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FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1902-1903 M' 47
DE L'UTILITÉ
LA MESURE RU SEGMENT
ANTHROPOMÉTRIQUE
THÈSE
POUR LEDOCTORAT
ENMÉDECINE
Présentée et soutenuepubliquement le 17 Décembre 1902
PAR
F>
aul-Eugène-Gornil
HAELEWYNNé à Wormhoudt (Nord), le 2 décembre 1878
Elève duService de Santé de la Marine
/<G°<
Examinateursde la Thèse:
MM. SIGALAS professeur.... Présidèan 1
JOLYET professeur....j \ Y"""
SABRAZÈS agrégé ( Juges. V(i
GENTES agrégé ) \
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU MIDI — PAUL UASSIGNOL
91 — RUK PORTE-IHJKAUX — 91 1 902
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS,doyen — M. PITRES,doyen honoraire.
IMlOFESSUUItS
MM. M1GÉ )
DIJPUY MOUSSOUS.
Pro fesseurs honoraires.
MM.
PICOT.
PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
Clinique interne....
Clinique externe....
Pathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments LEFOUR.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie CANNIEU
Anatomie générale et
histologie VIAIJLT.
Physiologie *JOLYET.
Hygiène LAYET.
Médecine légale MORACHE.
Physiquebiologique et
électricité médicale BERGON1É.
AUB1IÉ<; ÛS «ON I0XI0IMUI0 :
section de médecine(Pathologie interne et Médecine légale.)
MM. CASSAET. j MM. MONGOUR.
SABRAZÈS. | CABANNE3.
HOBBS.
MM.
Chimie BLAREZ.
Histoire naturelle ... GUILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
Matièremédicale.... de NABIAS Médecine expérimen¬
tale FEilRÉ.
Clinique ophtalmolo¬
gique BADAL.
Cliniquedes maladies chirurgicales des en¬
fants P1ÉGHAUD
Clinique gynécologique BOURSIER.
Cliniquemédicale des
maladies desenfants A. MOUSSOUS Chimiebiologique... DENIGÈS.
Physiquepharmaceu- SIGALAS.
tique •
Pathologieexotique. LE DANTEC.
section de chirurgie et accouchements
Pathologieexterne
MM.DENUCE.
) BRAQUEHAYE ) CHAVANNAZ.
BÉGOUIN.
Accouchements.tMM. FIEUX.
ANDERODIAS.
Anatomie.
section dessciencesanatomiqueset physiol.ogiques
JMM. GENTES. | Physiologie MM. PACHON.
•••/ CAYALIÉ. I Histoire naturelle BEILLE.
section dessciencesphysiques
Chimie MM. BENECH. | Pharmacie M. DUPOUY.
4 01IIS < OHI»UI1H I0\TA IIIIIS :
Clinique des maladies cutanées etsyphilitiques MM. DUBREUILH.
Clinique desmaladiesdesvoiesurinaires
Maladies dularynx, desoreillesetdunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements Physiologie.
Embryologie Ophtalmologie
HydrologieetMinéralogie
Le Secrétairedela Faculté,
POUSSON.
MOURfi.
REGIS.
RONDOT.
DENTICr,.
ANDÉRODIAS.
PACHON.
PRINCETEAU LAGRANGE.
CARLES.
LEMAIRE.
Par délibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinions émises dansles
Thèses qui luisontprésentéesdoivent êtreconsidérées commepropres à leurs auteurs,
qu'ellen'entend leurdonner niapprobation niimprobation
A MONSIEUR LE DOCTEUR MAURICE LEVIER
MÉDECIN AIDE-MAJOR DE lre CLASSE DE L'ARMÉE COLONIALE
Mon meilleur ami et qui fut pour moi unsecond frère.
A mes Amis et à tous ceux qui m'ont témoigné de l'estime
et del'affection.
