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A propos de la domestication des animaux pendant la période néolithique

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A propos de la domestication des animaux pendant la période néolithique

PITTARD, Eugène, REVERDIN, Louis

PITTARD, Eugène, REVERDIN, Louis. A propos de la domestication des animaux pendant la période néolithique. Archives suisses d'anthropologie générale , 1921, vol. 4, no. 3, p.

259-271

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:106481

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1 / 1

(2)

Extrait des Arcltives sursses d'Antltropalosie génëraie

Tome

IV.

No

3,

r9zr.

A propos de la domestication des animatrx pendant ta période néolithique

' Ttar

EucÈrB Pnrlnr, et Lours

Rpvrnnru.

L'intérêt de ce travail réside principalement dans ce

fait

que

la

couche d'otr proviennent les restes dquelettiQueS

qui

seront étudiés, appartient

à la partie'inférieure du Néolithique palafittique suisse et qrre tous I'es osse- ments rencontvés au cowrs d,es louilles ont été recue'illis et examiùés. Dans ces

conditiorts

-

mdis dans ces conditions seules --i-

il

est possible d'établir une statistiQue âyânt Quelque valeur comparative.

L'hisi.oite de La tlomesticatitln cles anirnaux

-

lts11g tles bases prinurpales ' rle torrte notre civilisa,tion

-

sorrlève rrn c.ertain nombre r1e problèmes dont aucun

-

on doit Ie dire

-

1's5f aujourd'hui définitivement résolu. N'ou- blions pas que c'est dans les stations palafittiques qire nôus aurons le plus de chances de découvrir les arguments nous permettant d'appfécier, dans son exactitude;

cèt

événement

qui

amène

un

changement radical dans la vie des populations préhistoriques. Mais

il

faut que ces recherches soient conduites d'une manière précise, ce qui a manqué juSqu'alors.

Tout de suite nous pouvons nous poser plusieurs questions:

Les animaux domestiques connus des Néolithiques

-

en I'espèce des

Néolithiques suisses habitant dans les,stations palafittiques

-

ont-ils été

domestiqués tous au même moment ?

Ou, au contraire, peut-on constater un ordre successif dans I'apparition 'de ces animaux domestiques ? On sait que, pour ce qui concerne l'ènsemble

du Néolithique, l'accoid n'est pas encore

fait

Sur ce point.

Au fur et

à mesure que progresse

la

domestication, voit-on disparaître graduellement, de la table des Lacustrês, les animaux sauvâges ? En cas d'afÊrmative, quels sont ceux qui disparaissent les premiers ?

Pour ce qui concerne l'ês'seuls animaùx domestiQues, plusieurs questions se posent encore. Les Lacusties pratiquaient-ils I'élevage sans

choii

déter-

miné,

apportant

à

chaque espèce

la

même sollicitude ?

Au

contraire, faisaient-ils un choix ?

Et

alors, lesquels de ces animaux étaient considérés par eux comme les plus importants ? Ceux dont

il

s'agit d'assurer la multiplication ?

(3)

z6o eucÈNo PlrrARD ET Lours REVERDTN

Les espèces domestiquées

-

quel qu'ait été le choix pratiqué

-

étaient-

elles mangées à n'importe quel âge ? Abattait-on surtout des jeunes, ou des vieux ? Des mâles ou des femelles ?

L'animal sacrifié était-il mangé en entier ou seulement certaines parties

du

corps étaient-elles considérées comme pouvant

servir

de nourriture,

etalorslesquelles?' \

'

Quand on sait les multiples réserves (tabous, etc) faites à I'égard d.es faits

ci-dessus par diverses populations, observances que I'ethnographie compara- tive nous révèle

petit

à

petit,

on comprendra que les questions posées nous ne pourrons peut-être pas les résoudre conrplètement

-

-

ne sont pas

de vaines questions.

On 4dmet volontiers,que le chien aurait été le premier animal domestiqué.

A

elle seule.la logique pourrait conduire.à faire supposer que

la

collabo- ration,du chien a été nécessaire à l'homme pour assurer

la

domestication des autres espèces.. Les Kjækkenmôddings

du nord

européen,

qui

sont considérés ôomme appartenant au plus vieux néolithique, ont bien montré que, pour ces régions au moins, le chien est I'animal le plus anciennement

tïi:iï:

du chien, dans 1.'ordre d,'apparition chronotogique, on ptace la chèvre et le bæuf puis le cochon et le mouton.

