TREIZE ANS DE RECHERCHES APICOLES A BURES-SUR-YVETTE. ESSAI DE SYNTHÈSE
R. CHAUVIN
Station de Rerhenhes sur l’Abeille et les 1>isecies Sociaux, Buyes-suy-Yvette (.S. & 0.).
Lorsque je pris
il y adéjà
13 ans( 194 8)
la direction de la Station de Recherchesapicoles
deBures-sur-Yvette,
la tâchequi
s’offrait à moi et àl’équipe
de chercheursqui m’accompagnait pouvait paraître
délicate. Tous les payseuropéens
ou presquedisposaient
de laboratoires voués à l’étude desAbeilles ;
certains étaient fort connus,comme l’Institut du
I,Ws!!!r,D, dirigé
alors par le Dr.M ORGÊNTHALER ;
et legénie expérimental
du Professeur Karl von FRISCH avait couvert degloire
son laboratoire de Munich et sa fameuse revue, véritable B ible del’Apidologie,
« Zeitschrift für ver-gleichende Physiologie
».Quant
aux chercheursfrançais,
bienqu’ils
aientpublié
uncertain nombre de travaux sur
l’Abeille,
intéressants maisdéjà anciens,
ils n’avaientjamais disposa
d’uneorganisation
co nvenable. D’autantplus
que nous sortions àpeine
de lapériode
de l’entre deux guerres, difficile pour les chercheursfrançais,
dans leur ensemble. D’autre
part,
ma formation propre était celle d’unspécialiste
du
comportement
des Insectes engénéral
et de lasociologie animale ;
maisje
m’étaissurtout
occupé
des Fourmis et maintenantencore e garde beaucoup
de tendresse auxfauves roux et minuscules
qui
se cachent dans leur nid de brindilles au fond des forêts.Vies recherches sur
l’Abeille,
faute de matériel etd’organisation appropriée,
avaientété peu nombreuses.
Que
faire donc?Quelle
directionadopter?
Tout le monde me disait : maintenant que vous voilàchargé
du laboratoire desAbeilles,
vous allez étudier leursdanses,
comme von P, RiscH? Et
je répondais :
sûrement pas, augrand
étonnement de laplu- part.
C’est que lastratégie
de la recherche estdélicate ;
les sentiers de la science sont nombreux etdivergents ;
certains conduisent à des territoires bien défrichésdepuis vingt
ans par des hommes degénie
comme vonF RISCH ,
entourés d’uneéquipe
pres-tigieuse ;
iln’y
a pas deprofit
à lessuivre ;
on nepeut plus
récolter que les miettesqu’ils
veulent bien vous laisser. Mieux vautprendre
certaines routes àpeine frayées ;
car
malgré
les innombrables travaux parus sur lesAbeilles,
il reste encore bien des domaines mal connus.J’essayai
donc de mettre enplace
unplan d’attaque,
etj’y
fus
beaucoup
aidé par lacompréhension
de l’Institut National de la RechercheAgro- nomique, qui
ne s’estjamais
démentiejusqu’à présent,
et queje
tiens à remercier.J’ai
eu la chance que mesprincipaux
collaborateurs du début soient encore ceuxd’à
présent ;
ilsacceptèrent
avec enthousiasme de former ce dont on entendparler
si souvent en France et
qu’on
voit si rarement, uneéquipe
visant le même but. Noussommes parvenus assez
loin, je crois ;
mais c’est parce que nos démarches ont été coordonnées.Les membres de
l’équipe
sont bien connus maintenant en France et àl’étranger.
LouvEAux était le seul
botaniste,
recrueprécieuse
pour un laboratoired’apiculture ; je
lepriai
donc de s’intéresser auxrapports
des Abeilles et desfleurs,
et surtout à la récolte dupollen ;
MIIe PAINprit
en main laphysiologie
dudéveloppement
ovarienchez
l’ouvrière, puis
chez la reine.Je gardai
pour moi lecomportement,
aidé de LE- COMTE, de VTTILLAUME et de l’abbé DARCHEN.Quant
àI,AVIE, je pensais
lediriger
du côté de la
pathologie
desAbeilles,
mais il lui arriva au cours de ses recherches unesingulière
aventure dontje parlerai
tout à l’heure.LES RECHERCHES D’ORDRE TECHNOLOGIQUE ET L’HISTOIRE DE LA STATION AU COURS DES PREMIÈRES ANNÉES
Nous nous installâmes donc tant bien que mal au début et
je
fisentreprendre
la formation d’un rucher. Disons tout de suite que c’est ce dernier
point qui
me donnale
plus
de mal.Je
n’avais pas fait deprévisions
assezlarges ;
d’autrepart,
des intoxi- cationsrépétées
par lesépandages
insecticides sur colza ruinèrent à trois ouquatre reprises
nosespoirs
dedéveloppement apicole.