A MONSIEUR LE DOCTEUR
BERGONIÉ
PROFESSEUR DE PHYSIQUE BIOLOGIQUE ET D'ÉLECTRICITÉ MÉDICALE A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE BORDEAUX
CHEF DU SERVICE ÉLECTROTHÉRAPIQUE DES HOPITAUX CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE CORRESPONDANT NATIONAL DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR SICALA S
PROFESSEUR DE PHYSIQUE PHARMACEUTIQUE A LA FACULTÉ
DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
AYANT-PROPOS
Une carrière nouvelle s'ouvre devant nous, carrière pleine d'attraits,puisqu'elle représentepour nousl'inconnu, etnous
nous y engageons volontiers.
Mais ce n'est pas cependant sans un sentiment de tristesse
que nous quittons les êtres chers : parents, maîtres, amis,
enfin tous ceux qui ont contribué à faire denous ce que nous
sommesaujourd'hui.
A tous nos maîtres, nous offrons le témoignage d'une
reconnaissance durable et d'une respectueuse sympathie.
Nous tenons toutefois à remercier particulièrement M. le
Prof. Bergonié qui nous accueillit avec tant de bienveillance
à la Clinique électrothérapique. Pendantle stage trop court
que nous fîmes dans son service, ce maître éminent ne nous
a ménagé ni ses conseils ni ses encouragements. Le présent
travaila été fait sous sa direction et nous regrettons que son absence ne lui ait point permis cle réaliser notre désir de
l'avoir parmi nosjuges. En le quittant nous regrettons de ne
pouvoir lui offrir un travail plus digne de lui et nous le prions de vouloir bien excuser notre inexpérience.
Nous ne saurions non plus oublier notre ami le docteur
Levier qui nous témoigna tant d'affection vraie aux heures
d'ennui et de découragement qui sont parfois le partagede la
vie de l'étudiant.
Enfin M. le Prof. Sigalas veut bien nous faire l'honneur
de présider notre thèse inaugurale, nousl'assurons de notre respectueuse reconnaissance.
Bordeaux, le 10 décembre 1902.
Paul Hjelewyn.
INTRODUCTION
Notre travail est divisé entrois chapitres.
Dans le premier, nous étudierons la nutrition en
général,
sesimperfections,la mesure de son
intensité
au moyende la
notion du segmentanthropométrique.
Dans le second, nous traiterons de la mesure du segment anthropométrique, des causes d'erreurs qui peuvent
fausser
son évaluation.
Dans le troisième, nous montrerons l'application à la cli¬
nique de la mesure du segment
anthropométrique.
CHAPITRE PREMIER
La Nutrition. Ses Variations. Le Segment anthropométrique.
La nutrition, dit Liebig, est
l'assimilation des aliments
devenant tissus en quantité
correspondante à la destruction
des tissusdevenant matières excrémentitielles.
Riïbner ladéfinit tout autrement, caril considèreles tissus
comme formés sans rénovation; c'est la destruction des
ali¬
ments et au besoin des tissus n'ayant pour but que
cle
dégager l'énergie de lamatière organique
euproportion et
au fur et à mesuredes besoins.
Lavérité est des deux côtés, dit le professeur
Bouchard
(x).Oui, ily aune destruction,
mais aussi il
y a unerénova¬
tion. Il y a une destruction et
c'est le côté dynamique de la
nutrition, destruction qui intéresse
l'albumine, la graisse, le
sucre que les humeurs ont reçu
du tube digestif. Il
yaégale¬
mentune rénovation, carune fraction variablede l'albumine
du corps se détruit chaque jour et
est remplacée
par une quantité égale d'albuminealimentaire.
Mais entrons plus avant dansl'étude de ces
deux
processuscontraires et commençons par le premier.
Nous avons dit que trois éléments
participaient à cette
destruction : l'albumine, le sucre, la graisse.
L'albumine alimentairevase fixer en partie dans les tissus
(!) Bouchard,Troublespréalables de la nutrition. 1899.
azotés et assurer leur rénovation. De matière circulante, inerte qu'elle était, elle va devenir matière figurée vivante,
du moins pourla partie qui se fixe et entre dans laconsti¬
tution de la cellule. Lesbesoins du tissu azoté règlent cette vivification, qui ne se faitjamais au delà de la restauration.
