Leçon 234 : Espaces L
p, 1 6 p 6 +∞ . 1 Construction de L
pSoit (X,A,µ) un espace mesuré.
Définition 1. Soitp∈[1,∞[, on définit l’espaceLp(X,A,µ) comme l’en- semble des fonctions mesurablesf telles queR
X|f|pdµest fini. On note Lp(X,A,µ) le quotient deLp(X,A,µ) par la relation d’équivalence « éga- litéµ–p.p. ».
On définit pourf ∈Lp(X,A,µ) la quantitékfkp=¡R
X|f|pdµ¢p1 .
Définition 2. Pour f mesurable positive, on définit la quantité ess sup(f)=inf{M>0|µ({f >M})=0}. On posekfk∞=ess sup(|f|) et on noteL∞(X,A,µ) l’ensemble des fonctions mesurables telles quekfk∞
est fini. On note L∞(X,A,µ) le quotient deL∞(X,A,µ) par la relation d’équivalence « égalitéµ–p.p. ».
Remarque3. Siµest la mesure de comptage sur¡
N,P(N)¢
, alors on note
`p(N).
Définition 4. Soient p,q ∈[1,∞], on dit quep et q sont des exposants conjugués sip1+1q =1 avec la convention ∞1 =0.
Proposition 5(Hölder). Soient p,q ∈[1,∞]des exposants conjugués et soient f ∈Lp et g ∈Lq. Alors le produit f g est dansL1 et on akf gk16 kfkpkgkq.
Proposition 6(Minkowski). Soit p∈[1,∞]et soient f,g ∈Lp. Alors on a l’inégalitékf +gkp6kfkp+ kgkp.
Corollaire 7. Pour tout p∈[1,∞], l’espaceLp(X,A,µ)est un e.v.n. pour la normek·kp.
Proposition 8.
1. Si la mesureµest finie, alors pour tous16p6q6∞, on a l’inclu- sionLq(µ)⊆Lp(µ).
2. Siµest la mesure de comptage surN, alors pour tous16p6q6∞, on a l’inclusion`p(N)⊆`q(N).
Exemple 9. Sur (R,B(R),λ), la fonctionf définie parf(x)=p1x1]0,1](x) est dans L1mais pas dans L2, et la fonctiongdéfinie parg(x)=1x1[1,+∞[(x) est dans L2mais pas dans L1.
Théorème 10. Pour tout p∈[1,+∞], l’espaceLp(X,A,µ)est complet pour la normek·kp. De plus, si(fn)converge dansLpalors on peut extraire une sous-suite qui convergeµ–p.p.
Exemple 11. On considère la suite de fonctionsfn,k=1[k
2n;k+12n[pourn∈N etk∈{0, . . . , 2n−1}. Alorsfn,kconverge vers 0 dans Lplorsquen→ ∞mais ne converge pas p.p.
Théorème 12. Soit p∈[1,∞[, on se place sur(R,B(R),λ).
1. L’ensemble des fonctions en escalier à support compact est dense dans Lp(R).
2. L’ensemble des fonctions continues à support compact est dense dans Lp(R).
Corollaire 13. L’espace Lp(R) est séparable pour p ∈ [1,∞[. Par contre L∞(R)n’est pas séparable.
2 Densité et convolution
Définition 14. On appelle produit de convolution de f etg la fonction f∗g(x)=R
Rf(y)g(x−y) dy, lorsque celle-ci est bien définie.
1
Lemme 15. Soit p∈[1,∞[, alors pour tout f ∈Lp(R), l’application a∈R7→
τaf ∈Lp(R)est uniformément continue.
Proposition 16.
1. Soient p,q∈[1,∞]des exposants conjugués et soient f ∈Lpet g∈Lq. Alors f∗g est bien définie surR, elle est uniformément continue, bor- née etkf∗gk∞6kfkpkgkq. De plus, si p∈]1,∞[, alors f∗g(x)tend vers0lorsque|x|tend vers+∞.
2. Soit p ∈[1,∞] et soient f ∈L1 et g ∈Lp, alors f ∗g existe p.p. et f∗g∈Lp. Plus précisément,kf∗gkp6kfk1kgkp.
Proposition 17.
1. Soient f ∈L1(R)et g bornée, dérivable et de dérivée continue bornée, alors f ∗g est dérivable et(f∗g)0=f∗(g0).
2. Soient f ∈L∞(R)et g dérivable et intégrable de dérivée continue et intégrable, alors f ∗g est dérivable et(f∗g)0=f∗(g0).
Définition 18. On dit que (ϕn) est une suite d’approximation de l’unité si :
1. ϕn>0 p.p. pour toutn∈N; 2. R
ϕn=1 pour toutn∈N; 3. pour toutδ>0,R
|x|>δϕntend vers 0 lorsquen→ ∞.
