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Texte intégral

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2014

Université Paris 1

Ecole nationale d’administration

Master « Relations internationales et Actions à l’Etranger » Parcours « Administration publique et Affaires Internationales »

La législation en matière de protection des travailleurs domestiques au Liban : quelles leçons retenir du cadre

juridique et réglementaire français ?

soutenu par Denise Dahrouj

CIP Promotion Jules Verne (2013-2014)

Sous la direction de Alix Toublanc Maître de conférences

Université Paris 1

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REMERCIEMENTS

En premier lieu, je voudrais bien remercier ma tutrice Madame Alix Toublanc, Maître de conférences à l’Université Paris 1, d’avoir accepté de diriger ce mémoire. Ses précieux conseils et ses orientations méthodologiques judicieuses m’ont été d’une grande utilité pour la réalisation de ce travail.

J’adresse mes remerciements aux directions de l’ENA et de l’Université Paris 1, et à l’ensemble du pôle Masters et également à toute l'équipe pédagogique et le personnel de l’ENA.

Je remercie tous ceux qui m’ont aidée à la Direction Générale du Travail, au ministère du Travail, de l’Emploi, du Dialogue social et de la Formation professionnelle pour avoir accès aux informations.

Je tiens à remercier tout particulièrement, M. Salim Jreissati, ancien Ministre du travail au Liban, qui m'a accordé sa confiance et son encouragement pour venir étudier à l’ENA.

Mes vifs remerciements s’adressent à mes ami(e)s qui ont contribué à la réalisation de ce mémoire.

J’adresse mes remerciements et ma reconnaissance, spécialement, à ma mère qui m’a soutenue tout au long de mon parcours dans la vie.

Enfin, je dédie ce travail à la mémoire de mon frère qui a cru en moi.

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LISTE DES ABREVIATIONS

BIT Bureau International du Travail CCEM Comité contre l’esclavage moderne CDI Contrat à Durée Indéterminée

CEACR Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations CEDH Cour Européenne des Droits de l’Homme

CMCL Centre des migrants de Caritas au Liban CTO Criminalité Transnationale Organisée

DGSG Direction Générale de la sûreté générale (Ministère de l’Intérieur)

DIRECCTE Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi

FEPEM Fédération des Particuliers Employeurs de France

ICMPD Centre International pour le développement de la politique de l’Immigration IDCC Identifiant des Conventions Collectives

MIPROF Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains

OFII Office Français de l’Immigration et de l’Intégration OHCHR Haut-Commissariat aux droits de l’homme

OIT Organisation Internationale du Travail ONG Organisation Non Gouvernementale

PCAAM Comité Pastoral pour les Migrants Afro-Asiatiques TEH Traite des Etres Humains

UE Union Européenne

UNESCO Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la Science et la Culture

Convention d’écriture : sans discrimination à l’égard des femmes qui représentent la majorité des « travailleurs domestiques au Liban », mais dans le but de faciliter la lecture du présent rapport, nous utilisons le masculin comme représentant des deux sexes. Pourtant, la nomenclature française est « employés de maison » et « aides à domicile ».

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ... 3

PARTIE I : LE DROIT POSITIF LIBANAIS ET FANÇAIS EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE ... 8

1.1 ETAT DU DROIT AU LIBAN ET EN FRANCE EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE ... 8

1.1.1 Engagements du Liban et de la France au titre du droit international relatif aux droits de l’homme ... 8

1.1.2 Droit national au Liban et en France ... 11

1.1.2.1 Cadre juridique national au Liban ... 11

1.1.2.2 Cadre juridique national en France ... 14

1.2 EVOLUTIONS JURISPRUDENTIELLES AU LIBAN ET EN FRANCE EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE ... 18

1.2.1 Jurisprudence au Liban ... 18

1.2.2 Jurisprudence en France ... 21

PARTIE II : LES LACUNES DES REGLEMENTATIONS LIBANAISES ET AMELIORATIONS POSSIBLES AU REGARD DU DROIT INTERNATIONAL ET DU DROIT FRANÇAIS ... 24

2.1 LES LACUNES DES TEXTES ET LES DERIVES DES PRATIQUES ... 24

2.1.1 Les lacunes des textes au Liban ... 24

2.1.1.1 Les horaires ... 24

2.1.1.2 Le salaire minimal mensuel ... 25

2.1.1.3 Les congés ... 25

2.1.2 Les dérives des pratiques au Liban et en France ... 26

2.1.2.1 Le travail illégal ... 27

2.1.2.2 Le travail forcé ... 28

2.2 LES TENTATIVES DE REGULARISATION: LE PROJET DE LOI A LA RENCONTRE DES RÉGLEMENTATIONS INTERNATIONALES ET FRANÇAISES ... 30

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2

2.2.1 LE PROJET DE LOI AU LIBAN A LA RENCONTRE DES RÉGLEMENTATIONS

INTERNATIONALES ET LES ACCORDS BILATERAUX ... 31

2.2.2 LES RÉGLEMENTATIONS FRANÇAISES ET INTERNATIONNALES : UNE SOURCE D’INSPIRATION ? ... 33

2.2.2.1 L’emploi indirect : les prestataires et associations intermédiaires ... 33

2.2.2.2 Les négociations collectives ... 34

2.2.2.3 L’inspection du travail ... 35

CONCLUSION ... 36

BIBLIOGRAPHIE ... 39

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INTRODUCTION

Le travail domestique est défini par l’article 1 de la convention internationale du travail (n°189), Un travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestique, 2011, en ces termes : « Aux fins de la présente convention :

(a) l'expression travail domestique désigne le travail effectué au sein de ou pour un ou plusieurs ménages ;

(b) l'expression travailleur domestique désigne toute personne de genre féminin ou masculin exécutant un travail domestique dans le cadre d'une relation de travail ;

(c) une personne qui effectue un travail domestique seulement de manière occasionnelle ou sporadique sans en faire sa profession n'est pas un travailleur domestique. »

Comme l’indique le terme «domestique», le travail effectué par les travailleurs domestiques a lieu au domicile privé de l’employeur. Ce travail inclut des tâches telles que faire le ménage, la cuisine, laver et repasser le linge, prendre soin des enfants ou des personnes âgées ou malades d’une famille, jardiner, assurer le gardiennage, et même prendre soin des animaux domestiques.

La croissance du secteur domestique en tant que secteur de services est entretenue par une offre et une demande en constante augmentation. Au Liban comme dans d’autres pays, les changements démographiques, tels que le vieillissement de la population, le déclin des prestations sociales, la participation croissante des femmes au marché de l’emploi et la recherche d’un équilibre entre la vie professionnelle et familiale contribuent à augmenter les besoins en travailleurs domestiques.

En ce qui concerne l’offre, la pauvreté qui sévit dans les zones rurales, la discrimination subie par les femmes sur le marché du travail, ainsi que le manque de perspectives d’emploi dont souffrent en règle générale les travailleurs dans les communautés rurales ou les pays d’origine assurent une réserve importante de main d’œuvre dans ce secteur.1

Le Liban est un pays d’émigration par excellence, mais aussi un pays d’accueil des immigrés.

Les mouvements migratoires au Liban ont commencé à une grande échelle dès la fin de la première guerre mondiale. Les guerres successives qui se sont déroulées au Liban depuis 1975 jusqu’au début des années 1990 ont entrainé le départ de plusieurs vagues d’émigrés.