L'apparition, en bloc ou par apports successifs, des animaux domestiques soulève.naturellement. des questions de même nature chronologique pour ce qui concerne l'homme. Dernièrement, .Conrad Keller, à la suite d.'autres naturalistes, pensait que tous les animaux domestiques étaient apparus a la 101s.

Toutes ces questions, si, importantes.pour

l'histoire

de

la

civilisation, comme pour éclairer certains points de I'ethnogénie européenne, ne peu- vent être résolues que par un examen stratigraphique soigné,

Au printemps de

r9zr,

la Commission neuchâteloise pour les recherches préhistoriques transportait son chantier de fouilles

à St. Aubin. Elle

a eu

la

chance de rencontrer en, cet endroit

un

terrain

qui niavait

encore

jamais été fouillé. Nous n'ayons pas à parler ici des travaux pratiqués par nos collègues

et

de leurs belles,découvertes archéologiques. Disons seule-

ment que les matériaux.qui seront, examinés dans ce mémoire proviennent des. couches

IV et III

de

la

stfatigraphie .--_

type

d'Auvernier

-

telle

que M. Vouga

l'a

indiquée dans ses notes préliminaires {.

Les fouilles de M. Vouga ont porté sur une superficie de r3o.me. Le nombre des objets recueillis a été immense. Celui,des débris de squelettes d.'animaux

1 P. Voucr; Essai cle classiJl,cdlion du néolithique lacrstre .l'après la stratiJication, Anzeiger ftr schweizerische Altertumskunde, Band XXII, Hefi4, r9:o; Band XXIII, Heft 3, r9zr.

(4)

DOMESTICATION DES ANIMÀUX 261 a été aussi considérable. Tous ces débris nous ont été envoyés, y compris les fragments oo

"rqoiil"r

ind.éterminables. Nous avons eu ainsi en mains plus de 4oob os ou débris, sur lesquels 2336 ont été déterminés zoologiquemènt

l.

Ces ossements, considérés numériquement, appartiennent

aux

espèces suivantes:

Chien Loup Renard Ourç.

Loutre.

Blaireau .

Martè Chat

Autres oiseaux ? .

Dans cette statistique ne figurent ni les côtes ni les vertèbres. On souli- gnera, tout de suite I'immense différence numérique existant entre les osse-

ments rles espôccs sâ,rrvn.gcs

ct

lcs osscmcnts dcs capôccs domcstiqrrées.

Les premiers sont dans la proportion de rB,4 o/o,Ies seconds dans la propor- tion de 8r ,5 o/o.On constatera que les cinq animaux primitivement domes- tiqués sont présents.

A

ce début

du

Néolithique

palafttique

suisse, les Lacustres utilisent déjà, dans une forte proportion, la viande des animaux domestiques. On constatera aussi que sur plus de 4ooo débris osseux, aucun ne peut être rap- porté au cheval. Le cheval semble être ignoré des Palafitteurs de St-Aubin.

Une seconde statistique comparative devait être faite. Elle a pour objet la proportion des diverses espèceé domestiquées, entre elles. Voici le résultat obtenu:

Proportion des diverses espèces domestiquées (Couche IV) :

Bæuf

928

GrandBceuf .

r5

Chèvre ou mouton 5or

Cerf. zz\

Chevreuil

46

Elan

3

Cochon des tour- bières

.

z9r

Sanglier

24

Bæuf Chien Cochon

24r

r

T2 o ô J

ô o

Castor Lièvre Rat ? Hérisson Poissons Outarde

oo 2

I

J J

4

4

50 %

Chèvre

2r3o/o

Mouton

,rB,o o/,

Le faible pourcentagedes moutons et des chèvres est intéressant à retenir, ainsi que Ia grande quantité dês bæufs.

A

eux seuls,

ils

figurent pour la moitié de tous les ossementS d'animaux domestiques rencontrés dâns la couche

IV

de St-Aubin.

Les animaux domestiques paraissent arriver chez nous, non

par

suite

1 Les déterrninations ont été faites par M. Louis Rnvenorx

6,6 0/o 4,o o/o

(5)

z6z pucÈNa prrTARD ET Lours REvERDTN

d'apports successifs, mais en même témpS que la première bânde des migra- teurs (Brachycéphales néolithique's ?).'C. Keller semble 'donc

avoir raison lorsqu'il pehse que tous les animaux domestiques connus des Néolithiques sont arrivés ensemb'le (ici, dans le vieux néolithique palafittique suisse).

