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III. Activité d’électrodes de cuivre, d'or et d'alliages or- cuivre pour l’électroréduction du dioxyde de carbone

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31 III. Activité d’électrodes de cuivre, d'or et d'alliages or-

cuivre pour l’électroréduction du dioxyde de carbone

III.1 INTRODUCTION

III.1.1 État de la question

Électroréduction du CO2 en milieu aqueux sur des surfaces monométalliques

Vers le milieu du vingtième siècle, Giner met en évidence la réduction du dioxyde de carbone par les atomes d'hydrogène adsorbés sur une électrode de Pt [1]. Ces révélations suscitent chez les électrochimistes un vif intérêt qui s'accroît dans les années qui suivent, avec la multiplication de travaux et résultats prometteurs. Dans un premier temps, l'attention se porte davantage sur les métaux dits "à grande surtension pour la réaction d'évolution de l'hydrogène". Sur des électrodes comme Pt et Rh, dont la surface est couverte de H (ads) dans le domaine de potentiels auquel la réduction du dioxyde de carbone est observée, les molécules de CO2 adsorbées sont présumées réagir avec H (ads) pour former un produit de réduction non identifié à ce stade des études [1,2]. Par contre, il a été établi que l'électroréduction du CO2 sur Hg ou Pb conduit à la formation de formiate en milieu aqueux [3] et de formiate, d'oxalate et de CO en milieu non aqueux [3,4].

Vassiliev et ses collaborateurs élargissent la gamme des métaux étudiés dans une publication qui, sans avoir la prétention d'élucider tous les processus de la réduction électrochimique du dioxyde de carbone, discute néanmoins d'une manière systématique de l'influence de plusieurs paramètres expérimentaux, tels que la nature de l'électrode, le potentiel, la pression partielle en CO2, le pH, la température et la nature de l'électrolyte, sur le courant mesuré lors de la réduction du CO2 [5]. Cu, Sn, Ga et Sb sont, parmi les métaux examinés, ceux qui nécessitent les surtensions les plus faibles pour la réduction du CO2, tandis que Hg requiert une surtension plus élevée. En ce

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32 qui concerne le milieu dans lequel sont effectuées les mesures, le pH se révèle être un facteur déterminant : en milieu acide, la réduction du CO2 est masquée par la réduction des protons ; en milieu basique, CO2 est converti, par réaction avec OH-, en HCO3- qui ne peut être réduit électrochimiquement. Ces contraintes limitent le domaine de pH, généralement aux milieux neutres. Par exemple, la réduction du CO2 sur des électrodes de cuivre n'est observée que pour un pH compris entre 5 et 6,5. La nature de l'électrolyte a également une influence sur l'activité des électrodes, modifiant la surtension nécessaire pour réduire le CO2. Dans la seconde partie de leur travail, le groupe de Vassiliev complète cette étude réalisée en solutions aqueuses par des mesures en milieux aprotiques [6].

La même année, en 1985, une publication du groupe de Hori va changer la façon d'envisager la réaction de réduction électrochimique du CO2. Alors que la plupart des travaux se basent sur des mesures électrochimiques conventionnelles, Hori et ses collaborateurs mettent l'accent sur l'étude de la sélectivité de l'électrode en accordant une importance prépondérante à l'électrolyse et à l'analyse des produits de la réaction. Jusqu'à présent, à de rares exceptions près [7], seule la phase aqueuse était analysée, et HCOO- était l'unique produit détecté. Hori et al. présentent les résultats de l'analyse, qu'ils qualifient alors de "complète", des phases liquide et gazeuse après l'électroréduction du CO2 sur différents métaux [8]. Ils révèlent la formation de monoxyde de carbone et de méthane présents dans la phase gazeuse, en plus du formiate déjà connu comme produit de la réduction du CO2 dans la phase aqueuse. L'année suivante, ils examinent brièvement la réduction électrochimique du CO2 sur des électrodes de Cu [9] : ils détectent HCOO- en solution et CO, CH4 et C2H4 sous forme gazeuse. Ces travaux ouvrent la voie à de nouvelles perspectives, d'une part en insistant sur l'importance d'évaluer non seulement l'activité des métaux mais également leur sélectivité, et d'autre part en établissant la possibilité de former des hydrocarbures sur des électrodes de cuivre. Hori fait de l'électrolyse une étape presque indispensable dans l'étude de l'électroréduction du CO2.

A partir de ce moment, les recherches qui sont poursuivies se focalisent davantage sur l'analyse de la sélectivité des électrodes et des variations de la distribution des produits en fonction des conditions expérimentales, et un

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33 classement des métaux s'établit peu à peu sur base de l'espèce principalement formée [8,10,11]. L'activité d'électrodes de nickel, fer, platine et rhodium est très faible ; il est cependant reconnu que CO2 s'adsorbe sur les surfaces de Pt [12,13] et de Rh [2,13] où il est partiellement réduit par les H (ads). Par contre, le palladium produit CO et de petites quantités de HCOO- [12,14,15]. En réalité, HCOO- est surtout obtenu sur le plomb, le mercure ou l'indium [16].

Dans la série des métaux qui donnent essentiellement du monoxyde de carbone, nous retrouvons l'argent, le zinc et l'or, pour n'en citer que les principaux. Parmi ceux-ci, les électrodes de Au [17-19] sont capables de réduire CO2 en CO, seul produit détecté, avec la plus petite surtension. Le cuivre, de son côté, se distingue des matériaux cités précédemment par la diversité des produits formés lors de la réduction électrochimique du CO2 : CH4, C2H4, HCOO-, C2H5, CO et CH3CHO sont générés en quantités variables sur une électrode polycristalline de Cu [20].

De nombreux travaux sont dès lors consacrés à l'électroréduction du CO2

sur Cu et, plus précisément, à l'étude de l'influence de l'état de la surface de l'électrode de Cu sur son activité. Ainsi, le traitement de l'électrode de Cu se révèle d'une importance primordiale pour la sélectivité de la réaction et la reproductibilité des mesures : des corrélations entre la distribution des produits et la structure chimique de la surface d'une part, et la morphologie de la surface d'autre part ont été suggérées [21-24]. Il a été montré que la présence d'oxydes de Cu favorise la production de CO et H2, avec une évolution de la distribution des produits marquée au cours du temps, tandis que le Cu métallique conduit principalement à la formation, plus constante dans le temps, d'hydrocarbures.

Par ailleurs, l'activité de surfaces rugueuses et lisses diffère considérablement, avec un avantage pour les surfaces rugueuses.

Au cours de ces recherches, plusieurs questions sont abordées, certains problèmes sont soulevés, motivant de nouvelles études pour une meilleure compréhension de la réduction électrochimique du CO2.