Il fallut la création de la Stationexpé-
rimentale
d’Apiculture
deMontfavet,
annexe de Bures, pour mettre fin à nos diffi- cultés d’ordreapicole ;
M.T p ouvEL O T,
directeur central dudépartement
deZoologie Agricole
àl’INRA,
contribua de toutes ses forces à la réalisation de cette annexedont LouvEAUX traitera d’autre
part.
Le
problème
des insecticides fut une source de difficultés dans nosrapports
avec une
partie
de laprofession apicole, désespérée
par lescatastrophes qui
dévas-taient
chaque
année les ruchers. Nous sentions bienl’importance
duproblème
etje
fis exécuter diverses recherches sur la courbe de floraison du colza et la claustration des ruches. C’est alors que sous
l’impulsion
desproducteurs d’oléagineux
furent en-trepris
nos travaux sur letoxaphène
et sa toxicité vis-à-vis des Abeilles.Je me
souviensencore de cette
époque héroïque.
La situation se détériorait d’année enannée ;
il fallait réussir. Or nous étions en octobre et nous aurions bien voulu que leprintemps
suivant voie la fin des intoxications. Nous avons tout
improvisé ;
nousqui
ne savionsrien de la
physiologie végétale,
nous avonsessayé
de forcer le colza à fleurir au moisde
janvier
et nous y avonsréussi,
et les Abeilles réactivées ont butiné leurs nectairesdébordants ;
et letoxaphène
à des dosespourtant
énormes ne les a pas tuées. Si bien que nous avons pu àtemps
faire interdire les autres insecticides trèstoxiques
et que le cauchemarapicole
apris
fin la même année. Il a fallu pour cela énormément de travail et traverserbeaucoup d’angoisses ;
1°LTILL.xu>IE,déjà
docteur ès sciencespourtant,
se couvrait de boue en allant sélectionner lesplants
de colza dans leschamps.
Cet
effort,
bien oublié desapiculteurs,
aporté
sesfruits,
et c’est l’essentiel.Je
suivais en mêmetemps
une idéequi
m’était chèredepuis longtemps :
il m’a-vait semblé que
l’apiculture
seraittoujours
en fâcheuseposture
si ellen’exPloitait qu’un
seulprodzrit,
le miel. On connaît bien d’autres substancesprovenant
de la rucheet
qui pourraient présenter quelque intérêt,
non seulement levenin,
mais encore lagelée royale,
lepollen,
lapropolis,
etc. Nous n’avions alors que des donnéeséparses
sur leurcomposition chimique
et nous ne savions rien de leur actionphysio- logique possible
sur les animauxsupérieurs :
c’estprécisément
ce dernierpoint
queje
voulais étudier. Il fallaitpartir
de rien ou peu s’en faut.Je
fis d’abord constituer à Bures une animalerie dequelques
milliers desouris,
car nos crédits ne nous per- mettaient pas de travailler sur les rats. Mais comment rechercher l’action sur les Mammifères d’un corps dont onignore
à peuprès
tout ?Après quatre
ans deréflexions,
detâtonnements, d’expériences qui
ne menaient pas àgrand’chose,
il m’a sembléqu’on pouvait
tout au moins tenter lessondages
suivants.i)
l’action sur la croissance à différentes doses.2 )
l’action sur lepoids
des organesqui permet
des’orienter ;
par
exemple
ledegré
d’involution duthymus
est un indiceprécieux. 3 )
l’effet sur lenombre et le
pourcentage
des élémentsfigurés
du sang ; ainsi que l’action éventuellesur
quelques-unes
de ses constantesbiologiques
comme laglycémie. 4 )
l’action surle coefficient d’utilisation
digestive,
étude facilitée par le fait quej’avais
pu mettreau
point
undispositif permettant
d’administrer sansperte
à une souris une alimen- tationpulvérulente,
tout en récoltant àpart
les excréments et les urines.5 )
l’actionsur le
comportement
engénéral :
activitéspontanée,
tonusmusculaire, émotivité,
etc.Je
ne veux pas dire naturellementqu’une
tellefaçon
d’aborder lesujet l’épuise,
et il existe
vingt
autres manières deprocéder. Je
pense seulementqu’étant
donné lesmoyens dont nous
disposions,
nouspouvions
réaliser ainsi uneexploration
raisonnable de l’effet d’unproduit
inconnu. Ces recherches sont enplein développement.
