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Les syndromes paranéoplasiques en rhumatologie.

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Les syndromes paranéoplasiques rhumatologiques sont un ensemble de symptômes reliés à une néoplasie connue ou infra clinique. Ces syndromes peuvent précéder, succéder ou être concomitants avec la tumeur et disparaissent après le traitement radical de la néoplasie. Certes, de tels syndromes se rencontrent par définition au cours d’un processus tumoral, mais leur symptomatologie est possiblement induite par une cause non tumorale, ce qui est mis en évidence pour l’ostéoarthropathie hypertrophiante pneumique de Pierre Marie (OAH) qui

reste l’exemple historique du syndrome paranéoplasique rhumatologique [1]. Les syndromes paranéoplasiques rhumatismaux et systémiques peuvent se classer en articulaires, neuromusculaires, cutanés, vasculaires et divers [2]. Certaines pathologies sont beaucoup plus fréquentes que d’autres. On a exclu dans cette mise au point les tumeurs survenant au cours de l’évolution d’un rhumatisme inflammatoire chronique ou d’une maladie auto immune.

Résumé

Les syndromes paranéoplasiques sont un groupe d’affections associées à des tumeurs malignes indépendemment reliés à leurs sièges ou à leurs tailles. Ils sont médiés par des facteurs solubles tels que des hormones et des cytokines secrétés par une néoplasie sous jacente. Il peut s’agir d’une conséquence des mécanismes immunitaires humoraux ou cellulaires à l’encontre des cellules tumorales et donc ilsse révèlent à distance de la tumeur maligne responsable. Dans le cas des syndromes paranéoplasiques en rhumatologie, qui sont assez rares, les symptômes musculo squelettiques intéressent essentiellement les articulations, les muscles, les os, les fascias ou les vaisseaux. L’intervalle entre l’apparition des signes rhumatologiques et le diagnostic de la tumeur associée ne dépasse pas souvent les 2 ans, ce qui constitue une importance clinique considérable qui permet la détection précoce et le traitement à temps du cancer.

Mots clés :

Syndrome paranéoplasique;

Ostéoarthropathie hypertrophiante; Hippocratisme digital.

Abstract

Paraneoplastic syndromes are a group of disorders associated with malignant diseases, particularly independent from the location and the size of the tumor. They are mediated by soluble factors, such as hormones and cytokines from a cancer. This may be a consequence of humoral or cellular immune mechanisms directed against tumour cells and, therefore, often occur at regions distant from the underlying malignancy. In the case of paraneoplastic syndromes in rheumatology, which are rare, musculoskeletal symptoms arise in joints, muscles, bones, fasciae or vessels generally no longer than 2 years before the diagnosis of an associated neoplasm, and can therefore be of the utmost clinical importance for early detection and therapy.

Key words :

Paraneoplastic syndrome;

Hypertrophic osteoarthropathy syndrome;

Clubbing.

Les syndromes paranéoplasiques en rhumatologie.

Paraneoplastic syndromes in rheumatology.

Imad Ghozlani

1

, Mirieme Ghazi

2

, Radouane Niamane

2

1 Service de Rhumatologie, 1er Centre Médico Chirurgical, Agadir - Maroc.

2 Service de de Rhumatologie, Hôpital Militaire Avicenne, Marrakech - Maroc.

Rev Mar Rhum 2016; 35: 22-8

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IMMunopAthogènIe Des synDRoMes pARAnéoplAsIques RhuMAtologIques