Pour éclairer plus complètement cette question, nous établirons mainte-

nant la

statistiquq des espèces selon I'ordre d'apparition chronologique supposé par certains .auteurs.

Rencontrés à St-Aubin (Couche IV) Ire apparition (supposée)

ziu

apparition (supposée)

. .

.

Chien Chèvre Bceuf ..

Cochon . Mouton.

2r30Â 6,6 5o'o o/o :B,o o/o 4,ooA

IO

. Une si petite quantité de restes de moutons (dans cette station de St-Au- bin qui nous sert de type pour le néolithique palafittique ancien,) pourrait servir

-

si cette même caractéristique s'est présentée ailleurs

-

à expliquer

I'erreur commise par ceux qui ont cru à l'absence du mouton dans I'étage néolithique le plus ancien. Mais, d'autre part, Ie fort pourcentage des restes du ôochon ne pourrait être utilisé pour une même supposition d.'absence.

Il

semble que si le côchon a été

partout

aussi abond.ant

qu'il l'a

été à

St-Aubin on'aurait dû s'apercevoir de sa présence parmi les ossements du premier groupe chronologique supposé.

Le nombre minimum des individus de chaque espèce retrouvés dans la couche

IV

de St-Aubin est le suivant :

Bæuf

. 75

Chèvre

Chien 32 Mouton

6

Cochon

zB

Le cube de terre fouillé renferme donc les restes d'au moins

l5r

animaux domestiques. On distingue

d'un

coup d'æil I'abondance d.es bæufs, des chiens et des cochons;la rareté relative des chèvres et d.es moutons. pou- vons-nous inférer, de ces chiffres,

la

rareté absolue, à ce moment-là, en Suisse, du mouton et de la chèvre? Et, d'autre part, conclure à l,abondance absolue

du

bceuf

et du

cochon

?

Peut-être vaudrait-il

mieux

attendre qu'une plus grande quantité de fonds lacustres ait été examinée. Mais si

la

portion fouillée peut nous permettre de supposer qu'elle représente en petit f image exacte de toute la station, nous devrions conclure à l'eîistence chez les Palafitteurs de troupeaux de bæufs relativement grands, tandis que les mêmes Lacustres n'auraient eu que de faibles contingents de mou- tons et de chèvres.

(6)

DOMESTICATION DES ANI.MAUX 263

Disfariti'on grad'uel,l,e d,es espèces sauaages :

Pouvons-nous discerner à l'aide des 4ocuments ostéologiques recueillis dans les couches

IV

et

III,

examipés cornparativement, une modification quelconque dans

l'utilisation

culinaire des animaux domestiques

et

sau- vages ?

A

un moment donné les Néolithiques de St-Aubin demandent-il

d"

piétere.t"e leur nourriture animale à

la

chasse ? ou à l'élevage des ani- maux domestiques ?

Une réponse peut être donnée-sous toutes réserves

'-

à I'aide du pour- centage des espèces domestiquées

et

sauvages retrouvées .da1s chaque couche.

Répartition des espèces des couches

IV

et

III

er: oÂ;

IV III IV III

Bos brachyceros Canis larniliaris.

Sws palwstris Ccrrn,ts cl'aflott's Capra hircws

Oais aries palwst.

Cevaus capreol,ws

Canis awlpes Ceraws

alces

:

Castor fi,bar

39

t6,6 r4

5,2 5,2

Jta

2,r

2:l

r16

t,6

27,4

4,t

oo t?,"3

2rB

5,6

r,4

218

I'4

5,6

I,I I,I I,I I,I I,I

r14

4,r

Grand. Bos .

Felis catws Mel,es votlgaris I

Lutra uailgar'is Mwstela lna.rtes Mustela pwtoriws

Ursus arctos Erinacews ewrop .

Canis lupws Lepws europ

.

.

Sws scrola lerws Mus ?

I,I t.,r

o,5 or5 or5 o,5

r,4

2,8 T14

r,4

2,8

Pour ce qui concerne les espèces sauvages:

Dans la période palafittique la moins ancienne,, le cerf élaphe semble en forte augmentation. Sa présence a plus que deux fois doublé. T,e chevreuil paraît un peu moins abondant (mais le matériel de comparaison est bien faible). Le renard, I'élan, le chat sauvage, le hérisson, sernblent avoir été apportés par les Lacustres de

la

couche supérieure dans des proportions semblables

à

celles de leurs prédécesseurs. D',ailleurs, ces animaux sont rares aux deux époques considérées. Le castor, le,blaireau, I'ours, le sanglier, sont.en forte augmentation dans la couche

III,

notarnment le castor, dont la proporti<ln passe de

r

à g. Pour quelle raison le castor est-il chassé plus qu'auparavant ?