Trois points sont plus particulièrement discutés dans la littérature : l'élucidation du mécanisme de la réaction, encore peu compris, le problème de la désactivation de l'électrode au cours du temps, mentionné à plusieurs

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34 reprises, et l'influence de l'arrangement atomique de la surface sur l'activité du métal, illustrée par les différences de comportement des faces cristallines.

L'électroréduction du CO2 est un processus complexe qui comporte plus d'une étape et donne lieu à la formation de nombreux produits, jusqu'à sa réduction complète en CH4, très dépendants des conditions de mesure. Dans un premier temps, alors que la réaction est étudiée sur des électrodes de Pt, Pb ou Hg et que seule la phase aqueuse est analysée, les auteurs s'accordent sur un mécanisme décrivant la réduction du CO2 en HCOO- :

CO2 + e- CO2.- lent (III-1) CO2.- + H2O HCO2. + OH- rapide (III-2)

HCO2. + e- HCOO- (III-3)

Le radical anion CO2.- a pu être mis en évidence dans certaines conditions [3]. Eyring et al. [25,26] soutiennent que les espèces CO2.- et HCO2.

sont adsorbées sur la surface de l'électrode tandis que Aylmer-Kelly et al. [3]

arrivent à la conclusion que les intermédiaires se trouvent en solution et non adsorbés à l'électrode.

La spectroscopie IR sera abondamment utilisée pour la recherche des intermédiaires de l'électroréduction du CO2 [27-29]. Sur l'électrode de Pt, une espèce adsorbée, appelée "CO2 réduit", est identifiée comme étant CO par Beden et al. [30]. Près de quinze ans plus tard, des mesures semblables confirment ces résultats sur Pt [31]. D'autres travaux révèlent la présence de CO adsorbé et en solution lors de la réduction du CO2 sur Pd [12] et sur Rh [32].

La découverte de l'activité particulière de Cu et la production d'hydrocarbures et alcools dans la phase gazeuse relancent le débat, laissant entrevoir l'existence d'un mécanisme plus complexe. Le groupe de Hori suggère l'intervention de CO comme premier intermédiaire stable et la formation de HCOO- comme premier produit de la réaction sur l'électrode de Cu [20]. Ils étayent leur hypothèse par des mesures électrochimiques [20,33,34]

et spectroscopiques [34-38]. En voltampérométrie cyclique (figure III-1) [33], ils observent en présence de CO2 dans une solution tampon de phosphate le

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35 développement d'un pic de réduction vers -1,01 V (vs NHE), suivi d'une diminution en valeur absolue du courant puis d'une nouvelle augmentation à partir de -1,1 V.

Ils expliquent ce comportement par la formation de CO adsorbé, qui couvre presque la totalité de la surface de l'électrode, conduisant à la diminution de courant enregistrée. Ce CO adsorbé est ensuite réduit à des potentiels plus négatifs que -1,1 V, libérant la surface pour les réactions.

D'autres auteurs corroborent ces résultats [39].

Afin de prouver la possibilité d'adsorber CO sur une surface de Cu, Hori et ses collaborateurs multiplient les expériences de spectroscopie IR. Ils démontrent en effet l'apparition d'une bande à 2087 cm-1, caractéristique de CO, et en déduisent la présence de CO (ads) à l'électrode. Cependant, en considérant l'ensemble de ses publications, un seul spectre IR de CO adsorbé sur Cu lors de la réduction du CO2 est présenté [35] ; toutes les autres mesures sont réalisées dans une solution saturée en CO.

Hernandez et Kalaji [40] vont tenter de reproduire ces résultats à partir de la réduction du CO2 sur Cu en milieu hydrogénocarbonate et dans un tampon

Figure III-1 : Voltampérogrammes de Cu (poly) dans un tampon phosphate à pH 6,8 sous Ar (a), CO (b) et CO2(c) ; v = 50 mV/s [33].

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36 phosphate. Les spectres IR qu'ils obtiennent dévoilent des bandes d'absorption à 2343 cm-1, correspondant à CO2(aq), 1360 cm-1 et 1625 cm-1, assignées à HCO3-, et 1400 cm-1, appartenant à CO32-. Leur interprétation de ces données se base sur la variation de pH qui a lieu près de l'électrode du fait de la consommation des H+ lors de leur réduction aux potentiels négatifs. Suite à cette alcalinisation du milieu, le CO2 dissous est converti en HCO3- puis en CO32-, électrochimiquement inactifs, au fur et à mesure que le potentiel devient plus négatif. Selon ce modèle, il ne subsiste près de l'électrode qu'une très petite quantité de CO2 (aq) qui peut être réduit. Aucun produit de la réduction du CO2 n'a été détecté. Ils concluent que l'existence de cette réaction indésirable explique les efficacités relativement faibles des électrodes pour la réduction du CO2.

Les réactions globales de la réduction de CO2 peuvent s'écrire comme suit :

CO2 + 2e- + 2H+ CO + H2O E0 = -0,103 V (vs ESH) (III-4) CO2 + 2e- + H+ HCOO- E0 = -0,225 V (vs ESH) (III-5) CO2 + 8e- + 8H+ CH4 + 2H2O E0 = 0,169 V (vs ESH) (III-6) 2CO2 + 12e- + 12H+ C2H4 + 4H2O E0 = 0,079 V (vs ESH) (III-7)

Thermodynamiquement, la réduction du CO2 en CH4 et en C2H4 devrait avoir lieu à des potentiels moins négatifs que la réduction des H+, comme le montre la représentation ci-dessous, mais cinétiquement ce n’est pas le cas.

-0.80 -0.70 -0.60 -0.50 -0.40 -0.30 -0.20 -0.10 0.00

4 5 6 pH 7 8 9 10

E (V vs ESH)

CO2/CH4

CO2/C2H4

CO2/CO CO2/HCOO-

H+/H2

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37 Plusieurs mécanismes sont proposés dans la littérature pour décomposer ces réactions en étapes élémentaires. Le schéma III-1 résume le mécanisme général de la réduction de CO2 sur Cu tel que Hori et al. le décrivent [20].

Schéma III-1 : Mécanisme de la réduction électrochimique de CO2 sur Cu selon Hori et al. [20].

Les produits de la réaction sont en solution HCOO- et les alcools, et en phase gazeuse CH4, C2H4 et CO.

Kyriacou et Anagnostopoulos [22] introduisent dans leur mécanisme la participation d'espèces empoisonnantes (schéma III-2), causes de la désactivation de l'électrode au cours du temps déjà évoquée dans la littérature pour Cu [22,41] mais également pour Au [42].

