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Les pots-de-vin

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Book

Reference

Les pots-de-vin

HÉRITIER LACHAT, Anne

HÉRITIER LACHAT, Anne. Les pots-de-vin . Genève : Georg, 1981, X, 208 p.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:144323

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

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MÉMOIRES

PUBLIÉS PAR LA FACULTÉ DE DROIT GENÈVE

ANNE HÉRITIER

LES

POTS~ DE-VIN

GEORG - LIBRAIRIE DE L'UNIVERSITÉ - GENÈVE

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MÉMOIRES PUBLIÉS PAR LA FACULTÉ DE DROIT DE GENÈVE

N° 67

ANNE HÉRITIER

LES

POTS-DE-VIN

GENÈVE

LIBRAIRIE DE L'UNIVERSITE GEORG & c1e S.A.

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En publiant le présent ouvrage dans la collection de ses Mémoires, la Faculté n'entend prendre aucune position à

l'égard des opinions qui s'y trouvent exprimées.

© 1981 by Librairie de l'Université Georg et Cie S.A.

Droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays.

ISBN 2-8257-0080-0

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AVANT-PROPOS

Je désire adresser mes remerciements les plus chaleureux à Monsieur Alain Hirsch, professeur à la Faculté de droit de Genève, qui a accepté de diriger ce travail de thèse et dont les conseils, suggestions et remarques critiques m'ont permis de mener à bien cette étude.

Que MM. Philippe Graven, Charles-André Junod, Herbert Schonle, professeurs à la Faculté de droit de Genève, ainsi que M. Walter R. Schluep, professeur à l'Université de Zürich, trouvent ici l'ex- pression de mes remerciements pour l'intérêt qu'ils ont porté à mon travail.

Je tiens enfin à exprimer ma reconnaissance à ceux, et surtout à celles, qui ont consacré de longues et fastidieuses heures à la dactylographie, la lecture et la correction des épreuves de cet ouvrage.

Anne HÉRITIER.

Mai 1981.

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(7)

ABRÉVIATIONS

ACF Arrêté du Conseil fédéral.

ADF Archives de droit fiscal suisse (Berne)

=

Archiv für Schweize- risches Abgaberecht.

AE Alternativ Entwurf eines Strafgesetzbuches (RFA; cf. Lampe/

Leckner/ ... , op. cit. dans la bibliographie).

BB Der Betriebsberater (Heidelberg).

BGH Arrêts du Bundesgerichtshof (RFA).

BGHSt Arrêts du Bundesgerichtshof (RFA) en matière pénale.

BJM Basler Juristische Mitteilungen (Bâle).

BJP Bulletin de Jurisprudence pénale (Berne)

=

RStrS, Recht- sprechung in Strafsachen.

Bull. crim. Bulletin criminel de la Cour de Cassation (Paris).

CC Code civil suisse.

CCI Chambre de commerce internationale.

CO Code fédéral des obligations.

CPF Code pénal français.

CPS Code pénal f>UÎsse.

DB Der Betrieb (Dusseldorf/Francfort).

D Dalloz hebdomadaire (Paris).

FF Feuille fédérale (Berne).

FJS Fiches juridiques suisses (Genève).

GA Goltdammer's Archiv für Strafrecht (Hambourg).

JCP Jurisclasseur périodique (Semaine juridique) (Paris).

JT Journal des Tribunaux tLausanne).

JZ Juristenzeitung (Tübingen).

LCD Loi fédérale sur la concurrence déloyale du 30 septembre 1943 (Suisse).

NJW Neue Juristische Wochenschrift (Münich).

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X

RDAF RDPC RDS RG RGST RIB RO RPS RS RSC RSJ SAG SEC SJ TF UWG ZStW

ABRÉVIATIONS

Revue de droit administratif et fiscal (Lausanne).

Revue de droit pénal et de criminologie (Bruxelles).

Revue de droit suisse (Bâle)

=

ZSR, Zeitschrift für Schweize- risches Recht.

Reichsgericht (Recueil des arrêts du Tribunal d'Empire).

Arrêts du Tribunal d'Empire en matière pénale.

Revue des juristes Bernois (Berne)

=

ZBJV, Zeitschrift des bernischen J uristenvereins.

Recueil officiel des arrêts du Tribunal fédéral suisse (Lausanne)

=

BGE, Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts.

Revue pénale suisse (Berne)

=

ZStR, Schweizerische Zeitschrift für Strafrecht.

Recueil systématique des lois et ordonnances de la Confédération suisse (Berne).

Revue de science criminelle et de droit pénal comparé (Paris).

Revue suisse de jurisprudence (Zürich)

=

SJZ, Schweizerische J uristenzei tung.

Die schweizerische Aktiengesellschaft - La société anonyme suisse (Zürich).

Securities and Exchange Commission (Washington).

Semaine Judiciaire (Genève).

Tribunal fédéral suisse.

Gesetz gegen àen unlauteren Wettbewerb du 7 juin 1909 (RFA).

Zeitschrift für die gesamte Strafrechtwissenschaft (Berlin).

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INTRODUCTION

Pourquoi les pots-de-vin, la corruption de l'économie privée?

Celui qui prétend étudier ce sujet est immédiatement confronté à deux problèmes. Lorsqu'il pose des questions sur la corruption, on lui affirme tout d'abord qu'elle n'existe pas; puis, dans le même souffle, on lui affirme que c'est un usage, voire même une nécessité, dans de nombreuses transactions !

Ces deux assertions, à première vue contradictoires, ont excité notre curiosité et nous ont incitée à examiner de plus près le phéno- mène, à nous demander aussi si le problème des pots-de-vin dépas- sait le cadre de la seule réprobation morale. Nous avons découvert alors que non seulement la corruption existait, mais encore que l'invocation d'un usage, d'une nécessité recouvrait en réalité des arguments souvent contestables. De plus, il est clairement apparu aussi qu'au delà d'une question morale, les pots-de-vin font courir des risques sérieux tant aux corrupteurs et corrompus qu'à la con- currence loyale, la bonne foi en affaires.

La corruption existe sur une vaste échelle et concerne aussi bien les transactions nationales qu'internationales, les personnes privées que les fonctionnaires. Comme il s'agit d'un comportement que le corrupteur et le corrompu ont tous deux avantage à garder secret, nous ne disposons bien entendu pas de statistiques ou de renseigne- ments précis à ce sujet; néanmoins, un certain nombre d'études ont été entreprises, notamment à la suite des scandales américains des années 1976 et suivantes, études qui ont mis en lumière l'impor- tance du phénomène.

La corruption est par conséquent usuelle, mais cela n'implique pas qu'elle soit admissible, contrairement à ce que prétendent ses défenseurs. En effet, elle cause des dommages graves dans plusieurs domaines.

Tout d'abord, les pots-de-vin sont coûteux et tendent à le devenir de plus en plus, dans la mesure où la concurrence s'instaure à ce niveau aussi ; le corrupteur qui obtient des affaires par ce biais peut répercuter une partie de ces frais sur son cocontractant, il ne peut pourtant dépasser certaines limites. Ainsi, au niveau-même du premier intéressé, les pots-de-vin ne constituent-ils pas toujours

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2 INTRODUCTION

une décision économique raisonnable, ceci d'autant moins que les contrats obtenus par ce biais peuvent être remis en question par le cocontractant.

li y a cependant des conséquences plus graves au niveau indi- viduel : le corrompu est amené à trahir les intérêts de son em- ployeur au profit du corrupteur et à causer des dommages à cet employeur en le conseillant mal ou en l'engageant dans des transac- tions peu avantageuses. Nous verrons que cette trahison peut prendre la forme de délits graves, tels la gestion déloyale ou l'escroquerie.