Ellesont abouti d’une
part
à une démonstration de l’intérêt de lagelée royale (traitement
de la
sénescence, euphorisant général)
et dupollen (action
sur l’intestin et la formulesanguine).
Pour mesurer l’incidencepratique
de ces recherches ilpeut
être intéressant de noterqu’il
a été vendu en une seule annéeplus
de 800kg
degelée,
au moment oùson
prix dépassait
500 frs le gramme, etqu’en 1050 -6 0 vingt
tonnes depollen
desAbeilles ont trouvé preneur à un minimum de i ooo frs le
kg. Malheureusement,
ladiscipline
nécessaire dans la commercialisation d’unproduit
nouveau n’a pas étérespectée ;
certains abus même ont étécommis ;
si bien que le laboratoire se verraforcé de
prendre plus
deprécautions
que par lepassé,
au cas où d’autresproduits
révéleraient des
propriétés
intéressantes.LA POI,ITIOUE VIS-A-VIS DE L:1 PROFESSION ET LA VULGARISATION
Nous nous
préoccupions
en mêmetemps
de nous faire connaître dans la pro- fessionapicole
et de l’intéresser aux travaux de la Recherche. C’est une tâche très délicate :j’hésitais
etj’hésite
encore sur les meilleurs moyens del’accomplir.
Nousavons d’abord voulu toucher la
quasi-totalité
desapiculteurs,
amateurs etprofession-
nels à l’aide de conférences et d’articles
publiés
à peuprès
exclusivement dans leplus
ancien des
journaux apicoles
de France etprobablement
dumonde,
«l’Apiculteur
»,qui
nous offrit aimablementl’hospitalité.
Nous fîmes aussipendant plusieurs
annéesdes cours réservés à une élite et
qui
duraient huitjours.
Puisje
conclus que lesapi-
culteurs amateurs étaient
d’origines trop
diverses et que leur intérêt pourl’apicul-
ture avait des motifs
trop
variés pour que nouspuissions
les toucher utilement. Il était sans douteplus
sîir de rechercher le contact avec lesprofessionnels qui disposent
de 500 ruches ou
davantage
etqui
vivent entièrement del’apiculture. Je
dois direque nous n’avons pas
remporté
de succès bien net ni dans un cas ni dansl’autre ;
nous avons perçu rarement l’écho de nos cours et
conférences ; quant
à nosarticles, l’opinion
unanime les trouvaittoujours trop compliqués.
Nous avons tenté aussi différentes
enquêtes
pour nousrenseigner
nous-mêmeset
renseigner
laprofession
sur son propre état et sur sesobjectifs.
Cesenquêtes
onttoujours
été accueillies très favorablement et on nous apromis
de nombreusesrépon-
ses : elles n’ont
jamais
atteint 10 p. ioo du total desquestionnaires
distribués auxprofessionnels,
et nous n’avons donc pu en tirer aucune conclusion.Ajoutons
d’ailleursqu’il
n’existe et n’ajamais
existé aucunestatistique complète
sur l’ensemble de laprofession ;
il y aprobablement
de 20 à 30 ooo ruches pardépartement,
mais per-sonne ne
peut
l’affirmer.Il
existe, je crois, plus
d’une raison à un état de choses aussidécourageant.
Seule
parmi
toutes lesprofessions agricoles, l’apiculture
ne trouve nullepart
d’école de formationprofessionnelle ;
car lesquelque
heures de coursqui
se donnentçà
et là surles Abeilles ne
peuvent
en tenir lieu. Cela entraîneplusieurs conséquences ;
d’abordla
pauvreté
de la littératureapicole
engénéral,
distribuée dans detrop
nombreuxjournaux ;
alors que lespériodiques
devulgarisation agricole exposent
sous une formesimplifiée
les conclusions de travauxscientifiques sérieux,
et ne remettent pas en cause le rôle desengrais,
ou de la sélection ni l’utilité del’agronomie
engénéral, l’apicul-
ture
ignore
encore une scienceapidologique pourtant
trèsdéveloppée.