Dst-il

devenu plus abondant ? Est-cc pour l'utilisation de ses incisives ? de sa peau ? ou comme espèce culinaire ?

Ces quatre d.erniers animaux n'ont laissé que peu de traces.dans la couche

IV,

mais s'ils ne deviennent pas abondants dans le niveau archéologique- ment plus récent, on ne peut pas dire qu'ils sont à

titre

exceptionnel'

(7)

264 EUGÈNE PITTÀRD ET LoUIs REVERDIN

Pour ce qui concerne les animaux d.omestiques i

on assiste partout à Ia diminution

-

sauf pour le mouton et le cochon

-

du nombre des animaux domestiqués dans

la

couche

la

moins ancienne.

Le bceuf passe de 39 % à z7 o/o; la chèvre de 5 â z o/". Mais c,est le chien surtout

qui

semble fortement diminuer. De 16 o/o dans

la

couche

IV,

sa

proportion n'est plus que de 4 o/o dans la couche supérieure.

Pouvons-nous imaginer une diminution réene des troupeaux de bæufs

et

une diminution concomitante des chiens, gard.iens de ces troupeaux ?

un

autre calcul va nous renseigner d'une manière générale sur les rap- ports comparatifs des espèces sauvages

et

des espèces domestiquées au cours des deux périodes néotithiques considérées. Dans

la

couche

IV,

les

espèces domestiquées sont dans la proportion de 78,r % ; dans la couche

III,

cette proportion est de 6t,6 o/o.

Dans

la

couche

IV,

les espèces sauvages sont dans

ra

proportion d.e

2r,9

%;

dans la couche

III

elles sont dans la proportion de 38,.4 o/o.

Il

est difÊcile, devant ces faits, d'émettre une conclusion raisonnable.

Logiquement,

il

semblerait que I'homme

dût

faire de plus en plus appel, pour son alimentation, aux animaux domestiques.

Préfère-t-il,

plutôt

que de manger

la

viande de ceux-ci, poursuivre le gros gibier ? et conserver le plus longtemps possible les animaux d.omesti- ques? S'il en était ainsi, ces derniers, lorsqu'ils ont été mangés par les hom- mes, devaient être surtout des animaux adultes.

une

statistic|re ba.sée

sur l'âge des animaux domestiques tués nous renseignera sur ce point.

Les anirnawx d,omestiques sont-ils éleaés sans choix,

ou

wne s,élection a-t-ell,e été pratiqwée ?

cette sélection, si elle existait, pouvait être basée en vue de gorits culi- naires (on élève davantage les animaux dont on aime la viande) ou ên vue de l'utilisation de certaines parties d.u corps peau, laine, cornes, etc.

A considérer les chifires que nous avons sous res yeux,

il

semble que deux espèces surtout étaient

l'objet d'un

élevage plus intensif:

le

bæuf

et

le cochon. La chèvre et le mouton, aussi bien dans la couche

IV

que dans la couche

III,

sont peu nombreux.

cette comparaison des deux couches archéorogiques nous, montre encore un

fait

intéressant. Le niveau le plus ancien

(IV)

avait

livré

des os d'un grand bceuf, beaucoup plus grand que le bæuf des tourbières;,aucun débris de cette espèce n'a été Iencontré dans la couche

III.

Les chiens ont-ils été mangés, par les T.acustres ? A priori rien ne s'oppo- . serait à ce que le chien figurât dans la liste des espèces alimentaires. Le chien qui. pouvait être chasseur, gard.eur de troupeaux ou d'habitation,

(8)

DOMESTICATION DES ANIMÀUX 265

compagnon

journalier, pouvait être

néanmoins considéré comme une nourriture.

La

réponse

à

cette question est d'une certaine importance.

11 faut reconnaître qu'elle est difûcile. Mais une étude soigneuse de tous les os de chien que nous avons à notre disposition nous renseigne plus exacte' ment.

un

exameh comparatif des restes de cet animal avec les tas d'osse- rnents que nous avons sous les yeux, appartenant à d'autres espèces, nous

fait

saisir, au premier coup d'æil, une immense différence. chez les autres animaux que le chien, les ossements intacts sont très rares' en particulier

les os longs qui sont, sauf,une ou deux exceptions, tous brisés. Au'contraire, chez les ohiens, les os longs intacts apparaissent abortdants. Sur zz8 pièces osseuses provenant de squelettes de chiens, nous n'en trouvons que z3 pré- sentant des cassures anciennes permettant de les considérer comme datant de l'occupation néolithique première de St-Aubin.

