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Une pédagogie de la lecture 10

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Texte intégral

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(Ç) E d i t i o n s M a g n a r d , 1998.

C o n c e p t i o n c o u v e r t u r e : K U B E

Aux termes du Code de la propriété intellectuelle, toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, micro- filmage, scannérisation, numérisation...) sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

L'autorisation d'effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre d'exploitation du droit de Copie (CFC) - 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

Tél. : 01 44 07 47 70. Fax : 01 46 34 67 19.

Achevé d'imprimer sur les presses de l'imprimerie Campin

Tournai - Belgique N° d'éditeur: 98/210 Dépôt légal : juin 1998

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L i r e e t c o n t r e - l i r e

« Et pourtant, dans chaque cas, c 'est le lecteur qui lit le sens ; c "est le lecteur qui accorde ou reconnaît à un objet, à un lien ou à un événement une certaine lisibilité ; il revient au lecteur d'attribuer une signification à un système de signes et puis de le déchiffrer. Tous, nous nous lisons nous-mêmes et lisons le monde qui nous entoure afin d'apercevoir ce que nous sommes et où nous nous trouvons. Nous lisons pour comprendre ou pour

commencer à comprendre. Nous ne pouvons que lire. Lire, presque autant que respirer, est notre fonction essentielle.

Je n'ai appris à écrire que beaucoup plus tard, à sept ans.

Je pourrais peut-être vivre sans écrire. Je ne crois pas que je pourrais vivre sans lire. La lecture, ai-je découvert, vient avant l'écriture. Une société peut exister

- beaucoup existent - sans l'écriture, mais aucune société ne peut exister sans lecture. »

Une histoire de la lecture, Alberto Manguel, essai traduit de l'anglais par Christine Leboeuf, Éditions Actes Sud.

« Sans doute, il y a des lectures qui ne sont que de simples consommations : celles précisément tout au long desquelles la signifiance est censurée ; la pleine lecture, au contraire, est celle où le lecteur n'est rien de moins que celui qui veut écrire, s'adonner à une pratique érotique du langage. »

Roland Barthes,

i article Le texte,

Encyclopœdia Universalis.

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S o m m a i r e .

Préface 7

De la lecture au lecteur 9 à 15

On va d'abord à l'école pour apprendre à lire 9

Une pédagogie de la lecture 10

Une pédagogie du lecteur 10

Continuité ou rupture ? 11

Du texte 14

Pour réfléchir... sur « le texte entier » 17 à 57 Texte et écrit, le mythe de l'origine 19 à 25

Le texte, objet ambigu 20

La restitution : unité et unicité de la forme 21 L'interprétation : unité et unicité du sens 22

Le texte, objet sacré 24

La lecture-consommation 26 à 43

Schéma de la lecture classique 26

Le message 27

L'auteur 31

Le lecteur 32

La lecture-consommation 38

La pédagogie de la lecture classique 44 à 57

La pédagogie classique de la lecture 44

Apprendre à lire 46

L'apprentissage 47

La méthode 49

La guerre des méthodes 50

Le cadre général de la pédagogie de la lecture 51

Le matériel pédagogique 53

Pour comprendre... le texte en morceaux . . . 59 à 129

Le texte pluriel 61 à 84

Texte ou écrit ? 61

Le signe linguistique : 63

L'écrit- signifiant 63

L'écrit et les écrits 65

L'écrit-objet 65

L'écrit, objet de production 67

L'écrit, objet de reproduction . . . 69

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Texte et signifié 75

Le texte comme pratique 78

Le texte comme productivité 79

Significations et signifiance 79

L'intertexte 79

Le texte pluriel 80

La lecture plurielle 85 à 100

Le schéma ou les schémas 85

Le texte cherché 90

La recherche 90

La rencontre 92

Le travail du texte 94

L auteur et le lecteur 97

La lecture : communication ou rencontre ? 98

La pédagogie du lecteur 101 à 129

Le lecteur et la pédagogie 101

Les obstacles 106

La pédagogie de la recherche 107

La pédagogie de la rencontre 109

Le texte au travail 112

Le cadre de la pédagogie du lecteur 125

Le matériel pédagogique : des outils pour lire 127 Pour agir... la collection « Puzzles » 131 à 214 Découverte et utilisation d'un manuel scolaire 133 à 140