La deuxièmeconséquence
est l’absence duprogrès technique ; beaucoup
conviennentparmi
lesapiculteurs
que la seule et dernièregrande
découvertequi
a vraiment révolutionnél’apiculture
consiste dans la ruche à cadresmobiles ;
mais elle remonte à bienlong- temps déjà.
Les innovationstechniques
sont d’ailleurs souvent mal accueillies dans laprofession.
Dans lepassé
l’introduction du « mobilisme » a donné lieu de lapart
des « fixistes » à toutes sortes de controversesqui
se sontpoursuivies pendant
deslustres.
J’ai
vécu uneexpérience analogue, lorsque j’ai
voulu introduirel’usage géné-
ralisé des
pièges
àpollen.
Mais il ne sert à rien de se
plaindre
et mieux vaut chercher les moyens de remédier à un état de choses peu satisfaisant.Je
pense que notretechnique
a été mauvaise etnos
collègues
du Ministère del’Agriculture, spécialistes
de lavulgarisation,
ontjus-
tement attiré mon attention là-dessus. La distance est
trop grande
entre desprofes-
sionnels dont le niveau moyen est celui du certificat d’étude et les hommes de
science ;
les seconds ne savent pas
parler
auxpremiers.
Il faut un échelon intermédiaire devulgarisateurs professionnels qui
manquejusqu’à présent
etqui
seraitlui,
instruit directement par les hommes des laboratoires. En un mot, unsystème
à deuxdegrés,
élémentaire et
supérieur,
comblerait sans doute les très graves lacunes quej’ai signalées
et remettrait en marche dansl’apiculture
leprogrès technique
si nécessaire dans le monde moderne.Comme le montre l’étude de LOUVEAUXet I,AVIEnous avons voulu servir autre- ment le
progrès
enprêchant d’exemple.
Onprépare
en France le miel comme on le faisaitnaguère
pour lelait,
sanshygiène parfois,
sans lesprécautions techniques indispen-
sables
trop
souvent. Lesapiculteurs ignorent l’usage
du réfractomètre pour la mesure de la teneur en eau, nedisposent
pas dedispositifs
pour la fonte du miel vraimentadéquats,
etc... EnAmérique
aucontraire,
latechnologie
du miel estparfaitement
con-nue et
pratiquée.
Des créditsimportants
nous ont été attribués par l’INRA pour mon- ter dans notre annexe de Montfavet une installation trèscomplète
de traitement dumiel,
laplus
moderned’Europe.
Apeine commencée,
elle a suscité l’enthousiasmeun peu hâtif de certains
professionnels
et, àpeine terminée,
descritiques quelque
peu irréfléchies. Mais voiciqu’un
peupartout
se montent descoopératives (dont
cer-taines,
comme celle duGâtinais,
démarrent avec des moyenspuisssants)
etqui
veulent traiter le miel à
l’exemple
de Montfavet. Elle découvrent du même coup l’existence de la Station de Bures,beaucoup plus adaptée
à l’insertion dans unestructure industrielle comme la leur
qu’à
se débrouiller au milieu desparticularismes
et des
préjugés
artisanaux.Peut-être, après
tout, lestemps
sont-ilsaccomplis’?
’?I,’INRA nous a
permis
aussi de fonder sous sonégide
unjournal d’apidologie,
les « Annales de l’A beille »,
qui présente
la masse sans cesse croissante des travaux du laboratoire et aussiquelques
travauxétrangers.
Cette formule a tous lesavantages,
car
l’appui
d’un service officiel nouspermet
denégliger
lesproblèmes
commerciaux de la diffusion d’unpériodique.
Nouspensions
dès le débutgarder
aux « Annales »un niveau
scientifique élevé,
sansemployer trop systématiquement
unlangage
abs-trait. Nous
espérions pouvoir
sélectionner ainsi lesquelques
centainesd’apiculteurs français
ouétrangers qui disposent
de la culture nécessaire pour s’intéresser à la science de l’Abeille.Je
dois dire que le succès des Annales a été immédiat etconsidérable ;
il adépassé
nosprévisions
lesplus optimistes puisque
le nombre des abonnésdépasse
maintenant 450 et que
l’étranger s’y
intéresse deplus
enplus.
LE PERSONXEL ET L’ORGANISATION DE I,:1 STATION DE BURES EN
1961
Actuellement
(avril ig6i)
la Station de Bures dontj’assume
ladirection,
com-prend
un maître de recherches(L OUVEAUX )
deuxchargés
de recherches(I,r ~ co M TE
et Mlle
PAIN)
et deux chercheurs associésdepuis toujours
à nos travaux,V UII ,r, AUM I;,
maître de conférences à la Faculté des Sciences de
Nancy,
et l’abbéMnRCH!N, chargé
de recherches du Centre National de la Recherche
Scientifique.
