• Aucun résultat trouvé

La Construction de critères de scientificité pour la démarche d'investigation : une approche pragmatique pour l'enseignement de la

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La Construction de critères de scientificité pour la démarche d'investigation : une approche pragmatique pour l'enseignement de la"

Copied!
617
0
0

Texte intégral

(1)

Thesis

Reference

La Construction de critères de scientificité pour la démarche d'investigation : une approche pragmatique pour l'enseignement de la

physique à l'école primaire

BLANQUET, Estelle

Abstract

Le mémoire propose une épistémologie pragmatique de la science scolaire à l'école primaire.

Une étude des représentations de la science par les enseignants confirme qu'ils n‘en ont majoritairement qu‘une vision assez floue, relevant d'une forme d'empirisme naïf. Un jeu opératoire de critères de scientificité adapté au contexte de l'école est développé dans une approche "bottom-up" qui part des pratiques de classe effectives. Sa capacité à discriminer pratiques scientifiques et non scientifiques est discutée, de même que les implications didactiques et épistémologiques de son utilisation. Cet outil épistémologique s'avère bien reçu par les enseignants auxquels il a été présenté. Le test en situation de différentes stratégies pédagogiques suggère qu‘on ajoute à la démarche d'investigation une composante épistémologique explicite. Certains éléments de méthode scientifique, ainsi que des rudiments de modélisation scientifique peuvent être travaillés dès la Grande Section de maternelle (5-6 ans).

BLANQUET, Estelle. La Construction de critères de scientificité pour la démarche d'investigation : une approche pragmatique pour l'enseignement de la physique à l'école primaire. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2014, no. FPSE 591

URN : urn:nbn:ch:unige-427832

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:42783

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:42783

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

(2)

                                                                                                                                                 

Section des Sciences de l’Éducation

Sous la co-direction d'André Giordan, Joaquim Dolz-Mestre, Éric Picholle (Nice) et Pierre Coullet (Nice) Thèse en cotutelle entre les Universités de Genève et de Nice Sophia Antipolis

       

LA CONSTRUCTION DE CRITÈRES DE SCIENTIFICITÉ POUR LA DÉMARCHE D’INVESTIGATION.

Une approche pragmatique pour l’enseignement de la physique à l’école primaire.

   

THÈSE

  Présentée à la

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève

pour obtenir le grade de  Docteur en Sciences de l’Éducation    

par Estelle BLANQUET

de Nice (France)

  Thèse No 591

GENÈVE Novembre 2014 N° étudiante : 09-327-420

(3)
(4)

UNIVERSITÉ DE NICE SOPHIA ANTIPOLIS - UFR Sciences École Doctorale de Sciences Fondamentales et Appliquées

THÈSE

pour obtenir le grade de Docteur en Sciences

de l’Université de Nice Sophia Antipolis Discipline : Physique

présentée et soutenue par Estelle BLANQUET

LA CONSTRUCTION DE CRITÈRES DE SCIENTIFICITÉ POUR LA DÉMARCHE D’INVESTIGATION.

Une approche pragmatique pour l’enseignement de la physique à l'école primaire.

Thèse en cotutelle entre les Universités de Nice Sophia Antipolis et de Genève

co-dirigée par Pierre COULLET, André GIORDAN et Éric PICHOLLE

soutenue le 24 novembre 2014

Jury :

Prof. Pierre Coullet, Université de Nice Sophia Antipolis Prof. Joaquim Dolz-Mestre, Université de Genève Prof. André Giordan, Université de Genève

Prof. Roger Maynard, Université Joseph Fourier de Grenoble Prof. Jean-Louis Martinand, ENS Cachan (rapporteur)

Prof. Paul-Antoine Miquel, Université Toulouse Jean Jaurès (rapporteur) Dr. Éric Picholle, CNRS Nice

Prof. Yves Quéré, membre de l'Académie des Sciences (président)

(5)
(6)

IVERsITÉ

DE GENÈVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DE5

sctENcEs DE

t'Éoucailolu

Bd du Pont-dArve 40 | CH{21 I Genève 4

Doctorat en sc¡ences de l'éducat¡on

en cotutelle avec I'Université de Nice Sophia-Antipolis

Thèse

de

Estelle Blanquet

lntitulée La construction de critères de scientificité pour la démarche

d'investigation. Une approche pragmatique pour I'enseignement de la physique à l'école primaire

La Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, sur préavis d'une commission forrnée par les professeurs :André Giordan, co-directeur, FPSE, Université de Genève, Joaquim Dolz, co-directeur, FPSE, Université de Genève ;

Eric Picholle, co-directeur, CNRS (Nice,LPMC) ; Pierre Coullet, co-directeur, Université de Nice Sophia-Antipolis ; Jean-Louis Martinand, ENS Cachan ; Yves Quéré, Ecole polytechnique, France ; Roger Maynard, Université Joseph Fourier de Grenoble ; Paul-Antoine Miquel, Université Paul Sabatier, Toulouse 2/Le Mirail

autorise I'impression

de la

présente thèse,

sans

prétendre

par là

émettre d'opinion sur les propositions qui y sont énoncées.

GENEVE, le 24 novembre 2014

Le doyen :

Pascal Zesiger Thèse No 591

Numéro d'immatriculation : 09.327 .420

Unl Mail

40 bd du Pont-d'Arve - CH-1211 Genève 4 Tê1.022 379 90 01 -Fax022 379 90 20

PJ-*

(7)
(8)

À mes parents

(9)
(10)

1. Introduction

Pour enseigner efficacement les sciences, un enseignant doit avoir une notion claire de la nature de son sujet — des qualités spécifiques qui séparent la science des autres domaines d’étude. Avec une telle compréhension, la science peut être enseignée comme un élément séparé ou intégrée à d’autres domaines sans perdre ses caractéristiques propres. En l’absence de cette compréhension, il risque d’y avoir peu d’activités, même dans le cadre de leçons spécifiques de science, qui soient réellement scientifiques.

Wynne Harlen

Les enfants aiment les sciences. Il suffit d’entrer au Palais de la découverte, à Paris ou au musée des sciences de Londres, de se rendre aux nombreux événements organisés à l’occasion de la Fête de la science ou, plus localement, dans un Jardin des sciences des Alpes-Maritimes pour voir briller les yeux et éclore les sourires des petits autant que des grands.

C’est beaucoup, mais cela ne saurait suffire... Aujourd’hui, seulement 27% des élèves en fin de CM2 font preuve d’aisance dans la manipulation des concepts étudiés tandis que près de 16% ne les maîtrisent pas1 ; ils ne sont qu’environ 9% à maîtriser les compétences nécessaires à la mise en œuvre d’une démarche d’investigation, selon les chiffres mêmes du Ministère de l’Éducation Nationale français.2 Ces chiffres sont stables depuis 2007.