Mais l'excès d'albumine alimentaire qui ne concourt pas à
cette œuvre de rénovation que va-t-il devenir? En dehors*
de la réparation devenue nécessaire par la désassimilation,
l'albumine ne s'accumule pasdans le sangni dans les tissus.
La lymphe peut en recevoir une partie qui n'est pas consi¬
dérable, aussi le surplus se détruit-il et son mode de des¬
truction est le suivant : elle s'hydrate en fournissant de l'urée, du glycogène qui, plus tard, se transformera en glu¬
cose, et de l'hydrogène. Ily a donc hydration et combustion.
Cette albumine se détruit, même si l'économie n'a pas besoin de l'énergie dégagée dans cette combustion, même si celle-ci était nuisible ; il est vrai qu'en compensation l'orga¬
nisme sedébarrasse facilement du calorique excédant.
L'albumine fixe elle-même, n'est point stable, une partie
de cette matière vivante s'élabore comme l'albumine alimen¬
taire, sans incitation fonctionnelle préalable. Celle-ci peut agir, il est vrai, mais son absence n'empêche pas la destruc¬
tion d'une partie de l'albuminefigurée.
Occupons-nous maintenant de ce que deviennent le sucre et la graisse.
L'amidon ou les sucres sonttout d'abord transformés dans le tube digestif, puis ils aboutissent au foie, où ils sont em¬
magasinés sous forme de glycogène.
L'hydratation du glycogène hépatique l'amène à l'état de
glucose. Ce sucre, en partie transporté jusqu'au muscle,
subit une nouvelle transformation qui l'amène de nouveau à l'état de glycogène. Il s'y emmagasine, mais bientôt devenu acide lactiquepar suite des besoins mécaniques, il se com-
bure. C'est làune combustion indirecte. Une autre partie du
sucre, celle qui reste, s'oxydera directement sans passer dans
le muscle. Ces combustions s'accompagnerontde formation
d'acide carbonique, de dégagement de calories et de produc¬
tion d'eau.
Uneautre métamorphose importante etqui, nous leverrons
plus loin, n'est pas sans influence sur la genèse de l'obésité,
estla transformation du sucre en graisse, transformation qui
est la conséquence soit d'une ingestion excessive de sucre, soit d'une combustion incomplète qui augmente la quantité
de sucre de l'organisme.
La destruction de la graisse se fait par combustion, la graisse étant une réserve de combustible que la machine
utilisera au moment du besoin d'énergie. Il en résultera,
comme dans l'élaboration du sucre, un dégagement de calo¬
ries etd'acide carbonique et formation d'eau.
De plus, et cette opinion est confirmée par les expériences
de Bouchardet de Desgrez, la graisse donnerait naissanceà du glycogène qui irait s'accumulerdans le muscle et suppléer
en partie, pour les besoins mécaniques, à l'apport insuffisant
du glycogène hépatique.
Nous voyons donc les résultats fournis par l'élaboration
desprincipes immédiatsqui concourent à lanutrition : réno¬
vation plastique, fonctionnement musculaire et entretien de la température.
Si cette élaboration se fait complète, nous aboutissons au
type moyen normal de la nutrition.
Mais à côté de cette élaboration parfaite qui fournit libérar
lement aux besoins de l'organisme, il y a d'autres types
moins parfaits de métamorphoses, formés d'oxydations
intenses oude destructions ralenties.
Supposons, en effet, que par suite de maladies ou d'états morbides il se fasse dansl'organismede grands besoins d'éner¬
gie, le sucre et la graisse fourniront par leur combustion les éléments nécessaires tant qu'ils le pourront; mais quand par suite d'appels trop répétés ils seront en déficit, où l'organisme
s adressera-t-il, si ce n'est à l'albumine, pour satisfaire ce
besoin d'énergie.
