Chapitre 2 : Méthodes Classiques d’Identification des Systèmes
CHAPITRE 2
METHODES CLASSIQUES
D'IDENTIFICATION DES SYSTEMES
2.1. Introduction
Le principe général des méthodes classiques d'identification des systèmes se base sur un concept pratique, qui consiste à injecter au système réel un signal test et à enregistrer sa réponse à ce signal test. A partir de cet enregistrement (réponse du système) il s'agit de déterminer, graphiquement ou par un calcul simple, les paramètres essentiels du système.
Il existe plusieurs signaux tests qui peuvent être utilisés pour identifier un système.
Les signaux tests les plus utilisés en pratique sont l'échelon, l'impulsion, le signal sinusoïdal et la séquence binaire pseudo-aléatoire (S.B.P.A).
2.2. Méthodes indicielles
Les méthodes indicielles pour l’identification des systèmes utilisent comme signal test un signal échelon dont l’amplitude dépend du système considéré.
2.2.1. Méthode de Boïda
La méthode de Broïda permet d'identifier les paramètres d'un système modélisé par une fonction de transfert du premier ordre comportant éventuellement un retard . Par conséquent la fonction de transfert est de la forme:
( ) (1 ) sT
s s e
G +
= −
(2.1)
Pour cela on relève sur la réponse indicielle y(t) les temps t1 et t2 correspondant, respectivement, à 28% et 40% de sa valeur comme l'indique la figure 1.
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Figure 1 : Méthode de Broïda
La résolution d’un système de deux équations à deux inconnues conduit aux deux relations suivantes permettant d'identifier la constante de temps T et le retard du système considéré.
T =5.5(t2 −t1)
=2.8t1−1.8t2 (2.2) 2.2.2. Méthode de Strejc
La méthode de Strejc est très utilisée pour l'identification des systèmes industriels d'ordre supérieur ou égal à 2 dont les réponses indicielles sont apériodiques. Ces systèmes industriels peuvent donc être modélisés par la fonction de transfert générale suivante :
sT n
s s e
G( ) (1 ) +
= −
(2.3)
Pour cela on trace la tangente à la réponse indicielle au point d'inflexion, cette tangente coupe l'axe des temps en un point d'abscisse Tu et l'asymptote qui représente le régime permanent un point d'abscisse (Tu +Ta) comme l'indique la figure 2.
Connaissant Tu et Ta donc le rapport (Tu /Ta)on peut à l'aide du tableau 1 déterminer les paramètres du système.
Lorsque le rapport (Tu /Ta) ne correspond pas à une valeur exacte du tableau on prend alors la valeur de n immédiatement inférieure et on introduit un temps mort qui est en fait le retard de la manière suivante.
Le rapport (Tu /Ta) est en fait :
mesuré tableau a
a u mesuré a
u mesuré a u
T T
T T
T T
T
+ + =
=
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Ce qui donne :
−
=
tableau a u mesuré a u mesuré
a T
T T
T T
(2.4)
Figure 2 : Méthode de Strejc
n (Tu /Ta) (Ta/T) (Tu /T) ti/T yi (Tm/T) (Tm/Ta)
1 0 1 0 0 0 1 1
2 0.104 2.718 0.282 1 0.261 2.000 0.736 3 0.218 3.695 0.805 2 0.323 2.500 0.677 4 0.319 4.463 1.425 3 0.353 2.888 0.647 5 0.410 5.119 2.100 4 0.371 3.219 0.629 6 0.493 5.699 2.811 5 0.384 3.510 0.616 7 0.570 6.711 3.549 6 0.394 3.775 0.606 8 0.612 7.164 4.307 7 0.401 4.018 0.599 9 0.709 7.164 5.081 8 0.407 4.245 0.587 10 0.773 7.590 5.869 9 0.413 4.458 0.587 Tableau 1. Tableau de Strejc
2.2.3 Méthode d'approximation de la réponse indicielle
La méthode de l’approximation de la réponse indicielle permet d’identifier les paramètres d’un système modélisé par une fonction de transfert dont la forme polynomiale est la suivante :
=
= = n
i i i m
j j j
s a
s b s
G
0
) 0
( (2.5)
Son principe consiste à approcher la réponse indicielle d'un système apériodique par une suite de segments de droite de pente i. A partir de la connaissance des
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pentes de tous les segments il s'agit de déterminer les paramètres ai et bj du système.
Pour cela, soit t1 le temps au bout duquel on juge que le régime transitoire est terminé. On divise l'intervalle [0 t1] en n périodes de durée T . Pour chaque période T la réponse indicielley(t) est assimilée à un segment de droite de pente i comme le montre la figure 5.
Figure 5 : Approximation de la réponse indicielle
La réponse indicielle du système est alors approximée par la somme des segments de droite et par conséquent on aura :
) (
) (
...
