une éventuelle aide d’Etat illégale20.

1.4 CONCLUSION

37. Le contrat de programme, conclu en 1974 entre le gouvernement fédéral d’une part et une association professionnelle privée d’autre part, est un instrument de régulation des prix prévu dans la loi du 22 janvier 1945 sur la réglementation économique et les prix. Le tableau 1 résume les caractéristiques du contrat de programme pétrole, telles que discutées ci-dessus.

20 Cf. IP/07/815 et IP/07/93.

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Tableau 1 : Principales caractéristiques du contrat de programme pétrole

Objectif assurer une certaine stabilité d'expoitation du secteur pétrolier Moyen

Type de réglementation de prix prix de vente maximum Prix régulé prix du consommateur final

Prix contraignant

Révision des prix automatiquement, sur base d'une formule fixée Fréquence journalier

Principe de base la valeur journalière se trouve au-dessus/dessous de la moyenne mobile de 20 jours prix de marché internationalement quotés

marges bénéficiaires minimum pour les acteurs du marché Paramètres de la formule de prix

réguler les prix qui réflètent les coûts qui sont supportés à tous les stades par le secteur pétrolier

contraignant pour le secteur entier si le contrat de programme est conclu avec des associations professionnelles qui sont représentatives pour au moins 60% des quantités de produits pétroliers mises à la consommation en Belgique

Calcul de la formule de prix

Source : CREG

38. Tant le Conseil de la concurrence que la Commission européenne se montrent très critiques à l’égard de la régulation des prix. Une forme générale de régulation des prix qui s’applique à tous les clients et qui est contraignante pour tous les acteurs de marché implique des risques considérables au regard du droit de la concurrence belge et européen, même si cette régulation repose sur la loi du 22 janvier 1945 et partant, découle d’une initiative de l’autorité publique. Dans son avis du 21 décembre 2001, le Conseil de la concurrence a dès lors conseillé au ministre « afin d’éviter le risque de nullité d’office conformément aux articles 2 § 2 LPCE ou 81, al. 2, du Traité CE, le ministre est invité à reconsidérer le principe ou à tout le moins le fondement juridique de l’actuel système de contrat de programme.21 »

39. Dans des circonstances particulières, la régulation des prix peut toutefois être envisagée, sans qu’elle ne crée de problème par rapport au droit de la concurrence belge et européen. Ainsi, outre des prix de marché libres, des prix régulés peuvent être autorisés à condition qu’ils se situent au-dessus du niveau de marché (cf. paragraphe 33). Par ailleurs, la régulation des prix est possible dans certaines circonstances pendant des périodes transitoires (paragraphe 34). Enfin, la régulation des prix est également autorisée comme obligation de service public, à condition qu’elle ne viole pas l’article 86 du Traité CE (paragraphe 35). La régulation des prix et la protection de clients vulnérables peuvent par exemple être autorisées sans qu’elles n'enfreignent le droit de la concurrence.

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2 COMPARAISON DES SECTEURS DU PETROLE ET DU GAZ NATUREL

2.1 COMPARAISON DES MARCHES INTERNATIONAUX DU PETROLE ET DU GAZ NATUREL

40. Les principales conditions connexes pour un fonctionnement efficace du contrat de programme pétrole sont formées par les caractéristiques du secteur pétrolier en lui-même. Si l’objectif est d’appliquer le contrat de programme pétrole dans d’autres secteurs, il est crucial qu’outre les caractéristiques du contrat de programme même, les caractéristiques du secteur pétrolier soient également examinées de plus près.

41. Le marché international du gaz naturel ne présente que peu de similitudes avec celui du pétrole, si ce n’est le fait que le gaz naturel est géologiquement souvent présent aux endroits d’exploitation du pétrole. Par rapport à l’électricité, le pétrole et le gaz naturel ont cependant en commun le fait que leur production et leur approvisionnement soient maîtrisés dans une large mesure par des transactions conclues en dehors de la portée de la libéralisation européenne des marchés de l'énergie. Les caractéristiques du gaz naturel et du pétrole diffèrent tellement que les marchés sur lesquels ces produits sont négociés sont aussi différents.

42. Le marché du pétrole est un oligopole homogène au niveau international : quelques offrants (80 % de la production mondiale provient du cartel de l’OPEP) ; quelques demandeurs (les sept grandes compagnies pétrolières) ; un produit homogène (la qualité du brent est la même dans le monde et partant, un marché transparent) et un accès difficile (l’offrant doit avoir du pétrole dans le sol et est tributaire d'autorisations).