1 D’SOUZA Asha, Le travail domestique sur la voie du travail décent Rétrospective de l’action de l’OIT, BIT, France, 2010, p.11

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En parallèle, l’immigration au Liban d’une main d’œuvre étrangère peu ou pas qualifiée s’est beaucoup développée durant les dernières décennies et ce, pour plusieurs raisons politiques, sociales et économiques, entrainant la mise en place d’un dispositif légal global régissant les intérêts des étrangers au Liban et ayant trait aux droits qui leur sont reconnus et aux obligations qui leur incombent dans tous les domaines.

« On estime le nombre de Libanais résidant en permanence au Liban à environ trois millions de personnes. Le nombre de Non-Libanais présents légalement ou illégalement sur le territoire est difficile à évaluer, en particulier pour les Syriens et les Palestiniens qui forment incontestablement la grande majorité des résidents étrangers au Liban ; si la communauté palestinienne s’est réduite en nombre après l’invasion israélienne de 1982 et le départ de l’organisation de la libération de la Palestine, le nombre de Syriens travaillant au Liban, de façon saisonnière ou permanente, a incontestablement augmenté ; il faut y ajouter de nombreux migrants pauvres du Sri Lanka (35 000, ainsi que des Egyptiens, sans oublier des Kurdes présents au Liban. Suivant les estimations, le nombre d’étrangers varie entre un et deux millions de personnes ».2

D’après les tableaux du ministère du travail (2013)3, le nombre de femmes et hommes migrants, travaillant au Liban de toutes les nationalités et dans tous les domaines, est évalué à 158 216 au sein d’une population globale de 4 millions d’habitants. On a pu établir les statistiques suivantes : 29,47% ont un nouveau permis de travail datant de 2013 et les autres, soit 70,53%, ont déjà renouvelé leur permis de travail. Sur ce total, les travailleurs domestiques sont au nombre de 120 351, soit 76,07%, répartis entre 1,65% d’hommes et 98,35% de femmes. Quant à leurs nationalités, ces travailleurs sont originaires des pays suivants : 47,54% de l’Ethiopie, 19,92% du Bangladesh, 15,51% des Philippines, 6,55% du Sri Lanka et le reste est originaire d’autres pays africains et arabes : Soudan, Égypte, ...

En France comme au Liban, les travailleurs domestiques en France sont particulièrement des femmes migrantes. Les immigrés, en 2012, représentaient 8,3 % de la population totale et 8,6 % de l’emploi. Largement recrutés comme employés non qualifiés ou comme ouvriers et manœuvres. La plupart de ces immigrés sont issus des pays du tiers-monde mais aussi du

2 CORM Georges, Le Liban contemporain : Histoire et société, Paris, la découverte, 2012, p.10

3 Disponible en arabe sur : http://www.labor.gov.lb/_layouts/MOL_Application/Cur/stat2013reNew.pdf et http://www.labor.gov.lb/_layouts/MOL_Application/Cur/statfirst2013.pdf

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Portugal. La Part des immigrés dans le secteur des services personnels et domestiques est de 15,2% dont 25,6% en tant qu'employeurs de personnel domestique. Les femmes sont plus que 30% employées de maison, la majorité est originaire d’Afrique.4

Les travailleurs domestiques (dont la plupart sont des femmes immigrées) n’entrent pas dans le champ d’application du code du travail libanais. Cette catégorie est soumise à un régime spécial de contrat de travail rédigé en arabe, en vertu duquel la plupart des travailleurs migrants se voient obligés de signer un document qu’ils ne comprennent pas. Le 16 mars 2009, le ministère du travail a finalement mis en place un contrat unique, disponible dans la langue d’origine du travailleur domestique depuis 2012.

Tandis qu’en France, les travailleurs domestiques sont soumis aux dispositions du Code du travail, et à la convention collective nationale des salariés du particulier employeur.

Au Liban, le système de parrainage « kafala »5 très répandu a été conçu pour protéger l’employeur en l’obligeant à prendre en charge toutes les responsabilités juridiques et économiques vis-à-vis du « travailleur invité ». Mais, en établissant un lien entre le droit de résidence dans le pays et le contrat avec le « parrain », ce système de parrainage contribue à exposer les travailleurs au travail forcé dans la mesure où ceux-ci ne sont pas libres de changer d’employeur en cas de différends ou d’abus. En vertu

Des études récentes sur le travail domestique au Moyen-Orient témoignent de la violence et de la coercition auxquelles les travailleurs domestiques sont assujettis et la tendance des employeurs à les menacer comme s’ils leur appartenaient. C’est précisément cette dimension de « propriété privée » qui caractérise l’esclavage.6 De plus, les violences exercées à l’encontre des travailleurs domestiques peuvent prendre des formes extrêmes et entraîner le handicap permanent, voire la mort des travailleurs ou leur suicide.

Les conditions de travail auxquelles les travailleurs domestiques sont parfois soumis se rapprochent de l’esclavage, même dans des pays où le travail domestique est réglementé ;

4 Infos migration ; n ° 39 mars 2012, « L’emploi et les métiers des immigrés »

5 Selon le système du « kafala », tout étranger désirant s’installer et travailler au Liban a besoin d’un « kafil », qui est le garant juridique de sa présence dans le pays. Ce système constitue en quelque sorte une délégation au secteur privé de l’une des prérogatives de l’Etat.

6 Selon la convention relative à l'esclavage (1926) de la Société des Nations : « L'esclavage est l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux ». La définition d’esclavage sera analysée ultérieurement dans la section 2.1.2.2 Le travail forcé, p.28

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comme en France. La situation de travail forcé est analogue en France où les femmes migrantes sont plus ou moins vulnérables à l’exploitation et à l’« esclavage moderne »de certains employeurs.

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG), comme le centre des migrants de Caritas Liban (CMCL) et « KAFA » au Liban et Comité contre l’esclavage moderne (CCEM) en France, qui se sont intéressées à la question de la vulnérabilité des travailleurs domestiques au travail forcé et à la traite d’êtres humains mobilisent leur action pour la protection des travailleurs domestiques. Elles jouent un rôle direct et indirect dans la prise en charge des étrangers dans leurs pays.

Après l’adoption de la convention internationale du travail (n° 189) et de la recommandation (n° 201), le ministère du travail libanais a présenté un projet de loi, relatif aux travailleurs domestiques, qui n’a pas encore été adopté à ce jour.

Force est de constater une carence législative au niveau de la protection des travailleurs domestiques au Liban. De plus, les dérives des agences de recrutement disqualifient le travail, ce n’est plus un contrat librement consenti, mais un texte d’adhésion qui aboutit bien souvent à un travail forcé.

Certes, des réglementations existent, mais des lacunes persistent au niveau des textes, et des dérives sont constatées dans les pratiques qui peuvent faire que ce travail tourne à une exploitation de l’être humain. Le droit au travail se convertit dans ces cas en asservissement.

D’où la nécessité de légiférer en la matière, le droit pouvant changer les mœurs, d’autant plus si les textes sont assortis de sanctions dissuasives. À cet effet, s’inspirer du cadre juridique français est un moyen, à la fois pertinent et faisable, de mettre fin à cette situation contraire aux droits élémentaires de l’homme.

La démarche méthodologique utilisée dans la rédaction de ce mémoire se fonde sur une recherche approfondie de l’abondante littérature existante en matière de droit international du travail et la lutte contre la traite des êtres humains en général ; et sur les droits nationaux des deux pays en particulier. Il est à noter que presque la totalité des règlementations libanaises sont en arabe, et une partie de la littérature de la jurisprudence consultée était en anglais. Ce qui a demandé un travail de traduction. Plusieurs rapports, publications académiques, articles de presse et sites internet officiels ont contribués à compléter la liste des sources et documents utilisés dans ce travail de recherche.

