Journalderadiologie(2011)92,1135—1138
LETTRE / Neurologie
Encéphalite de Bickerstaff : à propos de deux cas
Bickerstaff’s brainstem encephalitis: Report of two cases
W. Nejhy
∗, W. Zamiati , S. Lezar , A. Adil
Servicecentralderadiologie,CHUIbnRochd,1,ruedesHôpitaux,Casablanca,Maroc
MOTSCLÉS Encéphalitede Bickerstaff; Tronccérébral; IRM
KEYWORDS Bickerstaff’s encephalitis;
Brainstem;
MRI
L’encéphalite deBickerstaff est unemaladie auto-immunecaractérisée par des lésions inflammatoires démyélinisantes du tronc cérébral. Elle se traduit par un tableau de dysfonction aiguë du tronccérébral survenant dans lessuites d’une infectionaprèsun intervallelibre.L’objectifdecetravailestdemontrerl’apportdel’IRMdanslediagnostic decettepathologieàtraversl’étudededeuxobservations.
Observations
Cascliniqueno1Ils’agitd’unenfantde14ans,desexemasculin,ayantprésentéaudécoursd’unefièvre éruptive,probablementvirale,unsyndromeméningéfébrile.Uneponctionlombaireaété réalisée,révélantunepléiocytoselymphocytaireassociéeàunehyperprotéinorachieavec examendirectetculturesnégatives.Lediagnosticdeméningiteviraleaétéretenu.Devant l’apparitiondetroubledelaconscienceetd’uneataxie,avecàl’examencliniqueunsigne deBabinskipositif,l’enfantaeuuneIRMcérébraleavecdesséquencespondéréesenT1, T2,FLAIRetinjectiondegadoliniumquiamontréuneplageenhyposignalT1(Fig.1a), hypersignalT2etFLAIR(Fig.1b,c)intéressanttoutletronccérébralsansélargissement niprisedecontrasteanormale(Fig.1d).
Cascliniqueno2
M.B.H.,âgéde40ans,aprésentéàlasuited’unsyndromeinfectieuxnonétiquetéune ataxieetuneobnubilation évoluantdansuncontexteapyrétique.Laponction lombaire réaliséearévéléunepléiocytoselymphocytaireassociéeàunehyperprotéinorachieavec examendirectetculturesnégatives.LepatientaeuuneIRMcérébraleobjectivantune plageenhyposignalT1(Fig.2a)ethypersignal T2(Fig.2b) intéressantlaprotubérance sansélargissementniprisedecontrasteanormale(Fig.2c,d).
∗Auteurcorrespondant.
Adressee-mail:nejhy.wafaa@gmx.fr(W.Nejhy).
0221-0363/$—seefrontmatter©2011PubliéparElsevierMassonSAS.
doi:10.1016/j.jradio.2010.08.004
1136 W.Nejhyetal.
Figure1. HyposignalT1ethypersignalT2etFLAIRintéressanttoutletronccérébralsansélargissementnirehaussementanormalaprès injectiondegadolinium:a:séquencesagittaleT1;b:séquenceaxialeT2;c:séquencecoronaleFLAIR;d:séquenceaxialeT1+C.
Leprofilévolutif,lanégativitédel’enquêteinfectieuse etladistributiondeslésionsenIRMontfaitévoquerlediag- nostic de l’encéphalite de Bickerstaff. Les deux patients ontétémissouscorticothérapieavecuneévolutionclinique favorable.
Discussion
L’encéphalitedeBickerstaffestunedémyélinisationaiguë du tronc cérébral survenant dans les suites d’une infec- tion.Saphysiopathologierestepeu claire,néanmoins des mécanismesauto-immunssecondairesàuneinfectionbac- tériennesontévoqués[1—3].Certainsauteursconsidèrent cette entité comme une variante de l’encéphalomyélite aiguë disséminée (une maladie inflammatoire démyélini- santeintéressant principalement la substance blanche et s’installant en général dans les suites d’une infection ou d’une vaccination)[3,4].Iln’existe pas demarqueur bio- logiquespécifiquede lamaladie etle diagnosticest basé sur un faisceau d’arguments anamnestiques, cliniques et radiologiques[1,4].Letableaucliniqueassocietypiquement
uneophtalmoplégie,uneataxieetuneconfusionsurvenant enpériodepost-infectieuse[1,2,4].Unfacteurdéclenchant infectieuxest retrouvédans92%des casetunesérologie Campylobacter jejuni est positive dans 22% des observa- tions[3—5].L’analyseduLCRestfondamentaleetpermet toutd’abordd’exclureuneméningo-encéphaliteinfectieuse nécessitantuntraitementspécifique.Ellepeutmontrerdes anomalies non spécifiques à type de pléiocytose lympho- cytaire dans 40% des cas, hyperprotéinorachie dans 59% descasetunedissociationalbumino-cytologiquedans19% des cas [3,4]. Des anticorps antigangliosides (anti-GQ1b) sériquessontretrouvésdansdeuxtiersdescas.Néanmoins, leurabsencenepermetpasd’éliminercediagnostic[1,4,6].
L’encéphalite de Bickerstaff présente des analogies avec lesyndromedeMiller-Fischer(formecliniquedesyndrome deGuillain-Barréassociantophtalmologie,ataxie,aréflexie, dissociation albumino-cytologiqueet présence d’anticorps anti-G1b). Toutefois, la présence d’un syndrome pyrami- dal, detroublesdeconscienceoudesanomaliesdesignal du tronccérébral à l’IRM permet deretenir le diagnostic de l’encéphalite de Bickerstaff [2,4]. L’IRM montre dans seulement 30% des cas des anomalies de signal à type
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Figure2. PlagehétérogènedelaprotubéranceenhyposignalT1,hypersignalT2,sansélargissementniprisedecontrasteanormale:a: séquencesagittaleT1;b:séquenceaxialeT2;c:séquencecoronaleT1+C;d:séquenceaxialeT1+C.
d’hypersignalT2etFLAIRdutronccérébral,ducerveletou duthalamus.Laprisedecontrasteestinconstante.Concer- nant la stratégie diagnostique, on réalise une IRM avec injectionaustadeaiguetpendantlarécupération.Alorsque dansl’intervalle,descontrôlescourtspeuventêtreréalisés enFLAIRuniquement[1—3].Letraitementspécifiquen’est pascodifié.L’utilisationdelacorticothérapiesembledonner desrésultatscliniquessatisfaisants.Lerecoursauxéchanges plasmatiques,paranalogieauxsyndromesdeGuillain-Barré et Miller-Fisher, a également permis des évolutions cli- niquesfavorablesdanscertainescirconstances.L’évolution est favorable avecrécupération sans séquellesdans deux tiersdescasenviron[1,2,4].Cesdeuxobservationsillustrent ladifficultédudiagnosticdel’encéphalitedeBickerstaff.Il s’agit certes d’un diagnosticd’élimination maisqu’ilfaut savoirévoquerdevanttouttableaudedysfonctionaiguëdu tronc cérébral, notamment aprèsun syndrome infectieux avec négativité des différentes démarches étiologiques.
L’IRM cérébraleest incontournabledans lastratégie diag- nostique. L’améliorationclinique estparfois spectaculaire
souscorticothérapie,d’oùl’intérêtdenepasméconnaître cediagnostic.
Déclaration d’intérêts
Lesauteursdéclarentnepasavoirdeconflitsd’intérêtsen relationaveccetarticle.
Références
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1138 W.Nejhyetal.
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