É D I T O R I A L
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mpiriquement, l’humanité sait de tout temps que tout ce qui est naturel n’est pas nécessairement sans danger. Mais après plus d’un siècle d’études, les scientifiques ont montré que de nombreuses espèces animales, végétales ou microbiennes produisent une vaste diversité de toxines, dont la vocation première est de dérégler le fonctionnement d’une cible moléculaire, d’une cellule, d’un organe ou d’un organisme.D
e nature chimique variée, alcaloïdique, lipidique, peptidique, protéique, etc., les toxines peuvent être hautement dangereuses pour les humains, telle la toxine botulique, une des toxines connues les plus puissantes vis-à-vis de l’homme. D’autres, au contraire, sont sans effet sur la physiologie humaine mais affectent celle d’un autre être vivant, comme par exemple un insecte.L
es toxines semblent ainsi taillées sur mesure pour agir de manière adaptée. Claude Bernard, voici plus de 150 ans, avait le premier compris tout le parti qu’un physiologiste pouvait tirer de ces bistouris moléculaires pour étudier le fonctionnement du vivant. Aujourd’hui, les toxines nous révèlent une autre de leurs facettes, leur utilité possible pour l’homme, en devenant médicaments, cosmétiques ou pesticides.L
e dossier du mois vise à montrer que la diversité du vivant se retrouve dans le monde des toxines qu’il engendre, et qu’il importe de considérer ces substances avec attention non seulement pour s’en protéger mais aussi pour en exploiter le fort potentiel d’utilité pratique. Pour ces deux raisons, la toxinologie, c’est-à-dire l’étude des toxines d’origine animale, végétale ou microbienne, est devenue une discipline scientifique très active. GAndré Ménez Président du Muséum national d’histoire naturelle
Les toxines
Dr Jekyll et Mr Hyde
BIOFUTUR 272 • DÉCEMBRE 2006 1
© VISUALS UNLIMITED/CORBIS
Œuf de papillon monarque (Danaus plexippus) sur des feuilles d’Asclepias, dont certaines espèces contiennent un poison, qui va être absorbé par la chenille, la protégeant ainsi des prédateurs.
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