Enfin, les pots-de-vin faussent les conditions générales de la concurrence et la notion-même de loyauté et de bonne foi en affaires, notion sur laquelle reposent les systèmes légaux et économiques.

La simple énumération des dommages principaux causés par la corruption permet de montrer qu'il ne s'agit pas seulement d'un problème éthique et de moralisation de la vie des affaires ; les enjeux en question sont importants. Par conséquent, il convient de réagir rapidement et de lutter contre les représentations fausses de l'inocuité des pots-de-vin, qui conduisent à se soumettre - bon gré, mal gré - à ce qu'on considère comme un usage. On ne peut tolérer que ces pratiques continuent à se répandre. Le droit a un rôle à jouer dans cette lutte, il ne peut ignorer - et d'ailleurs n'ignore pas - des actes qui mettent en danger des valeurs qu'il considère comme importantes.

C'est pourquoi il nous est apparu judicieux de consacrer une étude au droit suisse applicable aux pots-de-vin, étude qui en révé- lant simplement la situation actuelle devrait déjà permettre d'atta- quer les préjugés et l'ignorance qui règnent dans le domaine.

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A. PARTIE GÉNÉRALE

CHAPITRE PREMIER

DÉFINITION

§ 1 : GÉNÉRALITÉS.

1.1 Terminologie.

Comme cela résulte déjà de notre introduction, nous utiliserons indifféremment les termes corruption et pot-de-vin.

Il nous apparaît en effet qu'il n'existe pas de différences fonda- mentales entre ces deux notions; de plus, les nombreux auteurs qui ont abordé ce sujet n'ont pas mis en évidence à notre avis l'existence de telles différences.

En outre, le terme pot-de-vin comporte un double aspect polé- mique et usuel non déplaisant. Notons encore qu'il correspond à la notion allemande de « Schmiergeld », notion employée très cou-

ramment par la doctrine 1 et même le législateur 2 • Finalement, l'origine même de ce vocable est intéressante, car il désignait réel- lement la boisson qu'il était d'usage d'offrir à l'intermédiaire avec qui, ou grâce à qui, on venait de conclure une bonne affaires. Cette origine présente quand même un certain intérêt car elle indique à la fois le caractère usuel du procédé et le but de celui-ci. Signa- lons enfin que le terme anglais « bribe » se rattache étymologique- ment à la notion de morceau de pain, de pièce distribuée à des

1 Par ex. E. Haasis, thèse; O. Hirzel, thèse; et la terminologie adoptée par A. Steinbeisser, thèse.

2 Cf. le § 12 de l'UWG.

3 Cf. Larousse du xx• siècle (1932), sous la rubrique «pot-de-vin»,

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4 PARTIE GÉNÉRALE

mendiants et aussi à l'action de mendier 4 et qu'il n'a acquis le sens de pot-de-vin que peu à peu, suivant une évolution mal connue aujourd'hui.

1.2 Définition.

Le but de notre définition doit être le même que celui de la partie générale elle-même, soit la mise en évidence des principaux pro- blèmes posés par la corruption. A cet effet, il convient de forger un concept suffisamment large, qui soit utilisable dans différents domaines et qui permette d'englober le phénomène dans son ensem- ble. Une telle approche n'exclut pas bien entendu une modification ultérieure de la définition pour l'adapter aux exigences d'un domaine particulier 5, le droit pénal notamment, domaine gouverné par le principe de la précision des incriminations (nullum crimen sine lege certa) 6.

Pour établir une définition satisfaisant à ces exigences, nous examinerons dans un premier temps celles que proposent diffé- rents auteurs, législateurs ou juges.

J .2.1. Définitions diverses.

La multiplicité des démarches utilisées pour cerner la notion de corruption rend difficile une classification; aussi avons-nous choisi quelques exemples rencontrés fréquemment que nous énu- mérerons avant d'en tirer les points communs et éléments utilisa- bles pour notre propos.

La première définition est originale dans sa forme «quasi poé- tique», mais elle fournit cependant quelques indications impor- tantes, notamment en dénonçant le caractère ambigu de la corrup- tion qui est à la fois un mal (Judaslohn) et une nécessité, voire un bien:

1) « Bakschich ist Trinkgeld oder Bestechungsgeld oder Judas- lohn. Aber zugleich ist er das 01 in Raderwerk des Lebens, die Schmierung menschlicher Verstückungen und Bindungen, der Schlüssel zum Herzen des Nachsten und zu den Pforten des Rimmels obendrein 7 ».

4 Cf. E. Klein, Comprehensive etymological dictionnary of the English language, Londres, Elsevier 1971 ; J. Murray, A new English dictionnary on histo- rical principle, Oxford, Clarendon press, 1888.

5 Cf. la démarche de H.R. Koch, thèse, not. p. 138 et 139.

6 Cf. E. Schmidt, Die Bestechungstatbestande ... , p. 8.

7 Définition de G. von Rezzori (in Maghrebinische Geschichten, 1953) citée par K. Schmidt in Schmollers Jahrbuch 1969, p. 132.

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DÉFINITION

Nous citerons maintenant d'autres définitions, moins particu- lières, que nous commenterons globalement ensuite.

2) « Schmieren heisst sich andere durch Bestechung gefügig machen8 »;

3) « Essentiellement une pratique de corruption est un proces- sus ou une technique spéciale visant à influencer la prise de décision 9 » ;

4) «Commercial bribery: ( ... ) payments made to improperly influence a non-governmental customer's use of a company's product or services 10 » ;

5) « ( ... )liesse sich Bestechung als einen illegalen Tausch von Rechten bezeichnen, indem der Bestochene für Rechte (auf Güter), die der Bestechende an ihn übertragt, diesem Rechte (auf Güter) zukommen lasst, die er (der Bestochene) de facto jedoch nicht legal besitzt 11 »;

6) «L'expression «pot-de-vin» entendue dans le sens large du mot, désigne des prestations qui sont faites pour engager le bénéficiaire à observer une certaine conduite ou qui sont remises à ce dernier à titre de remerciements pour des ser- vices rendus 12 » ;

7) «If a gift be made to a confidential agent with the view of inducing the agent to act in favour of the donor in relation to transactions between the donor and the agent's principal and that gift is secret as between the donor and the agent - that is to say, without the knowledge and consent of the prin- cipal-then the gift is a bribe in the view of the law 13 »;

8) « ( ... ) accorde ou offre à des employés, mandataires ou auxi- liaires d'un tiers des avantages qui ne devaient pas leur reve- nir et qui sont destinés ou de nature à procurer un profit, soit à lui-même soit à autrui, en les faisant manquer à leur devoir dans l'accomplissement de leur travail 14 » ;

8 Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1081.

9 ONU, Conseil Economique et Social, Rapport du Secrétariat Général sur les mesures visant à empêcher les sociétés transnationales ( ... ) de se livrer à des pratiques de corruption, DOC E/5838, p. 7.

10 SEC, rapport, p. 27.

11 G. Neugebauer, thèse, p, 7.

12 Circulaire du 8.11.1946 de l'Administration fiscale fédérale, ADF 1946-7, p. 141; traduction de F. Gendre in Masshardt/Gendre, commentaire IDN, p. 142.