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Nous avons également fait plusieurs entretiens avec des personnes impliquées, dans la direction générale de travail, de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) et d’une association intermédiaire agréée pour les emplois familiaux, qui ont enrichi nos informations et nous ont guidé dans la recherche bibliographique.

Ce mémoire s’articule selon un mode binaire. Ces deux grandes parties sont elles-mêmes composées de 2 grands chapitres chacune. La première partie consiste une étude du droit positif libanais et français en matière de travail domestique dans les deux pays.

Dans le premier chapitre de la première partie, le cadre normatif et institutionnel sera présenté au niveau international, ensuite au plan national, au Liban et en France successivement. Ce chapitre liste les engagements du Liban et de la France au titre du droit international relatif aux droits de l’homme et aux normes internationales de travail et décrit le droit national appliqué par chacun des deux pays. Le deuxième chapitre de la première partie porte sur l’évolution jurisprudentielle en matière de travail domestique, au Liban d’une part et en France d’autre part.

La deuxième partie du mémoire énonce des lacunes des textes et des dérives des pratiques au Liban, à partir desquels des tentatives de régularisation seront établies à la rencontre des règlementations internationales et françaises. Le premier chapitre de la deuxième partie analyse les conditions de travail domestique au Liban dans les textes en vigueur, ainsi que les dérives des pratiques au Liban et en France sous deux aspects : travail illégal et travail forcé.

Enfin le deuxième chapitre de la deuxième partie évoque une tentative de législation au Liban qui était déjà préparée à l’encontre de l’exploitation de cette catégorie de travailleurs. Dans ce dernier chapitre, le projet de loi sera étudié et sera comparé avec les règlementations internationales avec une amélioration possible au regard du droit français. La conclusion de ce mémoire récapitule les défis de la mise en œuvre d’une législation confortée par le droit positif international en la matière et présente des recommandations en perspective pour mieux protéger les travailleurs domestiques migrants.

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PARTIE I : LE DROIT POSITIF LIBANAIS ET FANÇAIS EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE

Cette première partie étudie les différentes législations qui définissent le travail domestique au Liban et en France. Le cadre juridique international, du Liban et de la France, relatif aux droits de l’homme et aux normes internationales du travail sera décrit, ainsi que le cadre juridique national libanais et français (1.1). Ensuite, l’évolution jurisprudentielle en matière de travail domestique sera présentée dans les deux pays (1.2).

1.1 ETAT DU DROIT AU LIBAN ET EN FRANCE EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE

Dans ce premier chapitre, le cadre normatif et institutionnel sera présenté au niveau international, puis au plan national dans les deux pays.

1.1.1 Engagements du Liban et de la France au titre du droit international relatif aux droits de l’homme

Le préambule de la Constitution énonce expressément l’engagement du Liban à respecter la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont le Liban exprime souvent sa fierté d’avoir participé à sa rédaction7. De même, le Liban s’engage expressément dans la version actualisée de sa constitution (amendement de 1990 suite aux accords de Taëf) à respecter tous ses engagements internationaux et en particulier la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Les conventions et traités internationaux constituent pour le Liban une part importante de ses obligations internationales en ce sens qu’ils ont la primauté sur les lois internes et doivent obligatoirement être appliqués par les tribunaux.

Le Liban a ratifié six des neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme : la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination

7 Dans préambule de la constitution (B) : « Le Liban est arabe dans son identité et son appartenance. Il est membre fondateur et actif de la Ligue des Etats Arabes et engagé par ses pactes; de même qu'il est membre fondateur et actif de l'Organisation des Nations-Unies, engagé par ses pactes et par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme.

L'Etat concrétise ces principes dans tous les champs et domaines sans exception ».

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raciale de 1996, à laquelle il a adhéré le 12 novembre 1971 ; le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels , le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 auxquels il a adhéré le 1er septembre 1972 ; la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (adhésion le 16 avril 1997) ; la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (en 2000) ; le Protocole facultatif se rapportant à cette convention en 2008 et la Convention relative aux droits de l’enfant le 30 octobre 1990.

En outre, il a signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Le Liban est partie à la Convention relative à l’esclavage de 1926, cependant il n’a pas signé le Protocole amendant la Convention, ni la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage.

En 2002, le Liban a conclu une convention avec le Centre International pour le développement de la politique de l’Immigration (ICMPD) dont l’objet principal porte sur le rapatriement des immigrés illégaux et l’établissement d’une politique à cet effet.

En octobre 2005, le Liban a ratifié la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (CTO) du 15 novembre 2000, et le Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Le Liban a ratifié un nombre important de conventions internationales du travail (50 au total), dont 7 des 8 conventions fondamentales8 que l’Organisation internationale du travail (OIT) considère comme des instruments énonçant des principes que les États ont l’obligation de respecter et de renforcer. De même pour les conventions internationales du travail ayant un lien avec la prévention des formes contemporaines d’esclavage, notamment la Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 ; la Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 ; la Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, dont toutes les trois ont été ratifiées en 1977 ; et la Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, ratifiée en 2001.9

8 La convention de l’OIT (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 ; n’est pas ratifiée par le Liban.

9 http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=1000:11200:0::NO:11200:P11200_COUNTRY_ID:103147

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En sus des chartes et des conventions internationales précitées que la France a également ratifiées, celle-ci a ratifié :

- La Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui adoptée le 21 mars 1950 ;

- Un grand nombre de conventions internationales du travail (124 au total et 1 protocole), dont les 8 conventions fondamentales ;

- en 1954, la Convention (n°97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, mais elle a exclu les dispositions de l’annexe II.10

En outre, Le Liban a ratifié la Charte arabe des droits de l’homme en 2008.

Le Liban n’a pas ratifié la Convention (n°97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949.11 Néanmoins, la France et le Liban n'ont pas ratifié :

- la convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille adoptée en 1990 ;

- la convention internationale du travail (n°189), Un travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestique, 2011.

Dans le cadre institutionnel de la promotion des droits de l’homme au Liban, l’Etat libanais a adopté plusieurs mesures et initiatives tendant à assurer une meilleure protection des droits de l’homme. Certaines sont institutionnelles, d’autres législatives. Au niveau structurel, le ministère de la justice a élaboré un projet de loi visant à créer une direction générale des droits de l’homme. De même, la Direction générale des forces de sécurité intérieure a mis en place au sein de l’Inspection générale un département des droits de l’homme et a créé un comité d’officiers des forces de sécurité intérieure chargé de la planification stratégique et des droits de l’homme.

Une commission parlementaire des droits de l’homme a été constituée à la Chambre des députés.

Elle exerce des fonctions législatives et de contrôle, étudie les projets et propositions de lois qui lui sont transmis par le Gouvernement et les députés et présente des rapports et des propositions en la matière afin de promouvoir les droits civiques, politiques, économiques et culturels au Liban. La Commission a lancé un projet portant sur l’élaboration d’un plan national pour les droits de l’homme, dans le cadre duquel ont été organisés des ateliers sur les droits civiques,

10 http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=1000:11200:0::NO:11200:P11200_COUNTRY_ID:102632

11 http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=1000:11200:0::NO:11200:P11200_COUNTRY_ID:103147

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économiques, politiques et sociaux, en coopération avec le Bureau du Programme des Nations Unies pour le développement à Beyrouth et avec la participation d’organismes publics compétents et des différentes branches de la société civile. Les discussions qui se sont tenues ont débouché sur des études de fond de l’ensemble de ces droits qui serviront de base pour l’élaboration du projet de plan national pour les droits de l’homme, conformément aux recommandations de la Conférence sur les droits de l’homme organisée à Vienne en 1993. Ce projet sera étudié par les autorités libanaises et la société civile en vue de son adoption définitive par la Chambre des députés.

