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Développements du droit suisse des OPA

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Développements du droit suisse des OPA

THÉVENOZ, Luc, BOVEY, Pascal

THÉVENOZ, Luc, BOVEY, Pascal. Développements du droit suisse des OPA. Revue suisse de droit des affaires et du marché financier , 2013, vol. 85, no. 3, p. 239-253

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:36337

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Table des matières I. Introduction II. Prix minimum

1. Abolition de la prime de contrôle 2. L’offre sur Quadrant AG

2.1 Nomination de l’organe de contrôle chargé d’évaluer les prestations accessoires 2.2 Evaluation des prestations accessoires 2.3 Pas d’effet sur le prix minimum de l’offre 2.4 Effet d’une hypothétique augmentation

du prix ?

3. Prix minimum – moment déterminant pour sa fixation

3.1 L’offre sur Bank Sarasin AG 3.2 L’offre sur Uster Technologies AG

3.3 Comparaison des transactions Sarasin et Uster III. Opting out et opting up: chagement de pratique

1. Le contexte

2. La décision Advanced Digital Broadcast 3. La décision Perfect Holding

4. Qui sont les actionnaires minoritaires ? 5. Les actionnaires minoritaires ont-ils

le dernier mot ?

6. Les clauses formellement sélectives sont-elles possibles ?

IV. Programmes de rachat d’actions 1. Nouvelles règles au 1er mai 2013 2. Exigences d’égalité de traitement

et d’absence de changement de contrôle : la transaction Absolute Invest

I. Introduction

En 2012, le marché des offres publiques d’acqui­

sition a connu son étiage avec deux nouvelles offres publiques, sur Bank Sarasin AG et sur Uster Techno­

logies AG (I.3). Les développements juridiques sont plus riches cependant. D’une part, l’offre sur Qua­

drant AG, lancée en mai 2009, a connu sa conclusion par une décision, entrée en force, par laquelle la Com mission des OPA (COPA) a confirmé que le prix de l’offre était conforme aux règles en vigueur (I.2).

D’autre part, la COPA semble avoir désormais fixé sa pratique en matière de clauses d’opting out et d’op­

ting up introduites dans les statuts d’une société après son entrée en bourse (II).

Les principales nouveautés tiennent cependant à des modifications législatives et réglementaires.

A l’occasion d’une révision de la loi sur les bourses (LBVM) améliorant la lutte contre les abus de mar­

ché, datée du 28 septembre 2012 et entrée en vigueur le 1er mai 2013,1 le Parlement fédéral a modifié plu­

sieurs règles relatives aux OPA. La principale modifi­

cation supprime la possibilité pour un offrant de ver­

ser une « prime de contrôle », c’est­à­dire un prix plus élevé à certains actionnaires qui lui vendent leurs titres avant qu’il ne lance une offre publique d’acquisition.2 Nous y revenons plus loin (I.1). En outre, le champ d’application territorial du droit des OPA est désor­

mais étendu aux sociétés étrangères qui sont cotées

« à titre principal » en Suisse.3 A cela s’ajoutent plu­

sieurs modifications de nature plutôt procédurale.4 La révision de la LBVM rendit nécessaire une ré­

vision partielle de l’ordonnance sur les offres pu­

bliques d’acquisition (OOPA).5 Aux changements d’ordre technique dus à la révision de la loi (notam­

ment l’augmentation de 2% à 3% du seuil de la parti­

cipation devant être détenue par les actionnaires sou­

haitant prendre part à la procédure devant la COPA ; art. 33b al. 3 LBVM), la COPA saisit cette occasion pour résoudre certains problèmes qui se posaient en pratique.6 L’introduction des nouvelles dispositions

1 Loi fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières du 24 mars 1995 (RS 954.1), modifiée le 28 septembre 2012 (RO 2013 1103). Voir le message du Conseil fédéral du 31 août 2011, FF 2011 6329 = BBl 2011 6873.

2 Art. 32 al. 4 LBVM.

3 Art. 22 al. 1 LBVM. Auparavant, les offres publiques sur ces sociétés n’étaient régies ni par le droit suisse de la co­

tation principale, ni (en général) par le droit du siège de la société.

4 Mesures conservatoires en cas de manquement à l’obli­

gation de présenter une offre (art. 32 al. 7) ; seuil de 3%

définissant les actionnaires qualifiés autorisés à faire op­

position ou recours contre les décisions de la COPA et de la FINMA (art. 33b al. 3) ; procédure devant la FINMA (art. 33c al. 3) ; suppression des féries pour les recours au TAF (art. 33d al. 3).

5 Ordonnance de la Commission des OPA du 21 août 2008 sur les offres publiques d’acquisition (RS 954.195.1), mo­

difiée le 28 janvier 2013 (RO 2013 1119).

6 Méthodes de publication des annonces, prospectus, rap­

ports et autres documents relatifs à une offre (art. 6, 6a et 6b, et nombreuses dispositions éparpillées) ; alternative en espèces pour les offres d’échange volontaires (art. 9 al. 6, 9a et 9b ; abrogation de la circulaire COPA n° 4) ; obliga­

tion de déclarer les transactions (art. 39) ; émoluments (art. 69).

* Les deux auteurs s’expriment en leur nom personnel. Les opinions présentées dans cette contribution ne lient pas la Commission des OPA.

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légales relatives aux abus de marché et délits d’initié entraîna également une modification de l’ordonnance du Conseil fédéral sur les bourses (OBVM),7 qui pré­

cise désormais à quelles conditions les programmes de rachat d’actions sont considérés comme ne violant pas ces nouvelles dispositions. Ensuite de cela, la adapta également sa Circulaire COPA n° 1 relative aux programmes de rachat d’ac tions (III). L’intégra­

lité de ces modifications est en trée en vigueur le 1er mai 2013.

II. Prix minimum

1. Abolition de la prime de contrôle

Dans sa teneur en vigueur jusqu’au 30 avril 2013, l’art. 32 al. 4 LBVM disposait que le prix minimum d’une offre obligatoire devait être (i) au moins égal au cours de bourse et (ii) ne pas être inférieur de plus de 25% au prix le plus élevé payé par l’offrant pour des titres de la société visée dans les douze derniers mois. Il était ainsi admis qu’un offrant verse un prix supérieur d’un tiers à celui de l’offre pour les titres acquis durant l’année précédant la publication de l’offre.

Depuis le 1er mai 2013, ce même alinéa n’autorise plus cette pratique et dispose que le prix d’une offre obligatoire doit être au moins égal au plus élevé des montants suivants : (i) le cours de bourse ; (ii) le prix le plus élevé payé par l’offrant pour des titres de la société visée dans les douze derniers mois. Il s’agit ici de la principale modification concernant le droit des OPA dans le cadre de la révision de la LBVM adoptée par le Parlement le 28 septembre 2012. Dans son message, le Conseil fédéral considéra en subs­

tance que la possibilité de verser une prime de contrôle violait le principe d’égalité de traitement et qu’elle poussait les grands actionnaires des sociétés visées (ainsi que les conseils d’administration de ces sociétés) à « se concentrer sur la négociation du prix des paquets d’actions déterminants échangés en amont plutôt que sur les modalités de prix de l’offre

7 Ordonnance sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières du 2 décembre 1996 (RS 954.11), modifiée le 10 avril 2013 (RO 2013 1111).

publique d’acquisition »,8 au détriment des action­

naires minoritaires.