Le triste constat est inévitable : en dépit des efforts déployés pour promouvoir, avec la démarche d’investigation (officiellement recommandée par les programmes de l’école primaire depuis 20023), un enseignement des sciences attractif à l’école primaire, celui-ci « marche » mal. Les raisons en sont certainement multiples et complexes, et de tous ordres — pédagogiques, psychologiques, anthropologiques, politiques, financières, etc. Aucune solution miracle ne résoudra à elle seule un problème de cette envergure. Pour autant, on peut tenter d’identifier certains de ses paramètres pertinents, et de déterminer comment on pourrait les faire évoluer plus favorablement.

Mon intuition, fondée sur près de 15 ans de pratique de la formation à la démarche d’investigation de milliers d’enseignants et futurs enseignants du primaire auxquels j’ai tenté de faire partager ma passion des sciences,4 est que l’un de ces paramètres pourrait être, indépendamment du problème de “niveau” — par définition assez élémentaire à l’école primaire —, la difficulté des enseignants à se représenter clairement la nature même de la science.

                                                                                                               

1. « CEDRE 2013 - Grande stabilité des acquis en sciences en fin d’école depuis 2007 ». Synthèse disponible sur le site du ministère. http://www.education.gouv.fr/cid54836/cedre-2013-grande- stabilite-des-acquis-en-sciences-en-fin-d-ecole-depuis-2007.html (consulté septembre 2014)

2. Un demi-siècle après l’introduction, entre 1946 et 1952, des “classes nouvelles” au collège.

3. « CEDRE 2013 - Grande stabilité des acquis en sciences en fin d’école depuis 2007 ». Note d’information de la DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance), N°27, juillet 2014, p. 3.

4. Formatrice d’enseignants du primaire en physique depuis 2000, j’ai travaillé aux IUFM de Franche- Comté (2000-2001), de Bourgogne (2003-2007) et de Nice (depuis 2007). J’ai par ailleurs assuré la formation des enseignants du secondaire à l’IUFE de Genève en 2013-2014.

(11)

L’idée que « pour enseigner efficacement les sciences, un enseignant doit avoir une notion claire de la nature de son sujet » n’a rien d’original. Je l’emprunte à Wynne Harlen, l’une des pionnières de la réflexion sur l’enseignement des sciences au primaire, qui insistait dans un rapport pour l’I.A.P.5 sur le caractère crucial d’une vision claire de la nature de la science pour enseigner les sciences. Plus généralement, la question de la nature de la science (NoS, dans le jargon de la didactique anglo-saxonne) et de son appropriation par les enseignants est devenue un enjeu considérable de la recherche en didactique des sciences. Son enseignement explicite est par ailleurs l’un des enjeux des récentes réformes des programmes américains et anglais, y compris pour l’école primaire.

Elle est en revanche moins courante en France, où la nature de la science est tout simplement absente des programmes d’enseignement des sciences à l’école primaire.

On ne dispose en outre que de fort peu de données sur sa perception aussi bien par les écoliers français que par leurs professeurs.

Objectifs et grandes lignes de la thèse

L’objet de cette thèse est donc, d’une part, de développer des outils épistémologiques accessibles aux enseignants du primaire et, d’autre part, de documenter autant que possible le rapport à la science des élèves et des enseignants français.

La partie théorique de ce travail a donc elle-même une vocation appliquée. Il s’agira de préciser autant que possible la notion de science scolaire, non de faire œuvre originale dans le débat séculaire sur la nature de la science. C’est pourquoi nous exclurons largement de notre propos les marges actuelles de la recherche scientifiques — nous épargnant ainsi les difficultés épistémologiques associées — pour nous appuyer sur la théorie des “trois mondes” de Karl Popper et qualifier en particulier différents types de savoirs établis (du “monde 3”). Nous nous appuierons également sur la notion de ”subjectivité collective”, la communication et la communicabilité étant au cœur même de toute transmission des savoirs, et donc de la science scolaire, qui se joue en grande partie au niveau individuel (“monde 2”).

Pour le professeur des écoles enseignant les sciences, l’enjeu est alors de faire accéder ses élèves à la science scolaire, conçue comme une culture savante. Des jeux de critères de scientificité adaptés au niveau de sa classe lui permettent de valider une pratique donnée comme recevable, ou non, en tant que “scientifique”. On peut qualifier de “bottom-up” cette approche ascendante, qui part des pratiques de classe élémentaires pour construire progressivement une représentation de la nature de la science. Par opposition, l’approche traditionnelle, qui part d’une vision de la “science                                                                                                                

5. I.A.P. (2009) Teacher Professional Development in Pre-Secondary School Inquiry-Based Science Education (IBSE). Wynne Harlen and Jorge E. Allende (Eds),. Accessible sur le site de l’IAP (consulté septembre 2014) : http://www.interacademies.net/12238/2951/12250/9348.aspx. C’est également de ce rapport qu’est extraite la phrase en exergue : « To teach science effectively a teacher needs a clear notion of the nature of the subject - of the distinctive qualities that separate science from other subject domains. With such an understanding science can be taught as part of a topic, integrated with other subjects yet still retain its special features. Without such understanding there may be little activity, even in separate science lessons, that is truly scientific. » (p. 19). L’InterAcademy Panel (I.A.P.) est un réseau qui rassemble au plan mondial les Académies des sciences.

(12)

des scientifiques”, édulcorée à mesure qu’on descend en niveau pour l’adapter aux enseignements scolaires, sera dite “top-down”.

La partie expérimentale, quant à elle, visera à déterminer l’évolution du rapport à la science de différents publics impliqués dans des démarches d’investigation soumises aux critères de scientificité précédemment définis.

En ce qui concerne les enseignants et futurs enseignants, nous adopterons la posture de praticien-chercheur, classique en sciences sociales,6 pour expérimenter à partir de nos propres formations à la démarche d’investigation en physique. Elle nous permettra d’évaluer la réception de l’outil développé et la capacité des enseignants à s’emparer, ainsi que d’identifier les modalités les plus favorables à son appropriation.

Par ailleurs, la mise en place dans leurs classes, par des enseignants en poste, de séquences adaptées permettra de déterminer la capacité des élèves à pratiquer une

“science scolaire” légitime, même à un niveau nécessairement limité. Nous concentrerons en particulier notre attention sur la Grande Section de maternelle, pour déterminer s’il est possible d’initier des enfants, dès 4/5 ans, à des activités authentiquement scientifiques, comme la modélisation.

Présentation des parties du manuscrit

La structure du présent mémoire traduit directement la double ambition consistant à développer des outils épistémologiques et à documenter le rapport à la science des élèves et des enseignants.

Après un État des lieux assez détaillé (Partie 2) et une présentation de la Problématique (Partie 3) et de la Méthodologie (Partie 4), la construction d’un ensemble opératoire de critères de scientificité est présentée dans la Partie 5, ainsi que ses implications didactiques et épistémologiques.