1.1.2 Droit national au Liban et en France

1.1.2.1 Cadre juridique national au Liban

Le Code du travail libanais de 1946 exclut expressément les travailleurs domestiques (qu’ils soient libanais ou migrants) du champ d’application du dispositif de protection prévu pour les travailleurs.

L’article 7(1), du chapitre premier, des dispositions préliminaires, du Code du travail : « Sont exceptés de la présente loi :

1) Les domestiques aux domiciles des particuliers.

2) les corporations agricoles qui n'ont point de rapport avec le commerce ou l'industrie qui feront l'objet d'une loi spéciale ;

3) les établissements où ne travaillent que les membres de la famille sous la direction soit du père, soit de la mère, soit du tuteur ;

4) les services gouvernementaux et municipaux pour ce qui concerne les employés et les salariés provisoires ou journaliers auxquels ne s'appliquent pas les règlements des fonctionnaires. Ces agents feront l'objet d'une loi spéciale »12.

Les relations de travail sont régies par un texte de loi spécifique, le Code du travail, ainsi que par le Code des obligations et des contrats, qui définit le concept de contrat de travail.

a- Contrat de travail domestique

Le droit libanais distingue entre les étrangers hommes d’affaires et employeurs et les immigrés travailleurs : cf. arrêté ministériel n° 80/1 du 9 mars 1995, relatif à la classification des étrangers

12 Disponible sur : http://www.ilo.org/dyn/natlex/docs/WEBTEXT/39255/64942/F93LBN01.htm#t1c1

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qui travaillent au Liban. Pour trois d’entre elles, le contrat de travail peut aller d’un à trois ans, avec la possibilité de plusieurs renouvellements. La quatrième catégorie « les travailleurs domestiques » sont soumis à un régime plus strict en termes de durée de séjour, Ces contrats sont d’une durée d’un an renouvelable.

Cette forme contractuelle doit s’imposer à toute relation de travail domestique et doit être formalisée devant le notaire. Cependant la majorité des personnes relevant de cette catégorie quitte le Liban pour retourner dans son pays d’origine après trois ans. En outre, tout travailleur étranger est tenu de signer avant son entrée au Liban un contrat de travail avec un employeur, qui doit veiller à faire subir au travailleur les examens médicaux nécessaires, à l’affilier à l’assurance maladie obligatoire, à verser une caution bancaire et à s’engager à s’acquitter des frais de voyage lors du retour du travailleur dans son pays.

Un comité directeur national a été mis en place en avril 2007 pour examiner les réformes législatives qui devraient être mises en place, ainsi que les règles et les réglementations relatives aux travailleurs migrants et aux agences de recrutements privées. Ce comité est sous le patronage du ministère du travail et constitué de représentants de la Direction générale de la sûreté générale, du ministère des affaires sociales, du ministère de la justice, de la société civile, de l’OIT, du bureau régional du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (OHCHR) à Beyrouth et de certaines ambassades de pays exportateurs de main-d’œuvre.

Ce comité a introduit par un décret du Ministère du travail de 2009 un contrat de travail domestique unique. Ce contrat a complété les dispositions relatives au contrat d’assurance unifié visant à garantir le respect des droits fondamentaux des travailleurs domestiques, en fixant une série de normes communes relatives notamment à des conditions de vie décente, à une alimentation adéquate, à des périodes de repos et à une assurance santé. Ce contrat doit être signé par les deux parties avant qu’un permis de travail ne soit délivré.

b- Autorisation d’entrée et de travail des étrangers au Liban

La loi du 10 juillet 1962 règlementant l’entrée des étrangers, leur séjour au Liban ainsi que leur sortie fait obligation dans l’article 25 : « à chaque ressortissant étranger qui souhaite entrer au Liban pour y travailler d’obtenir au préalable l’autorisation du Ministère du travail » ; et reprend cette disposition dans son décret d’application 10188 du 28 juillet 1962 de cette loi.

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Le décret n°17561 du 18 Septembre 1964 réglementant le travail des étrangers au Liban fixe la procédure de demande de l'autorisation préalable nécessaire à l'étranger qui entre sur le territoire libanais en vue d'y travailler (autorité compétente, informations à fournir, notamment la nature et la durée du travail, le nom de l'employeur). Il prévoit que l'employeur doit également présenter auprès du ministère du Travail une demande approuvant la venue de l'étranger et confirmant les informations communiquées par le migrant, ainsi qu'un contrat de travail. Il contient des dispositions relatives aux démarches à effectuer en vue d'exercer au Liban une activité indépendante. Il prévoit que, une fois l'autorisation préalable obtenue, l'étranger doit, dans les 10 jours de son arrivée, présenter une demande de permis de travail et fixe les conditions de délivrance et de renouvellement de ce document.

Parmi lesquelles, figure notamment l'absence de travailleur national capable d'exécuter les tâches prévues par le contrat. La formation d'un travailleur libanais pour le poste en question peut être requise par les autorités. Certains travaux et professions peuvent être réservés à la main-d’œuvre nationale.13 La procédure de délivrance du permis est prévue. Il est accordé pour une durée maximum de 2 ans et pour un emploi déterminé. Les cas d'annulation sont énumérés : refus de l'entreprise de donner priorité à un libanais ou de le former pour remplacer l'étranger, maintien d'un étranger dans son poste, alors qu'un travailleur libanais ayant les mêmes qualifications et conditions de travail a été licencié.

c- Quelques améliorations récentes

Le ministère du travail a organisé le travail des agences de recrutement et a fixé d’une façon claire et précise les tâches et les responsabilités des propriétaires de ces bureaux, des travailleurs et des employeurs.14

Le comité directeur national, en collaboration avec l’OIT, a diffusé en 2012, un guide d’informations pour les travailleuses domestiques migrantes, qui met clairement en évidence leurs droits et leurs devoirs envers leurs employeurs (traduit en 14 langues).15

13 Le dernier arrêté ministériel, n° 1/19 en date du 2 février 2013, relatif aux professions réservées exclusivement aux Libanais.

14 La décision n 1/1, en date du 3 janvier 2011, sur l’organisation de l’activité des agences de recrutement de travailleurs étrangers.

15 http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---arabstates/---ro-beirut/documents/publication/wcms_234628.pdf

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14 d- Code Pénal : Crime de la traite des êtres humains

En août 2011, le parlement libanais a promulgué une loi contre la traite des personnes qui renforce les protections juridiques pour les victimes de ce type de trafic. La mesure a été édictée après que le gouvernement des États-Unis ait rétrogradé le Liban vers la catégorie 3 de son rapport 2011 sur la traite des personnes, ce qui constitue la note la moins bonne.16

La promulgation de la loi n° 164 du 24 août 2011 ajoute également un chapitre consacré à la traite des personnes (chapitre 3) au Code pénal pour introduire la définition du crime de traite d’êtres humains, ainsi que les sanctions prévues pour les trafiquants. En vertu de l’article 586.2(2) du Code pénal, tel qu’amendé, le crime de traite des êtres humains est puni d’une peine de sept années d’emprisonnement et d’une amende qui peut être de cent cinquante fois à trois cents fois le salaire minimum officiel, si les faits ont été commis en recourant à la tromperie, à la violence, à la cruauté ou à la menace.17

L’article 569 du Code pénal, qui prévoit des sanctions pénales contre ceux qui auront privé autrui de leur liberté, s’applique aux cas d’imposition d’un travail forcé ou obligatoire.