Schéma III-2 : Mécanisme de la réduction électrochimique de CO2 sur Cu selon Kyriacou et al. [22].

L'intervention d'une espèce empoisonnante ne fait pas l'unanimité ; Hori et ses collaborateurs, par exemple, n'observent aucune diminution de l'activité de l'électrode au cours du temps [43]. Plusieurs travaux sont consacrés à

C (ads) + O (ads)

CH2 (ads)

CHOH (ads) CH4

C2H4

CO

CH2=C=O CH2=CH-OH

CO HCOO-

H2+

, e- H2+

, e- H2+

, e- e-

H2+

, e- e-

H2+

, 2e- H+, e-

CH2 (ads)

CO2 CO2.-

(ads) CO (ads)

CH3CH2OH, CH3(CH2)2OH

CO2 [HCOOH] [CO] Cu4C Cu=CH2

[CH2O] CsHpOq

CH4

C2H4

+ Cu=CH2

HCOOH CO

Espèce empoisonnante

Décomposition lente

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38 l'identification de cette espèce empoisonnante, qui ralentit considérablement le taux de production des hydrocarbures, et à la mise au point de procédures pour prévenir la désactivation de l'électrode [41,44-47]. Certains pensent qu'il s'agit de carbone, sous forme graphite, qui s'adsorbe sur la surface tandis que d'autres penchent plutôt pour la formation de patines d'oxydes de Cu.

Récemment, le groupe de Hori s'est attaqué au problème [48]. Ils font le point sur toutes les publications qui signalent une désactivation de l'électrode, reprennent leurs conditions de mesure, les testent et les comparent aux leurs.

En conclusion, ils affirment que l'effet d'empoisonnement observé provient de la contamination de l'électrode de Cu par des traces de métaux tels que Fe et Zn présents en petites quantités dans les sels utilisés pour préparer les électrolytes, ou éventuellement par des molécules organiques qui se trouveraient dans l'eau. Une simple étape de purification de l'électrolyte suffit à prévenir toute désactivation de l'électrode de Cu.

Notons que le modèle de Kyriacou et al. ne tient pas compte de la formation d'alcools en solution et présente certaines divergences par rapport à d'autres résultats de la littérature : il a en effet été montré que HCOO- n'est pas réduit à l'électrode de Cu [20], ce qui exclut sa participation en tant qu'intermédiaire pour la formation de CO.

À l'heure actuelle, la question du mécanisme de la réduction électrochimique du CO2 sur Cu est loin d'être tranchée.

Lorsqu'ils considèrent la formation de CO (ads) comme premier intermédiaire stable, Hori et al. envisagent l'existence de "sites actifs pour l'adsorption de CO", tels que des défauts, des marches ou des crans sur la surface métallique [33]. Quelques années plus tard, ils entament une longue série de recherches dont le but est de corréler l'activité de l'électrode et l'arrangement atomique de sa surface. Inspirés par le travail de Yeager et Adzic [49], ils étudient intensivement la réduction du CO2 sur des électrodes monocristallines de Pt [50-55]. L'activité de l'électrode dépend de l'orientation cristalline de la surface, selon la séquence décroissante Pt (210) > Pt (110) >

Pt (100) > Pt (111). Les surfaces lisses à l'échelle atomique, comme Pt (100) et Pt (111), ont une activité relativement faible ; les surfaces à marches, telles que

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39 Pt (110), ont une activité dix fois plus importante, et les surfaces à crans, dont Pt (210), donnent les meilleurs résultats. La séquence (110) > (100) > (111) est également valable pour Pd [56] et Ag [57]. Elle l'est aussi pour Rh [58] en milieu HClO4 alors que dans H2SO4, l'électrode Rh (100) possède une plus grande activité que Rh (110). Dans le cas d'électrodes de Ir, seule l'orientation (110) montre une activité ; les faces (100) et (111) sont inactives [59]. Comparées entre elles, ces électrodes peuvent être classées comme suit : Pd (110) >

Rh (110) > Pt (110) >> Ir (110).

Au cours de notre première année de thèse, alors que nous avons entamé l'étude de l'activité de surfaces Cu (111) et Cu (100) pour la réduction du CO2, Hori et al. présentent les résultats de leurs recherches les plus récentes sur les électrodes monocristallines de Cu [43,60,61]. Les tableaux de la figure III-2 sont des reproductions, issues de deux publications différentes, des résultats d'électrolyses sur plusieurs électrodes polycristallines et monocristallines de Cu en présence de CO2. Ils illustrent les données fournies par Hori et ses collaborateurs.

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40 Le traitement des électrodes et les conditions de mesure reprises dans les deux publications sont identiques : polissage électrochimique de Cu et électrolyse du CO2 effectuée par un contrôle galvanostatique dans KHCO3 10-1 M à une densité de courant de 5 mA/cm².

Figure III-2 : Reproduction de résultats présentés dans les références [60] : Table 1 et [61a] : Table 4.

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41 Considérons les résultats obtenus pour l'électrode Cu (110) dans les deux tableaux. Dans le premier cas, CH4 est, de loin, le produit majoritaire avec près de 50 % d'efficacité faradique (les efficacités faradiques sont calculées sur base du nombre d'électrons requis pour la formation d'une molécule du produit à partir de CO2, soit 2 e- pour HCOOH, 2 e- pour CO, 8 e- pour CH4, 12 e- pour C2H4, etc… [8]). Dans le second tableau, CH3CHO et CH3COOH sont les produits principaux, et CH4 n'arrive qu'en septième position avec environ 8%

d'efficacité faradique ! De plus, alors qu'en 1995, Hori et ses collaborateurs ne détectent pas de CO lors de la réduction de CO2 sur les électrodes monocristallines de Cu, en 2002, ils affichent des efficacités faradiques pour CO de 6 et 13% respectivement pour Cu (111) et Cu (110).

Ajoutons, à propos de la présentation des résultats chiffrés, que l'estimation des efficacités faradiques implique de connaître tous les produits formés pour atteindre au total les 100% attendus. En 1986, quand Hori et al.

détectent C2H4 comme nouveau produit de la réduction de CO2 sur Cu, ils insistent sur le fait que la somme des efficacités faradiques qu'ils obtiennent est d'environ 100% [9]. C'est effectivement toujours le cas depuis ce moment. Mais il ne faut pas oublier que, depuis, l'éthanol, l'acétaldéhyde, l'acide acétique et parfois certains alcools à plus longue chaîne se sont peu à peu ajoutés à sa liste des produits.

L’année dernière, Gattrell, Gupta et Co [62] ont publié une revue qui fait le point sur les données concernant l’électroréduction du CO2 sur le cuivre. La discussion est essentiellement basée sur les travaux du groupe de Hori.