L’étude expérimentale de l’appropriation de ces critères par des enseignants et futurs enseignants du primaire, selon diverses stratégies pédagogiques, fait l’objet de la Partie 6.

La possibilité de transmettre à de très jeunes enfants (Grande Section de maternelle) des bases d’une pratique authentiquement scientifique est envisagée dans la Partie 7, également expérimentale.

Des propositions pédagogiques (partie 8), une conclusion et des perspectives closent ce travail (Partie 9), que documentent plusieurs annexes techniques.

                                                                                                               

6. L’expression est empruntée à Catherine De Lavergne : « La Posture du praticien-chercheur : un analyseur de l’évolution de la recherche qualitative », in Recherches Qualitatives, Hors série n°3 du juin 2007. Accessible en ligne sur le site de la revue (consulté sept. 2014) :

http://www.recherche-qualitative.qc.ca/revue/hors_serie/hors_serie_v3/Delavergne-FINAL2.pdf

(13)
(14)

Sommaire

1. INTRODUCTION 5

SOMMAIRE 9

2. ETAT DES LIEUX ET GENERALITES 13

2.1. Une représentation de la science problématique 15

2.2. Quelques définitions et outils théoriques 20

2.2.1. Théorie des trois mondes et subjectivités collectives 20 2.2.2. Langage et apprentissage dans la théorie des trois mondes 35 2.2.3. Conceptions initiales et obstacles épistémologiques 41 2.2.4. Représentations, modèles et théories physiques 46

2.2.5. Observations et expériences 69

2.2.6. Représentations de mondes imaginaires 74

2.3. Eléments de scientificité 78

2.3.1. Synthèse du corpus historique et épistémologique 78 2.3.2. Science de l'arrière et pratiques sociales de référence 93

2.3.3. Nature de la science à l'école primaire 98

2.4. Approches de la démarche d'investigation à l'école 119

2.4.1. Une idée limpide 120

2.4.2. Diversité des approches théoriques 124

2.4.3. La D.I. dans les programmes de l'école primaire 129 2.4.4. Démarche d'investigation vs. pédagogie frontale 136

2.4.5. Une mise en place difficile 139

2.5. La question de la science à l'école maternelle 142

2.5.1. Des compétences aux contours flous 142

2.5.2. "Découvrir le monde" 146

3. PROBLEMATIQUE 151

4. METHODOLOGIE 157

4.1. Méthodologie théorique 159

4.1.1. Identification d'un ensemble d'éléments de scientificité 160 4.1.2. Organisation d'un ensemble de contraintes 163 4.1.3. Constitution et test d'un jeu de critères de scientificité 164

4.2 Méthodologie expérimentale 165

4.2.1. Publics adultes 165

4.2.2. Elèves 191

4.2.3. Limites et discussion 201

5. CRITERES DE SCIENTIFICITE ET SCIENCE SCOLAIRE 205 5.1. Des critères de scientificité pour la science scolaire ? 207

5.1.1. Définition & emploi 208

5.1.2. Un contexte scolaire favorable 209

(15)

5.2. Identification et organisation 210 5.2.1. Identification des éléments de scientificité 210 5.2.2. Identification de critères adaptés à l'école 226 5.3. Un ensemble de critères de scientificité pour l'école primaire 233

5.3.1. Méthodologie scientifique 233

5.3.2. Expérience / Observation 239

5.3.3. Discours 252

5.3.4. Argumentation et théorisation 260

5.4. Capacité discriminante 269

5.4.1. Toute investigation est-elle scientifique ? 269 5.4.2. Peut-on récuser une revendication de scientificité ? 276 5.4.3. Scientificité de discours en rapport avec la science 284

5.4.4. Retour sur la notion de CS 290

5.4.5. Des jeux de critères discriminants pour l'école primaire 295

5.5. Pertinence des CS à l'école 300

5.5.1. Recouvrement avec les programmes 300

5.5.2. Compatibilité avec la démarche d'investigation 307 5.6. Définitions bottom-up de la science scolaire 316

5.6.1. Construction des définitions 316

5.6.2. Conséquences didactiques 319

5.7. Implications épistémologiques et stratégiques 324 5.7.1. La science scolaire comme culture savante 324 5.7.2. Scientificité des pratiques vs. scientificité des connaissances 334

5.7.3. Approche top-down 339

5.7.4. Approche bottom-up de la nature de la science 345

6. APPROPRIATION DE CRITERES DE SCIENTIFICITE PAR LES

ENSEIGNANTS ET FUTURS ENSEIGNANTS DE PRIMAIRE 349 6.1. Impact de la DI sur le rapport à l’expérience 351

6.1.1. Statut de l'expérience en DI 351

6.1.2. Evolution du rapport à l'expérience 353

6.2. Représentations spontanées de la science chez les enseignants 365

6.2.1. Profils épistémologiques 365

6.2.2. Critères de scientificité spontanés 381

6.2.3. Bilan : Une représentation de la science peu discriminante 399 6.3. Impact d'une DI “simple” sur l'expression de CS 401

6.3.1. Expression spontanée de CS 401

6.3.2. Expression spontanée d'éléments de scientificité 403 6.3.3. Expression sollicitée de CS et d‘éléments de scientificité 405 6.4. Impact d'une DI enrichie sur l'expression de CS 415

6.4.1. Enrichissement métacognitif 415

6.4.2. Enrichissement méthodologique 423

6.4.3. Synthèse 435

6.5. Appropriation de critères de scientificité explicites 437

6.5.1. Modalités de mise en œuvre 437

(16)

6.5.2. Réception de l'outil "critères de scientificité" 439 6.5.3. Appropriation de critères de scientificité : premiers résultats 444

6.6. Synthèse et perspectives 447

7. UNE SCIENCE POUR LES PETITS ? 449

7.1. Premiers contacts avec la méthode expérimentale en GS 451

7.1.1. Pré-requis 451

7.1.2. Questions posées et typologie des réponses 454

7.1.3. Pratiques expérimentales en GS 461

7.1.4. Quelques éléments de scientificité accessibles en GS 475

7.1.5. Autres éléments de scientificité 481

7.1.6. Signification et limite de la “science” expérimentale en GS 482 7.2. Navigation entre fiction et monde physique 483 7.2.1. La fiction, un outil précieux à la maternelle 483