13 Cf. Cockburn in Harrington v. Victoria Graving Dock Co, L.R. (1878) 3 QBD 551.

14 Article 1, alinéa 2, lettre e LCD (RS 241).

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6 PARTIE GÉNÉRALE

9) « A person is guilty of commercial bribing when he confers, or offers or agrees to confer, any benefit upon any employee, agent or fiduciary without the consent of the latter's employer or principal, with intent to influence his conduct in relation to his employer's or principal's affairs 15 ».

Ayant jusqu'ici retenu des définitions proposées par la doctrine juridique (N° 2) ou économique (N° 5), par la jurisprudence (N° '7), l'administration (Nos 4 et 6), une organisation internationale (N° 3) et par différentes branches du droit, concurrence (N° 8), pénal, (N° 9), nous pensons avoir réuni les tendances essentielles en la ma- tière. Il convient par conséquent d'en extraire les éléments fonda- mentaux et de les réunir en une définition « synthétique ».

1.2.2. Essai de synthèse.

Tout d'abord, le grand nombre des définitions a le mérite de mettre en lumière un élément extrêmement utile, même s'il peut sembler évident : le phénomène étudié peut revêtir une quantité de formes et exercer ses effets dans de nombreux domaines. De même, accessoirement la corruption est connue sous différentes appellations : du bakschich au pot-de-vin, en passant par la busta- rella 16 • A cette diversité correspond la nécessité d'adopter une défi- nition large, comme nous le proposions.

Ensuite, nous retiendrons un second élément, lui aussi commun à toutes les définitions citées : la corruption met en jeu au mini- mum deux parties, soit le corrupteur et le corrompu; cet élément, qui de nouveau peut paraître évident à première vue, nous semble quand même non négligeable, principalement parce que les qualités des deux acteurs ne sont pas indifférentes pour la qualification juri- dique - de lege lata pour le moins - des comportements en cause.

Ainsi, lorsque la personne corrompue est un fonctionnaire le droit pénal intervient-il, dans la majorité des législations 17 • De plus, c'est l'action, ou l'inaction, des deux parties que nous devrons étudier pour déterminer si un pot-de-vin a été convenu ou non, pour pré- ciser le moment où la corruption est devenue « parfaite ».

Troisièmement, un avantage: « payments, Leistung, prestations, gift, benefit ... 18 », est accordé, ou au moins offert, par le corrupteur au corrompu. Les termes employés dans les définitions sont diffé-

15 New York Penal Law, § 180.00, Commercial bribing.

16 Littéralement : petite enveloppe.

17 Cf. le document ONU E/5838, cité note 9, p. 8 ss.

18 Cf. les définitions citées ci-dessus, N°' 4 ss.

(15)

DÉFINITION 7 rents et souvent generaux ; nous devrons donc essayer de préciser plus tard quels avantages sont relevants pour notre démarche.

Enfin, et peut-être est-ce l'élément le plus important, nous retien- drons le but visé par la corruption comme caractéristique du phéno- même. Il s'agit, par le moyen du pot-de-vin, d'amener l'employeur du corrompu à prendre une décision particulière ou à adopter un com- portement précis ; ces décisions ou comportements sont en principe favorables au corrupteur ou à un tiers pour le compte duquel le corrupteur exerce son activité, on imagine mal en effet une cor- ruption « désintéressée » !

1.2.3. Définition provisoire.

Si nous intégrons ces différents éléments dans une définition satisfaisante pour notre propos, nous obtenons celle-ci: constitue un pot-de-vin, un acte de corruption, tout avantage offert à un em- ployé 19 , agent, mandataire ... dans le but d'influencer la volonté de son employeur en faveur du corrupteur (ou d'un tiers).

Il convient maintenant d'examiner ces divers éléments constitu- tifs de la définition plus en détail et de préciser mieux l'objet de notre étude; il faut en effet que nous disposions d'éléments suffi.

sants pour aborder ensuite le délicat problème des cas limites où la qualification de corruption n'est pas évidente.

§ 2 : ELÉMENTS CONSTITUTIFS.

2.1 L'avantage.

La corruption pouvant prendre de multiples formes, il convient de commencer par déterminer quels types d'avantages sont consti- tutifs de pots-de-vin. Cette étude est essentielle car nous touchons au cœur du phénomène ; on ne peut en effet guère imaginer de corruption sans au moins l'offre d'un avantage. On peut par contre imaginer l'octroi d'un avantage sans qu'il y ait corruption, par exemple lorsqu'il est remis à l'employeur directement et constitue alors une forme de rabais. Nous devons par conséquent procéder en deux temps : tout d'abord examiner en principe la nature pos- sible de l'avantage, puis ensuite étudier dans quelles conditions il devient constitutif de corruption.

19 Au sens large, comprenant à ce stade tant les rapports de droit public que de droit privé ; nous utilisons aussi le terme « préposé » dans ce sens.

2

(16)

8 PARTIE GÉNÉRALE

2.1.1. L'avantage matériel.

Si l'on en croit F. Geerds, c'est l'argent ou ses substituts - les papiers-valeurs, reconnaissances de dettes - qui sont utilisés le plus fréquemment pour corrompre 2o.

Cette affirmation est d'ailleurs étayée par la jurisprudence suisse 21 , française 22 , britannique 2 3 ou allemande 24 dans divers domaines (droit pénal, de la concurrence, corruption d'employés ou de fonctionnaires) et même par certaines lois qui mentionnaient expressément, tel l'ancien code pénal glaronnais 25 , ce moyen; de plus, des enquêtes récentes comme celle de la Securities and Ex- change Commission aux Etats-Unis 26 ou les conclusions du Groupe de travail intergouvernemental de l'ONU chargé de l'étude de ces problèmes 27 confirment cette assertion.

Ces pots-de-vin en espèce sont remis à leurs destinataires de dif- férentes manières et à des titres divers 28 • Ils peuvent ainsi être accordés sous la forme d'une ristourne ( « Kickback ») 29 , de provi- sions, de prêts sans intérêts à long terme, prêts dont le rembourse- ment ne sera jamais exigé, etc... De même, ces sommes sont quel- ques fois versées à des personnes ou sociétés proches de celui qu'on désire corrompre, voire même à des bonnes œuvres dont le corrompu ou ses proches seront les bénéficiaires directs ou indi- rects. Cette méthode permet de rendre l'opération un peu moins apparente, mais elle tend aux mêmes buts qu'un versement direct à l'intéressé, soit à amener finalement celui-ci à une attitude favo- rable au corrupteur.

Cependant, même si c'est le plus courant, le paiement de sommes d'argent n'est bien entendu pas le seul moyen utilisable pour « per- suader » un individu ; les cadeaux de tous genres peuvent remplir cette fonction avec la même efficacité.

20 Unrechtsgehalt ... , note 19, p. 21 ; cf. aussi O. Hirzel, thèse, p. 30 et R.

Sievers, thèse, p. 29.

21 P. ex.: BJP 1954, N° 260, p. 119 = RSJ 1954, p. 227.

22 P. ex.: D 1927, p. 86.

23 P. ex.: l'arrêt cité note 13 supra.

24 P. ex. : RGST 48, p. 291.

25 § 146; cf. aussi W. Peter, thèse, p. 37-38.