La nouvelle règlementation protège mieux les ac­

tionnaires minoritaires qui ne pourront à l’avenir plus être traités de manière différente des actionnaires qui vendent leur participation à l’offrant en amont de l’offre. Cette égalité de traitement présente en quelque sorte un caractère absolu, puisqu’elle ne prend pas en considération le nombre d’actions fai­

sant partie du paquet aliéné. Peu importe que l’of­

frant acquiert un paquet de contrôle ou une seule ac­

tion : le même prix doit être proposé aux destinataires de l’offre. Le Parlement écarte ainsi l’un des princi­

paux arguments des opposants à l’abolition de la prime de contrôle, à savoir qu’une action faisant par­

tie d’un paquet de contrôle a en quelque sorte une valeur supérieure à la même action prise isolément et peut donc être acquise à un prix supérieur sans violer le principe d’égalité de traitement.

Ce faisant, le droit suisse s’aligne sur le City Takeover Code – qui lui a servi de modèle – et sur le droit européen, qui ne connaissent pas l’institution de la prime de contrôle.9 Mais la reprise unilatérale du droit européen n’est pas un argument fort au Parle­

ment fédéral. Cette correction importante d’un arbi­

trage qui avait été fait par ce même Parlement en 1995 lors de l’introduction de l’offre obligatoire trouve son origine dans des transactions suisses telles que Harwanne10 et Quadrant (I.2 ci­après), où la prime de contrôle payée aux actionnaires principaux apparut choquante aux petits actionnaires, aux ac­

teurs du marché et à l’opinion publique. Ces excès eurent un écho politique. Ils suscitèrent une interpel­

lation parlementaire11 et une proposition formelle de

8 FF 2011 6339. Voir également Luc Thévenoz/Lukas Roos, Die sogennante Kontrollprämie im Übernahmerecht, RSDA 2011 p. 612 ss; Daniel Daeniker, Angebotspflicht und Kontrollprämie – die Schweiz gegen den Rest der Welt ?, in : Tschäni Rudolf (éd.), Mergers & Acquisitions XIII, Zurich/Bâle/Genève 2010, p. 93 ss; Nina Reiser/

Hans Caspar von der Crone, Mindestpreis nach Art. 32 Abs. 4 BEHG, GesKR 2012 p. 29 ss.

9 Voir art. 5 al. 4 de la Directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d’acquisition et Rule 9.5 du City Code on Takeovers and Mergers.

10 ‹http://www.takeover.ch/transactions/detail/nr/0403›.

11 Interpellation 09.3667 déposée le 12 juin 2009 par Hans Kaufmann : Surveillance des marchés financiers déficiente ou lacunaire ?

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la COPA,12 soumise à une procédure d’audition qui confirma que la prime de contrôle ne trouvait plus grâce aux yeux du public et du marché.

Le législateur ayant tranché le débat, les offrants sont désormais tenus de garantir que le prix de l’offre est égal ou supérieur aux prix payés avant l’offre (ac­

quisitions préalables). Nous le verrons, l’affaire Qua­

drant montre les difficultés de cette comparaison lorsque, outre les prestations principales (paiement du prix et livraison des actions), des prestations ac­

cessoires importantes sont échangées entre l’acqué­

reur et l’aliénateur de titres dans le cadre de l’acqui­

sition préalable. L’existence de telles prestations peut avoir pour conséquence la correction du prix de l’ac­

quisition préalable du montant correspondant à leur valeur.13 L’abolition de la prime de contrôle pourrait avoir pour effet secondaire d’accentuer ce type de problématique. Tant que le prix de l’offre pouvait être inférieur de 25% à celui de l’acquisition préalable, d’éventuelles prestations accessoires importantes se trouvaient en général comprises dans cette marge. Il fallut attendre l’affaire Quadrant, où le prix de l’offre était 24,9% en­dessous du prix de certaines acquisi­

tions préalables, hors prestations accessoires, pour que la valeur de ces prestations accessoires devienne critique. Avec la suppression de la prime de contrôle, il faut s’attendre à ce que l’év a luation des prestations accessoires devienne un sujet délicat dans les offres soumises à la règle du prix minimum. Au vu des dif­

ficultés liées à leur évaluation, comme on va le voir dans l’affaire Quadrant, la prudence s’impose. Une acquisition préalable qui pose ce genre de problèmes peut entraîner des recours sus ceptibles de retarder, voire de faire dérailler, la transaction. Tout offrant doit peser ces risques avant de conclure une transac­

tion qui pose des problèmes complexes de valorisa­

tion.

2. L’offre sur Quadrant AG

Le 1er mai 2009, quatre administrateurs de Qua­

drant AG (Quadrant) ont conclu plusieurs contrats avec Mitsubishi Plastics, Inc (MPI), avec pour effet de régler le processus commun d’OPA sur Quadrant.

12 Mémorandum de la COPA au Département fédéral des fi­

nances du 21 janvier 2011, soumise à une procédure d’au­

dition le 25 janvier 2011, <http://www.sif.admin.ch/00488/

index.html?lang=fr&msg-id=37372>.

13 Art. 41 al. 4 OBVM­FINMA.

Sur la base de ces contrats, les administrateurs fondè­

rent la société Aquamit B.V. (Aquamit), lui transmet­

tant par apport en nature la totalité de leurs actions Quadrant (représentant 15,7% du capital de Qua­

drant) pour une valeur de CHF 114.50 par action. Im­

médiatement après la fondation d’Aquamit, les admi­

nistrateurs vendirent la moitié de son capital à MPI.

Le 4 mai 2009, Aquamit publia l’annonce pré alable d’une offre publique d’acquisition portant sur toutes les actions de Quadrant AG en mains du public, au prix de CHF 86. Le prospectus d’offre suivit le 2 juin 2009. Une fairness opinion établit que la valeur de l’action Quadrant se situait entre CHF 80 et CHF 95.

Dans sa première décision,14 la COPA constata que l’offre d’Aquamit était conforme aux règles sur les offres publiques d’acquisition. Notamment, les dis positions sur le prix minimum de l’offre furent con sidérées comme respectées : le prix le plus élevé payé par l’offrant pour des actions Quadrant dans les douze mois précédant la publication de l’offre était de CHF 114.50. Les quatre administrateurs reçurent ainsi une prime de 33,14 par rapport au prix de l’offre, restant ainsi dans les limites admises par l’art. 32 al. 4 LBVM, qui admettait alors le paiement d’une prime de contrôle pouvant aller jusqu’à 3313% du prix de l’offre. D’autres actionnaires importants de Quadrant vendirent leurs actions à Aquamit pour CHF 104.50.

Enfin, Quadrant vendit ses actions propres à Aquamit pour CHF 86. Bien entendu, le fait que différents prix furent payés à divers actionnaires, dont le prix le plus élevé aux fondateurs et administrateurs de Quadrant, choqua l’opinion et fut également à l’origine des dis­

cussions politiques qui suivirent.

Sarasin Investmentfonds AG (Sarasin), action­

naire qualifié de Quadrant, forma opposition contre la décision de la COPA. Il fit notamment valoir que les quatre administrateurs avaient reçu (au travers d’Aquamit), outre le prix de CHF 114.50 par action, d’autres prestations importantes15 dont la valeur de­

vait venir corriger le prix de l’acquisition préalable et

14 Décision 410/01 du 29 mai 2009.

15 Au sens de l’art. 41 al. 4 OBVM­FINMA. Sarasin avait en l’espèce identifié les prestations suivantes : prestations fi­

nancières par MPI (dans le but de financer l’offre, notam­

ment un prêt et la souscription d’une obligation converti­

ble), le refinancement par MPI d’un crédit syndiqué de Quadrant AG, l’octroi dans la convention d’actionnaires entre MPI et les administrateurs de droits de préemption et d’emption ainsi qu’un « Founder’s Right » accordé à ces derniers dans le contrat de Joint Venture, leur permettant

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finalement augmenter le prix minimum de l’offre.