43. Le marché du gaz naturel est un oligopole hétérogène au niveau régional. Le côté offre du marché du gaz naturel est même plus concentré que sur le marché du pétrole. Dans une perspective mondiale, les trois pays possédant les plus importantes réserves prouvées détiennent une part cumulée de 55,7 % du gaz naturel, tandis que pour le pétrole, les trois grands ne possèdent « que » 44,8 % des réserves mondiales. De même, les trois plus grands pays exportateurs nets possèdent une part mondiale de 49 % pour le gaz naturel contre 40 % pour le pétrole. Bien que le gaz naturel soit présent dans plus de régions différentes dans le monde, ce qui d’un point de vue géopolitique semble être favorable à la sécurité d’approvisionnement, la concentration de l’offre est encore plus perceptible en ce

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qui concerne les différents sous-marchés au monde.

44. A l’inverse du marché du pétrole, le marché du gaz dans sa forme actuelle ne peut pas vraiment être considéré comme un marché mondial. En raison du coût plus élevé du transport, qui représente un multiple du coût d’exploitation, et des possibilités de stockage moins nombreuses et plus coûteuses, le marché du gaz naturel a tendance dans un premier temps à se développer autour du lieu d’exploitation. C’est pourquoi le marché du gaz naturel se compose en fait de trois grands marchés régionaux, à savoir l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie, qui approvisionnent chacun un groupe de pays proches. L’offre sur le marché européen du gaz est très fortement concentrée et est caractérisée par une part de marché en baisse des producteurs internes (principalement le Royaume-Uni (18 %) et les Pays-Bas (13 %)) et une part de marché croissante des producteurs externes (Russie (26 %), Norvège (16 %) et Algérie (11 %)).

45. De même, au sein du marché régional européen, l’on distingue d’autres sous- marchés parce que le gaz naturel est un produit moins homogène que le pétrole. Les différents pays européens connaissent des spécifications (légèrement) divergentes, qui nécessitent parfois une infrastructure gazière totalement séparée. Ainsi, le gaz à faible pouvoir calorifique (gaz L) est distribué depuis les Pays-Bas en Belgique par le biais d'un réseau séparé de canalisations.

46. La scission régionale du marché du gaz naturel, résultant de facteurs de coût et de qualité, ne permet par conséquent pas d’harmonisation au niveau mondial en vue d’influencer le prix par le biais d’un système de quotas, comme l’OPEP peut le faire sur le marché du pétrole. En outre, l’existence d’un plus grand éventail de substituts au gaz naturel par rapport au pétrole accroît l’élasticité des prix du gaz naturel, d'une part, et réduit le pouvoir de marché d'un éventuel cartel gazier, d'autre part. Enfin, une série de considérations à plus court terme laisse apparaître qu’un cartel gazier fonctionnant comme l’OPEP est fort peu probable22 :

– Il n’y a pas d’offre excédentaire, tandis que le principe fondamental d’un cartel est d’utiliser l’offre pour jouer sur la liquidité du marché et ainsi influencer les prix qui, en ce qui concerne le gaz naturel, sont en outre surtout influencés par leur couplage avec les prix du pétrole ;

– Les caractéristiques spécifiques des relations contractuelles qui dominent le

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commerce gazier international ne permettent actuellement pas d’adapter facilement l’offre. En effet, la majeure partie de l’approvisionnement en gaz s’effectue par le biais de contrats à long terme qui en outre contiennent souvent des dispositions take- or-pay, tandis que les marchés spot représentent moins de 7 % du commerce international du gaz. Enfin, plusieurs contrats d’importation à long terme liant la Russie à des compagnies européennes telles que GdF, ENI, DONG et OMV, ont été prolongés de 20 à 25 ans.

– Le coût encouru par la conservation d’un excédent de capacité de production serait 6 fois moins élevé pour le pétrole que pour le gaz naturel ;

– Bien que la Russie soit le producteur dominant au sein du forum des pays exportateurs de gaz (GECF) avec d’importantes capacités de production, d’exportation et de réserve qui lui permettraient de jouer le rôle de « swing producer » comme le fait l’Arabie-saoudite au sein de l’OPEP, l’on peut se demander si elle souhaite endosser ce rôle puisque des restrictions de production volontaires sont financièrement plus pénalisantes pour le gaz naturel que pour le pétrole (cf. point précédent).

47. Bien qu’il n’existe actuellement pas de cartel du gaz naturel, le prix du gaz naturel en Europe occidentale est souvent étroitement lié au prix du pétrole (cf. tableau 1). La raison économique de cette indexation est liée à la concurrence entre le gaz naturel et le pétrole.

L’indexation se fait par le biais d’un mécanisme où un prix « net-back » est calculé en fonction des produits pétroliers en concurrence sur les mêmes marchés, appelés « market volume approach » par les compagnies gazières, ce qui se répercute sur le prix d’importation à la frontière.