26 Rapport (surtout les annexes).

27 Doc. E/AC 64/7, N°' 12 ss.

28 Zirpins/Terstegen, traité, p. 732 ss ; F. Geerds, Unrechtsgehalt .. ., p. 18 ss ; O. Hirzel, thèse, p. 37.

29 Cf. l'article 3 des règles de conduite adoptées par le conseil de la Chambre de Commerce Internationale (CCI) le 29 novembre 1977, document N° 315; cf.

aussi l'article 177 al. 2 du Code pénal français.

(17)

DÉFINITION 9 La doctrine 3o, et la jurisprudence dans quelques cas plus rares 31, offrent de nombreux exemples de présents possibles : « Die Skala der Sachzuwendungen reicht von den einfachen Dingen des tagli- chen Bedarfs über Genussmittel, Blumengebinde, Spielwaren und teuere Einrichtungsgegenstande bis zu ausgesprochenen Luxusarti-

keln und Liebhaberwerten 32 ».

Des objets beaucoup plus importants ont aussi été offerts, comme par exemple un hélicoptère qui a été remis par une société pétrolière américaine à des hauts personnages boliviens 33 •

Comme pour les paiements, les manières de remettre les avan- tages en nature sont nombreuses et parfois difficiles à détecter.

Ainsi, parle-t-on d' «attentions», de cadeaux d'anniversaire, de ma- riage, de primes (« Zugabe »), de cadeaux publicitaires, etc ... De même, ces avantages sont aussi remis dans certains cas à des per- sonnes physiques ou morales proches du corrompu s4,

Enfin, la notion d'avantage matériel recouvre encore toutes les prestations en jouissance qu'on accorde au corrompu comme par exemple la mise à disposition d'un terrain 35 , d'une automobile, les invitations à diverses manifestations, etc ...

C'est ce que résume H. R. Koch lorsqu'il écrit 36 : « Als Vorteile kommen auch Nutzwerte in Betracht, die dadurch gekennzeichnet sind, dass sie dem Empfanger zur Ersparung von Aufwendungen ver- helfen. Hier ist an Dienst-und Werkleistungen zudenken ( ... ), aber auch an alle Formen der Bewirtung, angefangen von der wohl in der Regel harmlosen Bekostigung bei Dienst-oder Geschaftsbesuchen über ausgedehnte Zechtouren, Barbesuche, Jagdeinladungen bis hin zu Urlaubseinladungen ».

2.1.2. L'avantage immatériel.

Il s'agit de tous les avantages non évaluables en argent, c'est-à- dire de prestations qui visent en règle générale à contenter l'orgueil, l'amour-propre de celui qui les reçoit - « die Befriedigung des Ehrgeizes, der Eitelkeit und des Geltungsbedürfnisses 37 ».

30 P. ex.: Baumbach/Hefermehl, commentaire, N° 6 ad § 12; R. Sievers, thèse, p. 31 ; H.R. Koch, thèse, p. 15.

31 Cf. les références citées par H.R. Koch, thèse, note 1, p. 15 et Baumbach/

Hefermehl, lac. cit.

32 R. Sievers, thèse, p. 31.

33 Exemple cité par E. Herlihy et T. Levine, Corporate crisis, p, 553 ss.

34 P. ex. : J. Kunz, thèse, p. 54.

35 RGST 64, p, 296 SS.

36 Thèse, p. 15-16; Koch reprend d'ailleurs ici R. Sievers, thèse, p. 31, sans le préciser.

37 Feuerbach, cité par E. Schmidt, Die Bestechungstatbestiinde, N° 7, p. 3.

(18)

10 PARTIE GÉNÉRALE

Il faut tout de suite préciser cependant que de tels avantages sont probablement fréquents en pratique mais très rarement décou- verts. Selon F. Geerds, ils ne représenteraient qu'au maximum 5% des cas de corruption de fonctionnaires et R. Sievers 39 estime que cette évaluation est aussi applicable à la corruption du secteur privé. Néanmoins, il ne nous paraît pas inutile d'examiner ce pro·

blème, notamment parce qu'il est controversé en doctrine et que nous ne disposons pas d'indications vraiment précises.

Dans cette catégorie, on classe traditionnellement les avantages suivants 40 : octroi de décorations, de titres honorifiques, comptes- rendus flatteurs à la radio ou dans la presse 41 , possibilité d'accé- der à un club privé renommé 42 , voire même promesse de mariage43 ou offre de relations sexuelles.

Ce dernier exemple a donné lieu à des discussions doctrinales en droit allemand où l'on s'est demandé s'il s'agissait d'un avan- tage matériel ou non 44, Nous ne trancherons pas ici cette question d'importance très secondaire ; le problème principal reste celui de savoir si en principe l'octroi d'avantage(s) immatériel(s) peut être

un moyen de corruption. ·

La doctrine dominante, tant en droit pénal 45 qu'en droit de la concurrence 46, en Suisse 47, en Allemagne 48 comme en France 49 ,

admet que de tels avantages constituent aussi une forme de pots- de-vin.

Ainsi, par exemple, B. von Büren 5o écrit-il : « sie ( = die Ver- günstigung) kann auch liegen in der Befriedigung des Ehrgeizes, z.B. Wahl in ein Amt, oder der Eitelkeit, z.B. Verschaffung einer Auszeichnung ».

38 Unrechtsgehalt..., note 98, p. 19.

39 Thèse, note 242, p. 32.

40 Baumbach/Hefermehl, commentaire, N° 6 ad § 12.

41 E. Schmidt, Die Bestechungstatbestande, N° 31, p. 16 (réf.).

42 J. Kunz, thèse, p. 49.

43 Le même, p. 54.

44 Cf. RGST 64, p. 291 ; E. Schmidt, Bestechungstatbestande, p. 5 ss ; R Sievers, thèse, p. 66-67; A. Steinbeisser, thèse, note 1, p. 12.

45 P. ex. : E. Hafter, traité, PS II 2, p. 756; Dalloz, répertoire, I, ad corrup- tion, N°• 18-42 ; pour le droit allemand cf. l'exposé de E. Schmidt, Die Bestechung- statbestande, p. 3 ss.

46 P. ex. : J. Kunz, thèse, p. 49 et 54; Baumbach/Hefermehl, commentaire 6 ad. § 12.

47 P. ex. : O. Feldmann, thèse, p. 115, 120, 129.

48 Le même, p. 57, 64, 77, 97.

49 Le même, p. 16, 23, 28.

110 Commentaire, N° 3 ad. 1, al. 2, litt. e, p. 153.

(19)

DÉFINITION 11 En principe, surtout dans le cadre d'une définition générale, il apparaîtrait logique de se rallier à la doctrine dominante et d'inclure l'avantage immatériel dans la notion de pot-de-vin. Or, même s'il est clair que certains individus peuvent être influencés par ce type de prestations immatérielles de la même manière que par l'octroi d'un avantage matériel, il nous paraît inutile et injustifié d'étendre le concept aussi loin.

Cette démarche nous paraît inutile car il sera vraisemblable- ment toujours très difficile d'apporter la preuve de l'existence d'un avantage immatériel.

A cet argument «pratique», il faut ajouter une réflexion plus fondamentale: il nous paraît injustifié de s'attaquer à un élément aussi marginal du phénomène de la corruption et de courir par là deux risques graves. Tout d'abord, la notion même d'avantage im- matériel est floue et de ce fait peut entraîner une insécurité juri- dique regrettable 51 quant aux limites que le législateur place à son intervention. Ensuite, en donnant trop d'importance à des détails de ce type, la lutte contre la corruption perd de vue les éléments principaux, les dangers réels des pots-de-vin, et risque d'apparaître comme futile et contestable car préoccupée par des chimères. Nous écarterons par conséquent l'avantage immatériel de notre définition.