7.2.2. Un cas d'école (Maternelle), Plouf ! 485

7.2.3. Observation de pratiques de classe 492

7.2.4. Entretiens différés 494

7.3. Une première approche de la modélisation scientifique 502

7.3.1. Un enjeu majeur au collège 502

7.3.2. Trois compétences méthodologiques fondamentales 503

7.3.3. La modélisation à l'école primaire 504

7.4. Retours d'enseignants de maternelle 510

7.4.1. Hiérarchisation spontanée des éléments de scientificité 510 7.4.2. Perception de l'utilité des éléments de scientificité 512 7.4.3. Perception par les enseignants de petite section 515 7.5. Définitions spontanées de la science chez les élèves de cycle 2 et 3 516 7.5.1. Une corrélation faible entre science et méthodologie 518 7.5.2. Une appropriation très majoritaire de la primauté de l'expérience 519 7.5.3. Une image des sciences très majoritairement positive 522 7.5.4. Evolution des catégories dominantes dans le temps 523 7.5.5. Représentation de la science en fonction du niveau de classe 527 7.5.6. Effet du jardin des sciences sur les réponses des élèves 532 7.5.7. Des représentations de la science en construction 536

8. PROPOSITIONS CURRICULAIRES 537

9. CONCLUSION ET PERSPECTIVES 545

TABLE DES MATIERES 559

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES  

 

(17)
(18)

Partie 2

É tat des lieux et généralités

(19)
(20)

2.1. Une représentation de la science problématique

« Après près de cinquante années de recherche sur les représentations des enseignants et des élèves sur la nature de la science, un certain nombre de généralisations peuvent être posées :

- Les élèves de niveau K-12 (Terminale) ne possèdent pas en général une représentation "adéquate" de la nature de la science

- Leurs professeurs de sciences ne possèdent pas en général une représentation

"adéquate" de la nature de la science. »

N.G. Lederman, 20071

Dans un ouvrage récent, l’épistémologue William Wismsatt propose de « reconstruire la philosophie pour des être humains limités »,2 au premier rang desquels il place les scientifiques eux-mêmes. Mon expérience quotidienne de formatrice en sciences à l’IUFM/ESPE de Nice me suggère que sa démarche pourrait également être utile aux enseignants du primaire, du moins pour ce qui relève de l’épistémologie.

En effet, enseigner les sciences aujourd’hui, c’est non seulement transmettre des contenus scientifiques aux élèves, mais aussi mener des « investigations » scientifiques.3 Parmi les compétences variées requises pour une telle approche,4 une compréhension minimale du fonctionnement de la science paraît indispensable.5 Or celle-ci semble bien loin d’être évidente pour tous. Se surajoutant à un défaut fréquent de formation scientifique initiale,6,7 ce défaut de représentation de la nature de la science pourrait être l’un des mécanismes limitant l’implication des enseignants du primaire dans l’enseignement des sciences à ce niveau, à la limite parfois de l’autocensure.

1. Norman G. Lederman, « Nature of Science : Past, Present and Future » in S.K. Abell and N.G.

Lederman (dir), Handbook of Research on Science Education, Lawrence Erlbaum éd., U.S.A., 2007, pp. 831–880.

2. William C. Wimsatt, Re-Engineering Philosophy for Limited Beings, Harvard Univ. Press, Cambridge, U.S.A., 2007, p. 5.

3. Selon les programmes officiels de l’école primaire. Bulletin Officiel n°1 du 5 janvier 2012, NOR MENE1131499A, pp. 6 & 17.

4. Une revue de littérature récente, s’appuyant sur différentes définitions proposées aux Pays-Bas et aux U.S.A. pour la démarche d’investigation, n’identifie ainsi pas moins de 22 compétences nécessaires aux enseignants du primaire pour mener à bien une démarche d’investigation. Ester Alake-Tuenter, Harm J.A. Biemans, Hilde Tobi, Arjen E.J. Wals, Ida Oosterheert & Martin Mulder,

« Inquiry-Based Science Education Competencies of Primary School Teachers : A literature study and critical review of the American National Science Education Standards ». International Journal of Science Education, 2012, vol. 34(17), pp. 2609-2640. DOI 10.1080/09500693.2012.669076

5. Le consensus semble établi aujourd’hui sur ce pré-requis (e.g. « To teach science effectively a teacher needs a clear notion of the nature of the subject - of the distinctive qualities that separate science from other subject domains. » I.A.P. (2009) Teacher Professional Development in Pre-Secondary School Inquiry- Based Science Education (IBSE). op. cit. p. 19). C’est par ailleurs une recommandation de l’OCDE : Pisa 2009 Assessment Framework – Key Competencies In Reading, Mathematics And Science, OECD, 2009, pp. 14 et 126. Disponible sur le site de l’OCDE :

www.oecd.org/pisa/pisaproducts/44455820.pdf (consulté août 2014).

6. Il ne suffit pas d’améliorer les connaissances scientifiques des enseignants pour qu’ils se lancent dans l’enseignement des sciences. Ce constat conduit par exemple Ken Appleton à conclure : « There may be key, fundamental misconceptions held by some elementary teachers, characteristic of a lack of understanding of foundational ideas in science, that particularly affect their self-efficacity. » Ken Appleton,

« Elementary Science Teaching », in Handbook of Research on Science Education, op. cit., p. 497.

7. Voir aussi Ken Appleton,  « Student Teachers Confidence to Teach Science : Is more science knowledge necessary to improve self-confidence? ». International Journal of Science Education, 1995, vol.

17 (3), pp. 357–369.

(21)

Les formateurs en sciences français s’accordent en effet à penser que de très nombreux enseignants du primaire font un “blocage“ sur l’enseignement des sciences.8 En 2010, Jean Salençon, alors Président de l’Académie des Sciences, se désolait que près de la moitié des enseignants de cycle 3 s’estiment incompétents pour enseigner les sciences.9 Dans les Alpes-Maritimes, tous cycles confondus, on peut estimer à 80% la part des enseignants du primaire qui ne se considèrent pas suffisamment compétents lorsqu’il s’agit d’enseigner les sciences10.

Un paysage longtemps mal connu

Peu d’informations statistiques sont disponibles pour étayer ces intuitions.11 La principale étude française s’appuie sur des données recueillies auprès de 120 futurs enseignants français du primaire et 171 du secondaire. Les différences entre les futurs enseignants du primaire de formation généralement non-scientifique et ceux du secondaire sont « minimales » et les deux populations y apparaissent porteuses d’un

« patchwork d’épistémologies, au sein duquel le statut des connaissances scientifiques n’est pas bien défini car elles sont à la fois vraies, objectives, prouvées, subjectives et évolutives » ce qui en fait un « mélange non réfléchi et donc peu cohérent d’idées ».12

La question de la compréhension13 de la nature de la science (Nature of Science, ou NoS) est en revanche une thématique majeure de la didactique des sciences anglo- saxonne. Depuis plus de cinquante ans, des études sondent en particulier les représentations de la science des élèves américains et de leurs enseignants.

Régulièrement, elles concluent à des inadéquations entre une représentation souhaitée et celle constatée.

Les études se sont longtemps focalisées essentiellement sur les professeurs de science, les élèves des niveaux collège et lycée, ainsi que les étudiants de l’université.