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Tableau 2 : Principaux paramètres d’indexation dans les contrats d’importation à long terme par producteur et par marché (% des volumes contractés)

Pays-Bas Royaume Uni Autres producteurs UE

prix gazier 1,8% 37,0% 30,2%

prix pétrolier 92,8% 21,0% 68,3%

inflation 0,0% 28,1% 1,0%

Norvège Russie Algérie

prix gazier 4,0% 0,0% 0,0%

prix pétrolier 87,3% 92,1% 94,4%

inflation 2,7% 0,0% 0,0%

Royaume Uni Europe occidentale Europe orientale

prix gazier 40,1% 4,9% 0,0%

prix pétrolier 31,4% 84,7% 95,3%

inflation 16,5% 2,0% 1,1%

Par producteur

Par débouché

Source : Commission européenne (2007), DG Competition report on energy sector inquiry

48. Les prix du pétrole auxquels le prix du gaz est lié dans les contrats à long terme con- cernent généralement les notations internationales de prix du marché généralement agréées et acceptées (par ex. Rotterdam ou Londres). En effet, contrairement au gaz naturel, l’achat de pétrole brut et de produits pétroliers s’effectue presque exclusivement par des bourses internationales. A court ou à plus long terme, les achats se font par des options et des futures. Le prix international du pétrole est principalement déterminé en fonction des prévi- sions d'offre et de demande. Autrement dit, il n’est que peu question de contrats à long terme dans le secteur du pétrole. L’existence de ces bourses fonctionnant correctement facilite énormément la détermination d’une valeur marchande pour un produit comme le pétrole. Ce principe revêt également une importance capitale pour les produits dérivés du pétrole, puisque le prix du pétrole brut est un maillon essentiel de l'ensemble de la chaîne de valeur.

49. Le gaz naturel ne possède pas de notation similaire généralement acceptée et agréée pour déterminer sa valeur marchande. Il existe bien des bourses gazières comme Zeebrugge, mais leur importance dans le commerce total de gaz naturel est minime. D’une manière générale, il a déjà été dit au paragraphe 46 que les marchés spot représentent moins de 7 % du commerce international du gaz. Le portefeuille d’approvisionnement de Distrigaz confirme cette situation en Belgique (cf. figure 1), puisqu'à peine 9 % de ses achats de gaz se font sur le marché spot. L’absence d’un tel prix de marché du gaz naturel complique très fortement l’application similaire d’un contrat de programme relatif au gaz

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Figure 1 : Portefeuille d’approvisionnement de Distrigaz (2006)

35%

34%

17%

9%

5%

Pays-Bas Norvège Algérie Marché spot Autres

Source : Distrigaz, Rapport d’activités 2006

2.2 COMPARAISON DES MAILLONS NATIONAUX DE LA CHAINE DE VALEUR DU GAZ NATUREL ET DU PETROLE

50. Une fois que le gaz naturel ou le pétrole23 a atteint la frontière belge, il doit être transporté et distribué jusqu’au consommateur final. La grande différence entre les deux formes d’énergie, c’est que le gaz naturel nécessite une infrastructure de réseau, qui n’est par ailleurs pas soumise à la concurrence. Par contre, en vertu de directives européennes, les réseaux font l’objet de tarifs qui doivent être préalablement approuvés par un organisme de régulation national. Aucune autre forme de régulation tarifaire ne peut donc être appliquée.

51. En ce qui concerne le marché de détail, c’est-à-dire la livraison du gaz naturel ou du pétrole (ou des produits pétroliers finis) au consommateur final, il est question pour les deux formes d’énergie d’un mécanisme de marché où la concurrence devrait pouvoir jouer librement. Bien que le contrat de programme pétrole prévoit l’attribution de marges aux différents acteurs de la chaîne de valeur, à savoir les compagnies pétrolières, le détaillant- revendeur et le détaillant-gérant (cf. paragraphes 20, 21 et 22), la concurrence semble

23 Dans la plupart des cas, le pétrole devra encore être transformé en produits finis.

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mener à ce que des réductions soient accordées par rapport au prix maximum. Beaucoup s’explique par le fait que le marché de détail des produits pétroliers finis approche l’idéal de la concurrence parfaite : de nombreux offrants et demandeurs, des produits homogènes, une information parfaite et la liberté d'accéder et de quitter le marché. D’une part, ce dernier critère s’applique plus dans le chef des demandeurs que des offrants et d’autre part, la demande n’est pas toujours aussi libre (des substituts ne sont pas toujours aussi évidents, mais il y a néanmoins une certaine liberté de décision en ce qui concerne le moment de l’achat)24. Le marché du détail pour la fourniture de gaz naturel est beaucoup plus éloigné de l’idéal de la concurrence parfaite : moins d’offrants, l’information est moins parfaite parce que les nombreuses formules tarifaires des fournisseurs de gaz naturel qui génèrent des revenus différents en fonction du profil de consommation ne facilitent pas la comparaison des prix, et la liberté d’accéder et de quitter le marché est moins grande. Ainsi, la décision de placer une installation de chauffage au gaz naturel dans un logement est plus fondamentale que l’achat d’une voiture essence. De même, le moment de la demande est beaucoup moins flexible et peut à peine être influencé par des impulsions tarifaires.