Sur ces zz8 pièces osseuses,

il,en

est

un

grand nombre sur lesquelles on peut s'attendre a

priori

à ne découvrir aucune cassure intentionnelle:

calcàneum, astragales, métapodes et phalanges'

l-e brisement

utile

des os peut s'expliquer de deux manières: Io le La- custre & voulu désarticuler un membre entier (hrisrrre rle l'omoplate ou du bassin) ou une partie d'un membre déjà désarticulé mais recouvert encore de toute.ou partie de sa chair (brisure des os longs); zo ou bien

il

a cassé les os longs une fois dépouiltés pour en extraire la moelle..

Sur le premier point nous trouvons dans notre série: a) onze omoplates;

(une d'elles seulement est cassée)

; b)

quatorue bassins, dont quatre sont

cassés.

ces

proportions d

os

brisés expliqueraient-elles des désarticulations intentionnelles ?

Sur

le

second

point: il faut

constater que les os longs

qui

pourraient

fournir

quelque peu de moelle sont les humérus, les fémurs, les tibias.

Sur dix-sept humérus, cinq sont cassés (2g,4 o/o) ; sur dix-sept fémurs, six sont cassés (35 %) ; enfi.n, quatre tibias sont brisés sur un

total

de vingt- trois,

soit r73

o/o.Pour les alltres régions des membres, les proportions d'os longs cassés sont: cubitus 6,6 o/o, radius, 5

%.Il

semble ressortir de ces chiffres que le chien a pu servir de nourriture aux Palafitteurs de St-Aubin, au moins d'une manière exceptionnelle. Mais nous ne nous expliquons pas la raison pour laquelle une partie seulement

-

et une petite partic

-

des chiens auraient été mangés.

Les animaux domestiques vivaient-ils

sur

les esplanades mômes des stations ? Oîr vivaient-ils sur terre ferme, dans des enclos, surveillés par les chiens ?

Et

alors, les Lacustres, désireux de manger de la viande, abat- taient-ils ces animaux domestiquês sur terre ferme et les dépeçaient-ils sur

a

(9)

266 EUGÈNE PITTARD ET LoUIS REVERDIN

place pour apporter les mo'ceaux de

choix

dans leurs habitations ?

ou

encore mangeaient-ils en entier ces animaux domestiques ?

pue des animaux domestiques aient vécu sur res esplanades lacustres, cela paraît hors de doute. N'a-t-on pas retrouvé, dans le fumier sous jacent aux habitations palafittiques, des restes d'excréments d.e ces animaux ?

Mais pouvons-nous savoir

si

tous les animaux domestiques habitaient dans les stations ou si ceux dont la présence est certaine n'étaient là qu'ex- ceptionnellement ?

Si les animaux domestiques ont habité normarement les stations et y ont été abattus, débités et mangés, on

doit

retrouver

la

totalité de leurs élé-

ments squelettiques.

Les vertèbres, les côtes, les os du tarse ou du caipe, que nous avons eu à

notre disposition, n'ayant pas encore été déterminés,

il

n'est pas possible de répondre d'une manière définitive à cette question. Néanmoins, certaines remarques peuvent être faites au sujet de

la

répartition d.es pièces sque- lettiques suivant les diverses régions du corps. certaines remarques peuvent également être faites au sujet de l'âge des animaux domestiques repré- sentés.

r.

Pour ce qui concerne les diverses régions du corps:

Pour chaque espèce (bceuf, chien, cochon, chèvre, mouton) c,est toujours, des deux mâchoires, la mâchoire inférieure qui est, de beaucoup,

la

plus abondante. Parmi les crânes, figurant dans notre matérier, ,ro.l, ,rl"r, comp- tons que trois presque complets, Ils appartiennent au chien. Les crânes des bæufs et des cochons

-

tous incomplets

-

sont représentés par un bon nombre de fragments appartenant aux différentes régions de

la

tête. Le crâne des chèvres et des moutons est presque uniquement représenté par

la

région occipitale.

11 semble bien, d'après cet examen, que les têtes ont été dépecées dans la station même.