2.2. L'avantage adéquat: l'avantage caché.

On peut très généralement affirmer que dans le cadre de rela- tions contractuelles 52 , chaque partie cherche à influencer son cocontractant afin de faire prévaloir ses intérêts particuliers; la corruption ne représente ainsi qu'un moyen parmi d'autres pour influencer son partenaire et l'inciter à agir en faveur du corrupteur.

Il devient donc très important de distinguer entre les moyens admis- sibles dans ce domaine et les cas où l'octroi d'un avantage matériel constitue un pot-de-vin.

2.2.1. Le problème central du secret.

Pour résoudre cette question, il faut tout d'abord souligner la qualité particulière du corrompu, soit son statut d'employé (au sens large) ; en effet, même s'il a le pouvoir de conclure des affaires

51 Cf. E. Schmidt, Die Bestechungstatbestande, p. 8 ss ; F. Geerds, Unrechts- gehalt .. ., p. 66-7.

52 Où par hypothèse les parties ont bien entendu le choix de déterminer le contenu du contrat !

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12 PARTIE GÉNÉRALE

ou d'en préparer la conclusion, ce dernier personnage n'agit que pour le compte d'un tiers, soit son employeur. Le corrupteur n'influence par conséquent qu'indirectement son partenaire réel, l'employeur, et les méthodes admissibles dans le cadre de relations contractuelles directes apparaissent sous un jour nouveau. S'il est possible d'offrir par exemple un cadeau directement à son cocon- tractant, il n'en va pas nécessairement de même de l'offre d'un cadeau identique au représentant de ce cocontractant ; dans cette seconde hypothèse, il faut distinguer deux cas, selon que le repré- sentant fait connaître ou non l'existence du cadeau. Lorsque le cocontractant sait que son représentant a reçu un présent et qu'il accepte de conclure avec l'auteur du cadeau, la situation est iden- tique à celle où le cocontractant lui-même a reçu un avantage quel- conque. Il n'y a en principe pas de problèmes particuliers, ce cadeau correspond pratiquement à l'octroi d'un rabais - rabais accordé ici à. l'employé plutôt qu'à l'employeur comme c'est le cas usuel- lement. Par contre, lorsque le cocontractant-employeur ignore l'avan- tage dont son partenaire a gratifié son représentant, l'analyse devient plus délicate et l'on doit se demander alors si l'avantage constitutif de corruption se caractérise par le secret dont la transaction est entourée.

La majorité de la doctrine 5a - sous réserve cependant des auteurs allemands spécialistes du § 12 UWG 54 - admet que le secret est un élément très important de la notion de pot-de-vin, mais ne construit pas la corruption autour de cet élément. Or, nous pensons qu'il s'agit là de l'élément central de la définition dont dépendent les autres. Il joue en effet un rôle au niveau de l'avantage et à celui du but poursuivi ; il met aussi en lumière l'intention des parties (corrupteur et corrompu) et révèle leur connaissance du caractère pour le moins douteux de leurs agissements. Le secret concerne donc ainsi les deux parties directement intéressées, le corrupteur et le corrompu, qui agissent alors comme « complices » dans le but d'obtenir chacun quelque avantage. Il ne s'agit donc pas d'un secret «fortuit», mais bien plutôt d'une attitude concertée des parties pour cacher leurs actes douteux. Il suffit d'ailleurs que le<; parties reconnaissent implicitement l'importance du secret, il n'est pas nécessaire qu'elles insistent spécialement sur ce point lors- qu'elles conviennent du versement d'un pot-de-vin.

Ainsi, lorsque les parties envisagent dès l'origine de révéler leur accord à l'employeur du corrompu, cet accord ne constitue plus à

53 A. Steinbeisser, thèse, p. 20; B. von Büren, commentaire, p. 153 ; H.R.

Sprüngli, thèse, p. 160; J. Kunz, thèse, p. 62 ss, not. 67.

54 H.R. Koch, thèse, p. 69; Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1091, N° 14; H. Lehmann, Die Werbung mit Geschenken, Berlin 1974, p. 81 ; RGST 48, p. 291 s~ ; contra : K. Hir~chenkramer, thèse, p. 37 ss ; Alternativ Entwurf (AE),

bes. Teil, § 176, p. 37. Cf. infra 3.1.

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DÉFINITION 13 notre sens un pot-de-vin ; de même, lorsqu'il est tout à fait indif- férent aux deux parties que leur accord soit connu de l'employeur du corrompu, nous ne nous trouvons plus en présence d'un secret concerté mais d'un secret «fortuit», donc non constitutif de pot-de- vin. Le moment décisif pour déterminer si les parties voulaient ou non que leurs actes restent cachés est celui de la conclusion de leur accord portant sur l'octroi d'un avantage à l'employé.

Nous examinerons maintenant la notion d'avantage adéquat à la lumière du secret.

2.2.2. L'avantage adéquat.

Tout d'abord, l'avantage adéquat doit être indû, faute de quoi il ne saurait bien entendu être question de corruption. Cette carac- téristique est d'ailleurs expressément mentionnées dans de nom- breuses dispositions légales : ainsi, par exemple l'article 316 CPS

«un avantage auquel ils n'avaient pas droit», l'article 13 e LCD

«avantages qui ne devaient pas leur revenir» 55 • Nous signalons simplement à cet égard qu'il nous paraît pour le moins curieux de dissimuler un avantage auquel l'employé aurait droit, si ce n'est pour des raisons fiscales.

La doctrine se penche ensuite sur la délicate question du rapport de causalité (Aquivalentsverhaltnis) 56 qui doit exister entre l'avan- tage et la prestation du corrompu favorisant le corrupteur. Dans cette optique, «Der Vorteil muss als Aequivalent für die Bevor- zügung beim Warenbezug fungieren » 57. La détermination de l'exis- tence d'un tel rapport de causalité est très délicate, en particulier lorsque les parties n'ont pas encore fourni ou déterminé précisé- ment leurs prestations et que seul un accord général à leur sujet est réalisé. Or, nous pensons que si l'on prend en considération uniquement le secret gardé par l'employé au sujet d'un avantage offert par le futur cocontractant de son employeur, il n'est plus nécessaire d'examiner ce rapport de causalité. Il nous paraît en effet qu'en acceptant de taire l'offre d'un avantage, l'employé recon- naît ipsu facto que celui-ci est de nature à lui faire adopter un com- portement favorable au corrupteur, donc que l'avantage offert est adéquat. Dans ces conditions, les caractéristiques particulières de l'avantage, son importance, deviennent irrelevantes 58 ; de même, il

55 Cf. aussi le Message du Conseil fédéral, FF 1942, p. 689.

56 Cf. E. Schmidt, Die Bestechungstatbestande, p. 67 ss, not. 73-74 (réf.).

57 R. Sievers, thèse, p. 57.

58 Cf. W. Peter, thèse, p. 36; H.R. Koch, thèse, p. 36; O. Hirzel, thèse, p. 31;

Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1090; J. Kunz, thèse, p. 48.