Lepersonnel
scienti-fique
a été renforcé récemment par POUVREAUetBARBIER,
contractuels. Les hommes de science sont aidés par deux technicienssupérieurs
I)OUAULTetLouIs, cinq
techni-ciens,
M’lesL HOSTE ,
CHANCERELet S.CHAUVIN,
MM. PARIS et CHERTIER ainsiqu’un
« Biennenmeister », THEURKAUFF. A cette
équipe s’ajoutent
un ouvrierspécialisé chargé
del’atelier, C HARLES ,
deux secrétaires et deux femmes deménage.
On
pourrait représenter
ainsil’organisation
de la Station :CHAUVIN
LEcomTF
Comportentent
des abeilles) !.uII,I,AUM!
Tech.:Paris,
S. Chauvin!
es a el es’ BUILLAUME < ec .: ans,. aUVln
( DARCHEN
Bionlétrie, Botanique apicole, Miel .. I’ouvEAUx
Tech. :Iaouis,
LhosteB. &dquo;
B.. l M. l
1 BARBIER
&dquo;h . h
lOmetne,
otaUlque
aplco e, le..B ARBIER 1ec ..
l.oms,
L osteTechnologie
desproduits
de la rucheautres que le miel ... CHAUVIN Tech. :
Douault,
ChertierPhysiologie générale,
Hormones .... Miie PAIN Tech. : ChancerelIl’’ .
B
LECOMTE T h .Th f
Pollinisation
... ( B P OUV REAU
Tech. :Paris,
Theurkauff f UVR AUAjoutons
que d’assez nombreuxstagiaires
viennent tous les ans s’initier à labiologie
desAbeilles ;
certains reviennentrégulièrement
etentreprennent
un travail delongue
haleine : ainsiN AULLEAU ,
licencié èssciences, qui
étudie lestranspositions
de larves et leurs
conséquences ;
MoNTAGNER et ROBERT(sous
la direction de VUIL-i.AUME)
s’attachent audéveloppement
des cellulesroyales
et à laponte
de la reine.M
le SALLERON
rédige
une thèse du troisièmecycle
sur leséchanges
entre Abeillesétudiés au moyen des
radioisotopes ;
Mle PETIT et RWRApréparent
le mêmediplôme,
lapremière
sur la croissance in vitro des larvesd’Abeilles,
la seconde sur le vieillissement descires,
étudié dupoint
de vuechimique
ethistologique.
D’autrepart
nous avons reçu un certain nombre destagiaires étrangers parmi lesquels
LE
NSKY
(Israël)
s’est intéressé à la résistance desAbeilles à la chaleur etJo y ArPA (Inde)
à la biométrie. Si bien que lepersonnel
enpleine
activitépeut dépasser
25per-sonnes. Si l’on
ajoute
à cela lespersonnes
de notre annexe deMontfavet,
on obtient 28
permanents, disposants
de trois voitures automobiles et de 80ooo NF de crédits de fonctionnement. Ils’agit
donc d’un très gros effort consenti par l’I N R A.en faveur de
l’apiculture.
Onpeut
noter que par ordred’importance
des moyens, lecomplexe
Bures-Montfavet doit être le deuxième dumonde, dépassé
seulementpar le
grand
laboratoire russe deRybnoe (province
deRyazan) dirigé
par Gr,usr3-KOV
. D’autres pays, comme
l’Allemagne
etl’Atrtérique, disposent
deplus
de cher-cheurs
apicoles
que nous mais ils sont trèsdispersés
etparfois
isolés.Les moye2s de travail.
Bures
dispose
d’un rucher d’environ 8o ruchesuniquement
destinées auxexpé-
riences et non à la
production
de miel(ce qui
est réservé àMontfavet) ;
d’une biblio-thèque qui comprend
trois sections :apiculture (avec
3 à 400o tirés àpart, photo- copies
et livres surl’Abeille) ; éthologie générale (un
laboratoired’éthologie expéri-
mentale de
l’f,’ cole
des HautesÉtudes,
est rattaché à laStation) entomologie générale
et
physiologie
de l’Insecte. Uncolloque
hebdomadaire réunitpendant
la mauvaise saison tous les chercheurs et techniciens dulaboratoire ;
chacun y expose ses recher- chesqui
sont libéralement etparfois vigoureusement critiquées
par les autres. Pen- dant la belle saison lesscientifiques
et techniciens doiventbloquer
en trois mois unegrande quantité d’expériences
et nedisposent plus
d’assez detemps
pour ces col-loques.