Une revue de littérature de 1992 ayant longtemps fait autorité ne citait que deux études s’intéressant aux enseignants du primaire.14 Une bibliographie de 2001

                                                                                                               

8.  Ce constat, qui n’est pas propre à la France, a fait l’objet d’études à l’étranger. Voir à ce propos la revue de littérature présentée par Ken Appleton, « Elementary Science Teaching ». Handbook of Research on Science Education, op. cit. , pp. 496–497.

9. Jean Salençon, Allocution d’introduction du colloque « Cultiver la science. La formation continue des professeurs enseignant les sciences », Paris, avril 2010.

10.  C’est ce qui ressort d’un sondage réalisé auprès de 165 d’entre eux au cours de formations.

Sondage réalisé par le praticien-chercheur au cours duquel il leur était demandé de se positionner sur une échelle graduée de 1 à 10, 1 signifiant “je ne me sens pas du tout capable d’enseigner les sciences”

et 10 “je suis tout à fait à l’aise”. 80% s’attribuent une note entre 1 et 5, certains sortant même de l’échelle pour proposer des nombres négatifs.

11. En 2011, après une recherche exhaustive de données portant sur les représentations de la science d’enseignants français, Lionel Pélissier n’identifie pas de travaux similaires aux études anglo- saxonnes. Lionel Pélissier, Etude de pratiques d’enseignement de savoirs de l’épistémologie en classe de physique de lycée général, Thèse de doctorat, Université de Toulouse 2 Le Mirail, 2011.  

12. Ezio Roletto, « La Science et les connaissances scientifiques : points de vue de futurs enseignants » in Aster, 1998, n°26, pp. 11–30. Une enquête est actuellement en cours à l’Institut Français de l’Education : http://ife.ens-lyon.fr/enquetes/sciences_ecole (consulté août 2014).  

13. On rencontre dans la littérature les deux expressions de understanding et de view of the Nature of Science.

14. Norman G. Lederman, « Students’ and Teachers’ Conceptions of the Nature of Science: A Review of the Research », Journal of Research in Science Teaching, 1992, vol. 29, pp. 331–359.

(22)

n’évoquait que dix articles s’intéressant aux représentations des enseignants du primaire, sur plus de deux cents15.

Une représentation des sciences par les enseignants globalement non satisfaisante Dans une deuxième revue de littérature de 2007, N.G. Lederman constate la convergence de nombreuses études réalisées avec des outils méthodologiques variés et n’hésite plus à conclure que « la compréhension des enseignants et des élèves s’est avérée systématiquement insuffisante ».16 Il précise par ailleurs que « les enseignants en science ne possèdent pas de représentations adéquates de la nature de la science, indépendamment de l’outil utilisé pour évaluer leur compréhension ».17,18

La première étude intéressant le primaire remonte à 1970 et portait sur 35 futurs enseignants dans le secondaire et 221 dans le primaire.19 R.L. Carey et N.G. Stauss y montraient déjà que les représentations de la science de ces futurs enseignants ne sont corrélées ni à leur niveau d’étude, ni à leurs résultats dans les disciplines scientifiques académiques.20 La seconde, due à J.W. Bloom21 en 1989, montrait que pour une grande partie des 80 futurs enseignants dans le primaire interrogés, l’objectif premier de la science était d’améliorer les conditions de vie de l’humanité.

Par ailleurs, pour ces enseignants, les théories scientifiques étaient disjointes des observations et pouvaient varier selon les idées personnelles de chacun.

La généralisation aux Etats-Unis22 et dans le monde entier de la démarche d’investigation à l’école a récemment suscité un regain d’intérêt pour les représentations de la science par les enseignants du primaire. Entre 1999 et 2012, on compte 14 études portant sur les représentations de la science chez les enseignants du primaire, impliquant 515 enseignants dont 202 en poste et 313 futurs enseignants en formation initiale (Addendum 2.a).

Toutes concluent que les enseignants du primaire ont une vision “non adéquate”

ou confuse de ce qu’est la science. Elles suggèrent par ailleurs qu’il n’est pas facile de modifier ces conceptions.

                                                                                                               

15. R. L. Bell, F. Abd-El-Khalick, N.G. Lederman, W.F. McComas, & M. Matthews, « The nature of science and science education : A bibliography ». Science & Education, 2001, vol. 10, pp. 187–204.

16. Norman G. Lederman, « Nature of Science : Past, Present and Future » in Handbook of Research on Science Education, op. cit., p. 861.  

17. Idem, p. 852. La liste qu’il établit des différents tests utilisés depuis 1954 révéle qu’au fil du temps et des études, les présupposés des chercheurs ont varié.  

18. Voir également Xiufeng Liu, « Developing Measurement Instruments for Science Education Research » in B. J. Fraser et al. (éd.), Second International Handbook of Science Education, Springer International Handbook of Education 24, 2012, pp. 651–665.  

19. R. L. Carey, N. G. Stauss, « An Analysis of Experienced Science Teachers’ Understanding of the Nature of Science », School Science and Mathematics, 1970, vol. 70, pp. 366–376.

20. Lederman arrive à la même conclusion : « les représentations de la nature de la science des enseignants ne sont pas significativement associées à leur niveau d’études ». Norman G. Lederman, « Nature of Science : Past, Present and Future », op. cit., p. 852.  

21. J. W. Bloom, « Preservice Elementary Teachers Conceptions of Science : Science, Theories and Evolution », International Journal of Science Education, 1989, vol. 11, p. 401–415.

22. National Research Council. National Science Education Standards. National Committee on Science Education Standards and Assessment. Washington, DC : National Academy Press, 1996.

(23)

Plus précisément :

- 13 études sur 14 évaluent l’impact d’un type de formation donné sur les représentations des enseignants considérés. Formation implicite ou explicite au NoS, couplage avec une formation à la métacognition, à la démarche d’investigation, à la modélisation, à l’évaluation, formation dite réflexive-explicite, mise en contact régulier avec un formateur spécialiste des questions NoS : toutes permettent d’améliorer les représentations des enseignants. Les résultats sont néanmoins meilleurs lorsque la formation au NoS est explicite.

- Toutes s’appuient sur des formations longues (comparées aux formations françaises typiques). Il s’agit essentiellement de blocs de 48h dédiés aux

“méthodes scientifiques élémentaires” (elementary science methods course) 23 pour ce qui est de la formation initiale des futurs enseignants. Les programmes de formation continue contiennent environ 130h de formation réparties sur un à trois ans. 24

- 11 études ont été réalisées par des groupes de chercheurs incluant Valarie L. Akerson. Elles portent sur 272 enseignants américains. Une douzième porte sur 22 enseignants en formation continue et utilise une méthodologie proche des 11 premières (test VNOS). Les deux dernières utilisent une méthodologie distincte et portent sur respectivement 148 et 73 futurs enseignants (resp. irlandais et australiens).