Les cervelles étaient certainement, déjà à cette époque, très appréciées;

ce qui expiique

l'état

fragmentaire de la presque totalité d.es crânes. Mais comment expliquer

la

faible quantité des crânes,

à

peu près complets, ou des débris de ceux-ci, en regard de Ia quantité relativement grande des mandibules ? Peut-être les diverses parties du crâne prôprement

dit

ont-

elles disparu sous les dents des chiens ? Peut-être les fragments brisés ont-ils été plus facilement disséminés par le mouvement des eaux ?

Il

serait difÊcile d'imaginer que lesLacustres choisissaientlesmandibules, à l'exclusion du reste du crâne.

Pour chaque espèce, le nombre d'omoplates

et

de bassins est toujours inférieur

à

celui des mandibules.

cette

observation semble indiquer que

a

(10)

DOMESTICATION DES ANII{ÂUX ,67

|a désarticulation des membres, faite sur terre ferme, offrait des difficultés techniques; souvent, les omoplates et les bassins, restés en connexion avec le tronc, auraient été alors abandonnés

Une même raison peut-elle être invoquée lorsque, pour

le

bæuf, par exemple, nous trouvons une plus grande quantité d'humérus et de fémurs que de bassins ou d'omoplates ?

L'avant-train et

l'arrière-train sont-ils dans les mêmes proportions ?

Nous fouvons essayel de nous rendre compte si un choix était

fait

entre les membres antérieurs et postérieurs en comparant le nombre des humérus au nombre des fémurs. Pour

le

cochon,

le

membre antérieur prédomine.

Pour le bæuf,

la

chèvre et le mouton; c'est f inverse; ces espèces ont les membres postérieurs plus souvent représentés que les antérieurs. L'expli- cation de telles répartitions,

il

faut bien l'avouer, est

dificile.

Dans

l'état

actuel de nos connaissances,

il

serait prématuré d'imaginer que les Lacu- tres préféreraient tel train des animaux qu'ils voulaient manger. Peut-être utilisaient-ils, pour

la

confection de leurs outils en os, préférablement tel

ou tel

os, ce

qui

pourrait servir

à

expliqucr lcs différcnccs numériques quc nous constûtoïrs.

Eu

1864, déjà, Rûtimeyer 1

attirait

I'attention srrr

un fait qui lui

semblait important

:

f inégale répartition des ossements

provenant des côtés

droit

ou gauche; d'après

lui, le

côté gauche serait, d.ans les ossements d'animaux domestiques,. toujours le mieux représenté.

Depuis lors, quelques travaux ont paru sur ce sujet, mais ils se rapportent à

la

faune

du

paléolithique.

A I'aide de notre matériel,

il

était indiqué de tenter un essai dans la direc- tion signalée par Rùtimeyer.

En

nous basant sur les os longs des membres (et pour

la

chèvre

et

Ie mouton sur les métacarpes et métatarses), nous avons établi Ie pourcentage d'utilisation des membres droits et gauches.

Os comparés : Droit Gauche Droito/o Gaucheo/o

Bæuf

(Fémur, tibia, humérus, radius, cubitus)

93 95 4g,4

5o,5

Chien. ( , ) ) ) )) )6+ 44 59,2

4o,B

Cochon.

( > )) ) ) )) ) S6 SS 52,r

47 '9

Mouton. (Tibia, métatarse, radius,

métacarpe) 16 37 27'?

62,8

Chèvre.( > ) ) ) ) S6 37 49,4

50,6

De cette statistique, il ressort que, pour ce qui concerne le bæuf,

il

semble y avoir eu égalité dans l'utilisation culinaire des membres droits et gauches.

r Rûrruevnn, Die Faund der Plahtbduten der Schueiq. (Neue Denkschriften det' Àllgemetnen schweizerischen Gesellschaft del Gesammten Naturwissenschaften, 1862, Bd' XIX' p' l?')

(11)

268 EUGÈNE PITTARD ET LOUIS REvERDIN

Il

en est de même pour

la

chèvre. Pour ce qui concerne le mouton, nous trouvons une util.isation presque double du côté gauchg, Çomparé au côté

droit. Et

c'est

le

contraire que nous constatons pour ce

qui

concerne le chien

et le

cochon.

Le

chierr surtout présente

un

beaucoup plus grand nombre d'ossements retrouvés appartenant au côté droit..

Dans nos séries, les faits signalés par Rûtimeyer se vérifi.eraient, seule- ment pour ce qui concerne le mouton. Pour tqutes les autres espèces, ces observations seraient controuvées; mais, nous ne voulons, naturellement, rien affirmer; nous restons encore dans l'expectative.