Électroréduction du CO2 en milieu aqueux sur des surfaces bimétalliques

Afin de diminuer les surtensions de la réduction du CO2, d'améliorer les efficacités faradiques des produits formés et de contrôler la sélectivité de la réaction, des chercheurs se sont tournés vers les électrodes bimétalliques et les ont testées pour l'électroréduction du CO2.

L'activité d'alliages à base de Cu a été évaluée [63]. Dans certains cas, comme les alliages Cu-Ni, Cu-Sn et Cu-Pb, un effet catalytique marqué a été mis en évidence. Cet effet se traduit par une augmentation de la production de

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42 HCOO- et CO à des surtensions plus faibles. D'autres alliages, dont Cu-Ag et Cu-Cd, conduisent à une dilution des propriétés de chacun des métaux pris séparément. Des auteurs [64] ont toutefois pu orienter la sélectivité des alliages Cu-Ag vers des composés à deux carbones par l'application d'impulsions en potentiel lors de l'électrolyse du CO2.

Des électrodes de Pd modifiées par Cu [65] développent un effet d'alliage à la surface et leur activité dépend du contenu en Cu et de la quantité de H+ adsorbés. En effet, les auteurs ont montré que la production de CH4 est favorisée sur les surfaces riches en H (ads).

Enfin, Kyriacou et Anagnostopoulos étudient des surfaces Cu-Au en milieu KCl [66]. La surface bimétallique est obtenue par immersion de l'électrode de Cu dans une solution de HAuCl4. Le temps d'immersion reste constant mais la concentration en HAuCl4 varie afin de préparer des électrodes avec différents taux de recouvrement en Au. La sélectivité de ces électrodes est conditionnée par leur composition : la production de CH4 chute quand la proportion de Au augmente, tandis que celle de CO s'accroît. L'évolution de la formation de C2H4

présente un maximum pour de petites quantités de Au. L'avantage offert par la présence de Au est, d'après ces résultats, une forte diminution de l'empoisonnement de la surface. Pour expliquer ce phénomène, les auteurs s'appuient sur le mécanisme de la réduction du CO2 repris sur le schéma III-2 : en présence de Au, la réduction de CO (ads) en C (ads) puis en CH2 (ads) est favorisée par rapport au chemin réactionnel qui mène à la formation de l'espèce empoisonnante CsHpOq. La perte d'activité de l'électrode est par conséquent amoindrie. Mais, en corollaire, l'espèce CsHpOq se décomposant lentement en CH4, la formation de CH4 par cette voie est également restreinte.

Électroréduction du CO2 en milieu non aqueux

Parallèlement aux travaux en solution aqueuse, de nombreuses études sont réalisées sur toute une série de métaux différents [4,6,67-76] dans des solvants organiques aprotiques. L'intérêt pour ce type de milieux est justifié par des arguments d'ordre expérimental : la solubilité du CO2 est beaucoup plus élevée dans les solvants organiques que dans H2O (jusqu'à cinq fois dans

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43 CH3OH), les températures de travail peuvent être abaissées sous les 273 K et la réaction de réduction des H+ est supprimée. La sélectivité des électrodes est également modifiée. Les métaux qui produisent HCOO- dans un milieu aqueux donnent l'oxalate, C2O42-, comme espèce principale. CO est le deuxième produit cité. La formation de CH3OH est difficile à vérifier car le méthanol sert fréquemment de solvant pour ces mesures. Les hydrocarbures ne sont détectés qu'en de très faibles quantités, les protons nécessaires provenant uniquement de l'eau résiduelle présente dans le milieu organique.

Kaneco et al., qui ont publié plusieurs articles concernant la réduction du CO2 dans CH3OH sur divers métaux [77-80], descendent la température d'une solution aqueuse jusqu'à la limite possible, ce qui a pour effet de diminuer fortement la réaction d'évolution de H2 tout en apportant les H+ indispensables à la formation d'hydrocarbures [81]. Les conditions des expériences menées en milieu organique sont souvent plus drastiques : des températures très basses ou des pressions élevées, jusqu'à obtenir le dioxyde de carbone sous forme liquide.

Quelques publications traitent de l'électroréduction du CO2 dans le méthanol sur des électrodes de platine modifiées par un film de polyaniline [82-85]. La particularité de ce système est d'être actif à des surtensions très faibles, la réaction débutant à des potentiels beaucoup moins négatifs que sur le substrat de Pt. De petites molécules comme HCOOH, CH3COOH et CH2O sont identifiées dans la phase aqueuse mais aucun produit gazeux n'est décelé. Le point faible de l'électrode réside dans la stabilité du film de polyaniline qui se désagrège pour des épaisseurs supérieures à 0,6 µm et qui ne couvre pas parfaitement la surface de Pt si il est moins épais que 0,6 µm.

En France, le groupe de S. Chardon-Noblat [86-88] modifie des électrodes de carbone par des complexes métalliques à base de bipyridine. Les complexes de Rh se révèlent les plus efficaces pour la réduction du CO2 en CO et HCOO- en milieu organique. D'autres métaux tels que Ir et Ru ont également été utilisés. La sélectivité de ce type d'électrode est orientée vers la formation de HCOO-.

Pour terminer cet état de la question, mentionnons encore les travaux de Yano et ses collaborateurs [89-91] qui mettent en œuvre la réduction du CO2 à

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44 une interface entre les trois phases solide, liquide et gazeuse, avec des résultats prometteurs.

Si la littérature traitant de l'électroréduction du CO2 est relativement abondante, nous avons montré ici qu'il n'en est pas moins difficile, parmi toutes les études, les conditions, les hypothèses et les contradictions exposées, de se faire une idée précise sur l'état de la question, qui reste encore assez floue.

III.1.2 Stratégie du travail de recherche

L'objectif général de la présente recherche est de comparer l'activité de différentes surfaces pour mieux comprendre les processus qui se déroulent à l'électrode lors de la réduction du CO2. Nous avons porté notre attention sur des surfaces de cuivre bien caractérisées, dont les propriétés remarquables pour cette réaction ne sont plus à prouver, et sur des surfaces bimétalliques à base de cuivre et d'or. Les alliages AuxCuy ont été choisis dans le but de modifier l'activité des deux métaux en combinant la faible surtension de Au et la capacité de Cu de réduire CO2 en hydrocarbures. En utilisant plusieurs techniques expérimentales, nous avons étudié le comportement de ces électrodes en présence de CO2, leur sélectivité et leur efficacité. Les résultats obtenus seront mis en relation avec l'arrangement atomique des surfaces et leur composition.