Découverte du manuel 133

Utilisation du manuel 134

A la découverte du manuel scolaire :

quelques pistes de travail 137

Les textes à lire 141 à 170

Les récits 141

Les aspects du récit 141

Les genres de récit 149

Regards sur 171 à 184

Le manuel 171

L'oeuvre 172

Le texte 174

Le texte en morceaux 184 à 211

L'oeuvre complète 184

Découpages 187

L'extrait 190

Les références 190

Situer un extrait dans l'œuvre 201

La chronologie 205

Construire un extrait 207

Après la lecture . . . 212 à 214

La réflexion méthodologique 212

Le bilan . . . 212 La fiche de lecture 212

Pour conclure . . . 215

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P r é f a c e

Ce guide Magnard traite d'un sujet que le philosophe Alain disait « admirable », la lecture, et qui constitue une préoccupation majeure, de l'école maternelle au collège, pour ne se limiter qu'aux établissements régis par l'obligation scolaire. Les problèmes de lec- ture se posent à tous les niveaux d'accès à la culture.

Texte en morceaux a pour objectif :

* d'apporter des informations qui ne peuvent être que modestes dans un domaine qui ne cesse de susciter des productions écrites ;

• de dégager quelques lignes de réflexions, qui ne peuvent être Que personnelles puisque lire, c'est d'abord se chercher, mais qui constituent surtout une invitation au dialogue ;

• de donner des exemples permettant surtout d'enrichir la pra- tique quotidienne de la classe et d'en imaginer peut-être de nou- velles.

Les exemples illustrant les différents points théoriques abordés sont empruntés à la collection de manuels et de cahiers d'exercices

« Puzzles ». Cette collection constitue un matériel destiné aux élèves de la troisième année de cycle 2 et aux élèves du cycle 3.

Néanmoins, cet ouvrage s'adresse à différents publics, à tous ceux qui s'intéressent, pour quelque raison que ce soit, aux pro- blèmes de lecture, ainsi qu'aux différents partenaires de l'école, enseignants et parents.

- Les enseignants, pour qui le renouvellement des pratiques apparaît comme une nécessité permanente. L'action pédagogique est d abord une recherche. Elle ne peut exister sans une remise en ques- tion et une interrogation de tous les jours. Toutefois, cette interro- gation ne saurait être simplement disciplinaire. La réflexion conduite en lecture, comme dans tout autre domaine, est, de nos

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jours, inséparable de la réflexion plus générale menée sur l'école elle-même, sur ses objectifs, sur les moyens mis en œuvre. Toute réflexion doit être méthodologique.

- Les parents, qui participent à l'effort d'acquisition et d'édu- cation accompli par leurs enfants et qui peuvent observer ceux-ci dans les situations quotidiennes de la vie. Il n'y a pas de rupture entre le milieu scolaire et le milieu familial, dans la mesure où c'est du même enfant qu'il s'agit.

Ce livre a été écrit dans une perspective historique. C'est en ayant conscience des conceptions qui ont sous-tendu les pratiques du passé que l'on peut comprendre les choix contemporains qui sont à faire et dégager des pratiques renouvelées.

Même quand ils apparaissent en rupture, les faits se succèdent dans une continuité qui est celle du temps. Il n'y a pas une école nouvelle opposée à une école ancienne, mais une école vivante qui doit, comme toute vie, affronter des contradictions et trouver des solutions.

Ce guide Magnard est constitué de trois parties : - pour réfléchir... sur « le texte en entier », - pour comprendre... le texte en morceaux, - pour agir... Puzzles.

Ces trois parties se suivent, mais on trouve des renvois d'une partie à une autre, dans l'esprit qui devrait animer toute lecture.

Aucune lecture n'est linéaire, toute lecture est faite de mises en rap- port, de rapprochements, de comparaisons d'éléments. On lit tou- jours un texte en pensant à un autre.

Il n'est peut-être pas nécessaire de les lire dans l'ordre donné, même si l'éclairage n'apparaît qu'après la lecture complète. Un lec- teur plus intéressé par des considérations pratiques peut n'aborder les justifications théoriques que dans un deuxième temps. Ce serait aller à l'encontre des choix pédagogiques que de maintenir la réflexion personnelle dans un cadre rigide qui serait un acte de sou- mission et non pas une expression de liberté.