Les animaux domestiques étaient-ils mangés seulement lorsqu'ils étaient adultes ? ou les Lacustres, comme

rous,

abattaient-ils, selon les espèces, de préférence les jeunes ?

Pour répondre

à

cette question, nous établissons

trois

groupements selon

l'âge:

adultes (A), jeunes (B) et très jeunes

(c)

en nous basant sur

l'état

de

la dentition:

dentition complète,

dentition de lait

complète, dentition de

lait

incomplète.

Nous obtenons, pour chaque espèce, les pourcentages suivants:

Proportion en o/o:

Bæuf . c Chien Cochon Mouton Chèvre

Pour l'ensemble:.

5I,I

54,r 24,8 55,5 73,7 5r,B

49,g 45,9 44,8 2I13 37,8

30,4 r6,8 5,o

Io,4 Les cinq animaux connus des Néolithiques étaient

le

plus souvent le cochon excepté

-

-

mangés

àl'état

adulte; rarement à

l'état

très jeune.

Mais

.le

plus souvent r: est une formule insufûsante. euelques détails sont nécessaires.

Le

bæuf

n'était

pas abattu lorsqu'il

était

très jeune

et

les Lacustres mangeaient cet animaL presqu'également à r'état jeune (veau)

et à l'état adulte. Le chien

-

s'il a été mangé

- l'était

presque également à

l'état

jeune et à

I'état

adulte; mais, comme le bæuf, jamais à l,état de

très grande jeunessc.

Quant au cochon,

il était

principalement mangé jeune

et

très jeune.

Le quart seulement des ossements retrouvés appartient à des individus adultes. Peut-être nos ancêtres palaûttiques avaient-ils déjà

un

certain gorit pour le cochon de

lait

(3o /o des ossements recueillis) ?

Le mouton était sacrifié surtout à t'âge adulte, mais aussi assez fréquem- ment jeune (r /4 des individus retrouvés) et même très jeune.

Quant à

la

chèvre, les Lacustres paraissent

lui

avoir conservé

la

plus

(12)

DOMESTICA ION DES ANIMAUX 269 longue vie. Les trois quarts des ossements rètrouvés appartiennent à des individus adultes.

Quelle est

la

raison de ce choix spécial ? Peut-être

la

chèvre, animal producteur de

lait,

facile à élever, rustique; représentait-elle alors, comme aujourd'hui pour les populations pauvres de l'Euroqe, une espèce parti- culièrement utile ? Les chevreaux étaient rarement sacrifiés.

Il

est bien évident que les indications ci-dessus ne doivent êùe consi- dérées qu'avec réserves. Nous estimons n'avoir pas encore assez de matériel pour émettre des conclusions définitives. Celles que nous exposons ne sont que provisoires. Mais déjà maintenant nous pouvons envisager, mieux que nous le faisions hier, quelques-uns des.actes les plus importants de la vie matérielle des Lacustres

-

et peut-être, en même temps, des populations néolithiques.

Et

de telles constatations sont encourageantes.

Concl,usions.

Les faits ci-dessus nous permettent une ou deux conclusions définitives.

Ils

nons permettent aussi d'imaginCr, avec moins d'irrcertitutles clue par le passé, quelques-uns des actes de la vie matérielle de nos ancêtres néolithi-

ques

-

en I'espèce les Lacustres des bords du lac de Neuchâtel.

La première conclusion certaine, c'est qu'à cette époque, et en ce lieu, le cheval

n'était ni

domestiqué

ni

chassé. Dans près de 3ooo débris de sque- lettes déterminés nous n'avons rien trouvé qui put être attribué au cheval.

Naturellement, cette constatation n'empêche nullement de penser que le cheval existait dans nos régions.

Il

avait été tellement abondant dans Ie cours

du

paléolithique que nous

ne

comprendrions pas sa disparition.

Il

y a, d,ailleurs, au sujet de Ia continuité de cette espèce dans le néolithique, des publications récentes: ce n'est pas Ia place d'en parler ici.

Le deuxième

fait

certain c'est que les cinq animaux domestiqués dès Ie

néolithique sont présents, tous dans le même niveau archéologique ancien, (vieux néolithique palafittique d'Auvernier).

Les suppositions émises par divers auteurs au sujet d'une arrivée gra- duelle des animaux domestiques ne peuvent être acceptées. Les premiers cinq animaux domestiques sont arrivés ensemble dans le vieux néolithique suisse palafi.ttique.