Deux mécanismes sont suggérés. Le premier est lié à l’effet direct de médiateurs autocrines ou paracrines (cytokines, hormones, peptides, facteurs de croissance….) libérés par les cellules tumorales qui génèrent un processus inflammatoire dans les tissus cibles. Le deuxième correspond à une réaction d’hypersensibilité due, soit à l’expression par la tumeur d’antigènes exprimés par les cellules/tissus ciblés par la maladie auto-immune, soit à la libération d’antigènes intra-cellulaires, incluant des protéines associées aux acides nucléiques, à partir des cellules tumorales apoptotiques. Cette dysfonction du système immunitaire stimule la production d’auto anticorps et de lymphocytes cytotoxiques. Il en résulte la production, non seulement d’auto anticorps anti-nucléaires voire anti-ADN double brin, mais aussi de toute une variété d’auto anticorps dirigés contre des antigènes tissulaires dans le sérum des patients ayant ces manifestations paranéoplasiques. Ces 2 mécanismes peuvent être associés [3].

ostéoARthRopAthIe hypeRtRophIAnte pneuMIque De pIeRRe MARIe (oAh)

L’OAH de Pierre Marie prenant également le nom de pachydermopériostose est un syndrome clinique et radiologique associant un hippocratisme digital, une périostose des os longs et une polyarthrite sub aigue ou chronique, secondaire dans 90% à une néoplasie bronchique non à petites cellules. La prévalence de l’OAH pneumique de Pierre Marie est estimée entre 3 et 5 % de l’ensemble des OAH secondaires. Du fait de l’augmentation de l’incidence du cancer pulmonaire chez la femme, le sex-ratio a manifestement changé durant ces dernières années et estimé actuellement à 11 hommes pour cinq femmes [4].

Des hypothèses pathogéniques ont été proposées dans la survenue de l’OAH, la plus pertinente est celle du shunt droit-gauche. En effet, cette anomalie anatomique pourrait être responsable de la présence dans la grande circulation de mégacaryocytes incomplètement clivés. L’agrégation périphérique des plaquettes dans le lit capillaire serait à l’origine d’une libération de facteurs de croissance, inducteurs de la formation de la matrice extracellulaire (PDGF et TGFβ1) ou vasodilatateurs (VEGF). Cette théorie explique la présence de microthrombi au sein du lit unguéal, de la synoviale et du périoste, correspondant à des dépôts de fibrinogène ayant franchi la paroi

vasculaire endommagée et responsables d’une activation endothéliale et d’une hypoxie locale. Chronologiquement, on constate initialement l’apparition d’un œdème inflammatoire des tissus adjacents à l’os avec présence de nombreux fibroblastes associés à une augmentation de l’épaisseur du périoste. Par la suite, les structures fibreuses deviennent ostéoïdes et se calcifient. D’autres mécanismes ont été suggérés dans la physiopathologie de l’OAH telle l’hormone de croissance interagissant avec d’autres facteurs vasodilatateurs associant l’hypertonie vagale, la ferritine et les prostaglandines (PGE2 et PGF2) [5].

Cliniquement, l’OAH est souvent le syndrome révélateur lorsque la néoplasie pulmonaire évolue lentement et silencieusement, elle se manifeste comme un ensemble syndromique associant un syndrome acromélique comportant un hippocratisme digital, une hypertrophie des parties molles et des troubles vasomoteurs, un syndrome articulaire avec des arthralgies ou arthrites et un syndrome osseux comprenant une périostose engainante.

l’hippocratisme digital

Il s’agit d’une incurvation intéressant le plan frontal et sagittal de l’ongle, touchant les doigts et parfois les orteils, réalisant un bombement en « verre de montre ». Il s’y associe une déformation de la dernière phalange, élargie en « baguette de tambour » ou en « battant de cloche ».

Un rapport des épaisseurs de l’index mesurées de profil à l’interphalangienne distale et à la racine de l’ongle supérieur à 1,10 authentifie l’hippocratisme digital [6].

l’hypertrophie des parties molles

L’aspect boudiné des doigts et des orteils évoque plus ou moins l’acromégalie. Toutefois, l’hypertrophie prédomine essentiellement sur les parties molles et siège au niveau des extrémités. Il peut s’y associer un œdème et un épaississement cutané donnant un aspect en « pied d’éléphant » [7].

les phénomènes vasomoteurs

Ils sont secondaires à l’augmentation du flux sanguin, et s’expriment par des œdèmes, surtout aux membres inférieurs, une hypersudation et un érythème chronique modéré [7].

l’atteinte articulaire

C’est le mode de révélation le plus fréquent de l’OAH. Elle précède le diagnostic de cancer pulmonaire d’un délai variable de 4 à 5 mois.

