Classification des groupes de pavage du plan
2012-2013
Référence : Rémi Goblot,Thèmes de géométrie, Masson, 1998, p.311.
On se place dansP un plan affine euclidien et on considèreP~ son plan vectoriel euclidien associé.
Un réseau est un sous-groupe additifR ⊆P~ ayant les propriétés : – RengendreP~ comme espace vectoriel
– Toute partie bornée deRest finie.
Proposition.
Les réseaux sont les sous-groupes additifs deP~ de la formeZ~u⊕Z~v,~uet~v non colinéaires.
SoitRun réseau,~ude norme minimum parmi les vecteurs non nuls deR,~v de norme minimum parmi les vecteurs non colinéaires à~u. AlorsR=Z~u⊕Z~v.
On noteT(P) le groupe des translations deP.
Un sous-groupe Gde Isom(P) est un groupe de pavage si T :=G∩T(P) est formé destw~ oùw~ décrit un réseauRdeP.~
Théorème.
SoitG un groupe de pavage inclus dans Isom+(P) (i.e. G est composé de dé- placements).
SoitT le sous-groupe des translations deGetRle réseau associé.
On noteGle groupe des rotations vectorielles deG.
Alors :
– Gest cyclique d’ordren∈ {1,2,3,4,6}.
– G=T oG
Il y a donc 5 groupes de pavage composés de déplacements à isomorphisme près.
Le produit semi-direct est le même que celui de Isom(P).
Démonstration. Soit f ∈ G. Pour tout w~ ∈ R, f tw~f−1 = tf(~~w) ∈ G, donc f~(~w)∈ R, doncRest stable parf~.
Soit (~u, ~v) une base deR. Alors
Mat(~u,~v)(f~) :=
a b
c d
1
est à coefficients entiers.
Orf ∈Isom+(P) doncf est une rotation d’angle θet on a : Tr(f) =a+d= 2 cosθ∈ {−2,−1,0,1,2}, d’où :
θ∈
π,2π 3 ,−2π
3 ,π 2,−π
2,π 3,−π
3,0
Le groupeGest donc un groupe de rotations vectorielles fini, donc cyclique (car isomorphe à un sous-groupe deC∗) d’ordre appartenant à{1,2,3,4,6}.
Décrivons maintenantGen fonction de l’ordrendeG. Pour cela, on définit : E:=
M ∈P / rM := rot
M,2π n
∈G
et on va étudier l’action naturelle deT surE.
On pose aussiG=< r >oùrest la rotation vectorieller:= rot
2π
n
. Sin= 1, alorsG=T. On suppose dorénavantn >1.
Montrons queE est un réseau affine dont le réseau vectoriel associéE~est image deRpar l’application linéaire (id~ −r)−1.
Soit Ω∈ E. Alors
M ∈ E ⇐⇒ rM ∈G ⇐⇒ tw~ :=rMrΩ−1∈T Cherchons le lien entre−−→
ΩM et w.~ On a
tw~rΩ=rM =t−−→
ΩMrΩt−−→
MΩ
L’expression de gauche donnerM(Ω) = Ω +w.~ SoitN =t−−→
MΩ(Ω) le symétrique deM par rapport à Ω, i.e.
rM(Ω) =rΩ(N) +−−→
ΩM Alors
rΩ(N) +−−→
ΩM = Ω +w~ =rΩ(Ω) +w~ D’où
~
w=r(−−→
ΩN) +−−→
ΩM = (id~ −r)(−−→
ΩM) On en déduit
M ∈ E ⇐⇒ −−→
ΩM = (id~ −r)−1(w)~ pour un certainw~ ∈ R.
– Supposonsn= 2, alors r=−id.~
E~ est donc l’image deRpar l’homothétie vectorielle de rapport 12.
Il y a ici 4 orbites pour l’action deT : si (~u, ~v) est une base deR, les 4 orbites sont Ω +R, Ω +12~u+R, Ω +12~v+Ret Ω +12~u+12~v+R, où Ω∈ R.
2
– Supposonsn∈ {3,4,6}.
Soit ~u un vecteur de R de norme minimum et ~v = r(~u). Alors ~v ∈ R et k~vk=k~ukdonc~vest aussi de norme minimum non colinéaire à~u, donc (~u, ~v) est une base deRpar la proposition.
On poseζ:= exp
2iπ
n
, on aζ∈ {i, j,−j2}.
Prenons la bijection définie par : C−→P
a+bζ7−→Ω +a~u+b~v oùa, b∈R.
Alors le réseau affine Ω+Rest formé des points dont l’affixe est dans l’anneau Z[ζ].
Le réseau E est formé des points dont l’affixe est z
1−ζ où z ∈ Z[ζ] car (id~ −r)−1 est identifié àz7→ z
1−ζ ici.
On veut maintenant compter le nombre d’orbites pour l’action deT. Sin= 6,
1
1−ζ = 1
1 +j2 = 1
−j =−j2∈Z[−j2] doncE~=Ret il n’y a qu’une orbite.
Sin= 4,
1
1−ζ = 1
1−i =1 +i 2 ∈/Z[i]
donc il y a 2 orbites (2.1+i2 ∈Z[i]).
Sin= 3,
1
1−ζ = 1
1−j = 1−j2 3 ∈/Z[j]
donc il y a 3 orbites.
Détails supplémentaires
– La deuxième partie de la preuve peut sembler un peu obscure et on comprend mieux ce qu’on fait si on a la représentation graphique en tête. Cette repré- sentation consiste à considérer pour chaque valeur den un pavage du plan qui est préservé parG. Le dénombrement des orbites de l’action deT sur les centres de rotations deGrevient alors à compter le nombre de ces centres de rotations dans chaque parallélogramme porté par les vecteurs de base du ré- seau associé au pavage (ce parallélogramme est appelé domaine fondamental du réseau).
– Démonstration de la proposition.
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– Soit (~u, ~v) une base deP~ etR:=Z~u⊕Z~v.
AlorsRengendre bienP~.
Les normes étant équivalentes, on choisit la norme infinie : kx~u+y~vk= max(|x|,|y|)
Alors toute partie bornée pour cette norme est finie, doncRest un réseau.
– SoitRun réseau etr >0 tel que{w~ ∈ R \ {~0} /kwk ≤~ r} 6=∅.
Cet ensemble étant fini, il existe~udans cet ensemble de norme minimum.
De même, il existe~v ∈ Rde norme minimum parmi les vecteurs non coli- néaires à~u.
Montrons queR=Z~u⊕Z~v.
Soitw~ ∈ R,w~ =x~u+y~vavec (x, y)∈R2. Soit (p, q)∈Z2 tel que
|x−p| ≤ 1
2,|y−q| ≤ 1 2 Posons
λ:=x−p, µ:=y−q, ~W :=λ~u+µ~v∈ R On a
kW~ k ≤ |λ|k~uk+|µ|k~vk
avec égalité si et seulement siλ~uetµ~vsont colinéaires, donc si et seulement siλ= 0 ouµ= 0.
Donc pourλ, µnon nuls, on a
kW~ k<|λ|k~uk+|µ|k~vk ≤ 1
2(k~uk+k~vk)≤ k~vk
Sous ces conditions,W~ doit donc être colinéaire à~u, ce qui contreditµ6= 0.
Doncµ= 0 etkW~ k ≤ 12k~uk<k~uk, d’oùλ= 0, ce qui conclut la preuve.
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