Enfin, ce guide Magnard et les manuels de la collection

« Puzzles » sont des ouvrages de praticiens, c'est-à-dire de per- sonnes qui agissent au quotidien dans l'école, qui sont attentifs aux études scientifiques, qui ont un lien dans le domaine de l'éducation mais qui les considèrent comme des moyens d'action et non comme des fins en elles-mêmes.

Cette approche accepte de courir les risques de la subjectivité, c'est-à-dire des critiques qui seront accueillies avec intérêt.

Le métier d'enseigner implique surtout une volonté de réussir et d'atteindre les objectifs qui ont été fixés à l'école.

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D e la lecture au lecteur

O n v a d ' a b o r d à l ' é c o l e p o u r « a p p r e n d r e à l i r e »

C'est un fait à la fois affirmé et ressenti profondément. La lec- ture a toujours occupé une place à part dans la liste des activités sco- laires. Elle est auréolée d'un prestige qui la distingue des autres dis- ciplines. Elle a, de tout temps, fait l'objet d'une demande prioritaire émanant aussi bien de l'Institution elle-même que des partenaires de l'école.

La lecture constitua, dès l'origine, le premier des trois objectifs ixes par le législateur : lire précédait écrire et compter.

Elle est encore première aujourd'hui dans les esprits des ensei- gnants. Chez les parents, la demande s'exprime très vite et souvent de façon angoissée, dès l'école maternelle. Cette dernière doit alors rappeler que l'acquisition de la lecture ne se pose pas, tout au moins en termes d'apprentissage, à ce niveau.

Cette permanence d'intérêt pour ce qui apparaît à chacun, fort Justement, comme un outil culturel et pédagogique fondamental masque souvent l'évolution qui se produit en même temps dans ce domaine et qui concerne à la fois la conception que l'on a de la lec- ture et de son rôle dans l'acquisition des connaissances.

Or, un déplacement s'est opéré et continue de s'opérer lente- ment dans la réflexion théorique et dans les pratiques, déplacement ont on est loin d'avoir tiré toutes les conséquences et exploité toutes les virtualités.

On passe insensiblement d'une pédagogie de la lecture à une pédagogie du lecteur.

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U n e p é d a g o g i e d e l a l e c t u r e

Elle est caractérisée :

- Par la priorité accordée à l'apprentissage.

Cet intérêt pour un aspect important de l'action pédagogique ne serait pas remarquable s'il n'était quasiment exclusif: il s'agit d'apprendre, tout le reste en dépend et n'est, en quelque sorte, que secondaire.

- Par la forme de cet apprentissage.

Celui-ci ne peut être que méthodique, au sens cartésien du terme : il s'agit de construire et de mettre en œuvre un moyen rationnel qui en assurera la réussite, et cela à partir du texte et du texte seul.

Elle est étroitement liée à une « pédagogie de la leçon », modèle dans lequel on retrouve ce même souci de méthode, mais étendu à la totalité des activités. L'enseignement y est disciplinaire et, dans chaque discipline, on doit pouvoir établir le même type de chemi- nement. Dans ce cadre de rationalité généralisée, la lecture est l'ou- til de base qui assure le fonctionnement du système.

Cet « impérialisme » de la méthode est justifié par des principes concernant le savoir et son acquisition, et par une certaine concep- tion de l'enfant. Ces principes et cette conception privilégient tous deux l'aspect social :

- le savoir est un « objet social », transmis dans une relation frontale de l'enseignant à l'élève et dans une situation de com- munication collective.

- l'enfant, être social, est candidat à l'état d'adulte. Il n'y par- viendra toutefois que s'il est « formé » progressivement par le contexte social. L'homme est d'abord un produit de l'homme.

U n e p é d a g o g i e d u l e c t e u r

Elle détourne son éclairage du texte pour le projeter sur l'enfant qui lit, le lecteur. La notion d'apprentissage est alors contrainte de céder une partie de sa place à une notion d'attitudes. On s'attache à les décrire, à les mettre en place. Elles permettent à l'enfant de devenir un « vrai lecteur ».

Elle cherche donc moins à découvrir et à appliquer une méthode qu'à accueillir tous les moyens quels qu'ils soient, rationnels ou m

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irrationnels, intellectuels ou affectifs, susceptibles de conduire à la compréhension du texte.

A l'idée de méthode, elle préfère celle de la méthodologie, qui est la prise de conscience, la prise de possession par l'enfant de son accès au savoir. La réflexion méthodologique se substitue à l'action méthodique que la pédagogie de la lecture mettait en œuvre. La méthode est utile dans certaines conditions d'application, elle n'est, de toute façon, pas suffisante à elle seule. Elle trouvera sa place, mais comme un moyen parmi d'autres.