Il s’agit de simples arthralgies, le plus souvent symétriques,

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touchant les grandes mais surtout les petites articulations, d’horaire mécanique ou inflammatoire. Plus rarement, il peut s’agir d’une oligoarthrite subaiguë. Les articulations les plus fréquemment touchées sont les genoux et les chevilles. Dans la majorité des cas, la vitesse de sédimentation est élevée. Le diagnostic différentiel avec d’autres rhumatismes articulaires peut donc être difficile (polyarthrite rhumatoïde, remitting seronegative symetrical synovitis with piiting edema syndrome (RS3PE), pseudopolyarthrite rhizomélique avec atteinte articulaire périphérique) [8].

Sur le plan radiologique, une périostose est généralement découverte. Elle est bilatérale, symétrique et progressive, ce qui explique les formes incomplètes. L’évolution de la périostose se traduit par une augmentation du nombre des os atteints (les os initialement touchés étant habituellement les tibias, les péronés, puis les fémurs, les cubitus et, très tardivement, les phalanges), puis une extension de la périostose sur un même os (apparaissant d’abord au niveau de la diaphyse, le plus souvent distale, puis s’étendent à la métaphyse et à l’épiphyse); ensuite un épaississement progressif de l’apposition périostée se produit [9].

La scintigraphie osseuse permet de détecter les anomalies précédant habituellement les signes radiologiques, permettant ainsi un diagnostic plus précoce. Il s’agit de bandes parallèles d’hyperfixation siégeant le long des diaphyses des os longs. La diminution de ces hyperfixations scintigraphiques après traitement de l’OAH est plus précoce que la disparition des signes radiologiques ce qui permet d’apprécier rapidement l’efficacité du traitement.

On note également des anomalies scintigraphiques aux sites squelettiques dont l’exploration radiologique est difficile : omoplates, clavicules, crâne (maxillaires inférieur et supérieur), voire une hyperfixation des phalanges distales des mains [10].

D’autres affections peuvent prêter à confusion l’OAH de Pierre Marie notamment les OAH secondaires d’originecardiaque, hépatique, intestinale ou pulmonaire (infectieux). De même, devant une dysacromélie on peut évoquer une acromégalie débutante. Toutefois, l’absence d’hippocratisme digital et de périostose la distingue.

L’acropachie thyroïdienne comporte de nombreux signes communs avec l’OAH (hippocratisme digital, périostose et infiltration oedémateuse des tissus mous). Toutefois, elle s’en distingue par la localisation médiodiaphysaire de la périostose et l’existence de signes évoquant l’origine thyroïdienne (exophtalmie et myxoedème prétibial) et à la fin, un effondrement des tissus mous dû à l’érosion sévère des

houppes phalangiennes observé dans l’hyperparathyroïdie peut être responsable d’un pseudohippocratisme digital.

L’apposition périostée, parfois révélatrice, est fréquente au cours de certaines affections pouvant comporter une atteinte osseuse inflammatoire. Il peut s’agir d’une ostéite infectieuse, d’une spondyloarthrite, d’un infarctus osseux ou d’une tumeur osseuse telles un ostéosarcome ou un sarcome d’Ewing. Le caractère localisé de l’apposition périostée et l’absence des autres signes évocateurs d’OAH permettent, le plus souvent, d’éliminer facilement cette hypothèse diagnostique. L’apposition périostée peut également traduire l’inflammation vasculaire comme au cours de l’insuffisance veineuse, de la périartérite noueuse ou de la maladie de Takayashu [11].

Le Traitement curatif de l’OAH de Pierre Marie repose sur l’exérèse radicale du cancer bronchique couplée à la radio chimiothérapie. En ce qui concerne les arthralgies, les antalgiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens et la corticothérapie orale sont peu efficaces.