L élaboration de cette dernière substance se fera plus
intense et l'albumine fixe y fournira sapart, au point même
de faire perdre aux cellules les
dimensions primitives qu'elles
lui devaient.
L'albumine alimentaire ne suffira plus par sa fixation à
faire face au mouvement actuel de désassimilation et l'or¬
ganisme tombera
dans
unétat qu'on
aqualifié de
marasme.Il existe encore d'autres imperfections dans les métamor¬
phoses delà matière.
Nous avons vu plus hautquela destruction de
l'albumine
aboutissait àcertainsproduits, tels que l'urée, le
glycocolle,
etc. Mais avant d'aboutir à cet étatexcrémentitiel la matière
passe par diversétats
intermédiaires. Ces états sont, il est
vrai, ordinairementfugitifs ; mais s'ils persistent, ces déchets incomplètementtransformés ne tarderont pas à
apparaître
dans le sang, puis dans l'urine. Nousverrons
dans
ce cas une augmentationde la toxicitédes urines, ainsi
quel'élévation
du taux du carbone urinaire et de l'acide urique.
Ce sont ces troubles que signalait Benecke, remarquant
dans les urines l'excès d'urate et d'acide oxalique, troubles
dont il ne connaissaitpas la cause, troubles que Bouchard a dénommés parralentissement de la nutrition (x).
Ces troubles, dus dans ce dernier cas à la désassimilation incomplète de l'albumine,nous sont mieuxconnus
depuis les
travaux de Bouchard et de Desgrez et leurs dosages compara¬
tifs de l'azote et du carbone urinaire.
Lesexpériences de ces auteurs ont prouvé que dans ces troubles par ralentissement le taux du carbone urinaire aug¬
mentait considérablement et que l'augmentation de la toxi-
cité marchait parallèlement avecl'élévation du coefficient
dont la moyenne est environ 0,870.
La détermination moyenne des différents coefficients uri-
naires
Az urée eu et cE et
Aztotal et Azt AzE Az
permet de décelerencore mieux les
imperfections
des méta-(i) Bouchard, Troublespréalablesdela nutrition.
morphosesde la matière. De plus, M. le Prof. Bouchard et
ses collaborateurs, MM. Claude et Balthazard,ont demandé
àdes recherches cryoscopiques le poids de la molécule éla¬
borée moyenne, et ils ont déterminé que ce poids, qui est à
l'état normal un chiffre oscillent entre 68 et 82, augmente
presque toujours à l'étatpathologique. Ce sont là des expé¬
riences bien intéressantes à connaître, mais nous ne pouvons
nousy arrêter.
Les substances ternaires sont, elles aussi, sujettes à des
destructions incomplètes, à des modes inférieurs d'élabo¬
ration ?
A côté de la combustion complète de la graisse, livrant
toutesa chaleur, il y a la combustion incomplète, laissant
lagraisse se mettre en réserve sous forme de glycogène. Il y
a même un trouble nutritif plus accentué, la graissene se détruisant plus, sedépose dans l'organisme et surtout dans le
tissu cellulaire sous-cutané : nous arrivons alors à l'obésité.
Ilen est de même pour les hydrates de carbone : insuffi¬
samment comburés, ils s'accumuleront dans l'organisme, produiront de laglycosurie et le diabète.
Nous pouvons conclure de cette étude que pour les trois
ordres de principes immédiats (albumine, sucre, graisse) il
y a deuxtypes d'élaboration, l'un normal, l'autre amoindri ;
cet amoindrissement, cetrouble de ralentissement n'est pas la maladie, mais il suffit à la provoquer s'il devient trop
intense.
Nous n'avonsjusqu'ici considéré la nutrition que comme
une élaboration plus ou moins parfaite de la matière. Il s'agit aussi de savoir avec quelle rapidité s'effectue cette destruction, et c'estlà lamesure de l'intensité vitale. Il est évident que ce processus destructif ne s'accomplit pas à la
même vitesse chez deux individus différents etchez le même individu à différentes époques de sa vie.