- Une seule étude s’intéresse à l’effet à long terme sur 19 futurs enseignants d’une formation réflexive-explicite. Après une amélioration de leurs répresentations, la moitié d’entre eux reviennent 5 mois après les cours à leurs représentations initiales.

Représentation des sciences par les élèves du primaire

Il paraîtrait surprenant que des élèves de primaire aient une représentation plus claire de ce qu’est la science que leurs enseignants. Très peu d’études sont toutefois disponibles sur la question. « Nous n’avons pas été en mesure de trouver la moindre étude au niveau des classes élémentaires inférieures », constatait même en 2005 une revue assez exhaustive de la littérature disponible25 ; la même n’identifiait que deux articles portant sur des élèves entre 11 et 12 ans (grade 6), et aucun en-deçà.

Depuis, à notre connaissance, seules cinq nouvelles études sont parues , d’ampleur assez limitée, sur les représentations d’élèves plus jeunes : quatre américaines (Akerson26, 27, 28, 29) et l’autre irlandaise (Murphy30, 104 élèves entre 8 et 11 ans). Elles                                                                                                                

23. À ces cours de méthodologie s’ajoutent par ailleurs des cours portant plus précisément sur les contenus scientifiques pour les futurs enseignants du primaire.

24. Ils incluent le plus souvent quinze jours de cours intensif pris sur les vacances des enseignants et un atelier de 3 à 4h par mois sur le reste de l’année.

25. V. Akerson & F. Abd-El-Khalick, « How should I know what scientists do? — I’m just a kid » : Fourth-Grade Students’ Conceptions of Nature of Science ». Journal of Elementary Science Education, 2005, vol.17 (1), pp. 1–11.

26. V. Akerson & L. A. Donelli. « Teaching Nature of Science to K­‐2 Students : What understandings can they attain? ». International Journal of Science Education, 2009, vol. 32 (1), pp. 97–124. Cette étude porte sur 9 élèves de CP, 8 de CE1 et 1 de GS.

27. V. Akerson et M. L. Volrich. « Teaching nature of science explicitly in a first grade internship

(24)

constatent que les jeunes élèves n’ont pas une représentation adéquate de ce qu’est la science.

Enfin, une revue de littérature31 de 2007 portant sur la compréhension de la science chez de très jeunes élèves indique qu’on peut s’attendre à une très grande dispersion des réponses chez les jeunes enfants, en fonction en particulier de leur vécu personnel (visite dans des musées, dessins animés, parents scientifiques ou non etc.).

En l’absence d’étude sur la question, ils font part des réponses d’élèves de CP (K-1) de la classe d’une praticienne-chercheuse, Gertrude Henessy, à la question « C’est quoi la science pour toi ? » : « apprendre sur des choses, sur le corps humain, apprendre et écouter, s’amuser et apprendre comment c’était avant ». Les auteurs en concluent que les jeunes élèves ont dans l’idée que la science implique d’apprendre de nouvelles choses bien qu’il n’ont pas encore beaucoup d’idées sur ce qui distingue la science d’autres moyens d’accès au savoir.

Il apparaît donc que ni les enseignants du primaire, ni leurs élèves ne disposent malheureusement, d’une manière générale, de représentations satisfaisantes de ce qu’est la science.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                         

setting ». Journal of Research in Science Teaching, 2006, vol. 43(4), pp. 377–394. Cette étude porte sur 14 élèves de CP.

28. C. Quigley, K. Pongsanon et V. L. Akerson. « If we teach them, they can learn : Young students’

views of nature of science during an informal science education program ». Journal of Science Teacher Education, 2011, vol. 22 (2), pp. 129–149. Cette étude porte sur 5 GS, 8 CP et 6 CE1.

29. Valarie L. Akerson, Gayle A. Buck, Lisa A. Donnelly, Vanashri Nargund-Joshi et Ingrid S. Weiland.

« The Importance of Teaching and Learning Nature of Science in the Early Childhood Years ». Journal of Science Education Technology, 2011, vol. 20 (5), pp. 537–549. Cette étude porte sur 24 CE1 ainsi que sur les mêmes élèves que dans l’étude « Teaching Nature of Science to K­‐2 Students : What understandings can they attain? ».

30. Cliona Murphy, Colette Murphy & Paula Kilfeather. Children making sense of science. Research in Science Education, 2011, vol. 41, pp. 283–298. DOI 10.1007/s11165-010-9165-6

31. Collectif, Taking Science to School : Learning and Teaching Science in Grades K-8. Committee on Science Learning, Kindergarten Through Eighth Grade. Richard A. Duschl, Heidi A. Schweingruber, and Andrew W. Shouse, Editors. Board on Science Education, Center for Education. Division of Behavioral and Social Sciences and Education. The National Academies Press, U.S.A., 2007, p. 81.  

(25)

2.2. Quelques définitions et outils théoriques

2.2.1.THEORIE DES TROIS MONDES ET SUBJECTIVITES COLLECTIVES

2.1.1. Le monde physique et ses représentations

Nous assumerons dans ce travail une posture heuristique réaliste et empiriste,32 c’est à dire que nous admettrons l’existence d’une réalité physique indépendante du sujet qui l’observe et à propos de laquelle il est possible de bâtir des consensus, mais dont on ne peut avoir qu’une connaissance limitée et dont les origines ne nous sont pas plus accessibles que le réel en soi33.

Il va de soi que cette posture n’a aucune vocation à s’appliquer naïvement à toutes les situations et à toutes les problématiques scientifiques, hors du cadre scolaire. Ainsi la question de l’existence d’une réalité objective indépendante de l’observateur devrait-elle être traitée avec beaucoup plus de précaution si l’on devait prendre en compte les idées quantiques apparues dans la première moitié du XXe siècle. De même il ne s’agit pas de contester a priori la possibilité d’autres voies d’accès à la connaissance de l’entièreté du monde34 et de ses origines.

Toutefois de telles réserves n’ont pas lieu de s’appliquer à l’école primaire.

2.1.1.1. Une approche réaliste et empiriste

Si nous ne pouvons pas être sûrs de l’existence indépendante des objets, nous serons laissés seuls dans un désert — il se peut que la totalité du monde externe ne soit rien d’autre qu’un rêve, et que nous seuls existions.

C’est une possibilité inconfortable ; mais, bien que l’on ne puisse strictement prouver qu’elle est fausse, il n’y a pas la plus légère raison de supposer qu’elle soit vraie.