1.1.2.2 Cadre juridique national en France

Les travailleurs domestiques en France sont particulièrement des femmes migrantes. Les migrantes en France ne sont pas majoritaires dans le secteur du travail domestique cependant elles sont surreprésentées dans ce domaine.18

En France, existent deux grandes familles « aides à domicile » et « employés de maison », elles sont distinguées par deux types d’emploi direct et indirect :

a - Emploi indirect : « aides à domicile »

Les services à la personne sont définis dans le code du travail par l’article L. 129-119 et suivants comme étant des organismes qui interviennent en qualité de prestataires, mandataires, intérimaires ou associations intermédiaires et qui consacrent exclusivement leur activité à des services aux personnes à domicile ou à des services favorisant le maintien à domicile des

16Human Rights Watch, World report-2012,U.S.A., 2011, p.592

17Disponible en anglais : http://www.ilo.org/dyn/natlex/docs/ELECTRONIC/89807/103253/F1878916208/LBN- 2011-L-89807%20%20in%20english.pdf

18 BIT, Promouvoir l’intégration des travailleuses et travailleurs domestiques migrants en France, BIT, Genève, 2013, p.4

19 Loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

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15 personnes âgées, handicapées ou dépendantes.

Les services à la personne comportent 21 grands métiers d'aide à domicile (cf. décret n° 2005- 1698 du 29 décembre 2005 fixant la liste des activités mentionnées à l'article L. 129-1 du code du travail), destinés aux particuliers essentiellement à leur domicile, à titre d’exemple, l’entretien de la maison et les travaux ménagers.

Ces contrats d’emploi indirect sont plutôt conclus avec des personnes peu qualifiées, momentanément exclues de l'emploi (ces personnes sont identifiées par les services sociaux ou pôle Emploi, qui leur délivre un agrément personnel pour une durée de 24 mois). Leurs effectifs ont plus que doublé en quinze ans pour atteindre 537 000 durant la période 2009-2011.20

Dans le cas des associations intermédiaires, ce sont des salariés en insertion qui signent des contrats d’une durée déterminée d'usage (1 mois) et interviennent à temps partiel, dans une activité économique telle les services à la personne dans le cadre de l'agrément simple : ménage, petit jardinage, manutention …

Des associations intermédiaires sont organisées pour professionnaliser, former et accompagner ces personnes, tout en prenant en compte leurs difficultés particulières pour développer leur potentialité et reconquérir une citoyenneté à part entière. Elles fixent des étapes et évaluent l'acquisition des connaissances, de l'expérience professionnelle et des compétences nécessaires pour honorer un contrat de travail. Par exemple, l’apprentissage du français pour les migrantes.21 b - Emploi direct : « employés de maison »

En situation d’emploi direct, ce sont des personnes qualifiées, présentes dans le marché

« classique ». En 2009-2011, 244 000 personnes étaient « employés de maison ».22

L’article L. 7221-1 du code travail stipule : « Est considéré comme employé de maison le salarié employé par des particuliers à des travaux domestiques ».

Selon l’article L. 7221-2 modifié23sont seules applicables au salarié défini à l'article L. 7221- 1 les dispositions relatives :

« 1° Au harcèlement moral, prévues aux articles L. 1152-1 et suivants, au harcèlement sexuel, prévues aux articles L. 1153-1 et suivants ainsi qu'à l'exercice en justice par les organisations syndicales des actions qui naissent du harcèlement en application de l'article L. 1154-2 ;

2° A la journée du 1er mai, prévues par les articles L. 3133-4 à L. 3133-6 ;

20 BIT, Promouvoir l’intégration des travailleuses et travailleurs domestiques migrants en France, BIT, Genève, 2013, p.37

21 Entretien avec Madame la directrice Logiservices, association intermédiaire,Strasbourg.

22 BIT, Promouvoir l’intégration des travailleuses et travailleurs domestiques migrants en France, BIT, Genève, 2013, p.35

23 Loi n°2011-867 du 20 juillet 2011 - art. 16

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16

3° Aux congés payés, prévues aux articles L. 3141-1 à L. 3141-31, sous réserve d'adaptation par décret en Conseil d'Etat ;

4° Aux congés pour événements familiaux, prévues par les articles L. 3142-1 et suivants ; 5° A la surveillance médicale définie au titre II du livre VI de la quatrième partie ».

Les employés de maison sont des salariés qui bénéficient d’un contrat à durée indéterminée (CDI). En tant que tels, ils sont soumis aux dispositions :

- du Code du travail, à l’exception des articles expressément réservés aux entreprises.

L’application du Code du travail a pour corollaire la compétence exclusive du conseil de prud’hommes en cas de litige s’élevant entre l’employeur et l’employé à propos du contrat de travail (n° 2256) ;

- de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999 (identifiant des Conventions Collectives IDCC : n °2111). Cet alinéa est étendu sous réserve de l'application de l'article L. 132-8 du code du travail (arrêté du 2 mars, 2000).24

La durée du travail effectif à laquelle ils sont tenus est de 40 heures hebdomadaires (pas assujettis au régime des 35 heures) pour un salarié à temps plein.

Le salarié doit percevoir au moins le Smic. Mais pour fixer le salaire à verser, l’employeur doit se référer à la grille de l’avenant « salaire » de la convention collective nationale qui prend en compte le niveau de qualification du salarié et son ancienneté dans le contrat.

c- Autorisation d’entrée et de travail des étrangers en France

Pour faire venir un salarié étranger en France dans le cadre du service à la personne , l’employeur doit déposer un dossier de demande dans lequel il doit joindre notamment une promesse d’embauche à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) et un engagement à payer la redevance à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) en cas d’embauche d’un salarié étranger. Le critère le plus difficile à prouver pour que la demande aboutisse favorablement est l’opposabilité de la situation de l’emploi ; de n’avoir pas été en mesure de trouver un candidat en France.

Si la demande aboutit favorablement, l’employé sera convoqué par le Consulat de France de son pays pour recevoir son visa d’entrée pour la France puis, une fois en France, pourra bénéficier d’un titre de séjour l’autorisant à travailler chez ses employeurs. Tout ressortissant d’un pays

24 www.Legifrance.gouv.fr

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17

tiers doit être titulaire d’un titre de séjour pour résider en France. Les titres de séjour qui « valent autorisation de travail » l’autorise à exercer l’emploi de son choix, d’autres donnent une autorisation de travail restreinte; d’autres enfin n’autorisent pas l’exercice d’un emploi salarié.

La majorité des titres de séjour sont valables un an. Ainsi, tous les ans, le ressortissant étranger doit solliciter un nouveau titre de séjour auprès de la préfecture, qui va lui délivrer un récépissé, dans lequel est notée une autorisation de travail.25

d- Code pénal : Crime de la traite des êtres humains

Contrairement au Liban qui a introduit dans son droit pénal de telles dispositions dès 2011, la France a attendu 2013 pour modifier sa législation en matière de traite des êtres humains, et ce, après deux condamnations prononcées par la Cour Européenne des Droits de l’Homme non suivies d’effet ... (cf. avis du CCEM).26

La loi n° 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union Européenne (transposition de la directive 2011/36/UE du parlement Européen et du conseil du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI) et des engagements internationaux de la France, a instauré dans le code pénal le crime de la réduction en esclavage (article 224-1 A et articles 224- 1 B).