Nous voulons doncmesurer l'intensité nutritive.Mais pour cela, il nous fauttout d'abord une unité de mesure, un terme de comparaison.
Quelle unité prendrons-nous, dit Bouchard (*). Prendrons-
nous, comme autrefois, l'urée dosée du litre d'urine, sans
même rapporter les résultats au volume des vingt-quatre
heures, etune fois cette idée de temp acquise pourrons-nous
l'appliquer en assimilant le nouveau-né à l'adulte et au
vieillard, le nain au colosse.
Le kilogramme corporel ne saurait nous suffire davantage
comme unité de mesure, car c'estune unité de composition
inconstante. Nous ne pouvons pas comparer, au point de
vue activité, le kilogramme de l'obèse et le kilogramme de
l'homme normal. Supposons en effet qu'un homme normal
double de poids par suite de l'obésité, le kilogramme de
l'obèse nedevrait valoircommeactivité qu'un 1/2 kilogramme
de l'homme normal, puisque la graisse est inactive. Si l'acti¬
vité était égale chez les deux hommes, ils devraient pro¬
duire lamême quantité d'urée; mais cela n'est pas, le kilo¬
gramme de l'obèse en produit plus quele 1/2 kilogramme de
l'homme normal. Ceci s'explique d'ailleurs par l'augmenta¬
tion chez l'obèse de la surface de déperdition du calorique ; l'invariabilité de latempérature exigeantunedestruction plus
active.
Le kilogramme corporel, renfermant plus ou moins de parties inertes, ne saurait être pris comme unité active au point devue de l'estimation des échanges nutritifs.
«Cequi est actif, ditBouchard,ce qui commandeet effectue
les métamorphoses de la matière, cen'est pasl'eau, nilessels,
ni la graisse, véritables dépôts de charbon que la machine
utilisera. Ce qui est actif, c'est l'ensemble destissus azotés ; dans ces tissus, c'est l'albumine. L'unité active réelle, c'estle kilogramme de l'albumine constitutive des tissus. Ce n'est
pas toute l'albumine, ce n'est pas l'albumine circulante du
sang ou de la lymphe, c'est l'albumine fixe qui à la faveur de l'eau, en utilisant la partie minérale, accomplitdans l'écono¬
mie tout ce qui est action, effectue les actes nutritifs, trans-
(!) Bouchard, Troubles préalables de la nutrition.
forme les matériaux alimentaires, les fixeen partie dans les cellules, détruit cequi circule ». Le kilogramme d'albumine
fixe est donc notre unité vivante.
Avant de nous lancer dans l'étude de la mesure des échan¬
ges nutritifs, il nous estnécessaire de connaître
deux choses:
d'abord la détermination dela surface du corps (nous avons
vucombien cette surface a d'influence sur l'activité vitale), et
le poids de la substance agissante de l'organisme.
Pour y arriver plus facilement. Bouchard (*) considère
l'homme comme un cylindre dont la hauteur est la taille de
l'individu, le volume, celui de l'individu, la masse, son nom¬
bre de kilogrammes. Il néglige les différences entre le volume
et le poids, quoiqu'elles ne soient pourtant pas tout à fait négligeables.
Ce cylindre est divisé en tranches ou segments de 1 déci¬
mètre de hauteur; ce sont ces tranches, dont la superposition
compose la totalité du corps, que Bouchard prend comme
terme de comparaison pour étudier les modifications que subit le corpsd'un individu dans les différentes phases de
son existence. Le segment anthropométrique est cette frac¬
tion du cylindre total qui a pour hauteur l'unité, le déci¬
mètre, pour formule algébrique
-yj-, c'est-à-dire le poids
exprimé en kilogrammes, divisé par la taille exprimée en décimètres, -y-
indique le poids du segment, et sensiblement
son volume.
Nous pouvons affirmer déjà que les individus différeront
par le nombre des segments, dont la superposition forme
le
corps, par le volume et la composition de leurs segments.