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45 III.2 ÉTUDE DE L'ACTIVITÉ D'ÉLECTRODES DE CUIVRE POUR

LÉLECTRORÉDUCTION DU CO2

Nous avons examiné l'activité électrocatalytique de surfaces polycristallines de cuivre (notée sous l'abréviation Cu (poly) par la suite) et monocristallines de cuivre d'orientation (111) et (100). Nous avons sélectionné les faces d'orientation (111) et (100) car elles présentent des caractéristiques de compacité et de rugosité très différentes de celles d'une surface polycristalline.

Deux milieux ont servi d'électrolyte pour la réduction électrochimique du CO2 : une première solution composée d'un mélange KH2PO4 / K2HPO4 et une seconde ne contenant que KHCO3. Ces deux électrolytes sont en effet les plus utilisés lors de l'étude de l'activité des électrodes de cuivre car, saturées en CO2, elles remplissent toutes deux les conditions de pH requises pour observer la réduction du CO2 sans que la réaction d'évolution de l'hydrogène soit trop importante ou que le CO2 dissous soit totalement converti en HCO3-.

Lorsque le CO2 gazeux est introduit dans la solution, les équilibres III-8 à III-11 s'établissent et résultent en l'acidification du milieu.

CO2 (g) CO2 (aq) (Ks = 0,034 mol/l atm à 25°C) (III-8) CO2 (aq) + H2O H2CO3 (Kf ≈ 65) (III-9) H2CO3 + H2O HCO3- + H3O+ (Ka1 = 4,3010-7) (III-10) HCO3- + H2O CO32- + H3O+ (Ka2 = 5,6110-11) (III-11)

Cette acidification a pour conséquence de favoriser la réaction d'évolution de H2 qui est en compétition avec la réduction du CO2 aux potentiels considérés. Ne connaissant pas les contributions respectives de ces deux réactions à l'électrode, il est impossible de faire la distinction entre les courants associés à l'une et à l'autre.

En voltampérométrie, le comportement d'une électrode en présence d'une espèce électroactive est évalué par comparaison avec une mesure réalisée dans l'électrolyte seul, en l'absence de l'espèce étudiée. Ce procédé n'est

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46 toutefois pas directement applicable dans notre cas du fait de la variation de pH inhérente à la solubilisation du CO2. Pour estimer l'activité de l'électrode en présence de CO2, il s'avère donc nécessaire d'effectuer une mesure de référence en absence de CO2 dans une solution ayant la même composition que la solution de départ mais dont les proportions d'acide et de base du tampon varient afin de compenser la différence de pH qui survient lors de la dissolution du CO2.

Le pH mesuré de la solution KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M vaut 7,8 ; en présence de CO2, le pH descend à 6,5. Une courbe de voltampérométrie enregistrée dans un électrolyte KH2PO4 10-1 M / K2HPO4 210-2 M, dont le pH vaut 6,5 sous N2, servira donc de référence dans ce travail.

Notons que dans le cas d'une solution KHCO3, nous ne pouvons pas préparer une solution qualitativement identique mais de pH différent. Bien que certains auteurs [17] n'hésitent pas à comparer les mesures en absence et en présence de CO2 sans correction, nous estimons qu'il est important de prendre en compte cette variation de pH pour interpréter correctement les résultats. Par conséquent, toutes les mesures de voltampérométrie cyclique sont réalisées en milieu KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M, tandis que la solution KHCO3 10-1 M ne sera utilisée que dans certaines conditions particulières pour l'étude de l'influence de la nature de l'électrolyte sur la sélectivité de la réaction.

III.2.1 Étude du comportement électrochimique du cuivre en présence de CO2

Le comportement général de l'électrode polycristalline de cuivre dans les électrolytes seuls a déjà été caractérisé et analysé par voltampérométrie cyclique lors de nos précédents travaux [92]. Les voltampérogrammes sont présentés sur les figures III-3 et III-4.

(17)

47 Le domaine idéalement polarisable est limité par les processus d'oxydation du cuivre vers les potentiels positifs et par la réduction des protons en deçà de -1,0 V.

-0.6 -0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0

0.1 0.2

-1.2 -1.1 -1.0 -0.9 -0.8 -0.7 -0.6 -0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0 0.1 0.2 0.3

E (V)

j (mA/cm²)

Figure III-4 : Voltampérogrammes cycliques de l'électrode Cu (poly) dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M : pH = 7,8 (trait plein) et dans KH2PO4 10-1 M / K2HPO4 210-2 M : pH = 6,5

(pointillés) ; v = 20 mV/s.

-0.15 -0.10 -0.05 0.00 0.05 0.10 0.15

-1.2 -1.1 -1.0 -0.9 -0.8 -0.7 -0.6 -0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0 0.1 0.2 0.3

E (V)

j (mA/cm²)

Figure III-3 : Voltampérogramme cyclique de Cu (poly) dans KHCO3 10-1 M ; v = 20 mV/s.

(18)

48 En présence de CO2, la réaction d'évolution de l'hydrogène débute à des potentiels moins négatifs suite à l'acidification de la solution (figure III-5).

La figure III-6 montre le comportement de l'électrode Cu (poly) en présence de CO2 dans la solution KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M.

-0.6 -0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0

0.1 0.2

-1.2 -1.1 -1.0 -0.9 -0.8 -0.7 -0.6 -0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0 0.1 0.2 0.3

E (V)

j (mA/cm²)

Figure III-5 : Voltampérogrammes cycliques de l'électrode Cu (poly) dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M sous N2 (trait plein) et sous CO2 (traits interrompus) et dans KH2PO4 10-1 M /

K2HPO4 210-2 M sous N2 (pointillés) ; v = 20 mV/s.

(19)

49 Dans l'électrolyte seul, un courant négatif dû à la réduction des H+ est enregistré à partir de -0,95 V.

En présence de CO2, nous sommes confrontés au choix du domaine de potentiels à balayer : la surtension nécessaire pour réduire CO2 nous contraint à appliquer des potentiels très négatifs. Mais dans un même temps, l'application de potentiels de plus en plus négatifs pose en électrochimie le problème de la formation de H2 gazeux à l'électrode, suite à la réaction de réduction des H+ de plus en plus importante lorsque le potentiel diminue. Ces bulles de H2 qui grandissent sur la surface puis s'en détachent créent des perturbations très gênantes lors de la mesure du courant. En se limitant à un balayage en potentiels de -0,8 V à -1,5 V, nous atteignons des potentiels suffisamment négatifs pour observer la réduction du CO2 tout en maintenant une contribution modérée de HER.