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14 PARTIE GÉNÉRALE

est indifférent que le corrupteur utilise ou non ses propres res- sources pour fournir cet avantage 59 •

Notre solution repose comme celle de la doctrine traditionnelle sur le contenu de la volonté du corrupteur et du corrompu 60 ; elle présente néanmoins l'intérêt de s'appuyer sur un élément extérieur facilement constatable, le secret, élément qui permet en quelque sorte de présumer du contenu de la volonté des parties.

2.3. Le but de la corruption.

Le problème du but de la corruption est lié directement à celui de l'avantage adéquat, puisque celui-ci constitue un moyen pour atteindre celui-là.

Le but de la corruption est d'amener le corrompu à adopter un comportement favorable au corrupteur. Ces deux éléments se trou- vent dans l'optique du corrupteur dans un rapport de moyen à but:

le comportement du corrompu est le moyen pour atteindre le but ultime du corrupteur, soit son propre avantage (ou celui d'un tiers).

Nous examinerons maintenant ces deux éléments séparément, toujours dans le cadre du problème général du secret.

2.3.1. Le comportement du corrompu.

Le comportement du corrompu est qualifié de manière différente par les nombreux textes légaux qui règlementent ce problème.

Ainsi, par exemple, la Loi suisse sur la concurrence déloyale - article 13, lettre e - contient-elle les termes « ... manquer à leur devoir dans l'accomplissement de leur travail», ce que le texte allemand traduit part « pflichtwidriges Verhalten bei ihren dienst- lichen oder geschaftlichen Verrichtungen »; l'UWG allemande réprime l' « unlauteres Verhalten » du corrompu (§ 12) ; le droit français intervient lorsqu'on est corrompu «pour faire ou s'abste- nir de faire un acte de son emploi » - article 177 al. 2 du Code pénal; en Grande-Bretagne, I'Act for the better prevention of cor- ruption du 4.8.1906 recourt à diverses reprises au terme «cor- ruptly » pour qualifier le comportement de l'agent corrompu. Le droit pénal suisse, enfin, distingue deux types d'infraction selon que le comportement du fonctionnaire est contraire ou non aux devoirs de sa charge - articles 288, 315 et 316 CPS.

59 Cf. W. Peter, thèse, p. 37; Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1087.

60 P. ex.: A. Steinbeisser, thèse, p. 10; J. Kunz, thèse, p. 49 (réf.).

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DEFINITION 15 Que faut-il retenir pour notre propos de ces approches très variées du problème ?

Tout d'abord, si l'on examine la forme que doit prendre le comportement du corrompu, il apparaît que celle-ci n'est pas impor- tante en tant que telle ; il faut en effet que le corrompu permette en principe par son action ou son abstention - comme le précise le droit français - au corrupteur d'obtenir un avantage.

Ce comportement peut ainsi être actif: l'employé corrompu con- seillant à son employeur de conclure avec le corrupteur, le fonc- tionnaire accordant une autorisation à ce dernier, ou passif : l'em- ployé n'effectuant pas certaines vérifications ou cachant à son employeur certains faits 61.

Il suffit donc que le comportement soit de nature à réaliser les buts du corrupteur, ce que nous avions d'ailleurs déjà sous- entendu en le considérant comme un « moyen ».

Il faut ensuite s'interroger sur la qualification de ce compor- tement, puisque les lois citées ci-dessus le considèrent comme « dé- loyal, contraire à des devoirs, ... ». Pour répondre à ces questions, nous devons à nouveau nous référer au secret dont s'entoure Je pot-de-vin. Le corrompu qui exerce son activité sous l'influence d'un avantage caché offert par le corrupteur agit contrairement à ses devoirs, puisqu'il accepte d'être «inféodé» à celui-ci, en secret. En dissimulant de la sorte un de ses motifs, le corrompu viole néces- sairement ses obligations à l'égard de son employeur. Faut-il encore que le comportement du corrompu cause un dommage à ce dernier pour être qualifié de déloyal ? Faut-il, par exemple, que l'employeur conclue des affaires peu avantageuses avec le corrupteur ? La réponse à cette question est délicate; en effet, l'existence d'un dom- mage n'est qu'une conséquence, fortuite le plus souvent, de l'acti- vité de l'employé, employé auquel il est normalement indifférent que son employeur subisse ou non un préjudice. La déloyauté réside déjà dans l'acceptation d'un avantage secret. Cependant, si l'on se place du point de vue de l'employeur, c'est probablement l'existence de ce dommage qui l'incitera à agir contre le corrup- teur et contre son employé corrompu; il ne se sentira que peu motivé pour sauvegarder uniquement la loyauté en affaires. Enfin, si l'on examine les effets néfastes de la corruption sur la concur- rence en général et la loyauté en affaires en particulier, il faut reconnaître que ces effets se produisent indépendamment de l'exis- tence d'un préjudice de l'employeur.

61 Par ex.: A. Steinbeisser, thèse"' p. 21 b); RO 95 Il, 37 ss = JT 1970 I 75 ~s,

E. Hasler C. B. et E. Gerwer & ;:,pirig.

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16 PARTIE GÉNÉRALE

Ainsi, adopter une définition où le dommage de l'employeur joue un rôle, conduirait d'une part à ignorer les effets supra-individuels de la corruption et d'autre part à se priver d'une possibilité d'inter- vention à ce niveau. Même si cette intervention n'est encore que théorique car la non conscience de ces effets n'incite pas à agir, on ne peut la supprimer avant d'avoir tenté des actions sur ce point.

Nous pensons donc utile et justifié de maintenir le préjudice de l'employeur hors de la définition générale de la corruption, tout en acceptant qu'en pratique cette position n'ait encore que peu d'effets ; ainsi le comportement de l'employé est-il déloyal dès qu'il accepte de garder le secret sur l'avantage offert par le corrupteur.

2.3.2. Le traitement favorable,

l'avantage obtenu par le corrupteur.

Le corrupteur vise à obtenir par la corruption un avantage qu'il pense ne pouvoir obtenir que de cette manière «détournée» 62 • La raison pour laquelle le corrupteur estime devoir recourir à l'offre de pots-de-vin n'a pas d'importance à ce niveau, sous réserve du cas (rare) où il devient la victime de l'extorsion (au sens propre) pratiquée par l'employé « corrompu» ; il ne saurait donc en prin- cipe se justifier par la référence à un usage généralisé.

La nature de l'avantage visé n'est en principe pas relevante;

celui-ci pouvant être aussi bien matériel qu'immatériel 63 • Il faut cependant relever qu'en règle générale il s'agit d'avantages maté- riels, en espèce ou en nature 64 ; pour les raisons développées plus haut 65 au sujet de l'avantage retiré par le corrompu, nous ne retien- drons que l'avantage matériel.

Les exemples d'avantages matériels sont nombreux 66 : ainsi la simple obtention d'un contrat, même conclu à des conditions habi- tuelles, représente-t-elle déjà dans la majorité des cas un avantage pour le corrupteur. De même, l'octroi d'un crédit, de conditions générales favorables, etc... constitue-t-il un traitement de faveur accordé au corrupteur. Dans un autre domaine, le droit public, la remise d'autorisation de construire, de concessions, de permis de séjour, etc ... par un fonctionnaire corrompu favorise indûment le corrupteur.