Dans un premier temps, la COPA puis la FINMA re­

jetèrent les arguments de l’opposant.16 Sarasin porta l’affaire devant le Tribunal administratif fédéral (TAF) qui, seize mois plus tard, renvoya l’affaire à la COPA pour que celle­ci fasse procéder à une évaluation complète et détaillée de toutes les prestations finan­

cières de MPI et de toutes contre­prestations des quatre administrateurs. Le TAF précisa que l’évalua­

tion devait être effectuée par un organe de contrôle au sens de l’art. 25 LBVM. Il appartenait à la COPA de choisir si l’évaluation serait effectuée par l’organe de contrôle qui s’était déjà occupé de l’offre ou par un nouvel organe de contrôle.17

S’ensuivit une très longue procédure, durant la­

quelle les parties s’affrontèrent en premier lieu sur la désignation de l’organe de contrôle chargé d’évaluer les prestations accessoires (infra I. 2.1), puis sur l’évaluation en soi (infra I. 2.2).

2.1 Nomination de l’organe de contrôle chargé d’évaluer les prestations accessoires

Peu après la notification de l’arrêt, la COPA indi­

qua aux parties que, conformément au système prévu à l’art. 41 al. 4 et 5 OBVM­FINMA, l’évaluation des prestations accessoires incombait tout d’abord à l’of­

frant (Aquamit) et que l’organe de contrôle serait ensuite chargé de vérifier que l’éventuelle correction (à la hausse ou à la baisse) du prix de l’acquisition préalable en découlant est équitable. Aquamit man­

data un expert externe pour procéder à l’évaluation en question tandis que Sarasin mandata de son côté un autre expert et déposa sa propre évaluation.

Les problèmes s’accentuèrent lorsqu’il fallut dé­

terminer qui devait vérifier l’évaluation établie pour Aquamit. Sarasin argumenta qu’il ne devait pas s’agir d’un organe de contrôle mandaté par l’offrant mais d’un expert indépendant au sens de l’art. 12 let. e de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA).18 Dans une ordonnance de procédure, la COPA rejeta

de sortir de leur investissement dans Aquamit si MPI re­

fuse de prolonger l’obligation convertible en 2014.

16 Décision 410/02 du 16 juin 2009; décision de la FINMA du 8 juillet 2009.

17 Arrêt du TAF B­5272/2009 du 30 novembre 2010, con­

sid. 13.

18 Loi fédérale sur la procédure administrative du 20 dé­

cembre 1968 (RS 172.021).

ce point de vue.19 Il s’est néanmoins avéré particu­

lièrement difficile pour Aquamit de nommer un or­

gane de contrôle indépendant de toutes les parties à la procédure et qui soit apte à effectuer les évaluations requises. Bien qu’un organe de contrôle puisse en théorie être soit une société d’audit autorisée par la FINMA soit un négociant en valeurs mobilières,20 la complexité des évaluations requises eut pour consé­

quence que la grande majorité des négociants ne dis­

posaient pas des ressources nécessaires pour ce faire.

De nombreuses sociétés approchées par Aquamit re­

fusèrent d’emblée d’accepter ce mandat. En outre, plusieurs candidats désignés par Aquamit renon­

cèrent en cours de route. En fin de compte, la COPA demanda aux parties de nommer chacune plusieurs candidats. Elle se prononça sur leur indépendance et leur aptitude par décision du 14 novembre 2011,21 confirmée par la FINMA puis par le TAF suite aux recours formés par Sarasin.22 Finalement, Aquamit mandata Kepler Capital Markets SA (Kepler) pour contrôler l’évaluation des prestations accessoires.

2.2 Evaluation des prestations accessoires

Conformément au système voulu par l’art. 41 al. 5 OBVM­FINMA, l’organe de contrôle est chargé de vérifier les calculs faits par l’offrante (respectivement l’expert qu’elle avait mandaté). Pour ce faire, il exa­

mine chaque prestation déterminante et expose ses calculs. Il dispose à cet effet d’un important pouvoir d’appréciation technique (technisches Ermessen).23 Il doit motiver son évaluation de manière approfondie.

Pour sa part, la COPA examine si les conclusions et les explications de l’organe de contrôle sont transpa­

rentes, plausibles et vérifiables (transparent, plausi- bel und nachvollziehbar).24 Ce contrôle limité de la COPA s’explique par le fait que l’organe de contrôle, considéré comme le « bras droit » de la COPA, dis­

pose d’une expertise technique et des ressources hu­

maines nécessaires à vérifier des éléments de fait que

19 Les ordonnances de procédure ne sont pas publiées sur le site de la COPA. On trouve souvent la trace des points contestés dans les décisions publiées, comme ici au consi­

dérant 1.1 de la décision 410/03 du 5 juillet 2011.

20 Art. 25 al. 1 LBVM.

21 Décision 410/04 du 14 novembre 2011.

22 Décision de la FINMA du 21 décembre 2011; arrêt du TAF B­253/2012 du 8 mars 2012.

23 Arrêt du TAF du 30 novembre 2010, consid. 7.3.

24 Décision 410/05 du 13 décembre 2012, consid. 4.

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la COPA n’est pas à même de clarifier elle­même.

L’organe de contrôle remplit à cet effet une sorte de fonction étatique (behördliche Funktion) aux cotés de la COPA, dans le but d’alléger sa tâche.25 En l’es­

pèce, après un examen approfondi, la COPA consi­

déra que les arguments renouvelés de Sarasin ne re­

mettaient pas sérieusement en cause les conclu sions de l’organe de contrôle.

La présente contribution ne commente pas de fa­

çon détaillée le rapport, très condensé, établi par Ke­

pler le 9 octobre 2012.26 Sa lecture confirme que l’évaluation de ces prestations dites « accessoires » peut être redoutablement complexe, mettre en œuvre des méthodes inédites et reposer sur des hypothèses économiques et financières faisant appel à un large pouvoir d’appréciation. Pour des motifs résumés de façon convaincante dans son rapport, l’organe de contrôle accorda une valeur relativement élevée aux prestations financières fournies par MPI. Il attacha cependant également une valeur importante aux contre­prestations fournies par les quatre administra­

teurs, notamment au know­how et à l’expérience ap­

portés par les quatre administrateurs ainsi qu’aux garanties fournies. Le rapport constate en outre que le « right of first refusal » que les parties s’étaient mu­

tuellement accordé avait une valeur plus grande pour MPI que pour les quatre administrateurs.27

2.3 Pas d’effet sur le prix minimum de l’offre

En l’espèce, l’organe de contrôle arriva à la conclusion que les règles sur le prix minimum avaient été respectées. Il compara la valeur attribuée aux prestations accessoires fournies par MPI à celles fournies par les quatre administrateurs et constata que l’avan tage en faveur de MPI dépassait celui des administrateurs. Ceux­ci n’ont donc reçu aucune prime cachée de MPI dans le cadre de l’acquisition préalable de leurs actions. Le prix versé aux adminis­

trateurs (CHF 114.50) put donc être utilisé pour dé­

terminer le prix minimum de l’offre d’Aquamit. Plus de 3 ans après l’exécution de l’offre, la COPA

25 Arrêt du TAF du 30 novembre 2010, consid. 2.2 ; arrêt du TAF du 8 mars 2012, consid. 3.2 et décision 410/05 du 13 décembre 2012, consid. 4.