) ( ) (
) ( )
( )
( 0 1 0 1
0
nT t tu T
t tu t
tu t
y t
y n n
n
i
i = + − − + + − −
= −
= (2.6)On démontre que la fonction de transfert du système s’écrit sous la forme suivante :
k n
i
i i k k
k
k i s
k s T
G ( ( ))
)!
1 ) (
1 ( ) (
1
1 1
1
0
1
+ = + −=
+ −
− +
=
Cette fonction de transfert est de la forme : k
k ks C s
G
+=
=
0
)
(
avec
= + −
+ + −
− +
= n
i
i i k k
k
k i
k C T
1
1 1
1
1 ( )
)!
1 ) (
1
( (2.7)
D'autre part, pour une fonction de transfert quelconque, on peut toujours la développée en série de Taylor autour du point s=0 sous la forme suivante:
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k k
ks C s
G
=
=
0
)
( où
0
) (
! 1
=
=
s k k
k ds
s G d
C k (2.8) En identifiant terme à terme ces deux dernières relations on obtient les relations entre les pentes des segments de droites et les paramètres aiet bj de la fonction de transfert recherchée ce qui nous permet de les identifier.
.
2.3. Méthodes impulsionnelles
2.3.1. Méthode de Tsypkin
La réponse impulsionnelle g(t) d'un système du second ordre de fonction de transfert :
) ( ) ( ) )(
( ) 1 (
2 1
2
1 s s
B s
s A s
s s s s
G + +
= + +
= + (2.9)
est de la forme:g(t)=Aexp(−s1t)+Bexp(−s2t) Où s1 et s2 sont les pôles de la fonction de transfert G(s) et A et B sont des constantes. Considérons trois points de la réponse impulsionnelle aux instants d’échantillonnage n , (n+1), et(n+2) .
On peut alors écrire :
) exp(
) exp(
)
(n A s1n B s2n
g = − + − (2.10) )
) 1 ( exp(
) ) 1 ( exp(
) ) 1
((n+ =A −s1 n+ +B −s2 n+
g (2.11)
) ) 2 ( exp(
) ) 2 ( exp(
) ) 2
((n+ =A −s1 n+ +B −s2 n+
g (2.12)
L'objectif est de trouver une relation entre les valeurs de la réponse impulsionnelle )
(n
g , g((n+1))et g((n+2)) et les pôles de la fonction de transfert G(s) et par conséquent les constantes de temps du système. Cette relation est de la forme :
) exp(
) ) exp(
( ) 1 )] (
exp(
) [exp(
) (
) 2 (
2 1
2
1 s s
n g
n s g
n s g
n
g + = − + − + − − −
(2.13)
Cette relation est de type : Y=SX +P c'est-à-dire l'équation d’une droite, où )
exp(
)
exp( s1 s2
S = − + − etP=exp(−s1)exp(−s2). Le tracé de cette droite permet de déterminer les pôles s1 et s2 de la fonction de transfert, connaissant S et P à
constant.
2.3.2. Méthode des moments
Si la réponse impulsionnelle g(t) est une fonction continue su l'intervalle [0 t], on appelle moment d'ordre k de la fonction g(t), la quantité suivante, si elle existe:
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dt t g t mk k ( )
0
= (2.14)
Les différents moments mk peuvent être calculés en utilisant une des méthodes d’intégration numérique (méthode des rectangle ou méthode des trapèzes) ou en calculant les différentes intégrales de la fonction analytique g(t) correspondant aux différents moments mk.
D’autre part la fonction de transfert d’un système est de la forme :
dt e t g t
g TL s
G = =+
−st0
) ( )]
( [ )
( (2.15)
En comparant la relation définissant la transformée de Laplace G(s)à la relation définissant les moments mkon constate que :
+
= = =
0
0 ( ) 0
)
(s g t dt m
G s
m0 est appelé moment d’ordre zéro, il représente la surface comprise entre la courbe )
(t
g est l’axe des temps. En général, on s’arrange à ce que cette surface soit égale à l’unité.
dt e t tg dt
ds e t d ds g
s
dG st st
− + −+
−
=
=
0 0
) ( )
( ) ) (
(
1 0 0
) ) (
( tg t dt m
ds s dG
s
−
=
−
= +
=
m1 est appelé moment d’ordre un, il représente l’abscisse du centre de gravité de la surface unitaire précédente.
De la même manière la dérivée seconde est à relier au moment d’ordre deux, qui représente le moment d’inertie de la surface unitaire par rapport à l’origine. Ce qui s’écrit :
2 0
2 0
2 2
) ) (
( t g t dt m
ds s G d
s
=
−
= +
=
Et d’une manière générale le moment d’ordre k est donné par : )
) ( 1 ( ) (
+
−
=
=
k k k kk ds
s G dt d
t g t
m (2.16)
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Nous avons rappelé lors de la méthode de l’approximation de la réponse indicielle que le développement d’une fonction de transfert G(s)autour du point s=0 s’écrit :
k k
ks C s
G
+=
=
0
)
( avec
0
) (
! 1
=
=
s k k
k ds
s G d
C k En combinant ces deux dernières relations on obtient :
k k
k k C
m =(−1) ! ou k
k
k m
C k
! ) (−1
= (2.17)
ce qui conduit à : k
k
k k
s k m s
G
+=
= −
0 !