Elle est liée à une « pédagogie de l'action » qui affirme la néces- site de l'engagement total de l'être dans le processus de connais- sance. Ce modèle intègre à la fois l'action physique, la gestuelle, la manipulation, l'action du corps (qu'il réhabilite) et l'action intellec- tuelle, avec la manipulation des mots, des idées, des concepts. Il insiste sur l'importance des « situations problèmes », situations épistémologiques de départ dans lesquelles l'enfant conjecture, sup- pose, anticipe, mobilise en les explicitant les moyens dont lui-même dispose, ou en crée d'autres plus appropriés. Apprendre, c'est résoudre des contradictions. La lecture, dans cette perspective, perd son monopole. Elle est un des moyens d'acquisition du savoir mais elle n'est pas le seul.

Comme pour la « pédagogie de la leçon », les choix sont justi- ies par des principes concernant le savoir et son acquisition, et par une conception de l'enfant. Mais ces principes et cette conception, Qui ne nient par l'importance du « social », mettent l'accent sur la

dimension individuelle :

- Le savoir est construit par celui qui apprend au cours d'une action personnelle qui est à la fois une action sur le monde auquel il emprunte des éléments et une action sur lui-même. Apprendre, c'est structurer le monde et se structurer soi-même.

- L'enfant est d'abord un sujet, un sujet apprenant et non pas un objet enseigné. Ce « pédocentrisme » n'élimine pas l'adulte, mais il lui donne un autre rôle. Il n'est que l'affirmation de la liberté de enfant, de sa liberté individuelle, qui n'est pas une libération totale mais une liberté en situation. Apprendre, c'est accepter de renoncer a une partie de soi-même, c'est accepter de se changer.

C o n t i n u i t é o u r u p t u r e ?

Le passage d'une « pédagogie de la lecture » à une « pédagogie u lecteur» n'est pas un fait contemporain. Il s'enracine déjà dans 1 histoire.

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Il a été amorcé il y a plusieurs décennies par ce que l'on a appelé alors « les méthodes actives » ou les « pédagogies nou- velles ». Ces modèles se sont posés en s'opposant à la « pédagogie de la méthode » d'une façon polémique, c'est-à-dire en créant leur adversaire. Se déclarer « actif » et « nouveau », c'est définir en même temps son « antagoniste » comme « passif » et « ancien » ou encore « traditionnel ». La réalité n'était assurément pas aussi néga- tive. Mais ces mouvements ont provoqué une critique interne stimu- lante et ont influencé les esprits et les pratiques.

Le cheminement s'est poursuivi, nourri de l'expérience quoti- dienne de la classe. Il s'est enrichi également des apports théoriques des sciences humaines, en particulier de la psychologie et de la lin- guistique :

- la réflexion pédagogique a intégré les acquis de la psycho- logie et, surtout, de la psychologie de l'enfant, dont les résul- tats ont servi à justifier et à étayer des choix qui bien souvent relevaient davantage de convictions intimes que de faits scien- tifiquement établis ;

- les pratiques se sont modifiées sous l'influence des mé- thodes d'analyse linguistique et se sont davantage orientées vers la recherche du sens avec la « lecture-hypothèse », les exercices de comparaison et de discrimination des formes, la recherche des repères de sens, c'est-à-dire la mise en place d'attitudes chez l'apprenti-lecteur.

Il y a donc eu une continuité dans la réflexion et l'action péda- gogiques, une continuité dynamique, une évolution sans rupture que la Loi d'orientation de 1989 avec son affirmation centrale, « l'enfant au centre du système éducatif », est venue couronner et institution- naliser. Il n'y a pas eu de bouleversement dans l'enseignement de la lecture, ce qui ne signifie pas qu'il n'y a pas eu de changements et que cette évolution est terminée.

Les programmes de l'école élémentaire

L'institution scolaire est régie par des Textes officiels, textes administratifs dans lesquels le législateur définit les objectifs à atteindre, les programmes à respecter, les condi- tions de travail de l'école. Ils sont datés. Ce sont donc des

« textes historiques » et, à ce titre :

- ils s'enracinent dans le passé en rappelant les idées jugées fondamentales, les objectifs généraux et permanents à atteindre, les pratiques essentielles qui en découlent ;

- ils s'inscrivent dans le présent en dressant un état de la situation pédagogique ;

- ils se tournent vers le futur en confortant des choix nou- veaux, déjà en partie mis en œuvre, et en dégageant des orien- tations, des pistes de travail et de réflexion.