Bertrand Russell, Les Problèmes de la philosophie35

La question de la réalité du monde sensible est aussi ancienne que la philosophie. Mais c’est René Descartes qui la place à la racine même de la méthode scientifique. En effet, il s’impose de :

Ne recevoir aucune chose pour vraie, qu’[il] ne la connusse évidemment pour tel : c’est à dire d’éviter soigneusement la précipitation et la prévention ; et de ne comprendre rien de plus en [ses] jugements que ce qui se présenterait si clairement et distinctement à [son] esprit, qu’[il] n’eusse aucune occasion de la mettre en doute.36

                                                                                                               

32. Le terme est ici employé dans le sens traditionnel où l’on considère que notre connaissance du monde dérive de l’expérience sensible, en faisant en particulier l’économie des spéculations sur des questions sans réponse possible dans le contexte expérimental et théorique considéré. La philosophie des sciences anglo-saxonne désigne un tel « principe d’économie » sous le nom de « rasoir d’Ockham ».

33. La notion d’objet « en soi », de « noumène » (par opposition au « phénomène » qui apparaît au sujet) est au cœur du « réalisme empirique » kantien (Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, 1781).

Comme lui, nous adoptons une définition négative de l’empirisme, par exclusion a priori de ce qui n’est pas accessible au sujet. Soulignons toutefois que notre emploi du terme “empirique” est, ici, délibérément, plus exclusif (donc plus étroit) que celui de Kant.

34. En effet, dans cette acception, une approche holiste de la connaissance du monde ne saurait être empirique ; pour autant, on peut revendiquer l’accès à celle-ci par des voies mystiques, par exemple.

35. Bertrand Russell, Les Problèmes de la philosophie (The Problems of Philosophy, 1912), éd. Payot, 2005.

36. René Descartes, Discours de la Méthode, 1637, éd. Gallimard Flammarion, 2000, p. 49.

(26)

Or ce “doute hyperbolique” fondateur ne l’autorise à valider a priori qu’une certitude : « Je pense, donc je suis. » J’existe, en tant que sujet. En revanche, le témoignage de mes sens n’est pas recevable a priori, dans la mesure où je pourrais être en train de le rêver37 : « il n’y a point d’indices concluants, ni de marques assez certaines par où l’on puisse distinguer nettement la veille d’avec le sommeil »38. Pire : je ne suis pas à l’abri d’un malin génie, « non moins rusé et trompeur que puissant qui a employé toute son industrie à [me] tromper »39. La seule existence dont Descartes puisse être absolument certain est la sienne propre.

Un détour par la théologie lui permet d’évacuer le paradoxe en “démontrant”40 l’existence d’un Dieu parfait, donc bienveillant : « de ce que Dieu n’est point trompeur, il suit nécessairement que je ne suis point en cela trompé »41.

Si l’on refuse un tel argument théologique, et plus généralement toute pétition de principe, la possibilité d’un malin génie reste en toute rigueur irréfutable,42 aussi paranoïaque et improbable qu’elle puisse paraître.

Pour échapper au solipsisme, avant de pouvoir envisager un regard scientifique sur le monde, il faut donc parier sur son existence. Dans l’esprit de ce pari cartésien, nous poserons donc arbitrairement en principe (métaphysique) l’existence d’une réalité physique indépendante du sujet qui l’envisage.

Dans le même esprit, nous admettrons l’existence et la réalité d’un grand nombre de sujets distincts, capables de se reconnaître mutuellement pour tels, et de communiquer entre eux.

Possibilité d’énoncés objectifs sur la réalité physique

Nous admettrons qu’il est possible de construire des énoncés objectifs à propos de cette réalité physique indépendante du sujet. Par « énoncé objectif », nous entendons ici un énoncé dont, d’une part, la vérité43 ne dépend pas des sentiments, des opinions, des idées ou des intuitions du sujet ; et d’autre part dont la vérité est la même quel que soit le sujet.

Inversement, nous qualifierons de « subjectif » un énoncé qui dépend des sentiments, des opinions, des idées ou des intuitions du sujet. Enfin, pour être                                                                                                                

37. L’argument du rêveur est classique. Dans le Théétète, Platon nous décrit Socrate s’en amusant déjà.

38. « Je vois qu’il n’y a point d’indices concluants, ni de marques assez certaines par où l’on puisse distinguer nettement la veille d’avec le sommeil, que j’en suis tout étonné ; et mon étonnement est tel, qu’il est presque capable de me persuader que je dors. » ; R. Descartes, « Première méditation », Méditations métaphysiques (1641), in Œuvres et Lettres, Bibliothèque de La Pléiade, éd. Gallimard, 1996, p. 269.

39. idem, p. 272.

40. La démonstration des Méditations métaphysiques est soit ironique, soit fautive (Descartes y glissant subrepticement du concept de réalité à celui de perfection).

41. René Descartes, « Première méditation », Méditations métaphysiques, op. cit., p. 334.

42. Le malin génie a bien sûr connu des incarnations plus modernes. Ainsi, le philosophe Hilary Putnam imagine-t-il un cerveau humain placé dans une cuve et alimenté par de pseudo-influx nerveux simulés par un ordinateur, “malin génie” high tech (H. Putnam, Raison, Vérité et Histoire ; Reason, Truth, and History, 1981). L’expérience de pensée de Putnam dérive d’une thématique science-fictionnelle classique, en particulier dans la littérature paranoïaque de Philip K. Dick ou de Stanislas Lem. En 1941, un autre auteur de science-fiction, Robert Heinlein, met en scène une variation sur le thème d’un personnage qui ne peut décider s’il est un psychopathe paranoïaque ou un dieu contraint à se croire un homme [« Ces gens-là » («

They », 1941) ; in Une Histoire de la science-fiction, t.2, dir. J. Sadoul, Librio, 2000, pp. 65-81].

43. C’est à dire le fait d’être vrai, ou bien le fait d’être faux.

(27)

systématique, nous qualifierons de « personnel » un énoncé (subjectif ou non) dont la vérité varie en fonction du sujet44.

D’autre part, nous ne préjugeons pas ici des contraintes qui peuvent peser sur une telle construction d’énoncé — triviale dans une posture de réalisme naïf, mais hautement technique, par exemple, dans un cadre quantique orthodoxe, où les seuls énoncés objectifs portent sur des résultats de mesure, pour des observables elles-mêmes dûment définies via une théorie de la mesure sophistiquée. Soulignons toutefois qu’une condition nécessaire de la possibilité de construire des énoncés objectifs est l’existence d’un langage opératoire, qu’il soit naturel ou formel.

La possibilité d’énoncés objectifs n’est sans doute pas démontrable a priori. On pourrait en effet imaginer des univers dans lesquels il est impossible d’en construire. 45 Toutefois, aucune science (du moins telle que nous la connaissons) n’y serait possible. L’existence de cette dernière, dans notre monde, vaut donc démonstration a posteriori.

Distinction entre le monde physique et ses représentations

Mais si notre vue s’arrête là, que l’imagination passe outre ; elle se lassera plutôt de concevoir, que la nature de fournir.