Si la mesure est effectuée directement après le polissage électrochimique de l'électrode, l'apparition du courant négatif est retardée en présence de CO2

et ne commence significativement qu'à partir de -1,0 V. De plus, l'intensité du courant est inférieure à celle mesurée en absence de CO2 et un léger

-5.0 -4.5 -4.0 -3.5 -3.0 -2.5 -2.0 -1.5 -1.0 -0.5 0.0

-1.6 -1.5 -1.4 -1.3 -1.2 -1.1 -1.0 -0.9 -0.8 -0.7

E (V)

j (mA/cm²)

Figure III-6 : Voltampérogrammes cycliques de Cu (poly) dans KH2PO4 10-1 M / K2HPO4 210-2 M sous N2 (gris) et dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M sous CO2 (noir) : trait plein = directement

après polissage électrochimique, trait interrompu = après balayage jusqu'aux potentiels d'oxydation de Cu ; v = 20 mV/s.

(20)

50 ralentissement de son évolution est observé vers -1,35 V. Lorsque l'électrode subit d'abord quelques cycles de caractérisation, tels que celui de la figure III-4, qui imposent des potentiels auxquels Cu est oxydé, la perturbation de l'évolution du courant est beaucoup plus marquée et se traduit par le développement d'un épaulement à -1,35 V.

A notre connaissance, aucune publication ne fait état de l'étude par voltampérométrie cyclique d'une électrode monocristalline de cuivre dans le cadre de l'étude de la réduction du CO2. Nous avons donc préparé une électrode monocristalline de Cu d'orientation (111) et relevé les courbes j-E en absence et en présence de CO2 dans les mêmes conditions que celles décrites ci-dessus (figure III-7).

L'électrode Cu (111) qui vient d'être traitée par un polissage électrochimique engendre des intensités de courant plus importantes, en valeur absolue, en présence de CO2 qu'en son absence. Par ailleurs, l'apparition du courant négatif se produit à des potentiels semblables dans les deux cas, un

-7.0 -6.5 -6.0 -5.5 -5.0 -4.5 -4.0 -3.5 -3.0 -2.5 -2.0 -1.5 -1.0 -0.5 0.0

-1.6 -1.5 -1.4 -1.3 -1.2 -1.1 -1.0 -0.9 -0.8 -0.7

E (V)

j (mA/cm²)

Figure III-7 : Voltampérogrammes cycliques de Cu (111) dans KH2PO4 10-1 M / K2HPO4 210-2 M sous N2 (gris) et dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M sous CO2 (noir) : trait plein = directement

après polissage électrochimique, traits interrompus = après balayage jusqu'aux potentiels d'oxydation de Cu ; v = 20 mV/s.

(21)

51 peu avant -1,0 V. Par contre, si des balayages dans la région des potentiels d'oxydation du cuivre sont exécutés avant la mesure, le développement du courant négatif en présence de CO2 est retardé et son intensité est plus faible que celle enregistrée en absence de CO2.

En résumé, la réduction du CO2 sur une surface polycristalline de cuivre fraîchement polie aboutit à une inhibition des réactions à l'électrode, ralentissement qui disparaît lorsque le potentiel devient plus négatif. Par contre, la réduction du CO2 sur une surface de cuivre d'orientation (111) ne provoque aucune inhibition et l'intensité du courant mesuré, en valeur absolue, est plus grande qu'en l'absence de CO2.

D’après les mécanismes proposés dans la littérature, l’espèce la plus susceptible d’être stabilisée à l’électrode lors de la réduction du CO2 sur Cu est CO. Lorsque la quantité de CO devient trop importante près de la surface, les réactions à l’électrode sont affectées. Cet effet disparaît aux potentiels plus négatifs, quand CO est lui-même réduit.

Nos résultats de voltampérométrie cyclique suggèrent que la réduction du CO est plus facile sur Cu (111) que sur Cu (poly). La morphologie de la surface est vraisemblablement en cause : le CO produit sur la surface lisse de Cu (111) est plus facilement réduit par les H présents à l’électrode que sur la surface plus rugueuse de Cu (poly).

Lorsque des cycles de voltampérométrie sont effectués entre -1,1 V et +0,2 V, l'électrode de cuivre est oxydée lors du balayage aller vers les potentiels positifs et ces oxydes sont réduits au balayage retour vers les potentiels négatifs. Ce processus d'oxydation et de réduction de l'électrode de cuivre induit la création de défauts à la surface, modifiant sa rugosité, sa structure et la nature des sites actifs. Sur Cu (poly), le ralentissement de la réduction de CO est renforcé. Sur Cu (111), la formation de nouveaux défauts rend la réduction de CO plus difficile que sur la surface d’origine plus lisse.

Ces résultats rappellent l'importance du traitement de l'électrode sur son activité. Mis en garde par ces observations, nous avons accordé par la suite une attention toute particulière à la préparation de l'électrode et à son

(22)

52 polissage. Une fois la surface polie, plus aucun balayage dans les potentiels d'oxydation de Cu n'est appliqué avant l'étude de l'activité de l'électrode.

III.2.2 Étude de l'interface électrode|solution par FTIR

Afin de réunir davantage d'informations sur les espèces impliquées à l'électrode lors de la réduction du CO2 sur Cu, nous avons réalisé des mesures FTIR in situ.

Nous avons utilisé la méthode SNIFTIRS, particulièrement adaptée à la détection des espèces adsorbées. D’après la littérature [20,33], l’inhibition observée en voltampérométrie cyclique lors de la réduction du CO2 sur une électrode polycristalline de Cu est due à l’adsorption de l’intermédiaire CO qui bloque la surface de l’électrode. Toutefois, la chaleur d’adsorption de CO sur Cu n’est pas très élevée (~38 kJ/mol). Les molécules de CO ne sont donc pas chimisorbées, mais plutôt physisorbées sur la surface de l’électrode. Le CO formé dans le condensateur interne de l’interface électrode|solution affecte les réactions qui se déroulent à l’électrode. Par la suite, en parlant de l’adsorption de molécules à l’électrode, nous entendons des interactions de physisorption entre ces molécules et la surface. Les molécules sont présentes à l’électrode, dans le condensateur interne, et affectent les réactions à l’électrode. La mise en évidence du CO à l’interface électrode|solution par IR n’est pas facile du fait des faibles interactions entre les molécules et la surface qui caractérisent la physisorption.

Dans un premier temps, nous avons considéré le comportement d'une surface de cuivre en présence de CO pour déterminer et optimiser les conditions de mesure qui permettraient d'observer l'existence de CO à l'électrode.

Nous avons éprouvé beaucoup de difficulté à obtenir les résultats présentés ci-dessous. Les figures III-8a, b et c montrent trois spectres SNIFTIR de l'électrode Cu (poly) en présence de CO pour différentes modulations en potentiel.