A cette même occasion, l’article 225-4-1I définit la traite des êtres humains et la réprime comme suit : « […] La traite des êtres humains est punie de sept ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ».

De plus, les conditions de travail ou d’hébergement contraires à la dignité humaine, définies à l’article 225-13 du Code pénal, ont été réprimées au travers des articles 225-14-1 et 225-14-2.

Les personnes victimes de traite des êtres humains qui témoignent ou déposent plainte contre leur trafiquant ou leur exploiteur peuvent bénéficier d’un titre de séjour temporaire.

Le décret du 3 Janvier 2013 a confié à la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF), créée par la ministre des droits des Femmes, la coordination de la lutte contre la traite des êtres humains (TEH), conformément aux engagements internationaux de la France et à la convention du conseil de l’Europe du 15 mai 2005.

25 http://www.immigration.interieur.gouv.fr/Immigration/L-immigration-professionnelle 26 http://www.esclavagemoderne.org/0035-que-dit-la-loi-francaise/13-page.htm

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18

Un coordinateur national de la lutte contre la traite des êtres humains a été nommé au sein de la MIPROF conduite par une secrétaire générale, avec pour objectif de mettre en place, un mécanisme de coordination et une stratégie nationale pour lutter contre ce phénomène ce qui nécessite une mobilisation interministérielle et un partenariat actif avec les acteurs associatifs et territoriaux.

A cet effet, la mission travaille à la révision du projet de plan d’action national élaboré entre 2008 et 2012 par un groupe de travail piloté par les ministères de l’intérieur et de la justice et composé des représentants des différents ministères concernés ainsi que des associations spécialisées, et avec des coordinations locales pluridisciplinaires.

En substance, les principales mesures portent sur : - Identifier les victimes pour mieux les protéger ; - Démanteler les réseaux de la traite ;

- Faire de la lutte contre la TEH une politique publique à part entière.27

1.2 EVOLUTIONS JURISPRUDENTIELLES AU LIBAN ET EN FRANCE EN MATIERE DE TRAVAIL DOMESTIQUE

1.2.1 Jurisprudence au Liban

Le Liban a un piètre bilan en matière de répression des mauvais traitements des travailleuses domestiques. Un rapport de 2010 intitulé « Sans protection: Comment le système judiciaire libanais exclut les travailleuses domestiques migrantes », rédigé en anglais par « Human Rights Watch », examinait 114 décisions de la justice libanaise touchant des travailleuses domestiques migrantes et constatait que pas un seul employeur n'avait été mis en accusation pour avoir séquestré des travailleurs, confisqué leurs passeports ou leur avoir refusé de la nourriture.

Très peu de travailleuses domestiques déposent des réclamations devant le tribunal de première instance. Parmi les 114 cas, une seule travailleuse domestique a déposé une plainte contre l'employeur devant le tribunal de première instance. L'affaire, cependant, était tout à fait exceptionnelle en ce que la travailleuse réclame 7000 $ comme salaires impayés, une très grosse

27 Entretien avec le Lieutenant-colonel Eric Panloup, Coordonnateur national « lutte contre la traite des êtres humains », MIPROF, 14 Avenue Duquesne - 75007 Paris, en avril 2014.

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19

somme étant donné que les salaires sont d'environ 150 $ - 200 $ par mois. L'affaire a pris 27 mois, mais le tribunal a fini par forcer l'employeur à payer les 7000 $, plus les intérêts.28

En raison du temps requis et du coût du dépôt des cas, les avocats représentant les travailleuses commencent le dépôt des plaintes pour salaires impayés devant le tribunal du travail (prud’hommes) avant le tribunal de première instance. Le principal avantage du tribunal du travail est qu'il n'y a pas de frais de dépôt. Alors que les travailleuses domestiques ne sont pas couvertes par le Code du travail du Liban, le tribunal du travail accepte les affaires touchant les travailleuses car une loi en date du 21 Octobre 1980, (exécuté par le décret n ° 3572) a élargi la compétence du tribunal du travail à tout conflit qui émane d'une relation qui correspond à la définition du travail conformément à l'article 624 (1) de la loi sur les obligations. Cela s'applique aux situations de travail domestique. Cependant, dans de tels cas, le tribunal du travail applique la loi générale sur les obligations contractuelles et non les lois du Code du travail.29

Les juridictions pénales libanaises ont souvent refusé de se déclarer compétentes dans les affaires concernant les travaux domestiques au motif que la question est de nature contractuelle et devrait être renvoyée devant un tribunal civil. Cependant, certains tribunaux pénaux se sont montrés disposés à accepter certains cas de salaires impayés qui pouvaient être considérés comme des cas où l'employeur n'a pas réussi à rendre des salaires déposés avec lui en toute confiance.

Notamment, le 25 Octobre 2000, la Cour d'appel des délits de Jdeideh a annulé la décision du tribunal pénal de première instance en considérant que l'employeur avait "abusé de la confiance"

de dame Jamilet Pirou, une travailleuse domestique éthiopienne à son domicile, en ne payant pas ses salaires dont elle pensait qu'ils étaient détenus par lui en confiance. Le tribunal a ordonné à l'employeur de payer à Pirou 400 $ en dommages et intérêts, mais n'a pas ordonné le remboursement des salaires impayés depuis, considérant que la question devait être tranchée par une cour civile.30

L'examen de 13 plaintes déposées au Tribunal pénal par des travailleuses domestiques a permis de constater qu'il fallait en moyenne 24 mois pour qu'elles soient traitées et qu'en général les poursuites débouchaient sur des peines légères. La peine la plus sévère pour avoir brutalisé une travailleuse domestique, dont Human Rights Watch a eu connaissance, est d'un mois de prison, peine infligée par un tribunal pénal le 26 juin 2010, à un employeur qui avait battu à de nombreuses reprises une travailleuse domestique sri-lankaise.

28 Human Rights Watch, Without Protection: How the Lebanese Justice System Fails Migrant Domestic Workers, Beirut, 2010, p.33

29 Ibid., pp.33-34

30 Ibid., p.36

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20

Les cas suivants illustrent la réaction timide de la police et du procureur public envers les employeurs battant des travailleuses domestiques :

Cas 1 : Salaire impayé

Le Comité pastoral pour les migrants afro asiatiques (PCAAM), qui aide les travailleurs, a reçu des informations selon lesquelles l'employeur de K.A. (pas ses vrais initiales), une travailleuse domestique Sri-lankaise, l’avait enfermée dans sa maison, et l’avait battue et n'avait pas payé ses salaires.