26 Kepler Capital Markets, Review body report on Neben- leistungen and minimum price rule compliance, ‹http://

www.takeover.ch/documentprovider/contentelements/

nr/2274›.

27 Décision 410/05 du 13 décembre 2012, consid. 6.

constata enfin que le prix de l’offre de CHF 86 res­

pectait les règles sur le prix minimum.28

2.4 Effet d’une hypothétique augmentation du prix ? Bien qu’ayant fait l’objet d’une procédure conten­

tieuse dont la durée fut sans précédent dans l’histoire suisse des offres publiques d’acquisition, l’offre sur Quadrant suivit les délais ordinaires en matière d’OPA. Le délai d’offre et le délai supplémentaire coururent normalement et les actionnaires ayant ac­

cepté l’offre d’Aquamit (91,58% des actions visées par l’offre) reçurent le prix de CHF 86 le 9 septembre 2009, trois mois environ après la publication du pros­

pectus de l’offre.

Cette situation est rendue possible par le fait que les recours auprès du TAF ne sont pas assortis de l’ef­

fet suspensif et n’interrompent donc pas le déroule­

ment de l’offre.29 Le législateur n’a pas souhaité qu’un recours au TAF retarde l’offre de manière ex­

cessive, celle­ci devant se dérouler rapidement au vu de ses effets sur la société visée et des incertitudes qu’elle peut créer quant à son avenir. En présence d’un recours au TAF, les actionnaires se trouvent donc devant un certain dilemme : accepter l’offre pré­

sentée à un prix qu’ils jugent peut­être trop bas ou attendre de voir le résultat de la procédure et espérer que l’offre soit réouverte si le prix est augmenté. La situation des actionnaires est délicate au vu des consi­

dérants du TAF à ce propos : en effet, le TAF semble considérer qu’une augmentation du prix décidée dans une procédure de recours ne devrait bénéficier qu’aux parties à la procédure.30 En d’autres termes, une aug­

mentation du prix ne bénéficierait pas aux autres ac­

tionnaires de la société, qu’ils aient accepté ou non l’OPA. Cette réflexion va à l’encontre du principe d’égalité de traitement, selon lequel un offrant doit traiter de manière identique tous les destinataires d’une offre publique.31 Dans sa décision finale dans l’affaire Quadrant, la COPA indiqua qu’elle ne parta­

geait pas l’avis du TAF et affirma qu’une éventuelle augmentation du prix devrait avoir un effet « réflexe » pour tous les participants au marché (Reflexwirkung für alle Marktteilnehmer), ou plutôt ici pour tous les

28 Ibidem, consid. 7.

29 Art. 33d al. 2 LBVM.

30 Arrêt du TAF du 30 novembre 2010, consid. 1.4.3.

31 Art. 1 LBVM ; art. 1 et 9 OOPA.

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actionnaires qui avaient accepté l’offre.32 Le paie­

ment d’un éventuel complément de prix devrait vrai­

semblablement être versé via la banque chargée de l’exécution de l’offre et acheminée aux actionnaires au travers des établissements (suisses et étrangers) qui ont remis des titres à l’offre pour le compte de leurs clients

3. Prix minimum – moment déterminant pour sa fixation

C’est au moment où une offre est rendue publique, que ce soit par l’annonce préalable (s’il y en a une) ou par le prospectus, que le prix minimum est fixé. Cette date est déterminante pour la fixation des deux com­

posantes du prix minimum : (i) le cours de bourse, qui est la moyenne (pondérée en fonction des volumes) des cours calculée sur une période de 60 jours de bourse précédant cette date33; (ii) le prix de l’acquisi­

tion préalable, qui correspond au prix le plus élevé payé par l’acquéreur pour des titres de participation de la société visée pendant les douze mois précédant cette même date.34 En 2012, deux transactions ont il­

lustré cette règle de deux manières relativement dif­

férentes. Il s’agit des deux seules OPA publiées cette année : sur Bank Sarasin AG et sur Uster Technolo­

gies AG.

3.1 L’offre sur Bank Sarasin AG

La reprise du paquet d’actions représentant 68%

des droits de vote dans Bank Sarasin AG (Sarasin), détenu jusqu’alors indirectement par Coöperatieve Centrale Raiffeisen­Boerenleenbank B.A. Amster­

dam (Rabobank) fut l’objet de nombreuses spécula­

tions à l’automne 2011. Le suspense prit fin le 25 no­

vembre 2011, jour de la conclusion d’un contrat d’achat avec Comtel Holding Ltd et B. Safra Luxem­

bourg S.A., deux sociétés détenues par Joseph Y. Sa­

fra (ensemble : Safra), qui fut immédiatement annon­

32 Décision 410/05 du 13 décembre 2012, consid. 7. Voir ég­

alement Henry Peter/Pascal Bovey, Droit suisse des OPA, Berne 2013, N. 760 s. ; Lorenzo Olgiati/Nadine Schwibs, Parteistellung und Urteilswirkung im übernahmerecht­

lichen Beschwerdeverfahren, Besprechung des Urteils B­5272/2009 des schweizerischen Bundesverwaltungs­

gerichts vom 30. November 2010 in Sachen Quadrant, GesKR 2011, 252 ss.

33 Art. 40 al. 2 OBVM­FINMA.

34 Art. 41 al. 1 OBVM­FINMA.

cée au marché. L’exécution de cet achat était soumise à plusieurs conditions suspensives, notamment l’ob­

tention des autorisations nécessaires des autorités en matière de concurrence et de surveillance financière en Suisse et à l’étranger. Le prix d’achat correspon­

dait à CHF 7.20 par action nominative A de Sarasin (non cotées) et à CHF 36 par action nominative B de Sarasin (cotées).

L’acquisition d’une participation de plus de 3313% (ici : 68%) des droits de vote dans une société cotée oblige l’acquéreur à présenter une offre. Cette obliga­

tion n’est en principe pas déclenchée au moment de l’acte générateur d’obligations mais au moment de son exécution, c’est­à­dire lorsque les actions (et les droits de vote y relatifs) deviennent propriété de l’ac­

quéreur.35 Dans des cas exceptionnels, la COPA ren­

versa ce principe et prit en considération la conclu­

sion de l’acte générateur d’obligations, notamment lorsque des accords sur l’exercice des droits de vote furent conclus ou lorsque ceux­ci furent transmis à ce moment à l’acquéreur.36 En l’espèce, le contrat entre Safra et Rabobank ne contenait pas de clause simi­

laire. En l’absence d’accord sur l’utilisation des droits de vote par Rabobank, cette­dernière conserva formellement l’usage de ces droits jusqu’à l’exécu­

tion de la vente. Le 2 juillet 2012, Rabobank s’enga­

gea néanmoins envers Safra à solliciter la convoca­

tion d’une assemblée générale à la fin du mois de juillet 2012 et la nomination de représentants de Sa­

fra au conseil d’administration. De son côté, Safra s’engagea toutefois à ne pas prendre de décisions im­

portantes au conseil d’administration tant que le contrat d’achat ne serait pas définitivement exécuté.

L’acquisition fut exécutée le 31 juillet 2012, date de l’assemblée générale lors de laquelle les représen­

tants de Safra furent élus au conseil d’administration.

Ce faisant l’obligation de présenter une offre prit naissance et Safra publia l’annonce préalable de son offre le même jour.