Lebudget
annuel y est discuté ainsi que sarépartition.
Je
tiensbeaucoup
à ce que les chercheurs ne s’enferment pas exclusivement dans la scienceapidologique
et soient familiers avec d’autresproblèmes :
c’estpourquoi
mes collaborateurs ont chacun
plusieurs sujets
d’étude.Je m’occupe
moi-même enplus
desAbeilles,
ducomportement
desfourmis ;
1,ECOMTE ducomportement
desaraignées
et des animauxsupérieurs ;
VmnAUME desguêpes ;
DaRCH!Ex del’appren- tissage
des Insectes dans lelabyrinthe,
etc.LES RESULTATS
SCIENTIFIQUES
Ils
comprennent
comme on le verra dans labibliographie, r6 3 travaux,
trois thèses(LO UV EA UX
,
DARCHEN,LA VIE) déj
à soutenues et trois autres(PA IN ,LECOMTE, BARBIER)
qui
vont l’être incessamment. Un traité debiologie
de l’Abeille est enpréparation,
ainsi
qu’un
Manueld’Apiculture.
Lasynthèse
de tous ces travaux se divise facile- ment enplusieurs chapitres.
LE COMPORTEMENT ET LA BIOLOGIE DE LA RUCHE.
Dès mon arrivée à la
Station, après
avoirrepris
certainsphénomènes
dus à« l’effet de groupe n
qui
commandent la survie des Abeilles à l’étatisolé,
et quej’avais déjà
étudiés avecGRASSE, je
me suis intéressé aux moyens d’observation directe de la ruche. En effet l’ouverture d’une ruche à cadres mobiles pour observer cequi s’y
passe est une
opération heaucoup plus
gravequ’on
ne le croitgénéralement ;
dans lamauvaise
saison,
comme BJD!,r, l’amontré,
il suffit d’enlever seulement le couvrecadre et
d’expédier
une seule bouffée de fumée pour que laperturbation thermique qui
s’ensuit metteplus
de 24heures à se calmer.J’aurais
vouludisposer
les colonies de telle sorte que l’onpuisse apprécier chaque jour
laponte
de lareine,
l’activitégénérale,
laqualité
de larégulation thermique,
la récolte dupollen
et du nectar, etc.C’est évidemment la mesure de la
ponte
de la reinequi présente
lesplus grandes
difficultés.
J’ai
eu la chance de les vaincre presque au début en collant sur uneplaque
de verre de la cire
gaufrée
sur une face seulement. Il est alors extrêmementcurieux, en regardant
partransparence
du côté de laplaque
de verrevierge
decire,
de voirla reine en train de
pondre :
les ccufsqui
sedéposent
au fond des cellules sont trèsvisibles,
car les abeilles en étirant la cire laissent presque à nu le verre au fond dechaque
cellule. Onpeut
ainsi maintenir aussilongtemps
que l’on veut des coloniesen observation. On
s’aperçoit
alors de l’extrême sensibilité de laponte
aux incidences de la miellée et aussi des énormes différences deponte
entre deux reines voisines et de même race élevées cote à côte. Mais cette méthodeprésente
des difficultés dont laprincipale
estqu’il
reste difficile d’obtenir des colonies d’une taillenormale ;
lecollage
desplaques
de cire sur desplaques
de verre degrande
di1neçisioYi est en effet si diiricile queje
n’ai pu le réaliser de manière satisfaisante. Aussiai-je préféré depuis
peu un moyen terme
qui
sembleparfaitement
rénssir :je
réalise un trèsgrand
cadrede i m X i m à une seule face utilisable
(l’autre
étant sirapprochée
de la vitre arrièrequ’elle permet
toutjuste
le passage d’uneAbeille).
Il ne faut surtout pas que la cire touche le verre sinon les Abeilles l’enlèvent. Alors les ouvrières et la reine secantonnent sur une seule des deux
faces,
laplus éloignée
de laparoi.
On obtient undéveloppement régulier
de lacolonie,
avec d’énormesplaques
de couvain(l’une
dé-passait
le demi-mètrecarré !)
al 1a condition toutefois que la ruche soit maintenue dans une armoire vitrée et thermostatée à 3-).°. Ces ruches unifacesprésentent
eneffet,
comme onpeut
s’endouter,
une énormedéperdition thermique
et si on ne leurfournit pas des calories
supplémentaires,
la colonie ne tarde pas àpéricliter.