62 Par ex. : Baumbach/Hefermehl, commentaire, n. 10, p. 1090; H.R. Koch, thèse, p. 30 et 50.

63 Par ex. : A. Steinbeisser, thèse, p. 22.

64 Idem.

65 Supra 2.1.2.

66 J. Kunz, thèse, p. 69 ss.

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DÉFINITION 17 La personne aux dépens de qui l'on obtient l'avantage ne joue pas de rôle au niveau général de la définition. Il peut s'agir du cocontractant (l'employeur) qui paie un prix trop élevé ; il peut s'agir des concurrents du corrupteur qui ont été évincés; il peut s'agir de l'Etat qui verse à tort une subvention. On peut en outre très bien imaginer qu'à l'avantage du corrupteur ne corresponde aucun désavantage direct pour quiconque 67 : par exemple parce que les contrats sont conclus à un prix usuel ou que la remise d'une autorisation de construire ne lèse pas un autre constructeur en puissance.

L'avantage ne se définit par conséquent que du point de vue du corrupteur.

2.4. Les parties en cause.

Si la corruption met directement en cause deux parties, le cor- rupteur et le corrompu, elle concerne indirectement un tiers : l'e1n- ployeur du corrompu. En effet, le corrompu n'est que le représen- tant, le préposé de ce tiers, au nom de qui il agit ou qu'il conseille.

Cet employeur à qui l'on dissimule le pot-de-vin peut être une per- sonne privée, liée au corrompu par un mandat, un contrat de tra- vail, etc ... , ou une collectivité publique, auquel cas le corrompu possède généralement le statut de fonctionnaire, ce qui le soumet à des règles particulières (cf. notamment les articles 288, 315, 316 CPS, le § 334 du Code pénal allemand).

La qualité des parties concernées directement ou indirectement joue un rôle dans la définition du type de corruption : soit du domaine privé, soit du domaine public. Cette distinction a de lege lata des conséquences non négligeables, car les textes applicables à ces deux domaines sont en principe différents et ne se révèlent pas toujours très cohérents 68 •

2.5. Les éléments subjectifs.

Nous avons jusqu'ici examiné essentiellement les caractéris- tiques objectives du pot-de-vin, bien que certaines d'entre elles se rattachent aussi aux personnes en cause comme l'avantage adéquat

67 Sous réserve cependant de l'obligation incombant à l'employé de remettre le pot-de-vin à son employeur; l'employeur subit un « dommage» égal au montant du pot-de-vin conservé par son employé. Ce dernier « dommage » n'est qu'une conséquence indirecte de l'avantage acquis par le corrupteur.

68 Cf. infra Chapitre IV.

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18 PARTIE GÉNÉRALE

que nous avons étudié du point de vue des parties en cause. Il faut maintenant nous pencher sur les éléments subjectifs les plus impor- tants pour déterminer quand un acte de corruption est parfait, c'est-à-dire à quel moment tous les éléments constitutifs sont réunis.

Pour résoudre cette question, il convient de distinguer claire- ment deux niveaux : tout d'abord celui de la définition générale du comportement, soit le niveau de l'acte illicite (tant pénal que civil), ensuite celui de la définition du pot-de-vin comme un contrat entre le corrompu et le corrupteur, soit le niveau du droit civil. Ce second niveau sera traité dans le chapitre VI, consacré à l'accord de pot-de-vin, et il suffit d'indiquer ici qu'à cet égard le contrat s'analyse comme un accord « normal» de volonté entre deux parties, même si ses buts ou son contenu sont discutables.

Dans le cadre de la définition générale, nous préciserons que la conscience et la volonté des deux parties doivent porter sur les éléments suivants:

a) offre d'un avantage indû ;

b) qualité d'employé (au sens large) du corrompu;

c) secret de la transaction;

d) fourniture d'un avantage au corrupteur.

Selon la personne qui prend l'initiative, les éléments de l'acte illicite sont réunis, à des moments différents. Lorsque c'est le cor- rupteur qui promet une prestation, il suffit que l'employé com- prenne le sens de l'offre 69 et l'accepte comme telle, expressément, par actes concluants ou tacitement.

Lorsque c'est l'employé qui demande ou exige une prestation de l'autre partie, c'est au moment où cette dernière a accepté cette demande, expressément ou par actes concluants et en a reconnu les buts et caractères spécifiques que les éléments constitutifs de l'acte illicite sont réunis.

Il n'est ainsi pas relevant pour la définition, dans aucune des deux situations, que l'offre soit ensuite exécutée ou que le corrompu fournisse sa prestation ; le moment décisif est celui où les deux par- ties acceptent de fournir leurs prestations particulières 70 . Nous préciserons néanmoins que le degré d'exécution ultérieur joue un rôle au niveau de la qualification des actes en droit pénal comme tentative ou délit manqué, par exemple.

69 Cf. J. Kunz, thèse, p. 56 ss (réf.).

70 Par ex. : Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1092-1093, N°• 17-18.

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DÉFINITION 19 Enfin, il faut encore souligner que seule la corruption inten- tionnelle est théoriquement concevable 71 ; il est en effet extrême- ment difficile d'imaginer des cas de corruption par négligence. Les deux parties ont l'intention d'obtenir un avantage par ce moyen, quel que soit cet avantage par ailleurs.

2.6. Résumé, définition.

Il nous paraît utile, après ces développements, de résumer en une formule les éléments constitutifs de la corruption. Nous propo- sons par conséquent de considérer comme constitutive de corrup- tion: toute offre (ou demande) portant sur l'octroi d'un avantage caché, matériel et indû à l'employé d'un tiers dans le but d'influen- cer la volonté de ce tiers en faveur du donateur.

La corruption est parfaite dès que les deux parties ont reconnu et accepté le principe de l'échange secret des deux prestations.

§ 3 : LES CAS LIMITES.

L'examen des cas limites, de la zone grise où les comportements ne sont pas faciles à classifier, présente à notre avis un double intérêt. Tout d'abord, il permet de mettre en œuvre notre définition et d'en vérifier en quelque sorte l'adéquation à la réalité et aussi l'utilité. Ensuite, il devrait nous aider à cerner mieux les limites - et en même temps les difficultés - du sujet.

Nous avons retenu trois phénomènes courants, donc présentant une importance particulière : les primes, les cadeaux, les pourboi- res, trois phénomènes que nom analyserons successivement.

3.1. Les primes.

Il s'agit de sommes payées à l'employé ou au représentant d'un client lors de l'achat de produits ; ces sommes sont en règle géné- rale proportionnelles aux ventes ou achats effectués 72 ; elle peu- vent aussi prendre la forme de ristournes n.

71 Dans le même sens, J. Kunz, thèse, p. 72.

72 P. ex.: H.R. Koch, thèse, p. 140 ss.

73 Cf. note 29 supra et l'arrêt genevois en matière d'escompte de chauffage, SJ 1980, p. 1 ss, not. 10 ss, Caver c. Chaupond.

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20 PARTIE GÉNÉRALE

Conformément à l'importance que nous attachons au caractère secret du pot-de-vin, nous distinguerons deux hypothèses, selon que le client (l'employeur) connaît ou non l'existence de la prime.

Lorsqu0 le client ne connaît pas l'existence de l'avantage maté- riel offert à son employé, les sommes versées sont constitutives de corruption car elles ont incité ce dernier à favoriser la personne offrant les primes: on ne peut en effet pas raisonnablement imagi- ner que le versement de primes secrètes n'ait aucun effet sur Je choix de l'employé. Si ce versement n'avait aucune conséquence, l'employé n'aurait aucune raison d'en cacher l'existence à son em- ployeur ... Faut-il déduire de ce qui précède que la connaissance par l'employeur exclut automatiquement la corruption? Cette solu- tion s'impose à notre avis, mais elle n'est pas partagée par la doc- trine allemande majoritaire en la matière 74 ; nous pensons par conséquent utile d'examiner maintenant la question plus en détail.