) 1 ) (
( (2.18)
A titre d’exemple, l’application de la méthode à la fonction de transfert de Strejc donne :
0 =1 m
+
=nT m1
2 2
2 =n(n+1)T +2nT + m
3 2 2
3
3 =n(n+1)(n+2)T +3n(n+1)T +3nT + m
Connaissant m1, m2 et m3 on en déduit n, T et par résolution du système d’équations.
2 3 1 2 1 3
3 2 1 2
) 2 3
(
) (
4
m m m m
m n m
+
−
= −
) (
2
) 2 3
(
2 1 2
3 1 2 1 3
m m
m m m T m
− +
= −
) 2 3
(
) (
2
3 1 2 1 3
2 2 1 2
1 m mm m
m m m
+
−
− −
=
2.4. Exemples d’applications
Ex.2.1 : Un moteur à courant continu, associé à son dispositif d’alimentation et à sa tachymétrie a donné la courbe de réponse ci-dessous lors d’un essai indiciel.
) (ms
t 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 )
(V
Vs 0 0.109 0.298 0.474 0.614 0.720 0.798 0.855 0.896 0.925 0.940
1°)- Déterminer les paramètres de la fonction de transfert de Broïda et les paramètres de la fonction de transfert de Strejc. Conclusion ?
Solution :
1°) L=4ms, R 0.0169V/s 59
1 =
=
Chapitre 2 : Méthodes Classiques d’Identification des Systèmes
275 1
. 9 13 .
0 −
=
= V
Kp RL , 1 0.3 0.075 −1
=
= ms
L
Ti donc 0.075)
1 ( 275 . 13 )
(s s
R = +
2°) Broïda : t1=22ms t2 =32ms donc n=1, T =54ms, =4ms Strejc : Tu =4ms, Ta =59ms donc n=1, T =59ms, =3.99ms
Ex.2.2 : Lors d’un essai indiciel sur un moteur à courant continu on a relevé les résultats suivants :
) (ms
t 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 )
(V
Vs 0 0.125 0.135 0.140 0.145 0.300 0.360 0.410 0.470 0.490 0.495
1°)- Déterminer la fonction de transfert de ce système par la méthode de Broïda et par la méthode de Strejc.
2°)- Déterminer la fonction de transfert du correcteur PID.
Ex.2.3 : Lors d’un essai indiciel sur un système dont on ignore les paramètres on a relevé la réponse suivante (Voir figure).
Pour des raisons pratiques on doit imposer à la réponse impulsionnelle de ce système une surface unitaire, l’abscisse du centre de gravité de cette surface doit être inférieur à deux (02) secondes et son moment d’inertie ne doit pas dépasser les six (06) unités. Justifier votre réponse pour l’identification de ce système.
Figure 2.3 : Réponse indicielle d’un système
Chapitre 2 : Méthodes Classiques d’Identification des Systèmes
Ex.2.4 : La fonction de transfert d’un système est:
) 1 (
) ) exp(
(
1
1 sT
s s
G +
= −
On décide de rechercher une fonction de transfert équivalente sous la forme
2 2
2 (1 )
) 1
(s sT
G = + . L’équivalence des deux fonctions de transfert est évaluée en se basant sur l’égalité des moments de même ordre.
1°. Quelles relations doivent vérifier m1 et m2 pour que la forme G2(s) soit possible.
2°. Vérifier qu’avec T1=1sec et =0.4secon est dans ce cas. En déduire alors T2. Solution :
1°) m11=m21 et m12 =m22 ou +T1 =2T2 et 2 +2T1 +2T12 =6T22 2°) T2 =0.7sec.
Ex.2.5 : Un système est modélisé par une fonction de transfert de la forme : )
3 )(
2 )(
1 ( ) 6
( = + + +
s s s s
H . On désire recherche une fonction de transfert sous la forme de Strejc équivalente en se basant sur l’égalité des moments de même ordre.
Solution:
97 . 15 ,
72 . 4 ,
83 . 1 ,
1 1 2 3
0 = m = m = m =
m , 1.88
) 85 . 0 1 (
) 23 . 0 ) exp(
( s
s s
H +
= −
Réferences
[1] Aström K.J. and Eykhoff P: System identification, a survey. 2nd IFAC symposium on Identification and Process Parameter Estimation. Prague, Czechoslovakia.
1970.
[2] Eykhoff P.: Process parameter and state estimation. Automatica, Vol.16, pp.205- 233. 1968.
[3] Gustavsson I.: Survey of applications of identification in chemical and physical processes. Automatica. Vol.11, pp.3-21. 1975.
[4] Fasöl K.H. and Jorgl H.P.: Principles of model building and identification.
Automatica. Vol.16, pp.505-518. 1980.
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