Blaise Pascal, « Les Deux infinis » 46

Tous les énoncés ne portent pas sur le monde physique. Certains énoncés sont purement esthétiques, pour le seul plaisir des mots. D’autres portent sur des mondes imaginaires, sans rapport avec le monde physique : on parle alors d’énoncés fictionnels47.

Même lorsqu’il porte sur le monde physique, ou plus précisément lorsqu’il décrit un phénomène particulier du monde physique, un énoncé ne saurait être confondu avec ce phénomène dont, selon la belle analogie d’Alfred Korzybski, il ne constitue au mieux qu’une “carte”48 :

1. Une carte n’est pas le territoire (les mots ne sont pas les choses qu’ils représentent)

2. Une carte ne couvre pas tout le territoire

(les mots ne peuvent pas recouvrir tout ce qu’ils représentent)

3. Une carte est auto-référente (le langage nous permet de parler du langage)

Plus généralement, toute représentation du monde, de quelque type qu’elle soit (images, schémas, représentations textuelles, verbales, mathématisées, etc.) doit être distinguée de ce qu’elle représente. En effet, même si elle a un référent dans                                                                                                                

44. En physique classique, il n’est a priori pas possible de construire un énoncé à la fois personnel, non subjectif, univoque et bien formulé à propos du monde physique. Mais certaines interprétations extrêmes de la mécanique quantique peuvent en admettre la possibilité. De même, de tels énoncés sont fréquents à propos de certains univers fictionnels, comme ceux de Lewis Carroll, démiurge logicien.

45. Il s’agirait alors d’une “non-science fiction”, pour reprendre l’expression de Quentin Meillassoux, in

« Métaphysique et fiction des mondes hors-science », Le Mois de la science-fiction à l’ENS, ENS Ulm, 18 mai 2006. Accessible sur le site : www.diffusion.ens.fr/index.php?res=conf&idconf=1286 (consulté août 2014).

46. Blaise Pascal, « Disproportion de l’homme », in Pensées, 1670, Brunschvicg 72.

47. Nous employons le terme dans un sens plus restreint que le sens courant de “produit de l’imagination”, dans lequel on pourrait considérer, très généralement, que tout modèle est une fiction.

48. Alfred Korzybski, « The Role of Language in the Perceptual Processes », in Science & Sanity. An Introduction to Non-Aristotelician Systems and General Semantics, 1933 ; éd. IGS, 1994 ; 3e éd., 1948.

(28)

le monde physique externe, la représentation relève proprement du sujet.

Au-delà de cette distinction d’ordre métaphysique, il n’est généralement pas possible d’établir une correspondance terme à terme entre une représentation de la réalité physique et les éléments du phénomène qu’elle décrit. Une démonstration classique confronte la finitude de l’esprit humain, et donc des représentations qu’il peut produire, et l’infinie complexité du monde physique. Ainsi, Pascal voulait-il « faire voir un abîme nouveau, (...) une infinité d’univers » dans la plus infime partie d’un minuscule ciron.49

D’autre part, différents énoncés peuvent avoir des degrés de généralité très variables. Ainsi, un énoncé objectif rendant compte d’une observation particulière à un instant et dans des conditions donnés n’a aucune généralité, quand un autre peut valoir à différents moments (e.g. “le Soleil se lève à l’est”), voire revendiquer une vocation universelle ( ).

Inversement, le monde physique ne connaît que des réalisations particulières : il est ce qu’il est, à un moment donné. 50 Même s’il est possible d’énoncer des généralités à son propos, une “généralisation du monde physique” est une contradiction dans les termes.

La possibilité même d’une représentation opératoire du monde, et a fortiori d’une modélisation scientifique, passe donc par une renonciation à l’ambition naïve de le penser intégralement, et par l’acceptation de n’en manipuler que des représentations très simplifiées.

Origine des représentations

Une autre difficulté concerne l’origine de telles représentations, et plus généralement de toute pensée créatrice. Nous admettrons dans ce travail que les représentations du monde sont créées par des sujets, sans intervention de démiurges ou d’inspirateurs surnaturels. 51

Ce choix ne fait bien sûr que renvoyer la difficulté aux mystères de la vie et de la pensée elles-mêmes. Au risque du réductionnisme, nous conjecturons donc avec Karl Popper que l’univers physique est, en en sens, “créatif” :

Je conjecture que la vie, et par la suite également l’esprit, ont évolué ou émergé d’un univers qui était, jusqu’à un certain moment, dépourvu de vie et d’esprit. D’une manière ou d’une autre, la vie, ou la matière vivante, ont émergé de la matière inerte ; et il ne semble pas complètement impossible que nous comprenions un jour comment ceci est advenu. Les choses apparaissent bien plus difficiles en ce qui concerne l’émergence de l’esprit. [...] Je pense que nous devons admettre que l’univers est créatif, ou inventif. En tout état de cause, il est au moins créatif au sens où le sont les grands poètes, les grands artistes et les grands scientifiques.52

                                                                                                               

49. Blaise Pascal, « Disproportion de l’homme », in Pensées, 1670, Brunschvicg 72.

50. Ou, selon la formule stoïcienne classique « Ce qui est, est ; ce qui n’est pas , n’est pas ».

51. Dans la tradition grecque, depuis Hésiode, les poètes et les créateurs humains ne sont que les instruments des Muses.

52. « I conjecture that life, and later also mind, have evolved or emerged in a universe that was, up to a certain time, lifeless and mindless. Life, or living matter, somehow emerged from nonliving matter ; and it does not seem completely impossible that we shall on day know how this happened. Things look far more difficult with the emergence of mind. /…/ I think we have to admit that the universe is creative, or inventive. At any rate, it is creative in the sense in which great poets, great artists, and great scientists are creative. » Karl R. Popper, « Natural selection and the

Références

Documents relatifs

B- Étude du choc entre les deux boules On lâche sans vitesse initiale la boule 1 du point G.. Au point G 0, un choc se produit entre la boule 1 et la boule 2 qui initialement est

Méthodes : Nous avons mené une étude descriptive qui s’est déroulée en 2 étapes : une description des mesures mises en place par la Faculté de médecine de

Une enzyme n’agit que dans des conditions de pH déterminées (acide, neutre, basique): l’amylase salivaire est active en milieu neutre.. QU’EST-CE QU’UN SUC

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des

Pour la même tension, une distance plus grande correspond à une plus petite charge → capacité plus petite ; et une plus grande surface correspond à une plus grande charge

La question des usages pédagogiques du numérique en contexte universitaire : comment accompagner les enseignants ?.. Revue Internationale des Technologies en Pédagogie Univer-

Ces expériences, fondées sur la déflexion des électrons, ne permettaient pas de déterminer séparément leur charge et leur masse, mais seulement leur rapport : la force

B- Étude du choc entre les deux boules On lâche sans vitesse initiale la boule 1 du point G.. Au point G 0, un choc se produit entre la boule 1 et la boule 2 qui initialement est