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Cette diversité des textes explique l'ambivalence avec laquelle ils sont perçus fréquemment. On les juge ou bien trop audacieux, ou bien trop timorés, selon l'état d'évolution per- sonnelle où on se trouve.

Les textes actuels suivent ce schéma.

Ils rappellent l'importance des apprentissages, sans pré- coniser de méthode ; ils insistent sur la découverte du sens dans la pratique de la lecture. Ce sont là effectivement des préoccupations constantes auxquelles on ne peut qu'adhérer.

Ils font état également de préoccupations plus récentes, la mise en place d'attitudes chez le lecteur par exemple. La prise de repères, la recherche d'éléments d'information, sont des pratiques maintenant courantes. Dans le même esprit, on remarque une volonté d'élargir le monde de la lecture, de pro- mouvoir la lecture comme exploration de l'écrit :

- en intégrant les bibliothèques extérieures, les biblio- thèques centres de documentation des écoles ;

- en invitant à l'étude des différents types et des diffé- rents genres de textes ;

- en amorçant l'entrée au collège.

Il s'agit pour l'enfant d'apprendre à gérer sa lecture, à se constituer des projets personnels, à évaluer aussi lui-même les progrès faits ou à faire. Toute évaluation suppose une pros- v pective.

Ils abordent enfin, dans une perspective de recherche, des points qui risquent de ne pas faire actuellement l'unanimité et qui sont cependant au centre de la réflexion contemporaine.

- La littérature de jeunesse. Les textes de lecture sont souvent empruntés à cette littérature mais les réticences demeurent. On en souligne plus fréquemment les dangers que les intérêts. On regrette leurs thèmes, leur violence.

On regrette surtout les libertés qu'ils prennent avec le langage. On oublie que cette littérature est le reflet du monde dans lequel nous vivons et que l'enfant s'y recon- naît sans l'angoisse excessive que nous redoutons. De toute façon, le choix appartient à l'enseignant. Les textes invitent à dépasser les craintes et suggèrent même de constituer une anthologie de ces textes contemporains.

- Les manuels sont aussi à reconsidérer dans leur forme et dans leur usage.

- La liaison entre la lecture et l'écriture. Elle est indiquée comme une obligation. « La leçon de lecture est en règle générale une séance d'écriture » (cycle 2) et « L'interac- tion entre la lecture et l'écriture, préconisée au cycle 2, reste essentielle au cycle des approfondissements »

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(cycle 3). On parle d'une interaction, c'est-à-dire d'une action réciproque. D'autre part, le mot «écriture» doit être compris comme concernant l'acte même d'écrire, il est synonyme de « production de texte ».

- La production de texte. On parle également de produc- tion d'écrit et, conjointement, « d'expression écrite ». On entre ainsi dans une action pédagogique fondée sur une autre conception du texte, différente de la conception classique, conception « plurielle » qui fait de la lecture, non pas une simple consommation passive, mais un acte de « production » : lecture et écriture ne sont pas deux activités séparées. Elles se rejoignent et se retrouvent pour viser le même objectif : produire du sens.

Ministère de l'Éducation nationale, Direction des écoles, collection « Une école pour l'enfant, Des outils pour les maîtres », CNDP, 1995.

D u t e x t e

Effectivement, la Loi d'orientation et les différentes instructions officielles qui l'ont accompagnée ouvrent des pistes de recherche qui invitent à aller au-delà d'une simple constatation.

Des concepts nouveaux concernant l'action pédagogique géné- rale ont été dégagés, concepts de projet, de compétence, d'évalua- tion, de méthodologie. La pédagogie de la lecture, au sens courant du mot, doit maintenant être pensée en fonction de ces notions.

Mais, et c'est une réalité au moins aussi importante et qui peut être très riche de conséquences, ces différentes instructions vont uti- liser, dans la pédagogie du français, une expression inédite, totale- ment inconnue jusque-là, celle de « production de texte ». Elles introduisent ainsi une notion qui, par ailleurs, en linguistique, se révèle d'une importance telle qu'elle fait l'objet d'une réflexion spécifique, la linguistique du texte.