Dans le cas d’espèce, l’obligation de présenter une offre fut déclenchée plus de huit mois après la

35 Art. 32 al. 2 OBVM­FINMA; recommandation 068/01 du 14 juillet 2000, Netstal-Maschinen AG, consid. 1. La situa­

tion est inverse en matière de droit de publicité des partici­

pations, où l’acte générateur de disposition est détermi­

nant.

36 Recommandation 314/03 du 28 juin 2007, GNI Global Net International AG, consid. 1.3 ; recommandation 293/02 du 31 octobre 2006, Saurer AG, consid. 3.

(8)

conclusion du contrat par lequel Rabobank vendait sa participation de contrôle à Safra et Rabobank, en raison du temps nécessaire pour réunir toutes les au­

torisations administratives requises. Le marché a ce­

pendant réagi immédiatement après l’annonce de la con clusion de ce contrat le 25 novembre 2011. Le cours de bourse chuta immédiatement de env. CHF 34 (cours aux environs duquel il se situait depuis plu­

sieurs semaines) à un peu plus de CHF 27. Le marché anticipait ainsi le prix de la future offre obligatoire qui devrait être lancée dès l’exécution de l’acquisi­

tion, soit le prix de l’acquisition préalable de CHF 36 moins une prime de contrôle de 25%. Le cours de l’action B se stabilisa aux alentours de CHF 27, si bien que le cours de bourse déterminant pour le prix minimum, fixé au jour précédant la publication de l’annonce préalable, fut de CHF 26.32. Le prix de l’offre (CHF 27) respecta donc les règles sur le prix minimum.

L’affaire Sarasin est la dernière dans laquelle un actionnaire vendant ses titres en amont d’une offre bénéficia d’une telle prime de contrôle, qui fut abro­

gée au 1er mai 2013.

3.2 L’offre sur Uster Technologies AG

De manière analogue à l’offre sur Sarasin, celle sur Uster fut également conditionnée à l’approbation de plusieurs autorités en matière de concurrence. La stratégie choisie par l’offrant fut néanmoins diffé­

rente. Avant la publication de l’offre, Toyota Indus­

tries Corporation (Toyota) avait acquis une partici­

pation de 28,46% des droits de vote dans Uster Technologies AG (Uster). Le 7 novembre 2011, Toyota conclut un autre contrat d’achat d’actions (avec le même vendeur) portant sur 21,88% des droits de vote, dont l’ex é cution était soumise à la condition que les autorités en matière de concurrence du Brésil et du Pakistan, ainsi que le ministre du commerce chinois donnent leur feu vert à la transaction. Le len­

demain, Toyota publia l’annonce préalable d’une offre publique d’acquisition au prix de CHF 38 par action. A cet instant, l’offre était volontaire mais sou­

mise aux règles sur le prix minimum. Depuis le 1er mai 2013, on parle ici d’offre de prise de contrôle (Kontrollwechsel-Angebot).37

37 Art. 9 al. 6 OOPA.

La publication de l’annonce préalable le 8 no­

vembre 2011 eut pour effet de fixer le cours de bourse déterminant le prix minimum de l’offre.38 Le pros­

pectus d’offre doit dans la règle être publié dans les 6 semaines suivant la publication de l’annonce pré­

alable.39 Or, les autorisations auxquelles le contrat d’achat d’actions du 7 novembre 2011 était condi­

tionné ne furent pas toutes délivrées durant ce délai.

L’offrant demanda, à deux reprises, à la COPA de prolonger le délai pour la publication du prospectus.

Il expliqua qu’il était favorable aux actionnaires de connaître les termes exacts de l’offre avant de pou­

voir l’accepter ou la refuser. L’octroi ou non des auto­

risations en question et l’exécution du contrat d’achat du 7 novembre 2011 auraient pour conséquence le franchissement par Toyota du seuil de 3313% des droits de vote et donc une prise de contrôle immé­

diate. Cela aurait transformé l’offre volontaire en offre obligatoire, avec un effet sur le nombre de conditions admises.40 Mais surtout, avec l’exécution de ce contrat, les actionnaires n’auraient plus la pos­

sibilité d’empêcher la prise de contrôle de Toyota en refusant son offre. Ils ne pourraient que décider de rester dans la société aux côtés d’un nouvel action­

naire de contrôle ou de la quitter en acceptant l’offre.

Pour ces raisons, la COPA admit à deux reprises le report de la publication du prospectus.41 Celui­ci fut publié le 29 février 2012, après l’exécution le 15 fé­

vrier 2012 du contrat d’achat d’actions ensuite de la délivrance de la dernière autorisation attendue. Le prix de l’offre fut augmenté de CHF 38 à CHF 44, suite à un accord entre Toyota et Uster dans lequel le conseil d’ad ministration de la cible s’est également engagé à recommander l’offre à ses actionnaires.

L’offre fut approuvée par la COPA le 28 février 2012.42

3.3 Comparaison des transactions Sarasin et Uster Dans les deux transactions présentées ci­dessus, le lancement effectif de l’offre fut reporté jusqu’à la délivrance des autorisations nécessaires en matière de concurrence. Le scénario choisi par les offrants

38 Art. 7 al. 3 let. a OOPA.

39 Art. 7 al. 1 OOPA.

40 Restreintes en cas d’offre obligatoire ; art. 36 OBVM­

FINMA.

41 Recommandations 495/01 du 15 décembre 2011 et 495/02 du 30 janvier 2012, Uster Technologies AG.

42 Décision 495/03 du 28 février 2012, Uster Technologies AG.

(9)

divergea, ce qui eut notamment un effet sur la fixa­

tion du cours de bourse déterminant le prix minimum de l’offre. Safra décida de ne pas publier d’annonce préalable au jour de l’annonce de la conclusion du contrat d’achat conditionnel, avec pour effet que le cours de bourse continua à évoluer sans être fixé aux fins de déterminer le prix minimum. Safra bénéficia ainsi de la chute des cours qui suivit l’annonce de la transaction avec Rabobank. Si l’annonce préalable avait été publiée au moment de la conclusion de cette transaction, il est vraisemblable que le prix minimum aurait été plus élevé. Toyota choisit en revanche de fixer immédiatement le cours de bourse en publiant son annonce préalable. Ce faisant, elle ne pouvait certes plus bénéficier d’une éventuelle baisse des cours par la suite, mais avait l’avantage de ne pas non plus devoir subir une éventuelle montée des cours.

En principe, l’offrant est libre de choisir le mo­

ment où il publie son annonce préalable. Cependant, aussitôt que naît l’obligation de présenter une offre, l’OBVM­FINMA limite cette liberté en imposant la publication de l’offre dans les deux mois suivant le dépassement du seuil.43 La COPA peut accorder une prolongation de ce délai pour de justes motifs. De­

puis le 1er mai 2013, si elle ne prolonge pas ce délai, la COPA peut provisionnellement suspendre les droits de vote de l’offrant et lui interdire d’augmenter sa participation.44

Le choix stratégique de lancer l’offre au moment de la conclusion de la transaction de contrôle (Uster) ou seulement au moment de son exécution (Sarasin) est laissé à l’appréciation de l’offrant. Seule limite, la COPA pourrait constater que les informations four­

nies au marché contiennent les éléments essentiels de l’offre (prix, conditions) et les qualifier comme étant constitutives d’une annonce préalable. Elle s’est ré­

servé cette possibilité dans le cadre de l’offre sur Se­

rono en 2007.45 En l’espèce, la COPA considéra que les informations publiées par Safra en novembre 2011 ne pouvaient pas être qualifiées d’annonce pré­

alable : l’obligation de présenter une offre n’était pas encore née et l’offrant n’avait encore annoncé ni son prix ni les conditions de l’offre.