Des perfusions annuelles de pamidronate à la dose de 1 mg/kg ont pu diminuer les douleurs articulaires [12]. Le pronostic dépend de l’agressivité et le stade du cancer bronchique. Généralement, l’exérèse tumorale causale permet l’amélioration de l’atteinte articulaire. Les images scintigraphiques s’améliorent en 2 à 6 mois. Tandis que la périostose radiologique diminue lentement et se fond progressivement avec la corticale. L’hippocratisme digital récidive souvent lors de la rechute de la tumeur ou lors de la survenue de métastases [8].

RhuMAtIsMes InFlAMMAtoIRes pARAnéoplAsIques

la pseudopolyarthrite rhizomélique (ppR) paranéoplasique

La PPR associée aux cancers est peu fréquente. Cependant, cette possibilité justifie constamment une attitude de prudence. En effet, la PPR paranéoplasique présente certaines atypies : atteinte asymétrique voire unilatérale sur les sites habituels, VS anormalement basse (< 40 mm1ère heure) ou très élevée (> 100) et absence de réponse à la corticothérapie par voie générale à faible dose. Les pathologies tumorales les plus fréquemment observées sont des syndromes myéloprolifératifs (myélome multiple) et myélodysplasiques [13].

la polyarthrite aiguë œdémateuse bénigne du sujet âgé (Rs3pe)

Aux signes du RS3PE se surajoutent parfois une fièvre,

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souvent une altération de l’état général. Au bout de quelques mois, sous traitement, la persistance de ce fléchissement de l’état général ou une cortico dépendance doit faire évoquer une néoplasie sous jacente [14].

la polyarthrite paranéoplasique isolée

L’éventualité d’un cancer évoluant sous le masque d’une polyarthrite doit souvent rester à l’esprit, particulièrement lorsque les manifestations apparaissent de façon explosive et qu’elles surviennent chez une personne âgée (tableau 1) [15].

pseudo-maladie de still paranéoplasique

Il associe une polyarthrite fébrile, une éruption maculopapuleuse fugace au moment des accés fébriles, une polynucléose neutrophile et des anomalies biologiques hépatiques, précédant de façon immédiate la découverte d’une néoplasie (syndrome myéloprolifératif, cancer épidermoïde ORL, cancer du sein ou de la thyroïde). Les réactions ganglionnaires parfois impressionnantes sont souvent retrouvées dans quelques cas de maladie de Still de l’adulte et peuvent au contraire faire évoquer à tort l’hypothèse d’un lymphome. L’évolution de la maladie systémique est favorable après traitement du cancer [16].

synDRoMes neuRo MusCulAIRes pARAnéoplAsIques

la dermatomyosite (DM) et la polymyosite (pM) paranéoplasiques

La probabilité que la DM ou la PM soit paranéoplasique est d’autant plus forte que les patients sont âgés en particulier de plus de 65 ans. La traduction clinique de la DM paranéoplasique est proche de celle de la DM non

paranéoplasique, à l’exception des lésions dermatologiques ulcéronécrotiques qui seraient plus fréquentes dans la forme paranéoplasique. Le syndrome cutané est souvent inaugural, l’atteinte musculaire retardée, mais d’aggravation rapide aboutit à une impotence fonctionnelle sévère. Le risque d’un cancer existe aussi dans les formes décrites sous le nom de DM sans myosite ou DM amyopathique. La présence des anticorps anti Jo1 ou anti Mi2 n’est pas discriminative d’une forme non paranéoplasique. La prise en charge thérapeutique de la DM et de la PM paranéoplasique est difficile. En effet, la corticothérapie et les traitements par le méthotrexate, l’azathioprine ou le rituximab sont peu efficaces. Une régression de la DM ou de la PM est possible mais non obligatoire avec le traitement radical du cancer. La néoplasie incriminée dans la DM ou PM est d’origine diverse (bronchopulmonaire, gastrointestinale, nasopharyngée, ovarienne, utérine, testiculaire ou prostatique). Plus rarement il peut s’agir d’un lymphome, d’une leucémie ou d’un mélanome [17] .