2.3 CONCLUSION

52. Le marché international du gaz naturel ne présente que peu de similitudes avec celui du pétrole : le marché du pétrole est un oligopole homogène au niveau mondial, tandis que le marché du gaz naturel est un oligopole hétérogène au niveau régional. Bien qu'il n’existe pas de risque qu'un cartel gazier voit le jour à court terme, il convient de noter que le marché de ce produit est peu flexible : la combinaison simultanée de l’indexation des prix, les livraisons en vertu de contrats « take or pay » à long terme et le fait que les importations de l’Union européenne s’effectuent principalement par le biais de gazoducs fait que le marché du gaz naturel connaît très peu de concurrence entre un nombre restreints de pays producteurs internes et externes. En Belgique aussi, le prix moyen du gaz naturel importé dépend peu des notations sur des bourses gazières (internationales), puisque la majorité des importations s'effectue dans le cadre de contrats à long terme dont le prix est lié à celui du pétrole. L’absence d’un prix de marché du gaz naturel qui soit pertinent pour le prix du gaz naturel importé complique très fortement l’application similaire d’un contrat de programme relatif au gaz naturel comme celui actuellement en vigueur pour le pétrole.

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53. De même, il existe des différences considérables au niveau de la manière dont le gaz naturel ou le pétrole parvient chez le consommateur final après l’importation en Belgique. En ce qui concerne le pétrole, le contrat de programme ne régule que le prix final, tandis que pour le gaz naturel, deux composantes importantes de ce prix final, à savoir le transport et la distribution, sont totalement régulées, en ce compris des tarifs régulés d’accès à et d’utilisation de l’infrastructure réseau.

54. Enfin, le mécanisme de marché de la fourniture du gaz naturel ou du pétrole (et des produits pétroliers finis) diffère également fortement. Le marché de détail de la fourniture de gaz naturel est beaucoup plus éloigné de l’idéal de la concurrence parfaite que celui de la fourniture de produits pétroliers. Par conséquent, il est beaucoup moins évident que la concurrence va déboucher sur une situation où des réductions sont accordées par rapport aux prix de vente maxima.

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3 CONCLUSION GENERALE

55. Les principaux obstacles à l’application du contrat de programme pétrole dans le secteur du gaz naturel se situent au niveau du droit de la concurrence. Le point de départ, le contrat de programme pétrole en lui-même, n’est en effet pas épargné par les critiques. En 2001 déjà, le Conseil de la concurrence conseillait au ministre « afin d’éviter le risque de nullité d’office conformément aux articles 2 § 2 LPCE ou 81, al. 2, du Traité CE, le ministre est invité à reconsidérer le principe ou à tout le moins le fondement juridique de l’actuel système de contrat de programme. » Une piste possible, mais néanmoins très faible, est la reconnaissance par la Commission européenne qu’une régulation de prix ciblée peut être autorisée afin de protéger les consommateurs dans certaines circonstances particulières, notamment pendant la période transitoire vers un marché fonctionnant correctement.

Toutefois, la régulation des prix doit être équilibrée et ne peut pas compliquer l’accès au marché, créer une discrimination entre fournisseurs, renforcer des inégalités dans la concurrence ou brider la vente.

56. Par ailleurs, les secteurs du gaz naturel et du pétrole présentent de telles différences qu’il est tout sauf évident de transposer simplement les mêmes principes. Une régulation du prix final du gaz naturel ne semble pas être au bon niveau pour remédier au problème constaté. En outre, deux maillons importants de ce prix final, à savoir le transport et la distribution, sont d'ores et déjà totalement soumis à des tarifs régulés, au contraire du pétrole. De même, il n’existe pas de prix de marché du gaz naturel qui soit pertinent pour le prix du gaz naturel importé, ce qui complique très fortement l’application similaire d’un contrat de programme relatif au gaz naturel comme celui actuellement en vigueur pour le pétrole. Enfin, étant donné que le marché de détail du gaz naturel est moins concurrentiel que celui du pétrole, il n’est pas certain que la concurrence va déboucher sur l'octroi de réductions par rapport aux prix de vente maxima.

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Pour la Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz :

Guido Camps François Possemiers

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