Exemple 19. Si ϕest L1 positive d’intégrale 1 alorsϕn(x)=nϕ(nx) est une approximation de l’unité. Par exemple pourϕ(x)=p12πe−x
2
2 ou pour ϕ(x)=Cexp(−1−x12)1[−1;1](x) avecCconstante de normalisation.
Théorème 20. Soit(ϕn)une suite d’approximation de l’unité.
1. Si f est continue bornée, alors f∗ϕnconverge uniformément sur tout compact vers f .
2. Soit p∈[1,∞[, si f ∈Lpalors f∗ϕnconverge vers f dansLp.
Corollaire 21. L’ensemble des fonctions C∞c est dense dans Lp(R), pour p∈[1,∞[.
3 Structure hilbertienne de L
2Proposition 22. SurL2(X,A,µ), on définit la forme sesquilinéaire suivante
〈f |g〉 =R
X f gdµ. Alors la norme associée à cette forme est la normek·k2et L2est un espace de Hilbert.
Théorème 23(projection orthogonale). Soit F un s.e.v. fermé deL2. Alors pour tout f ∈L2, il existe un uniqueπF(f)∈F qui réalise la distance de f à F . L’élémentπF(f)est l’unique élément de F qui vérifie f−πF(f)⊥F . De plus, l’applicationπF: L2→F est linéaire, continue et surjective. Enfin, on a la décompositionL2=F⊕F⊥.
Application 24(espérance conditionnelle L2). Soit (Ω,A,P) un espace de probabilité et soitF une sous-tribu deA. Alors pour toutX∈L2(Ω,A), on appelle espérance conditionnelle deXsachantF la projection ortho- gonale deXsur L2(Ω,F). Cette projection est notéeE[X|F].
Théorème 25(représentation de Riesz). SoitΦ: L2→Cune forme linéaire continue. Alors il existe une unique fonction g∈L2telle que :
∀f ∈L2,Φ(f)= Z
X
f gdµ
Définition 26. SoitI un intervalle deRet soitρ:I→R+ mesurable. On dit queρest une fonction poids si pour toutn∈N,R
I|x|nρ(x) dxest fini.
On note L2(I,ρ) l’espace des fonctions de carré intégrable pour la mesure de densitéρpar rapport la mesure de Lebesgue.
Muni du produit scalaire〈f |g〉ρ=R
I f(x)g(x)ρ(x) dx, c’est un espace de Hilbert.
Théorème 27. Soit I un intervalle deRetρune fonction poids. On sup- pose qu’il existeα>0tel queR
Ieα|x|ρ(x) dx est fini. Alors l’ensemble des polynômes est dense dansL2(I,ρ).
2
Corollaire 28. Il existe une unique famille(Pn)n∈Nde polynômes unitaires orthogonaux deux à deux tels quedegPn =n, obtenue par le procédé de Gram–Schmidt appliqué à la base canonique deC[X]. Sous les hypothèses du théorème précédent, cette famille est une base hilbertienne deL2(I,ρ).
Exemple 29. PourI =Retρ(x)=e−x2, les polynômes orthogonaux as- sociés sont appelés les polynômes de Hermite, notés (Hn)n∈N. C’est une base hilbertienne de L2(I,ρ). La famille (Hne−x
2
2 ) est alors une base hil- bertienne de L2(R) (une fois normalisée).
4 L’espace L
p2πOn note en(x) = einx et on munit L22π du produit scalaire 〈f | g〉 =
1 2π
R2π
0 f(t)g(t) dt.
Définition 30. Pour f ∈L12π, on note cn(f)= 21πR2π
0 f(t)e−intdt sonn–
ième coefficient de Fourier.
Définition 31. On appelle noyau de Dirichlet la fonctionDN=PN n=−Nen. On appelle noyau de Fejér la fonctionKN=N1PN−1
n=0Dn. Sif ∈L12π, on noteσNf =KN∗f.
Lemme 32. Soit p ∈[1,∞[, alors pour tout f ∈Lp2π, l’application a∈R7→
τaf ∈Lp2πest uniformément continue.
Proposition 33. La suite(KN)est une approximation de l’unité dansL2πp .
Théorème 34(Fejér).
1. Si f est continue, alorsσNf converge uniformément vers f . 2. Si f ∈Lp2πavec p∈[1,∞[, alorsσNf converge vers f dansLp2π. Corollaire 35. La famille(en)n∈Zest une base hilbertienne deL22π.
Corollaire 36(Parseval). Si f ∈L22π, alorskfk22=P
n∈Z|cn(f)|2.
Corollaire 37. L’application qui à f ∈L12πassocie ses coefficients de Fourier est injective.
Développements
1. Lpest complet.[10]
2. Théorème de Fejér.[34]
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Références
— BECK, MALICKet PEYRÉ,Objectif agrégation.
— BREZIS,Analyse fonctionnelle.
— BRIANEet PAGÈS,Analyse – Théorie de l’intégration.
— HIRSCHet LACOMBE,Éléments d’analyse fonctionnelle.
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