II

est vrai que tous ces animaux ne sont pas représentés par des contirrgents de rnême valeur numérique.

La

chèvrc

ct lc

mouton, au début de la domestication, apparaissent, dans les Palafi.ttes, comme beau- coup moins abondants que Ie bæuf, le cochon et le chien.

Pendant longtemps, l'homme continue, pour les besoins de son alimen-

tation,

à faire appel aux espèces sauvages.

La

couche

III

de St, Aubin renferme une proportion d'animaux sauvages plus grande que la couche IV.

Arch. suisses d'anthrop. gén. - T. IV,- N" 3. tg l. rfl

(13)

27O EUGÈNE PITTARD ET LOUIS REVERDIN

A

ce même moment, marqué par les dépôts de

la

couche

III, il

semble

qu'il y a un recul dans l'utiiisation des animaux domestiques.

A l'égard des ces deux faits, nous rappelons quelques chiffres significatifs:

Couche IV Couche III Proportion des animaux

domestiques 78,to/o

6t,6o/o

,,, )) ) sauvages 2r,g%

38,40Â

Pour ce qui concerne leurs goûts culinaires, les Néolithiques parafittiques semblent faire un choix dans le groupe des animaux domestiques. Les deux espèces dont ils mangent le plus abondamment la chair sont le bæuf, puis le cochon. Viennent ensuite le chien (?), ie mouton,

la

chèvre. D,oh pro=

vient ce choix ? Est-il réellement déterminé par un gorit spécial pour telle ou telle viande ?

otr

est-il guidé

par

I'abondance plus ou moins grande de telle ou telle espèce ?

Il

semble que tous les animaux utilisés

-

aussi bien les domestiques que les sauvages (de grande tailte)

-

étaient dépecés sur terre

ferme.

Les morceaux choisis étaient ensuite apportés dans la station. Toutes les parties du corps des animaux n'étaient pas considérées par les Lacustres comme de même valeur culinaire.

Et

les parties utilisées n'étaient pas, non pruS, les mêmes chez les animaux considérés.

Les Lacustres semblent avoir préféré les membres antérieurs des cochons aux membres postérieurs; tandis que leur choix se portait plus souvent srrr les membres postérieurs lorsqu'ils dépeçaient le bæuf, la chèvre et Ie mouton.

Ils ne faisaient pas de choix entre Ie train de devant et le train de derrière, lorsqu'ils sacrifiaient les chiens.

Mais ce

qu'il

faut encore relever, c'est .le nombre beaucoup plus grand.

des têtes (représentées par les mandibules) apportées par les Lacustres d.ans

la

station, que des autres régions du corps. Avaient-ils une raison parti- culière de préférer cette partie du corps des animaux ?

Les Lacustres mangeaient-ils de préférence un côté du corps de l,animal et lequel ?

Nous avons constaté que, pour ce qui concerne le mouton, le côté gauche parait être préféré, tandis que c'est te côté droit chez le chien et le cochon.

Aucun choix de cette nature n'était

fait,

lorsqu'ils dépeçaient le bceuf et

la

chèvre.

Les Lacustres mangeaient surtout des animaux d.omestiques adultes le cochon excepté. celui-ci était le plus fréquemment mangé jeune et très

-

jeune (cochon de lait). Le bæuf et la chèvre n'étaient jamais mangés à i,état de très jeunes animaux. De tous les animaux, c'est la chèvre que l,on sacri-

fiait

le moins souvent à

l'état

jeune.

(14)

DOMESTICATION DES ANIMÂUX 27r

Il

est bien entendu que nous exprimons ces conclusions sous toutes réserves. ceci

fait,

nous rappelons que c'est la première fois que tous les ossements d'une couche palafittique, étudiés

en

stratigraphie,

ont

été recueillis. Nous rappelons également que les

faits

ci-dessus s'entendent pour le

lieu

oir

ils

ont été constatés.

Ce travail,

s'il

ne résoud pas définitivement les questions posées dans le préambule de ce mémoire, apporte cependant une contribution

-

que

nous pensons n'être pas sans valeur

-

à la connaissance des actes princi- paux de la vie matérielle de nos ancêtres palafittiques. Nous pensons

d'ail'

leurs continuer ces recherches.

Il

faudrait rrtêrne puuvoir les amplifier en élargissant les champs de fouilles à d'autres stations' Alors, les comparai- sons nécessaires pouryaient être faites.

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