Les procédures d’autorisation des concentrations, et donc l’intervention nécessaire des autorités de la

43 Art. 37 al. 1 OBVM­FINMA.

44 Art. 32 al. 7 LBVM (nouveau).

45 Recommandation 304/01 du 8 janvier 2007, Serono S.A., consid. 1.2.

concurrence, parfois dans de nombreux pays, ont gé­

néralement pour effet de reporter le lancement ou l’exécution d’une offre. Outre les scénarios Sarasin et Uster, une troisième possibilité serait de publier l’offre sans attendre, mais de reporter ensuite son exécution jusqu’à l’obtention des autorisations atten­

dues. Ce fut le cas de l’offre sur Ciba Holding AG en 2008, où l’exécution fut reportée de 5 mois.46 Ces trois scénarios présentent chacun certains inconvé­

nients pour les destinataires de l’offre, qui voient le prix minimum de l’offre diminuer (Sarasin), ou ne pas suivre une augmentation des cours (Uster), ou alors qui doivent attendre de longs mois avant de re­

cevoir le prix de l’offre (Ciba).

Le scénario Sarasin ne devrait plus se reproduire à l’identique, puisque désormais le prix minimum de l’offre est au moins le prix le plus élevé des acquisi­

tions préalables.47 Le scénario Ciba n’est pas trop dé­

savantageux pour les actionnaires qui ont accepté l’offre et voient leurs titres de participation bloqués dans l’attente de l’exécution et du paiement du prix si l’offrant organise une ligne de négoce séparée où se traitent les titres présentés à l’offre. Mais aucun de ces scénarios n’est idéal et le choix appartient à l’ac­

tionnaire qui prend le contrôle, et non aux action­

naires destinataires de la (future) offre obligatoire.

III. Opting out et opting up : changement de pratique

Par une clause statutaire, les sociétés peuvent sup­

primer ou restreindre l’obligation de présenter une offre en présence d’un changement de contrôle. Une clause d’opting out dispense tout actionnaire qui, di­

rectement, indirectement ou de concert avec d’autres, franchit le seuil de 3313% des droits de vote de pré­

senter une offre obligatoire soumise à la règle du prix minimum. Une clause d’opting out supprime donc le droit de sortie à prix équitable offert par la loi aux actionnaires minoritaires en cas de changement de contrôle (art. 32 LBVM). Une clause d’opting up ne supprime pas l’offre obligatoire, mais relève à 49%

(au maximum) le seuil qui déclenche cette obliga­

tion.48 L’une ou l’autre clause peut être librement in­

troduite dans les statuts avant la cotation des titres de

46 Décision 382/02 du 11 mars 2009, Ciba Holding AG.

47 Art. 32 al. 4 let. b LBVM, nouvelle teneur.

48 Art. 32 al. 1, dernière phrase, LBVM.

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participation à une bourse suisse.49 Une fois entrée en bourse, la société peut « en tout temps » adopter une telle clause « pour autant qu’il n’en résulte pas pour les actionnaires un préjudice au sens de l’art. 706 du code des obligations».50 La liste des sociétés ayant une telle clause dans leurs statuts est publiée par les bourses suisses.51

La décision de l’assemblée générale d’introduire une telle clause dans les statuts peut être attaquée de­

vant le tribunal civil aux conditions des art. 706 et 706a CO. A notre connaissance, ce ne fut jamais le cas. S’agissant des clauses introduites après l’entrée en bourse, dans quelle mesure et avec quel pouvoir d’examen la COPA peut­elle ex officio en revoir la validité en application de l’art. 22 al. 3 LBVM ? La pratique de la commission, qui avait lentement évo­

lué, vient de changer.

1. Le contexte

Au nom de l’égalité de traitement des actionnai­

res, la Commission fédérale des banques avait en 2000 déclaré invalide toute clause d’opting out/up (adoptée après l’entrée en bourse) qui ne bénéficierait qu’à un seul actionnaire ou groupe d’actionnaires.52 Ces clauses étaient désormais soumises à un double contrôle : par le juge civil pendant les deux mois sui­

vant la décision de l’assemblée générale, et par la COPA en tout temps. Il s’en suivit une pratique de la COPA qui, faisant la chasse aux clauses formelle­

ment ou matériellement sélectives, et examinant sous cet angle toute transaction intervenue moins de cinq ans après l’adoption de la clause par l’assemblée gé­

nérale, créait une insécurité juridique majeure ren­

dant la possibilité offerte par l’art. 22 al. 3 LBVM pratiquement lettre morte.

Dès 2010, la COPA avait sensiblement assoupli sa pratique relative aux clauses d’opting out/up intro­

duites dans les statuts d’une société après l’entrée en bourse.53 Cet assouplissement, déjà décrit dans cette

49 Art. 22 al. 2 LBVM.

50 Art. 22 al. 3 LBVM.

51 Art. 5 al. 3 LBVM ; <http://www.six-exchange-regulation.

com/obligations/reporting/opting_fr.html>.

52 Décision CFB du 23 juin 2000, Esec Holding AG et Unaxis Holding AG, rejetant une recommandation 018/02 de la COPA du 6 juin 2000.

53 Décision 437/01 du 4 mars 2010, CI Com SA (clause va­

lable car pas matériellement sélective par rapport à l’opé­

ration soumise à la COPA) ; décision 440/01 du 4 juin

chronique,54 avait été favorablement accueilli par les milieux intéressés.55 Cet assouplissement mettait un poids important sur l’autonomie privée, qui s’ex­

prime par les votes des actionnaires à l’assemblée générale, fondée sur et renforcée par une information honnête et complète des actionnaires sur les motifs et sur les conséquences du vote qui leur est proposé. Si l’infor mation des actionnaires, avant et pendant l’as­

semblée générale, était suffisante, les actionnaires qui ne voulaient pas renoncer à l’offre obligatoire et s’étaient opposés à la clause d’opting out/up pou­

vaient (et peuvent toujours) attaquer cette décision dans les deux mois devant le juge civil en se prévalant d’un « préjudice non justifié par le but de la so- ciété ».56 La COPA n’interviendrait que si les action­

naires minoritaires n’avaient pas pu exercer leur droit en toute connaissance de cause parce qu’il s’avérait, tardivement, que des informations leur avaient été ca­

chées. Ce nouveau standard d’examen des clauses d’opting out/up par la COPA avait l’avantage d’amé­

liorer très considérablement la sécurité juridique, au prix cependant de mettre entièrement à la charge des actionnaires minoritaires les risques et les frais d’un procès civil contestant le vote majoritaire de l’assem­

blée générale.

Alors que le Parlement suisse venait de modifier l’art. 32 LBVM pour faire bénéficier tous les action­

naires du prix le plus haut payé par l’offrant pendant les douze derniers mois (suppression de la « prime de contrôle » ; supra I.1), le risque était notable que les actionnaires majoritaires de nombreuses sociétés

2010, COS Computer Systems AG (clause valable car conforme à l’intérêt de la société dans une phase de réo­

rientation stratégique) ; décision 446/01 du 30 juin 2010, Advanced Digital Broadcast Holdings SA (clause valable car pas sélective pour la constitution d’un nouveau groupe de contrôle ; la question fut cependant laissée ouverte s’agissant de l’actionnaire historique) ; décision 490/01 du 22 septembre 2011, LEM Holding SA (clause matérielle­

ment sélective valable car information suffisante des ac­

tionnaires et pas de recours au juge civil) ; décision 511/01 du 8 mai 2012, BT&T Timelife AG et Alpha PetroVision Holding AG (clause valable car pas matériellement sélec­

tive par rapport à la transaction réalisée).