(23)

53

Figure III-8 : Spectres SNIFTIR de Cu (poly) dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M sous CO pour différentes modulations en potentiel ; ∆R/R = (RE – REref)/REref.

1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 2500 2600 2700 2800 2900 3000

Nombre d'onde (cm-1)

R/R(unités arbitraires)

-1,0 V ; Eref = -0,8 V

1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 2500 2600 2700 2800 2900 3000

Nombre d'onde (cm-1)

R/R(unités arbitraires)

-1,2 V ; Eref = -1,0 V

1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 2500 2600 2700 2800 2900 3000

Nombre d'onde (cm-1)

R/R(unités arbitraires)

-1,3 V ; Eref = -1,0 V

a

b

c

(24)

54 Le premier (figure III-8a), enregistré au cours d'une modulation entre -0,8 V et -1,0 V, correspond à une situation où il n'y a pas de CO à l’électrode.

Lors d'une modulation du potentiel entre -1,2 V et -1,0 V en présence de CO (figure III-8b), nous apercevons une bande négative qui se détache légèrement du bruit de fond à 2075 cm-1, concordant avec les positions et potentiels cités dans la littérature pour l'adsorption de CO sur Cu [34,35]. Cela signifie que des molécules de CO sont détectées à l'électrode de cuivre à -1,2 V mais pas à -1,0 V. Par contre, le spectre de la figure III-8c, obtenu pour une modulation entre -1,3 V et -1,0 V, est dépourvu de toute bande d'absorption significative aux alentours de 2075 cm-1 : nous ne détectons donc pas de CO à -1,3 V.

De tous nos essais, avec divers paramètres de potentiel, de modulation et d'acquisition, le spectre de la figure III-8b est le seul qui indique la présence de CO à l'électrode de Cu à -1,2 V.

Nos premières mesures ont montré que la présence de CO à l’électrode de Cu est très difficile à mettre en évidence. Ceci est une conséquence de la physisorption de ces molécules sur Cu, nettement moins facile à détecter que la chimisorption. Nous avons néanmoins tenté à plusieurs reprises, en variant les conditions de mesure, de mettre en évidence la formation de CO à l’interface électrode|solution lors de la réduction du CO2, mais tous nos résultats se sont révélés négatifs. Nous n'avons donc pas d'évidence spectroscopique de la présence de CO, ni d'aucune autre espèce, sur les électrodes de cuivre, polycristallines ou monocristallines, au cours de la réduction du CO2.

Pour étudier les variations de la composition de la phase aqueuse à l'interface électrode|solution en fonction du potentiel et en présence de CO2, nous avons eu recours à la méthode SPAIRS, appropriée à la détection des espèces en solution. Les électrodes Cu (poly) et Cu (111) conduisent à des spectres SPAIR similaires. La figure III-9 montre un exemple typique de spectre SPAIR d'une électrode de cuivre en présence de CO2.

(25)

55 En absence de CO2, nous n'observons que les bandes d'absorption des anions phosphate H2PO4- (1079 cm-1) et HPO42- (1011 cm-1) de l'électrolyte et la bande des OH- de l'eau à 1640 cm-1. En présence de CO2, nous comptabilisons des bandes supplémentaires : la bande positive du CO2 à 2345 cm-1 et une bande négative à 1400 cm-1, dont la base relativement large pourrait cependant englober plus d'un pic. Nous constatons par ailleurs que la bande vers 1640 cm-1 est maintenant dédoublée, signe que plusieurs contributions en sont à l'origine. Ces premiers résultats nous ont incités à reproduire les mesures en milieu D2O qui a l'avantage de déplacer, par effet isotopique, la bande de l'eau à 1200 cm-1 (figure III-10). Deux nouvelles bandes apparaissent alors clairement : l'une centrée à 1625 cm-1 et l'autre à 1360 cm-1. En examinant attentivement l'ensemble des spectres en fonction du potentiel, nous remarquons que les bandes à 1360 cm-1 et 1625 cm-1 suivent une évolution identique : négatives de -0,9 V à -1,2 V puis positives à partir de -1,3 V. Ce parallélisme laisse supposer qu'elles sont associées à la même espèce. La bande négative à 1400 cm-1 se développe à partir de -1,3 V.

1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 2500 2600 2700 2800 2900 3000

Nombre d'onde (cm-1)

R/R (unités arbitraires)

-1,3 V

Figure III-9 : Spectres SPAIR de Cu (poly) dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M sous N2

(pointillés) et sous CO2 (trait plein) ; ∆R/R = (RE – REref)/REref avec Eref = -0,8 V.

(26)

56 Les bandes à 1360 cm-1 et 1625 cm-1 peuvent être attribuées, respectivement, aux élongations symétrique et asymétrique de HCO3- ; la bande à 1400 cm-1 correspond à l'élongation asymétrique de CO32- [40].

En accord avec notre représentation des spectres, une bande positive indique la disparition de l'espèce tandis qu'une bande négative reflète l'apparition de l'espèce. Par conséquent, HCO3- est produit près de l'électrode de -0,9 V à -1,2 V puis disparaît à partir de -1,3 V alors que CO32- est formé.

Sur la figure III-9, le pic positif du CO2 marque sa consommation près de l'électrode.

Les résultats que nous avons obtenus pour les électrodes Cu (poly) et Cu (111) concordent parfaitement avec ceux publiés par Kalaji et al. [40] sur du cuivre polycristallin et peuvent s'interpréter comme suit : lorsque le potentiel devient plus négatif, les H+ sont davantage consommés par la réaction d'évolution de H2, entraînant une augmentation du pH près de l'électrode ; en milieu plus alcalin, le CO2 dissous réagit avec OH- pour donner HCO3- puis CO32-.

1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 2500 2600 2700

Nombre d'onde (cm-1)

R/R (unités arbitraires)

-0,9 V -1,0 V -1,1 V -1,2 V -1,3 V

-1,4 V -1,5 V

Figure III-10 :Spectres SPAIR de Cu (111) dans KH2PO4 10-2 M / K2HPO4 10-1 M / D2O sous CO2 à différents potentiels ; ∆R/R = (RE – REref)/REref avec Eref = -0,8 V.

(27)

57 En conclusion, dans nos conditions de mesure, les seules espèces détectées en solution près de l'électrode de cuivre en présence de CO2 sont les anions hydrogénocarbonate et carbonate ; aucun produit de la réduction du CO2 n'a été mis en évidence. Plus le potentiel est négatif, plus le pH augmente près de l'électrode et CO2 (aq) est converti en HCO3- et CO32-. La fraction de CO2 (aq) qui arrive à l'électrode est donc très faible, facteur qui contribue à rendre difficile la détection d'éventuels produits formés en très petites quantités.