Aumoment de
l’hivernage,
on abaisse doucement latempérature
aux environs de 20°.Je
me suis aperçu que lapossibilité
de gouverner de l’extérieur l’étatthermique
dela ruche
permet
toute une séried’expériences
très intéressantes.Quant
àl’actÍ 1 ..ité,
labibliographie
montre lesgrandes
difficultés queprésente
sa mesure. On a
essayé
toutes sortes dedispositifs, généralement
à contacts élec-triques, qui
s’encrassent ou s’abîment trèsrapidement. J’ai
monté moi-même uncompteur
à eau où les Abeillespoussaient
pour sortir depetits
leviersqui
libéraientà
chaque
fois unegoutte
d’eau. Mais ellespoussent
les leviersplus
ou moins vivementsuivant la
température,
si bien que laquantité
d’eau écoulée à un moment ne corres-pond
pas à la mêmequantité
d’Abeillesqu’à
une autrepériode plu3
froide ouplus
chaude. Les cellules
photoélectriques
sont d’un usageplus pratique malgré
leprix
des
dispositifs d’enregistrement.
Tout récemmentenfin, j’ai
pu réussirl’enregistre-
ment d’une courbe d’activité par un
dispositif purement mécanique ;
laquantité
de
pollen
récoltée estenregistrée
au-dessous ainsi que latranspiration
de laruche,
c’est-à-dire la
quantité
d’eaurejetée lorsqu’il
y a miellée(on
la condense à l’aided’un
serpentin).
Il esttrop
tôt pourinterpréter
toutes cesdonnées,
mais il est biencertain que nous ne progresserons réellement dans la
biologie
de la ruche quelorsque
nous pourrons voir et mesurer tout ce
qui s’y
passe.LA CONSTRUCTION
Il m’a semblé
depuis toujours
que lesprocédés
de construction chez les animaux et enparticulier
chez les Insectes sociaux étaient l’indice de processuspsychiques supérieurs auxquels appartient
nécessairement l’activité fabricatrice. Aussiai-je
orienté de ce côté les recherches de DARCHEN
(cellules d’ouvrières)
et de VuilI,AU--,BIE(cellules
dereines).
Les résultats nous ont montrérapidement
que nousexplorions
un
champ
de recherchesparticulièrement
fécond.La construction des rayons.
D
ARCHEN a écrit là-dessus de nombreuses uotes et une thèse
qui
nous offrentde la construction une
image
assez différente de cellequ’on imaginait.
Audébut,
il semble bien que la forme de l’essaimrègle
ladisposition
des ébauches de cire surle
substrat,
sans doute par l’interaction de forcesmécaniques
assezsimples
où lapesanteur joue
leprincipal
rôle. Ces ébauches sont ultérieurement remaniées et l’une finit pardépasser
notablement les autres pour constituer lepremier
rayon ; c’est à cemoment que les théories de GRASSE sur la
stigmergie s’appliquent
sans doute. Pro-gressivement
d’autres rayons seront construitsparfois
dans despositions défectueuses,
ne
respectant
pas leparallélisme (à quoi
les Abeilles tendenttoujours quand
desobstacles insurmontables ne
s’y opposent pas).
C’est à l’aide de 1’etouches continuelles-
phénomène
fondamental surlequel
DARCHEx a mis trèsjustement
l’accent— que l’oeuvre est finalementréalisée ;
elle n’atteint nullementd’emblée,
commebeaucoup
auraient pu le
croire,
sonaspect
définitif. Ces retouchespeuvent comprendre
desdestructions
plus
ou moins massives. On croiraitpositivement
assisterparfois
à larecherche d’une
solution,
par une «intelligence » qui
tâtonne et cherche às’exprimer
en « termes de cire ». Le rayon en construction
présente
des zones d’accroissement nettement définies(la partie
inférieure del’arête)
et montre desphénomènes
derégénération après
ablation d’unepartie
de sa surface. Lesrégénérations
ou l’accrois-sement
peuvent
être arrêtés parl’interposition
dans l’arête du rayon d’obstacles telsqu’une
mince feuillemétallique.