54 Pascal Bovey/Lukas Roos, Aus der Praxis der Übernahme­

kommission, RSDA 2011 p. 298 ss (304–308) ; Sonja Blaas/Pascal Bovey, Aus der Praxis der Übernahmekom­

mission/Pratique de la Commission des OPA, RSDA 2012 p. 222 ss (228–231).

55 Frank Gerhard, Takeover Board Opts­out from Opting­

Out, CapLaw – Swiss capital markets Law 2011 43.

56 Art. 706 al. 2 ch. 3 et 706a CO.

(11)

cotées demandent et obtiennent l’introduction de nouvelles clauses d’opting out/up, percevant comme négligeable le risque d’actions en justice par les ac­

tionnaires minoritaires entendant se plaindre d’un préjudice non justifié par l’intérêt de la société.57 Une clarification des conditions auxquelles un vote de l’assemblée générale pouvait valablement restreindre ou supprimer le droit de sortie des autres actionnaires en cas de changement de contrôle s’imposait.

2. La décision Advanced Digital Broadcast

C’est ce qu’a fait la COPA dans une décision 518/01 du 11 octobre 2012, Advanced Digital Broad- cast Holdings AG (ADB), prise (exceptionnellement) par une délégation formée de ses neuf membres.

Le groupe d’actionnaires (4T SA) détenant 41,27%

des droits de vote proposa de remplacer par une clause d’opting out la clause d’opting up (49%) qui figurait depuis 2006 dans les statuts d’ADB. La convocation à l’assemblée générale comprenait une explica tion succincte mais complète des effets de la clause. Le conseil d’administration s’abstenait de toute recom­

mandation. Des explications circonstanciées furent fournies à l’assemblée générale du 15 juin 2012, où 51,8% des droits de vote étaient représentés. La clause d’opting out fut adoptée par 89,78% des votes exprimés, le groupe d’actionnaires proposant la clause ayant participé au vote. En déduisant les voix de ce groupe d’actionnaires, il apparaissait cependant que 80,82% des actionnaires minoritaires avaient re­

jeté la proposition.58 Aucun cependant ne recourut au tribunal civil dans le délai de l’art. 706a CO.

4T SA requit la COPA de constater que l’ac­

quisition d’actions lui faisant franchir le seuil de 49%

des droits de vote n’entraînerait pas l’obligation de présenter une offre. La COPA rejeta cette requête et déclara la clause d’opting out « invalide » et sans « ef-

57 Voir zCapital, Opting Out – Hintertüre zur Kontrollprä­

mie, 25 mai 2012.

58 En comptant les abstentions comme des voix négatives, conformément à l’art. 703 CO, cette proportion se monte­

rait même à 90%. A ce propos, voir Alain Hirsch, La COPA modifie sa jurisprudence sur les clauses d’« opting out », Actualité n° 836 du Centre de droit bancaire et finan­

cier, 22 octobre 2012, <http://cms.unige.ch/droit/cdbf, article n° 836, 22 octobre 2012>.

fet du point de vue du droit des offres publiques d’ac- quisition ».58a

Dans cette décision de principe, la COPA com­

mence par passer en revue sa jurisprudence, les cri­

tiques qui lui ont été portées, ainsi que son évolution récente. Elle constate que ni la première ni la seconde n’assurent un équilibre satisfaisant entre le principe d’égalité de traitement des actionnaires et la sécurité des transactions. L’évolution suivie depuis 2010, qui pose des exigences accrues en matière de transpa­

rence pour les actionnaires appelés à voter sur les clauses d’opting out/up, ne suffit pas.

Le point de départ du raisonnement est l’art. 22 al. 3 LBVM, qui autorise l’introduction de clauses d’opting out/up après l’entrée en bourse « pour au- tant qu’il n’en résulte pas pour les actionnaires un préjudice au sens de l’art. 706 du code des obli- gations ». Dans une société, les décisions de l’as­

semblée générale bénéficient d’une présomption de bien­fondé (Richtigkeitsvermutung). Cependant, lors que – comme lors de l’introduction d’une clause d’opting out/up – les intérêts d’un groupe d’action­

naires (ici 4T SA) sont opposés aux intérêts des autres actionnaires, cette présomption cesse de s’ap­

pliquer. « Lors que deux groupes d’actionnaires sont touchés de manière différente par une décision de l’assemblée générale, il est possible de rétablir la présomption de bien-fondé par un vote en deux étapes. Si la décision de la ma jorité [de tous les] ac- tionnaires représentés est ég al ement approuvée par la majorité des actionnaires qui en subissent poten- tiellement un préjudice, on peut considérer que la décision est justifiée par l’intérêt social et la pré- somption de bien-fondé est rétablie. »59

Pour que ce double vote reflète un informed consent des actionnaires minoritaires à l’introduction d’une clause qui restreint ou supprime leur droit à une offre obligatoire, encore faut­il que l’information donnée aux actionnaires avant et pendant l’assemblée générale soit complète. « Lorsqu’un actionnaire re- quiert l’adoption d’une clause d’opting out (ou

58a Décision 518/01 du 11 octobre 2012, Advanced Digital Broadcast Holdings AG.

59 Ibidem, Cm 12. La décision s’inspire explicitement d’une idée développée par l’ancien président de la COPA Hans Caspar von der Crone, Auf dem Weg zu einem Recht der Publikumsgesellschaften, RJB 1997 83 ss, idée qui sous­

tendait la recommandation de la COPA dans l’affaire Esec/Unaxis, puis rejetée par la CFB (supra n. 52).

(12)

d’opting up), il doit en conséquence fournir des in for- mations sur les motifs de sa proposition, sur la trans- action envisagée et sur le changement de contrôle qui en découlera. Le conseil d’administration fera figurer ces informations dans la convocation à l’assemblée générale. La convocation contiendra également des informations relatives aux effets généraux d’une clause d’opting out (ou d’opting up) et, lorsque cette clause n’est pas formellement sélective, indiquera no- tamment qu’elle pourra à l’avenir être invoquée par tout actionnaire. »60

Au cas d’espèce, et alors même que ADB n’avait pas procédé à un double vote, il était possible de cal­

culer le résultat du vote parmi les actionnaires pré­

sents ou représentés déduction faite des voix de 4T SA. Ce vote des actionnaires minoritaires était claire­

ment négatif (80,82%), de sorte que la décision de l’assemblée générale ne pouvait pas bénéficier de la présomption que la clause d’opting out correspondait à l’intérêt social.

La COPA se réserve, dans des circonstances ex­

ceptionnelles, de procéder à un examen détaillé et complet du bien­fondé d’une clause d’opting out/up au regard des critères de l’art. 706 CO.61 In casu, aucune circonstance particulière ne justifiait un tel examen qui permette éventuellement de conclure que, contrairement à l’avis des actionnaires minori­

taires, la clause d’opting out adoptée grâce aux voix des actionnaires majoritaires était conforme à l’inté­

rêt social.

3. La décision Perfect Holding

Dans quelle mesure cette nouvelle interprétation de la loi s’applique­t­elle aux clauses d’opting out/up adoptées plusieurs années auparavant ? C’est la ques­

tion à laquelle la COPA a répondu dans sa décision 531/01 du 26 avril 2013, Perfect Holding SA.