le syndrome myasthénique de lambert-eaton Il se traduit par une fatigabilité excessive aux efforts, une hyporéflexie et une faiblesse musculaire pelvienne et à la racine des membres inférieurs. Le syndrome myasthénique de Lambert-Eaton est relié à un cancer pulmonaire à petites cellules dans 60 % des cas [18].

le syndrome de l’homme raide

Il s’agit plus d’une affection immunologique plutôt que néoplasique. Elle se caractérise par une rigidité progressive diffuse, axiale et aux membres inférieurs associée à des spasmes déclenchés par un contact ou une contraction volontaire. Les affections malignes rapportées au cours du syndrome de la personne raide sont surtout le cancer du sein, et dans quelques cas le cancer du poumon à petites cellules, la maladie de Hodgkin, le thymome. Les anticorps anti glutamic acid decarboxylase ou GAD se rencontrent volontiers dans la forme auto-immune et plus rarement dans la forme paranéoplasique [19].

tRouble Du MétAbolIsMe phosphoCAlCIque D’oRIgIne pARAnéoplAsIque

l’hypercalcémie paranéoplasique liée à la parathormone-related peptide (pth-rp)

La tumeur en cause est souvent évidente, révélée par l’examen clinique, la radiographie pulmonaire et d’autres examens, en particulier d’imagerie orientés selon le contexte clinique.

Les affections malignes incriminées sont nombreuses : cancer bronchique, mammaire, cancers du rein, de la - Age de plus de 50 ans.

- Délai moyen entre l’arthrite et le diagnostic de cancer < 6 mois.

- Polyarthrite (symétrique ou asymétrique).

- Faible réponse aux corticoïdes.

- Altération de l’état général.

- Absence de nodule rhumatoïde.

- Absence de facteur rhumatoïde.

- Elévation du taux de CRP.

- Absence d’érosion sur les radiographies standards.

- Régression de l’arthrite après un traitement anti tumoral.

Tableau 1 : Critères d’aide au diagnostic d’une polyarthrite paranéoplasique.

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vessie, de l’ovaire, de la prostate, du pancréas, certaines leucémies, le myélome multiple, le mélanome malin. Le tableau biologique de sécrétion de PTH-rP correspond à celui d’une hyperparathyroïdie primaire (hypercalcémie, hypophosphatémie, hypercalciurie) mais le taux de la (1-84) PTH et la 1-25 OH2 vitamine D s’avèrent bas. L’élévation de la PTH-rP plasmatique confirme le diagnostic [20].

l’hypercalcémie paranéoplasique liée à d’autres facteurs humoraux

Dans certains lymphomes, une hypercalcémie ou plus souvent une hypercalciurie peut être due à une activité de la 1α-hydroxylation excessive de la vitamine D. Il s’agit de la même situation qu’au cours de la sarcoïdose. Le taux plasmatique de la 1-25 OH2 vitamine D est souvent augmenté. Le taux de la PTH est bas. La corticothérapie est efficace [21].

l’ostéomalacie paranéoplasique :

La majorité des tumeurs responsables de l’ostéomalacie paranéoplasique oncogénique est bénigne. L’origine de la tumeur est souvent mésenchymateuse (fibrome, dermatofibrome, schwannome mais aussi ostéosarcome) ou vasculaire (hémangiopéricytome), Quelques cas de cancer de la prostate sont rapportés. L’examen clinique ne permet pas souvent de dépister la tumeur en cause. D’où l’intérêt de la scintigraphie à l’octréotide qui permet de la localiser. Ces tumeurs s’accompagnent de la sécrétion d’une ou plusieurs substances circulantes (FGF23 et MAP kinase) inhibant la réabsorption tubulaire des phosphates et empêchant ainsi la 1α-hydroxylation de la vitamine D [22].