Si elle est suffisammentlarge,
elle arrêtel’accroissement du rayon, à moins
qu’on n’y pratique
des trous d’un diamètre et à un écartementconvenables ;
alors la constructionreprend
etenglobe
peu à peu le métal dans la cire. On voit alors des Abeilles se tenir par unepatte
à travers les trous ; d’autres sont à cheval surl’arête, qui paraissent
tout à fait inactives et secontentent de maintenir leurs
pattes
accrochées à celles des Abeilles de l’une et l’autre facequ’elles
relient entre elles. Et là où progresse la construction on trouvera tou-jours,
de la mêmefaçon,
des massesprofondes
d’ouvrièresqui se
tiennentpar les pattes.
Comme le
souligne
DARCHEN, onn’échappe
pas à la conclusionqu’une
information doit passer, trèsprobablement
par lespattes ;
elle consistepeut-être
en de subtiles différences de tension musculaire perçues par les nombreux organes chordotonaux quepossèdent
cesappendices.
Si l’on songe aux innombrables modalités de la cons-truction,
ils’agirait
alors d’un véritable «langage
par modulations tactiles » compa- rablepeut-être
aux danses desAbeilles ;
ces deux modesd’expression
ne sont sans doutepas les
seuls,
comme certainesexpériences
et observations réalisées à Bures semblent le montrer. Il en existeprobablement
un troisième dans les battements antennaires entreouvrières ;
et unquatrième
sans doute dans les subtils marquages olfactifsau moyen des
épagines
et desrépuls 2 : nes
substancesdéposées
sur les corps que touchent les Abeilles etqui
informent tout leurcomportement (voir plus loin).
Parmi lesplus importantes expériences
deD ARCHEN ,
il convient de citer :1
° celles des
obstacles-interposés
sur les tranches des rayons dont il vient d’êtrequestion ;
2
° celles sur le
parallélisme
des rayons et sarégulation, qui
sontparticulièrement élégants
une lame de cire inséréeperpendiculairement
entre deux rayons est tordue trèsrapidement
par lesAbeilles ;
une autre inséréetrop près
d’uneplaque
de cartonqui
recouvre le rayons’y
trouverapidement collée,
sauf si ce carton estpercé
d’uneétroite fenêtre
qui permet
aux ouvrières depercevoir
la surface des cellules du rayon ; la lamelle de cire sera alors nonplus collée,
mais étirée enrespectant
leparallélisme.
Un des facteurs du
parallélisme
est donc la cire non pas à l’étatbrut,
mais étirée encellules ;
3
°
celles sur l’influence de la reinequi
favorise ouplutôt
détermine la construc- tionprobablement
par l’intermédiaire d’une hormoneanalogue
à laphérormone ;
4
° plus
récemment la démonstration de l’influencerégulatrice
du fond des cel-lules,
obtenue entransposant
des cloisons de cellules de mâles sur des fonds de cel- lules d’ouvrières et vice-versa.Est-il
possible
deprésenter
de tout cela uneinterprétation générale?
Pas encoresans doute bien que nous
puissions
discerner certaines «lignes
de force »qui
pour- raient bien nous y conduire. Il est certain parexemple
que le rôle de la grappe des Abeilles cirières est essentiel etqu’il
faudraitpouvoir
l’observer directement au lieu deprocéder,
comme l’a fait DARCHENjusqu’à présent,
parinférence, après
1’oeuvreterminée. Ce n’est
qu’en
ces toutes dernières années que nous pensons avoir trouvéun moyen
d’y parvenir.
La construction en effets’accompagne
d’une élévation ther-mique considérable ;
or la masse des Abeillesqui
nous dissimule leur travail a enpartie
pour tâche d’entretenir cettetempérature élevée ;
sil’expérimentateur
ypourvoit
delui-même,
cequi
est facile dans un nucléus vitré à un seul rayon, alors la grappe estbeaucoup
moins dense et il semblequ’on puisse
suivreplus
aisément le travail des Abeilles.Quant
à la difficultéqui gêne
tellement tous les chercheurs dans l’étude des insectessociaux,
à savoir où réside la notion deplan
durcid,
il semble que les travaux de DARCHEN laissent entrevoir un moyen del’attaquer :
si en effet lespremières
ébauches de la constructionpeuvent
raisonnablements’expliquer
par lanotion de
stigmergie
suivantGRASSE,
par la suite l’idée d’interconnexion fourniraitpeut-être
une based’explication plus appropriée
aux étonnantes retouches etrégu-
lations
qui
sont monnaie courante dans la ruche. Il semble en effetimpossible
etabsurde que le cerveau d’une Abeille isolée