PCAAM a informé le bureau du procureur, qui a renvoyé la plainte à la police le 5 Décembre 2005. La police a mis 21 jours pour enquêter. Lorsque la police a finalement pris la déposition de K.A., celle-ci leur a dit que son employeur lui devait sept mois de salaire et la battait régulièrement, y compris une fois avec une canne sur la main droite, coup pour lequel elle a obtenu une radiographie. Face à la police, l'employeur a accepté de payer K.A. 670 $ qu'il lui devait en salaires. Toutefois, le procureur, sans donner de raison, n'a pas porté plainte contre l'employeur d’avoir battu K.A.31

Cas 2 : Violence

Un autre cas est celui de Jonalin Malibago, dont le gain de cause en cour a fait les manchettes en Décembre 2009. L'affaire remonte à la guerre de Juillet 2006 entre Israël et le Liban, lorsque l'employeur de Jonalin, Fayruz Sfeir, l'a amenée à l'ambassade des Philippines afin qu'elle puisse être rapatriée. Au vu de l'ambassade, Fayruz Sfeir a commencé à battre Jonalin et à la pousser à marcher plus vite tout en portant ses bagages. Jonalin s'est évanouie et a été transportée à l'hôpital. À l'hôpital, les médecins ont vu des signes de coups sur son corps, ainsi que des ecchymoses noires, bleues et jaunes. Le 9 Décembre 2009, un tribunal pénal de Batroun a condamné l'employeur à 15 jours de prison, une amende de 50,000 L.L. (33 $), et 10,000,000,- L.L. ($ 6.666,-) de dommages et intérêts à Jonalin.32

31 Human Rights Watch, Without Protection: How the Lebanese Justice System Fails Migrant Domestic Workers, Beirut, 2010, p.37

32 Ibid., pp.39-40

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21 Cas 3 : Salaire impayé et violence

Une travailleuse domestique a quitté son employeur et a cherché refuge à (CLMC), qui a informé la Sûreté Générale, le 11 Septembre 2006, que l'employeur battait la travailleuse chaque fois qu'elle demandait son salaire, et qu'elle souffrait donc au niveau de ses oreilles.

L'employeur répond à la revendication en l'accusant de vol. Le procureur n'a pas rapporté toutes les accusations portées contre l'employeur, et le seul procès qui a eu lieu était contre la travailleuse sur l'accusation de vol, pour lequel la travailleuse a finalement été innocentée. Bien que le tribunal ait noté dans son arrêt que «le défendeur a souffert de la rudesse de son employeur et son employeur lui devait $ 1,700, ce qui représente des salaires impayés depuis plus d'un an», le bureau du procureur n'a pas déposé plainte contre l'employeur.33

Cas 4 : Meurtre

Dans un seul des 114 cas que Human Rights Watch a examinés, il y avait un employeur poursuivi pour meurtre ou pour avoir contribué à la mort d'une travailleuse domestique. D.I. (Pas ses vraies initiales). Il s’agissait d’une travailleuse domestique sri-lankaise, décédée le 8 Août 1998, à la maison de son employeur. Selon l'enquête de police, l'employeur battait régulièrement D.I. Le médecin légiste a effectué des radiographies sur le cadavre de D.I. et a conclu qu'elle avait « des disques brisés dans son cou, d’autres os brisés, et une coagulation du sang au niveau de son cou ». L'autopsie a confirmé que la cause du décès était de sa nuque brisée. Le tribunal a jugé que l'employeur avait sévèrement battu D.I., sur son corps et son cou et l’avait « forcée à travailler ». Il l'a reconnu coupable d’ "homicide involontaire" (article 550 du Code pénal) parce que son intention « n'était pas de tuer mais de battre la travailleuse domestique pour la forcer à travailler ». Le tribunal a infligé à l'employeur une peine d'un an et demi de prison, même si la peine minimale en vertu de l'article 550 est de cinq ans, au motif qu'il y avait des circonstances atténuantes et que l'employeur était «hystérique et très sensible."34

1.2.2 Jurisprudence en France

La France a été condamnée la première fois, en 2005, par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) dans une affaire d’esclavage domestique. (AFFAIRE SILIADIN c. France,

33 Ibid., p.37

34 Ibid., p.45

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22

26/10/2005). En 2012, il y a eu une deuxième condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans une affaire d’esclavage domestique après plus de dix ans de procédures.

C’est essentiel d’évoquer le dernier arrêt, vu sa date plus récente et sa postériorité sur l’arrêt 2005. L’arrêt rendu par la CEDH le 11 octobre 2012 trouve son origine à la fin du 20ème siècle, à la suite du génocide survenu au Burundi. Le CCEM est saisi de l’affaire par un signalement de l'association Enfance et Partage en 1998, à propos de deux sœurs burundaises, orphelines, conduites en France par leur oncle et tante, respectivement en 1994 et 1995, à l'âge de 16 et 10 ans. Elles sont alors hébergées au domicile de ces derniers dans les Hauts-de-Seine.

Leur oncle occupant à l'époque un poste de haut fonctionnaire à l'UNESCO, la première démarche juridique à effectuer consistait en l'obtention de la levée de son immunité de juridiction, laquelle non seulement faisait obstacle à une partie importante des mesures d'investigation, mais se serait également dressée contre d'éventuelles poursuites décidées à son encontre ou à celle de son épouse. Le parquet ayant sollicité et obtenu la levée de cette immunité en janvier 1999, s'ensuivirent dix années de procédure devant les juridictions répressives françaises, qui se soldèrent le 29 juin 2009 par la relaxe des époux par la Cour d'Appel de Versailles, considérés comme non coupables d'avoir commis le délit de soumission de personnes vulnérables à des conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité humaine à l'encontre de leurs nièces.

Contrairement au Ministère public, les victimes formèrent un pourvoi en cassation – qui fut rejeté par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 23 juin 2010. Toutefois, la Cour de cassation n'ayant été saisie, en conséquence de l'abstention du Ministère public, que du volet civil de l'affaire, les parties civiles saisirent la Cour européenne des droits de l'Homme le 23 décembre 2009.

Dans son arrêt, la CEDH analyse la situation de la plus jeune, scolarisée durant toute la période litigieuse, en termes de maltraitance et non d'exploitation au sens de l'article 4 de la Convention qui interdit l’esclavage, la servitude et le travail forcé. Mais elle estime que l'aînée a été soumise non seulement à une situation de travail forcé, mais que l'exploitation qui lui a été infligée a atteint le niveau de gravité supplémentaire que requiert la notion de servitude. Les auteurs de ces faits de servitude ayant été définitivement mis à l'abri d'une condamnation pénale par les juridictions françaises, la Cour, confirmant en cela son précédent arrêt Siliadin, constate que les dispositions pénales applicables à l'époque des faits n'assuraient pas une protection efficace aux victimes contre de tels agissements, et que par suite la France n'a pas respecté les obligations

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qu'elle supporte au titre de l'article 4 de la Convention. Mais la loi pénale n'est pas la seule mise en cause. C'est bien également l'attitude du parquet qui fonde le constat de violation dressé à l'encontre de la France. Ainsi, comme l'a relevé un auteur, "la Cour, faisant écho, une fois encore, à l'arrêt Siliadin, stigmatise l'inertie du parquet général: en ne formant pas de pourvoi incident, celui-ci a anéanti les espoirs répressifs des requérantes (...). Il faut espérer que les parquets recevront le message strasbourgeois, et qu'ils comprendront que lorsque le droit pénal a pour fonction de protéger un droit de l'Homme aussi important que celui consacré par l'article 4 de la Convention, ils doivent se montrer particulièrement vigilants dans l'usage des voies de recours, le non-usage de celles-ci étant susceptible d'engager la responsabilité internationale (européenne) de l'Etat français"; (D. Roets, L'article 4 de la Convention européenne des droits de l'Homme une nouvelle fois violé par la France", Rev. Sc. Crim. 2013.149; Cf. également AJDA 2013.165, chron. L. Burgorgue-Larsen).35

35 Comité contre l’esclavage moderne, rapport d’activité 2012, Paris, 2013, p.14

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PARTIE II : LES LACUNES DES REGLEMENTATIONS LIBANAISES ET AMELIORATIONS POSSIBLES AU REGARD DU DROIT INTERNATIONAL ET DU DROIT FRANÇAIS

En l’absence de la législation libanaise pour la protection des travailleurs domestiques et vu l’exploitation pratiquée par les agences de recrutement, ainsi que l’augmentation du travail forcé, même si il existe des réglementations. Il reste des lacunes dans les textes et des dérives dans les pratiques (2.1) dont une tentative de régularisation tout en s’inspirant du cadre juridique et réglementaire français (2.2).