On ne peut pas parler de lecture sans se référer à cet objet qu'est le texte et sans le définir. Or, quand on s'y attache, on s'aperçoit que la « pédagogie de la lecture » et la « pédagogie du lecteur » utilisent le même mot : texte. Et que seul le mot est commun. Il recouvre en fait deux conceptions différentes.

- Une conception classique, qui attribue au texte, lié à l'écrit, une unicité de forme, une unicité de sens et un lec- teur unique. Le texte est « un », entier, unique.

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- Une conception plus large qui le distingue du simple écrit, qui le conçoit comme un « champ méthodologique » (Roland Barthes), avec une pluralité de formes, une pluralité de sens et, donc, une pluralité de lectures. Le texte est un

« objet éclaté ».

Et enfin, on s'aperçoit que c'est le mot « texte » qui constitue la c e de la pédagogie de la lecture au sens commun du terme et, au-

delà, de la pédagogie du français.

On ne peut comprendre les problèmes de lecture, et agir, c'est- à-dire proposer des pratiques renouvelées, sans réfléchir d'abord au sens classique du mot, texte, de ce texte unique qui fut longtemps au centre de notre pédagogie et qui imprègne encore nos mentalités.

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P o u s r u r r« é fl el é tc eh xi tr e. . .

e n t i e r »

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Texte et écrit,

le mythe de l'origine

L e t e x t e e t l ' é c r i t

La plupart du temps, ces deux mots sont considérés comme synonymes et, dans le langage courant, souvent employés l'un pour autre. C'est aussi ce qu'affirme la tradition classique : un texte est un écrit.

Selon le dictionnaire Le Robert (Article Texte), on appelle texte es termes, les phrases mêmes qui constituent un écrit, une œuvre ». La même définition pourrait s'appliquer au mot « écrit ».

Roland Barthes, dans un article donné à l' Encyclopædia Uni- Versalis (Théorie du texte) le définit comme « la surface phénomé- nale de l'œuvre littéraire: c'est le tissu des mots engagés dans œuvre et agencés de façon à imposer un sens stable et autant que Possible unique ». Il constate également que le texte « est lié consti- tutivement à l'écriture (le texte, c'est ce qui est écrit) peut-être Parce que le dessin même des lettres, bien qu'il reste linéaire, sug- S^replus que la parole, l'entrelacs d'un tissu ». (Étymologiquement,

« texte » signifie « tissu ».)

Il est intéressant de remarquer que cette liaison entre les deux mots est très forte. Les instructions officielles et les programmes de J en offrent une bonne illustration. Alors que les concepts qu'ils utilisent, comme celui de « production de texte », impliquent une autre l'autre définition du texte, on trouve employé indifféremment l'un ou autre de ces deux mots : « discussions sur différents types d'écrits rencontrés, production de textes analogues » 1 ; « production de

1. Ministère l'Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports. Direction des es. Coll. « Une école pour l'enfant », Hachette/écoles, page 24.

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textes en dictée de l'adulte » 2 ; « les productions d'écrits » et, même page, « les élèves seront conduits à produire des textes soi-

g n é s . . . » 3 ; « p o u r l a p r o d u c t i o n d ' é c r i t s . . . » 4 . A l a p a g e 9 8 , d a n s l a c o l o n n e « P r o d u c t i o n d ' é c r i t s a u c y c l e 3 » , o n p a r l e d e « d i f f é - r e n t s t y p e s d e t e x t e s » e t n o n p l u s d e « d i f f é r e n t s t y p e s d ' é c r i t s » c o m m e à l a p a g e 2 4 . L a c o n c e p t i o n c l a s s i q u e i m p r è g n e e n c o r e p r o - f o n d é m e n t l e s e s p r i t s .

L e t e x t e , o b j e t a m b i g u

Un texte est donc un ensemble de signes (lettres, mots ou signes de ponctuation) qui couvrent la feuille de papier, blanche à l'origine, placée devant soi. C'est ce qui apparaît. On le voit, on le perçoit avant toute lecture. Le texte a un statut d'objet, de chose matérielle.

Cette idée, reprise ultérieurement par l'analyse linguistique, donne au mot objet son sens plein, avec toutes les conséquences pédagogiques qui en découlent. Mais dans l'immédiat, et dans la perspective classique qui nous intéresse, l'objet « texte » est ambigu. Sa matérialité se trouve donc rapidement mise en cause.