Sous son ancienne raison sociale, cette société avait introduit en 2007 une clause d’opting out maté­

riellement sélective que la COPA avait, en 2007 éga­

lement, jugée « illicite à l’égard [des actionnaires re quérants] et partant inopérante pour [ceux-ci] en ce qui concerne la transaction envisagée ».62

60 Ibidem, consid. 5.

61 Ibidem, consid. 4.1, Cm 18.

62 Recommandation 321/01 du 22 mai 2007, 4M Technolo- gies Holding, consid. 1.3. La transaction put néanmoins

Six ans plus tard, les mêmes actionnaires requiè­

rent la COPA de constater que cette même clause d’opting out dispense d’offre obligatoire tous nou­

veaux investisseurs qui viendraient à prendre le contrôle de la société. La COPA rejette la requête et cons tate que la clause d’opting out « ne déploie pas d’ef fets à l’égard de tout actionnaire ou groupe d’ac- tionnaires qui franchiraient à l’avenir le seuil de 3313% des droits de vote ».63

La commission commence par constater que, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, une nouvelle jurisprudence s’applique en principe à toute nouvelle affaire, y compris aux affaires pen­

dantes. C’est une manière de dire que, contrairement à un changement de loi, une nouvelle interprétation de la loi a un effet rétroactif. Elle s’applique aux ef­

fets présents et futurs d’un état de fait né antérieure­

ment, ici à une clause d’opting out/up quelle que soit la date à laquelle elle a été adoptée.

In casu, les actionnaires qui avaient proposé la clause d’opting out avaient quitté l’assemblée géné­

rale de 2007 avant le vote de la clause. La clause fut alors adoptée par une écrasante majorité de 98,59%

des actionnaires minoritaires, de sorte qu’elle aurait pu ici bénéficier de la présomption qu’elle est justi­

fiée par l’intérêt social.

Cependant, une analyse du procès­verbal de l’as­

semblée générale révéla que les justifications don­

nées alors aux actionnaires avaient exclusivement porté sur le souhait des actionnaires majoritaires d’augmenter leur participation (ce qu’ils firent dans les mois suivants grâce à l’exception justifiée par des mesures d’assainissement). Lors de l’assemblée, au­

cune mention ne fut faite du caractère permanent et général de la clause d’opting out, et notamment du fait que les actionnaires minoritaires renonçaient également à un droit de sortie si les actionnaires ma­

joritaires de l’époque, auxquels ils faisaient confiance, venaient à céder le contrôle à de nouveaux ac­

tionnaires.

Ainsi, l’opting out introduit en 2012 par ADB fut déclaré sans effet en raison du vote négatif des ac­

tionnaires minoritaires alors que celui introduit en 2007 par 4M/Perfect Holding fut déclaré invalide en

être réalisée au bénéfice d’une dispense justifiée par des mesures d’assainissement, art. 32 al. 2 let. e LBVM.

63 Décision 531/01 du 26 avril 2013, Perfect Holding SA, chiffre 2 du dispositif.

(13)

raison de l’information insuffisante donnée aux ac­

tionnaires minoritaires qui l’approuvèrent.

Dans cette symétrie, fruit des circonstances, on retrouve les deux buts inscrits à l’article 1 de la loi sur les bourses : l’égalité de traitement et la transpa­

rence.

4. Qui sont les actionnaires minoritaires ?

Le décompte séparé des votes des actionnaires minoritaires, ou la procédure de double vote que les sociétés adopteront probablement à l’avenir pour adopter d’éventuelles clauses d’opting out ou d’opting up, impose de décider quelles sont les voix qui doi­

vent être exclues du second décompte ou du second vote. En d’autres termes, qui sont les minoritaires ?

La réponse figure au considérant 4.2 de la déci­

sion Advanced Digital Broadcast. Le décompte sé­

paré des voix des actionnaires minoritaires repose sur le constat qu’une clause d’opting out/up touche diffé­

remment deux groupes d’actionnaires. Certains ac­

tionnaires (majoritaires) bénéficient de la clause parce qu’ils envisagent ou obtiendront la possibilité de prendre ou de céder le contrôle de la société.

D’autres actionnaires (minoritaires) sont affectés par la clause parce qu’elle restreint ou supprime leur droit à une offre obligatoire. Doivent donc être exclus du second groupe non seulement le ou les action­

naires qui proposent la clause (et doivent expliquer leurs motifs) mais aussi tout actionnaire qui directe­

ment, indirectement ou de con cert avec d’autres ac­

tionnaires, dispose déjà du con trôle tel qu’il a été défini par le législateur à l’art. 32 al. 1 LBVM, c’est­

à­dire 3313% des droits de vote au moins.

5. Les actionnaires minoritaires ont-ils le dernier mot ?

La nouvelle jurisprudence repose sur la présomp­

tion de conformité à l’intérêt social des clauses d’op­

ting out/up approuvées par tous les actionnaires et par la majorité des actionnaires dont le droit à une offre obligatoire est restreint ou supprimé. Un vote positif des actionnaires minoritaires fait présumer que la clause ne cause pas aux actionnaires « un pré- judice au sens de l’art. 706 [CO] ». Un vote négatif fait présumer un tel préjudice. Cette présomption de fait – car elle n’est pas statuée par le législateur – peut­elle être renversée ? Dans quelles circonstances la COPA sera­t­elle amenée à faire un examen com­

plet au regard de l’art. 706 CO, comme elle l’a fait (succinctement) dans l’affaire COS Computer System en 2010 ?64 La décision Advanced Digital Broadcast réserve des « circonstances particulières et excep- tionnelles susceptibles de renverser la présomption résultant du vote [ici négatif] des actionnaires mino- ritaires ».65 Le test de l’art. 706 CO est particulière­

ment difficile à administrer. La Commission des OPA n’est pas un tribunal civil et elle n’a généralement pas le luxe du temps. Il est donc vraisemblable qu’elle interprétera de manière restrictive la notion de cir­

constances exceptionnelles et sera réticente à substi­

tuer sa propre appréciation au fonctionnement de la démocratie actionnariale que sa nouvelle pratique vise à favoriser.

6. Les clauses formellement sélectives sont-elles possibles ?

Les clauses formellement ou matériellement sé­

lectives – soit celles qui, explicitement ou implicite­

ment, bénéficient à un seul actionnaire (ou groupe d’actionnaires) ou ne visent qu’une seule transaction de contrôle – sont à l’origine de toute la jurispru­

dence relative aux clauses d’opting out/up. Sans avoir dû trancher la question, la COPA l’a remise d’ac­

tualité. « De telles clauses, si elles sont adoptées en toute transparence et approuvée par la majorité des actionnaires minoritaires, portent une atteinte moins importante aux intérêts des actionnaires minoritaires qu’une clause générale d’opting out. »66 Si, selon la nou velle interprétation de la loi donnée par la COPA, interprétation qui n’a pas fait l’objet d’un recours à la FINMA, les minoritaires peuvent renoncer à l’offre obligatoire d’une manière générale, ils doivent aussi et a fortiori pouvoir y consentir pour une seule tran­

saction spécifique.

Dans un commentaire approfondi de la décision Advanced Digital Broadcast, Adriano R. Huber et Hans Caspar von der Crone considèrent que la ré­

ponse doit rester négative : une clause sélective d’op­

ting out ne bénéficie pas seulement à l’actionnaire qu’elle désigne, elle lui confère un avantage par rap­

port à d’autres offrants (ou offrants potentiels) qui

64 Décision 440/01 du 4 juin 2010, COS Computer Systems AG, consid. 2.2.

65 Décision 518/01 du 11 octobre 2012, Advanced Digital Broadcast Holdings AG, consid. 6.3, Cm 39.

66 Ibidem, consid. 4.1, Cm 20.

Références

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