2.1 LES LACUNES DES TEXTES ET LES DERIVES DES PRATIQUES

Les lacunes des textes effectives sont une cause profonde de la servitude domestique au Liban.

Dans ce chapitre, les conditions de travail domestique au Liban (horaires, pauses, salaires, journées de repos, heures supplémentaires, congés payés,…) seront étudiées dans les textes en vigueur (le contrat type de 2009). Ainsi que les dérives des pratiques au Liban et en France sous deux aspects : travail illégal et travail forcé.

2.1.1 Les lacunes des textes au Liban

À l’exception notable des travailleurs domestiques et des ouvriers agricoles, la loi protège les travailleurs étrangers au même titre que les travailleurs libanais. L’exclusion des travailleurs domestiques du code du travail signifie qu’ils n’ont pas les mêmes protections que les autres travailleurs, comme un salaire minimum mensuel, un nombre maximal d'heures de travail par jour, ou un minimum de 15 jours de vacances garanties. Cela signifie également qu'ils n'ont pas de garantie accident ou une indemnisation pour résiliation abusive du contrat de travail.

2.1.1.1 Les horaires

Dans l’article 11 du contrat unique, sont mentionnées dix heures non-consécutives de travail par jour au plus, avec 8 heures de repos de suite au moins, mais il arrive que les employés de maison

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travaillent plus, et les heures supplémentaires ne sont pas payées. Il n’existe pas de valorisation des heures supplémentaires en cas de dépassement ; ce point mériterait d’être étudié.

2.1.1.2 Le salaire minimal mensuel

Au Liban, le salaire minimum mensuel est désormais fixé à 675.000 LL (450 dollars) depuis 2012. Par ailleurs, il n’existe généralement aucun salaire minimal mensuel pour les travailleurs domestiques. Le salaire n’est pas évoqué dans l’article 6 du contrat.

Actuellement, les salaires des travailleurs domestiques varient entre 150 $ et 400 $ suivant la nationalité et l’expérience, et restent donc inférieurs à ceux des autres secteurs d’emploi. En considérant que son logement et sa nourriture sont déjà assurés par l’employeur.

D’autre part, le versement des salaires peut être retardé, mal calculé ou retenu de façon arbitraire par l’employeur. Dans l’article 6 du contrat : « l’employeur doit payer le salaire de son employée sans retard injustifié », mais la question à se poser est toutefois celle de savoir en quoi consisterait un retard justifié? Les employeurs ont souvent recours à une pratique qui consiste à annoncer aux travailleurs que leurs revenus seront placés sur un compte bancaire à leur nom, mais ceux-ci ne peuvent en disposer avant le terme du contrat.

Les agences de recrutement de travailleuses domestiques migrantes laissent souvent la possibilité aux employeurs de remplacer leur employée par une autre après trois mois d’essai, au cas où ils ne seraient pas satisfaits de leurs services. Dans ce contexte, il arrive que beaucoup de travailleuses migrantes passent d’un employeur à un autre sans recevoir de rémunération pendant une année entière.

2.1.1.3 Les congés

Le contrat unique laisse vagues ou omet certaines questions clés. Par exemple, alors qu'il reconnaît le droit du travailleur domestique à un jour de repos hebdomadaire, ainsi que des congés annuels de 6 jours, le droit de ce travailleur de quitter la maison pendant ces jours reste un sujet flou et n’est possible que sous réserve du consentement de l'employeur. (Article 12 du contrat)

Ce contrat type a échoué également à aborder la question qui consiste pour un employeur à confisquer les passeports des travailleurs. Dans tous les cas, le contournement des lois a tendance

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à devenir la règle, et permet d’imposer des conditions de travail et de rémunération particulièrement défavorables.

2.1.2 Les dérives des pratiques au Liban et en France

Plusieurs pratiques largement répandues, au Liban, consistent entre autres pour l'employeur à confisquer le passeport de son travailleur, à l’enfermer ou lui interdire de sortir de la maison…

Ces pratiques et ces moyens utilisés comportent indéniablement un aspect certain de servitude et d’exploitation par le travail.

La définition de la traite des êtres humains telle qu’énoncée à l’article 4-a de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains du 16 mai 2005 et à l’article 3-a du Protocole de Palerme additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, comporte : « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation.

L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes. »

La traite des êtres humains et le trafic illicite de migrants sont deux choses différentes. Le trafic illicite de migrants est un délit supposant le fait d’assurer, afin d’en tirer un avantage financier ou un autre avantage matériel, l’entrée illégale dans un État d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État.

Néanmoins, les processus de traite et de trafic peuvent être interdépendants et la distinction entre les deux délits peut être difficile. Autant les migrantes victimes de trafic que les victimes de traite peuvent être identifiées dans un même groupe de personnes effectuant un passage illégal de frontières, puisque les réseaux criminels sont reliés entre eux. De même, un migrant qui consent

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à son passage illégal de frontières peut finir, soit en transit, soit à destination, dans une situation de traite.36

Il faut bien distinguer entre le travail illégal et le travail forcé. Le travail illégal peut parfois conduire au travail forcé.

2.1.2.1 Le travail illégal

Le travail illégal est l'ensemble des pratiques dérogeant aux lois ou règlements réglementant l'emploi en vigueur dans le pays considéré. Le travail dissimulé ou non déclaré n’est pas l’équivalent de la traite des êtres humains. Par travail non déclaré l’on entend « toute activité rémunérée de nature légale, mais non déclarée aux pouvoirs publics, compte tenu des différences existant entre les systèmes réglementaires des États membres de l’UE.»37

En France, le Code du travail le définit ainsi dans l’art. L. 8211-1 : « Sont constitutives de travail illégal, dans les conditions prévues par le présent livre, les infractions suivantes :

1° Travail dissimulé ; 2° Marchandage ;

3° Prêt illicite de main-d’œuvre ;

4° Emploi d'étranger sans titre de travail ; 5° Cumuls irréguliers d'emplois ;

6° Fraude ou fausse déclaration prévue aux articles L. 5124-1, L. 5135-1 et L. 5429-1 ».

Au Liban, il est difficile d'estimer le nombre de travailleurs migrants illégaux qui semble être beaucoup plus élevé que le nombre de personnes dûment enregistrées à la Sureté Générale libanaise et au Ministère du Travail.

Le seul moyen de résider et de travailler légalement comme employée domestique au Liban et être enregistrée comme travailleur migrant, est d’avoir un garant. Cette pratique du système

« kafala », n’est pas inscrite formellement dans la loi. Ce système de parrainage qui découle

36 France Expertise Internationale -Ministère des affaires étrangères, outil pratique : l’identification préalable des victimes de traite a des fins d’exploitation par le travail, Paris, 2013, pp. 4-9

37 France Expertise Internationale -Ministère des affaires étrangères, Lignes directrices pour l’identification de la traite en Europe, Paris, 2013, p.25

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