Le cas à l'origine de la controverse est le fameux « Korkengeld- fall 75 » que nous pouvons résumer de la manière suivante : un négociant en champagne offrait à un maître d'hôtel une somme pour chaque bouteille ùe son produit qu'il recommandait et vendait aux clients d'un restaurant ; le patron du restaurant connaissait cet « arrangement » et ne s'y opposait pas. Le Reichsgericht a con- sidéré, approuvé aussi par la doctrine majoritaire actuelle 76 , qu'il y avait là un acte de corruption réprimé par le § l2 UWG, donc un comportement déloyal 17 de l'employé maître-d'hôtel.

Pour résoudre ce cas, il faut à notre avis distinguer deux rap- ports : premièrement, le rapport négociant-restaurateur et deuxiè- mement le rapport maître d'hôtel-clients du restaurant. Le paie- ment des primes au maître d'hôtel n'a pas d'effets sur cette première relation, le restaurateur achète cette marque de champagne en toute indépendance, il lui est indifférent à cet égard que son employé reçoive une prime. En conséquence, les concurrents du négociant, c'est-à-dire les autres marchands de champagne, ne subissent aucun désavantage de ce fait.

Dans le cadre du second rapport, par contre, les clients du res- taurant sont conseillés par un maître d'hôtel «peu objectif» ; quelles sont les conséquences de cette situation ? Pour répondre à cette question, il faut préalablement définir le ou les buts des lois sur la concurrence et déterminer si elles protègent les concurrents

74 Cf. note 55 supra.

75 RGST 48, p. 291 SS.

76 Cf. Baumbach/Hefermehl, commentaire, p. 1091, N• 14 (réf.); M. Lehmann, die Werbung mit Geschenken, Berlin 1974, p. 81 - Contra : cf. note 54 supra.

77 « Unlauteres Verhalten ».

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DÉFINITION 21 en premier lieu et au-delà la concurrence en tant que telle, ou si elles s'adressent aussi directement aux utilisateurs, aux consomma- teurs. Si la seconde réponse s'imposait, et que les consommateurs subissent un désavantage du fait du versement des primes, il en découlerait que les «pots-de-vin» reçus avec l'accord de l'em- ployeur seraient contraires aux dites lois dans tous les cas. Dans cette hypothèse, on peut alors se demander s'il ne conviendrait pas en bonne logique de poursuivre aussi l'employeur trop tolérant 7 8•

Si, par contre, les lois existantes ne protègent pas, ou très indi- rectement les clients - ce qui est le cas en l'état des lois - le paiement de telles primes est légal, en règle générale. Cette conclu- sion, à notre avis tout à fait exacte, n'implique pas que l'on accepte le versement de primes dans n'importe quelles conditions; elle reconnaît simplement que le droit ne saisit pas actuellement ce genre de pratiques et qu'on ne saurait, sans étendre abusivement la notion de corruption, les considérer comme des pots-de-vin. La structure-même de ce comportement ne correspond pas au concept de corruption tel qu'on le définit généralement.

On peut enfin ajouter que dans le cas examiné (et dans bien d'autres) les clients ne s'attendent pas à être conseillés « objecti- vement» par le maître d'hôtel; en outre, si c'était le patron du restaurant lui-même qui conseillait de la sorte ses clients - parce que le vendeur de champagne lui avait concédé un rabais ou un avantage quelconque - , la situation ne poserait aucun problème juridique particulier ! On peut en effet conseiller ses clients de manière tout à fait « orientée ». Il est difficilement justifiable de traiter différemment un même comportement selon qu'il est le fait du restaurateur lui-même ou de son employé avec l'accord du restaurateur !

Ce n'est par conséquent que dans l'hypothèse (particulière) où l'obligation de fournir des conseils objectifs est l'objet-même du rapport juridique entre l'employeur qui sait que son employé est corrompu, donc pas ou peu objectif, et le consommateur que le ver- sement d'une prime ou d'une ristourne connue par l'employeur peut être constitutif de corruption 79 • De même, lorsque les consomma- teurs sont protégés par des lois spéciales, l'accord de l'employeur du corrompu n'a pas d'effet à leur égard et les consommateurs peu- vent se plaindre du versement d'une prime ou d'une ristourne.

A cet égard, l'arrêt cité à la note 73 ci-dessus fournit un exemple de cas où les locataires-consommateurs sont protégés par une loi

78 K. Hirschenkramer, thèse, p. 39.

79 Dans ce sens, cf. l'Alternativ Entwurf, bes. Teil, § 176, p. 37.

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22 PARTIE GÉNÉRALE

particulière - in casu !'Arrêté fédéral instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif du 30 juin 1972 - et peuvent exiger d'être mis au bénéfice d'une ristourne, quelle que soit l'attitude des propriétaires ( « employeurs » des régies qui percevaient la ristourne sur le combustible).

En droit suisse de la concurrence, la question n'a pas soulevé autant de passions qu'en doctrine allemande et ceci probablement déjà parce que nous ne connaissons pas de cas de jurisprudence en la matière, ni même sur les « simples» pot-de-vin 80 • La doctrine suisse admet que le versement de telles primes ne contrevient pas à l'article 13 lettre e LCD si. Cette solution paraît d'ailleurs la seule compatible avec le texte légal qui fait référence à la violation des devoirs de l'employé et qui exclut ainsi implicitement les cas où le consentement de l'employeur supprime cet élément constitutif. Ce- pendant, la question d'une éventuelle violation de l'article l, alinéa 1 LCD (clause générale) doit être encore examinée de cas en cas, mais il ne sera alors pas question de corruption. Notons encore à cet égard, que l'article 177, alinéa 2 du Code pénal français prévoit comme élément constitutif la non-connaissance de l'employeur: «à l'insu et sans le consentement de son patron ... ».

3.2. Les cadeaux.

Formellement, ce sont des moyens matériels de corruption. Il est courant cependant de donner des cadeaux dans les relations commerciales et aussi, bien qu'à moindre degré, dans les rela- tions avec l'administration. Plus encore que les primes, les cadeaux sont un phénomène tout à fait usuel et auquel on n'attache que peu d'importance en principe.

La doctrine - et la jurisprudence - qui se sont penchées sur ces problèmes se réfèrent essentiellement à ce concept d'usage, de coutume, pour déterminer si un cadeau est admissible. On trouve les raisonnements suivants :

1) «Die aus besonderen Anlass, z.B. Weihnachten, geschehene unent- geltliche Abgabe eines Feuerzeugs im Werte von unter 10.- DM an den Einkaufer eines Kunden ist weder als wettbewerbswidrig anzusehen, noch verstosst sie gegen § 12 UWG, wenn der Ges- chenkartikel nach seinem Wert und der ganzen Art der beste-

80 Cf. B. von Büren, commentaire, p. 154; cf. cependant les discussions pas- sionnées au Conseil des Etats à propos du premier projet de LCD in BS CE 1934, p. 344 ss et CN 1935, p. 322 ss.

81 Cf. B. von Büren, commentaire, p. 153, N° 4; O.A. Germann, concurrence déloyale, p. 265.

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