synDRoMe FAsCIIte pAlMAIRe

Ce syndrome touche électivement les femmes. Il se manifeste par un enraidissement des articulations des mains, qui sont le siège d’un œdème palmaire en rapport avec un épaississement du fascia, volontiers nodulaire ainsi que des troubles vasomoteurs. L’évolution se fait vers l’apparition d’une induration et d’une rétraction des gaines synoviales, source d’attitudes vicieuses avec flexion irréductible des doigts. La polyarthrite touche les métacarpo phalangiennes et les inter-phalangiennes des doigts, les poignets, les coudes et les genoux. Les épaules sont volontiers le siège d’une limitation passive et active évoquant une rétraction capsulaire. Les radiographies des mains et poignets, difficiles à interpréter compte tenu de la rétraction, peuvent montrer, après plusieurs semaines d’évolution, une déminéralisation osseuse sous chondrale régionale, et parfois un aspect micro ou macrogéodique, évoquant une algodystrophie. La fasciite

palmaire précède le diagnostic du cancer en moyenne d’un an. Le cancer de l’ovaire reste la tumeur la plus fréquemment observée. Les autres cancers associés sont pancréatiques, coliques, bronchiques ou mammaires. Il peut s’agir aussi d’hémopathies malignes [23].

AtteIntes vAsCulAIRes pARAnéoplAsIques [24]

le syndrome de Raynaud paranéoplasique

Chez certains patients, en général d’âge supérieur à 50 ans, un syndrome de Raynaud souvent sévère peut être en relation avec un cancer des poumons, du tractus digestif, de l’ovaire ou du sein, du pancréas, du rein ou bien une hémopathie.

l’érythromélalgie paranéoplasique

Elle se traduit par des accès douloureux accompagnés de gonflement et de rougeur des téguments siégeant aux extrémités, surtout aux pieds. Les crises s’atténuent au froid et sous l’action de l’aspirine. Une érythromélalgie est possiblement liée à une polyglobulie de Vaquez ou une thrombocytémie essentielle.

la nécrose digitale paranéoplasique

Une nécrose digitale paranéoplasique peut révéler une tumeur maligne, en particulier bronchopulmonaire, digestive ou rénale. Le mécanisme en est une vascularite paranéoplasique, un spasme artériel (proche du phénomène de Raynaud) et des microthromboses.

la vascularite paranéoplasique

La prévalence d’une affection maligne au cours d’une vascularite, surtout chez les sujets âgés, est évaluée à environ 4,5 %, avec environ deux tiers d’hémopathies, un tiers de tumeurs solides. Les intervalles extrêmes entre la vascularite et un cancer solide sont de 2 ans et 8 mois avant le cancer et 14 mois après le diagnostic de la néoplasie.

La symptomatologie de la vascularite paranéoplasique est semblable à celle de la vascularite non paranéoplasique. Il n’y a pas de marqueurs spécifiques de tels cas de vascularite.

L’importance de l’altération de l’état général peut orienter vers une affection maligne.

AutRes pRésentAtIons ClInIques

RhuMAtIsMAles systéMIques pARAnéoplAsIques

la réticulohistiocytose multicentrique

C’est une affection rare qui, dans environ 15 à 28 % des cas s’associe à un cancer de nature diverse, tumeur

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solide (urologique) ou hémopathie maligne. Elle peut également s’associer à diverses maladies auto-immunes.

La réticulohistiocytose touche environ deux fois sur trois la femme, et apparaît volontiers lors de la quatrième décade.

Les principales manifestations sont cutanées et articulaires.

Les lésions dermatologiques sont faites de papules et de nodules se localisant surtout au niveau de la moitié supérieure du corps, et singulièrement la face ainsi que les mains avec une prédilection pour les zones péri unguéales donnant un aspect caractéristique en lit de corail. L’atteinte articulaire peut prêter à confusion avec une polyarthrite rhumatoïde.