- D'une part, les liens rattachant le texte au concret sont très ténus. Les traces laissées par la plume, ces « pattes de mouche », sont bien minces. Le texte peut à tout moment s'al- térer, se briser, perdre des mots ou une partie de lui-même, être détruit et se perdre alors tout entier. Le texte est un objet fragile.

- D'autre part, le texte a un certain don d'ubiquité. Il peut être au même moment dans des lieux différents. On peut le repro- duire, multipliant ainsi les risques d'altération. Mais, lorsqu'il est imprimé à des milliers d'exemplaires, on dit pourtant de lui qu'il s'agit du même texte. Unique dans son «esprit», il est multiplié dans ses « réalisations ». Le texte, objet réel, est donc situé aussi au-delà des apparences. Objet matériel, il par- ticipe également d'une immatérialité, qui est celle du créateur, qu'on lui attribue lorsqu'on en parle comme d'une « produc- tion de l'esprit ».

Ces deux dimensions du texte sont incontestables et doivent être prises en compte. Elles ont suscité toutes les recherches sur la « resti-

2. Les programmes de l'école primaire, p. 25.

3. Les programmes de l'école primaire, p. 46.

4. Les programmes de l'école primaire, p. 59.

(21)

ution » et «l'interprétation» d'un texte, par exemple. Mais en s'y intéressant trop fortement, aux dépens de la matérialité, la conception c assique, trop préoccupée par la quête de l'unité et de l'unicité du e, a entraîné celui-ci dans le domaine inaccessible et intouchable du sacré. D'une certaine façon, la lecture va devoir se libérer du texte.

L a r e s t i t u t i o n :

u n i t é e t u n i c i t é d e l a f o r m e

Qu un texje soit fragile, l'Histoire le montre à l'évidence. Les es anciens ne nous sont pas tous parvenus. Certains ne nous sont connus que par leurs titres ou par des allusions faites dans d'autres es. Des quatre-vingt-dix pièces de théâtre écrites par Eschyle, sept seulement sont arrivées jusqu'à nous. Sophocle s'est vu attri-

er cent vingt-six pièces, il ne nous reste que sept tragédies.

Parmi les textes qui sont aujourd'hui en notre possession, et qui ont emprunté des chemins géographiques et humains multiples, nombreux sont ceux qui ont été changés, modifiés au cours de copies successives. Ces changements ont été la plupart du temps Involontaires et le fait de scribes ignorants qui ne comprenaient pas qu ils écrivaient. Cependant, les modifications apportées ont pu aussi être voulues, encore qu'en toute bonne foi, par des clercs qui souhaitaient orienter et préciser la lecture de passages obscurs ou qui voulaient éviter des interprétations qu'ils jugeaient dangereuses.

ssi constate-t-on maintenant la présence de «rajouts» qui font l'O bjet de débats passionnés.

A L imprimerie, par la suite, n'a pas supprimé ce problème. Un nieme tirage du XVIIe ou du XVIIIe siècle n'est pas uniforme. Les caractères ont pu glisser, des changements ont pu être faits, même cours d'impression. Puis, pour des raisons de profit, les textes auteurs à succès ont été l'objet d'abondantes contrefaçons. Rous- seau, avec sa Nouvelle Héloïse, en est un exemple typique.

. Un texte doit donc être abordé avec prudence. L'approche clas- sique du texte va s'y employer. « Le texte, s'il vient à se perdre ou f6 alterer, pour quelque raison historique, demande à être retrouvé, restitué" ; il est alors pris en charge par une science, la "philo-

°le , et par une technique, la critique des textes » 5. La critique

5* Roland Barthes, Encyclopœdia Universalis, voir article Texte. i ,

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verbale travaille sur les abréviations, les confusions de lettres, les répétitions abusives, la ponctuation. La critique externe compare les qualités des « témoins » (les exemplaires reçus), leur nombre, leur ancienneté. La critique interne tente d'évaluer la valeur des diffé- rentes variantes en étudiant le vocabulaire, la syntaxe, le style.

Aussi, par un travail souvent ingrat, bon nombre de textes ont pu être rectifiés, expurgés d'ajouts injustifiables, simplifiés. Mais, cette préoccupation très justifiée a des effets pervers. Il en résulte en particulier cette idée d'une unité, d'une pureté originelle du texte, qui se serait perdue et qu'il faudrait retrouver. On va donc recher- cher pour chaque œuvre un texte premier qui aurait, au fil des ans, éclaté, s'efforcer de redonner au texte son unité et, idée corollaire, éliminer tous les textes parasites pour parvenir à son unicité. Dans sa forme, tout texte doit être un.