Ces mesures FTIR in situ ont néanmoins permis de montrer que les processus acido-basiques mentionnés ci-dessus doivent être pris en compte aussi bien à l'interface Cu (poly)|solution que Cu (111)|solution.

Nos tentatives pour identifier les produits de la réduction du CO2 sur les électrodes de Cu par FTIR ayant jusqu'ici échoué, nous avons mis en œuvre des électrolyses prolongées en présence de CO2 et soumis le milieu réactionnel à des analyses chromatographiques afin d'examiner la sélectivité des différentes surfaces.

III.2.3 Étude de la sélectivité

Après différents essais, nous avons mis au point un mode opératoire pour les électrolyses et l'analyse des phases aqueuse et gazeuse. Le potentiel et la durée des électrolyses ont été fixés à -1,9 V et 3h respectivement. Ces conditions permettent d'accumuler des quantités de produits suffisamment importantes pour les détecter et les quantifier. Pour estimer la reproductibilité des mesures, nous avons répété l'expérience à plusieurs reprises. Le tableau III-1 donne des résultats obtenus pour l'électrode polycristalline de cuivre.

(28)

58

Concentration des produits dans les phases gazeuse et aqueuse (ppm)

Cu (poly) KHCO3 10-1 M E = -1,9 V t = 3h

T = 20°C CO CH4 C2H4 C2H6 HCOO- Exp 1 9516 1065 415 6 < 2 Exp 2 9646 1750 700 10 8 Exp 3 14898 1109 588 7 11 Exp 4 14562 571 310 5 < 2

Moyenne 12156 1124 503 7 6

Écart-type (écart-type relatif)

2976 (25%)

483 (43%)

174 (35%)

2 (32%)

5 (78%) Tableau III-1 : Résultats des électrolyses effectuées sur Cu (poly) dans KHCO3 10-1 M.

Nous constatons que les écarts-types calculés sont relativement grands.

Nous avons déjà eu l'occasion de vérifier l'importance de la morphologie de la surface du cuivre sur son comportement électrochimique. Les électrodes de cuivre étaient préparées par un polissage électrochimique, traitement le plus efficace pour obtenir une surface lisse et homogène. Ce type de polissage n'est cependant pas applicable aux surfaces bimétalliques à base de cuivre qui seront utilisées dans la seconde partie de ce chapitre.

Nous avons préféré conserver l'uniformité du traitement des électrodes dans le cadre de l'étude de leur sélectivité ; par conséquent les électrodes utilisées pour les électrolyses ont toutes subi un polissage mécanique à l'alumine.

Les résultats, moyennes d'au moins trois mesures, nous permettent de dégager des tendances relatives suffisantes pour comparer les propriétés de sélectivité des électrodes étudiées.

La plus grande partie des produits que nous avons détectés dans nos conditions de travail étant des espèces gazeuses, nous basons notre étude de

(29)

59 la sélectivité de la réaction essentiellement sur l'évolution de celles-ci en fonction des paramètres fixés. La quantité de HCOO- formé dans la phase aqueuse n'excède pas 1% de la totalité des produits, quelles que soient les conditions de mesure.

Pour simplifier la comparaison entre les différentes situations considérées, nous présentons les résultats en proportions relatives. La quantité d'une espèce gazeuse Ci est normalisée par rapport à la somme des concentrations de toutes les espèces carbonées produites lors de la réduction du CO2 dans la phase gazeuse. Nous ne prenons pas en compte la production de H2 lors de la réaction concomitante de réduction des protons. La fraction du produit i dans la phase gazeuse s'exprime donc en pourcent :

% 100

1

×

=

= N

i i i i

C

f C (III-12)

Influence de la nature de l'électrolyte

Pour commencer, nous nous sommes alignés sur les données de la littérature et nous avons évalué la sélectivité de la réaction de réduction du CO2

sur l'électrode polycristalline de cuivre en milieu KHCO3. Nous avons ensuite étendu les mesures à l'électrolyte KH2PO4 / K2HPO4 utilisé précédemment pour l'obtention des données électrochimiques et FTIR.

Le tableau III-2 donne les résultats obtenus pour l'électrode polycristalline de Cu dans chacun des deux milieux.

Nous avons identifié dans la phase gazeuse quatre espèces suite aux électrolyses effectuées en présence de CO2 : CO, CH4, C2H4 ainsi que des traces de C2H6. Malgré que la contribution de l'éthane soit négligeable, inférieure à 1%, nous signalons sa production dans la volonté de présenter des résultats complets. Entre parenthèses, nous avons ajouté l'écart-type calculé pour chaque résultat.

(30)

60

Fraction fi des produits dans la phase gazeuse Composition de (%)

l'électrolyte

CO CH4 C2H4 C2H6

KHCO3 10-1 M 88 (±6) 9 (±5) 4 (±2) < 1 KH2PO4 10-2 M /

K2HPO4 10-1 M 43 (±26) 50 (±23) 7 (±4) < 1 Tableau III-2 : Résultats de l'électroréduction du CO2 sur Cu (poly) dans différents électrolytes

(entre parenthèses : écart-type) ; E = -1,9 V, t = 3h.

En milieu KHCO3, CO (88%) est de loin le produit majoritaire dans la phase gazeuse, suivi par CH4 (9%) et C2H4. Dans la solution KH2PO4 / K2HPO4, les fractions de CH4 (50%) et CO (43%) sont comparables, compte tenu de la précision, avec cependant un léger avantage pour le méthane. La quantité de C2H4 reste faible. La nature de l'électrolyte modifie donc les proportions des espèces.

Aucune allusion à de telles observations n'a été faite jusqu'à présent dans la littérature.

Nos résultats sont en contradiction avec ceux fournis par Hori et al. [60]

qui annoncent la séquence suivante pour les produits gazeux de la réduction du CO2 sur Cu (poly) dans KHCO3 10-1 M : CH4 > C2H4 >> CO.

Ces divergences marquent l'importance des conditions de mesure. Le groupe de Hori réalise des électrolyses en mode galvanostatique et avec un apport continu en CO2. Le courant étant une grandeur non spécifique, le mode galvanostatique ne permet pas le contrôle des réactions redox qui se déroulent à l'électrode. Le flux de CO2 dans la solution assure l'approvisionnement en CO2 (aq) à l'électrode et accélère le passage des produits dans la phase gazeuse.

Dans ce travail, nous avons effectué les électrolyses en mode potentiostatique, de façon à pouvoir examiner l'influence de la surtension sur la sélectivité. Nous pouvons également mieux contrôler la distribution des produits en fonction de la surtension appliquée. Dans notre cas, le flux de CO2 était

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