L’évolution se fait une fois sur deux vers une polyarthrite destructrice et mutilante. Le diagnostic ne peut être établi que par l’étude histologique, soit de la peau, soit de la membrane synoviale. Dans les formes paranéoplasiques, l’évolution de la réticulohistiocytose multicentrique est favorable après le traitement du cancer [25].

la fasciite de shulman (Fasciite à éosinophilie) Il s’agit de fasciites des extrémités et du tronc associées à des rétractions articulaires et à une éosinophilie sanguine avec hyper gammaglobulinémie. Des formes familiales ont été rapportées au cours du cancer mammaire. Le tableau de fasciite précède habituellement le cancer de plusieurs mois (médiane 1 an), la prédominance féminine est habituelle. Il n’y a pas de bonne réponse à la corticothérapie et la régression est inconstante après le traitement de la tumeur [26].

le rhumatisme de Jaccoud paranéoplasique

C’est une polyarthrite non érosive s’accompagnant de déformations réductibles des doigts avec un coup de vent cubital, une flexion des MCP et parfois un aspect en col de cygne. Ce rhumatisme se voit aujourd’hui surtout dans le lupus systémique, mais il a été aussi rapporté au cours des cancers du poumon [27].

la polychondrite paranéoplasique : les cancers décrits dans cette atteinte sont des leucémies, des lymphomes, surtout des syndromes myélodysplasiques et plus rarement des carcinomes. La chondrite précède ou suit le diagnostic de la néoplasie. La corticothérapie apparaît efficace ainsi que le traitement de la tumeur maligne associée [28].

l’algodystrophie paranéoplasique : peut s’associer à des tumeurs malignes de différents types, en particulier le cancer épidermoïde du poumon mais aussi les cancers du côlon, du pancréas, de l’ovaire ou des leucémies myéloïdes [29, 30].

la sclérodermie paranéoplasique : Un risque accru de cancer singulièrement pulmonaire, mammaire, et de lymphome au cours de la sclérodermie est rapporté. Dans la majorité des cas, il s’agit de cancer survenant au cours d’une sclérodermie déjà installée, souvent ancienne. Une évolution parallèle est parfois notée avec notamment une amélioration notable de la sclérodermie lors du traitement du cancer [30].

le syndrome de Weber Christian ou « arthrite- panniculite »: c’est une pathologie rare qui se caractérise par des arthromyalgies, des poussées fébriles récurrentes, une panniculite avec des nodules profonds prédominant aux jambes et aux cuisses, mais touchant également les bras, le tronc, les seins, la face ou les fesses. Le mécanisme physiopathologique semble être dû à une libération dans la circulation sanguine d’enzymes pancréatiques qui détruisent le tissu graisseux, en particulier la lipase et la trypsine. Le cancer pancréatique est fortement incriminé [31].

la goutte articulaire et rénale : peut se développer chez des patients souffrant d’une leucémie, d’une polyglobulie de Vaquez, d’une thrombocytémie essentielle, d’un lymphome, d’un myélome, et plus rarement d’un carcinome, avant ou après la mise en route de la chimiothérapie [32].

l’arthropathie amyloïde: se rencontre essentiellement au cours du myélome multiple [33].

ConClusIon

Les syndromes paranéoplasiques rhumatologiques sont un groupe d’affections associées à des tumeurs malignes indépendamment reliées à leurs sièges ou à leurs tailles. Ils permettent de découvrir la tumeur responsable en adaptant une stratégie adéquate des explorations paracliniques.

Si le traitement tumoral est efficace, les manifestations paranéoplasiques disparaissent alors et ne réapparaîtront qu’en cas de récidive ou de métastases. Ce traitement tumoral n’est toutefois pas toujours suffisamment efficace, et un traitement symptomatique, éventuellement immunologique ou à visée osseuse, reste souvent nécessaire.

DéClARAtIon D’IntéRêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt.

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