Partie d'une situation objective, la conception classique du texte s'engageait dans la recherche métaphysique des commencements.

L ' i n t e r p r é t a t i o n : u n i t é e t u n i c i t é d u s e n s

La multiplicité et la diversité du texte, conséquences de sa fra- gilité, justifient non seulement un travail sur la forme mais aussi un travail sur le fond : c'est ce que l'on appelle « l'interprétation ».

Là encore, comme en ce qui concerne la « restitution », on constate un fait qui est une évidence. Les signes recouvrant la page n'ont rien de remarquable en eux-mêmes, dans leur aspect matériel.

Pour un observateur qui sait qu'il s'agit de signes d'écriture, ils peu- vent faire l'objet, à la rigueur, d'un jugement esthétique. On trouve l'écriture chinoise « belle » mais on ne peut lui demander rien de plus. Quant à l'homme qui n'aurait jamais eu aucun contact, aucune expérience de la lecture, il serait face au texte comme ce chien dont parle Alain, qui regarde sans le voir « le bleu du ciel incomestible ».

Les signes doivent être « vivifiés », il faut leur « donner un sens », les « interpréter ».

D e u x n i v e a u x d ' i n t e r p r é t a t i o n d ' u n t e x t e

Le niveau le plus simple, et pas forcément le plus facile, est celui de la lecture-déchiffrage, de la mise en application du « code ».

On passe ainsi du texte écrit au texte parlé et/ou au texte pensé.

Le niveau le plus élaboré est celui de la réthorique, étude des

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moyens d'expression et technique d'analyse du sens. Qui ne l,nnaît, de nom, les célèbres « figures de réthorique », liste de pro- e es de langue, système de référence commun à tous les lecteurs

« cultivés » dont le but est de faciliter l'unanimité des jugements. La orique est un discours du texte mais c'est aussi un discours sur le texte.

L' objectif de l'interprétation est de parvenir à la compréhension du texte. Un texte doit être compris. Mais qu'est-ce que com- prendre ? Qu'est-ce qui a un sens et qu'est-ce qui n'en a pas ? Que aut-il comprendre ? Y a-t-il un sens et un seul ? Ou peut-être une Infinité de sens ?

Les réponses sont données par la tradition classique telle que P°îî définie tous les écrivains du Grand Siècle. Un texte a un sens : a ffirmer, c'est exprimer deux idées, l'idée de signification et l'idée de direction.

Un texte a une signification

Il exprime des idées claires et distinctes, des sentiments avouables. Cette signification doit être perçue comme une évidence, sans ambiguïté. Le texte classique refuse tout ce qui est confus, obs- cUr, mal dit. Il n'admet que le mot «juste ». « Entre toutes les diffé- n'Y rentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos pensées, il y en a qu 'une qui soit la bonne. On ne la rencontre pas toujours to parlant ce. ou en écrivant ; il est vrai néanmoins qu 'elle existe, que ce qui ne l'est point est faible, et ne satisfait point un homme

€sprit qui veut se faire entendre. » .... « L'on n'écrit que pour être

e n t e n d u 6 . . . »

Un texte a une direction

Il montre quelque chose à quelqu'un, il délivre un message au eur. Le texte est un instrument de communication, c'est-à-dire n objet social. Il ne doit donc exprimer que des idées « com- munes », que chacun peut concevoir. Tout ce qui est trop individuel incommunicable, donc doit être censuré. « Tout écrivain pour écrire nettement, doit se mettre à la place de ses lecteurs, examiner propre ouvrage comme quelque chose qui lui est nouveau, qu 'il Pour la première fois, où il n'a nulle part, et que l'auteur aurait soumis à la critique; et se persuader ensuite qu'on n'est pas entendu seulement à cause que l'on s'entend soi-même, mais parce

on est en effet intelligible 1. »

Dans la mesure où une idée ne trouve sa véritable expression que s une seule forme, la réciproque veut qu'une forme n'exprime une seule idée. On arrive ainsi aux mêmes conclusions en ce qui

et 7. La Bruyère, Des ouvrages de l'esprit. 11 j

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