Cette donnée du segment anthropométrique rend
possible
l'estimation de la part proportionnelle de chacun des prin¬
cipes immédiats dans la composition du corps.
Si nous admettons avec von Noorden que la composition
moyenne du kilogramme du corps humain est la suivante :
(i) Voir Bouchard.
H.
- 18 -
Albumine 160 grammes.
Graisse 130 —
Eau 660 —
Matières minérales 50 —
nous aurons la composition du segment en
multipliant
chacun de ces nombres par le quotient de-jj-.
Supposons
normal un homme de 64 kilogrammes et de 16 décimètres,
son segment
anthropométrique
aura commepoids 4 kilo¬
grammes. Le segment
contiendra
:160 grammes X 4 = 640grammes albumine.
130 grammes X 4 = 520grammes graisse.
660grammesX 4 =2.640grammes eau.
50 grammes X 4 = 300grammes matières minérales.
L'albumine circulante du sang et de la lymphe a pu être
évaluée approximativement par
les physiologistes à 12
gram¬mes environ par kilogramme, ce qui fait 592 grammes
d'al¬
bumine fixedans le segment considéré, après avoir
soustrait
le chiffre de l'albumine circulante. Si toutefois, dans ce cas-ci, 4 estle poidsdu segment normal d'un homme
de cette
taille, sinon la notion de poids suffirait à nous donner
la
composition du corps. Nousdirons plus loin comment
onarrive àconnaître si un segment est normalou non.
Nous avons obtenu la première notion nécessaire à la solu¬
tion de notre problème, nous pouvons mesurer la
quantité
d'albumine constitutive de l'organisme.
Il nous faut maintenant nous occuper de la mesure de la
surface corporelle, seconde donnée de notre étude, car on
sait
que l'incitation à la destruction se
fait proportionnellement
à la surface du corps, abstraction faite de la température,
de l'état hygrométrique, dont on peut supprimer les
varia¬
tions. Plusieurs procédés de mesure ont été proposés, car il
n'est pas facile de mesurer exactement lasurface du corps.
Parmi les procédés expérimentaux, nous citerons tout
d'abord ceux du professeur Bouchard et de MM. les Prof.
Bergoniéet Sigalas.
19
M. Bouchard divise, dit-il, la totalité de la surface corpo¬
relle en figures géométriques assez petites pour
qu'on puisse
les considérercomme planes(triangles, trapèzes), et en fait la
la mesure géométrique. On obtientainsi une
approximation
par défaut, parce que le corps est
assimilé à
unpolyèdre
dont la surface est toujours moindre que la surface courbe qui l'enveloppe, etlui est tangenteaux
angles.
Le procédé de Bergonié et Sigalas
consiste
enceci
: onrevêtle corps de l'individu de sparadrap des
pharmaciens,
aussi inextensible que possible, et on le tapisse ainsi le
plus
exactement que l'on peut. La surface de la
pièce de
spara¬drap, mesurée avant l'expérience, permet
de connaître,
avec quelques corrections, la surfaceemployée. Ici l'approxima¬
tion se feraitplutôt en excès.
MM. Roussy et d'Arsonval ont employé
l'un
etl'autre
d'autres procédés dont ils sont les auteurs. L'un
utilise
un cylindre compteurà qui il fait parcourirla
peau;l'autre,
un véritable maillot en feuilles d'étain, qu'il charge électrique¬ment. Sachant combien d'électricité a été distribuée, il n'a qu'à mesurer la quantité d'électricité emportée par une
des
feuilles qu'il arrache pour connaître la
surface totale de dis¬
tribution.
Cette mesure expérimentale directe de la surface
corporelle
est assez longue, et c'est là un grand
inconvénient; aussi
a-t-on cherché à y arriver plus vite indirectement en
la cal¬
culant au moyen de formules. Pour cela,
Meeh assimilait
l'homme à une sphère dont le volume en décimètres
cubes
était indiqué par le nombre de kilogrammes; sa
formule
n'était pas applicable.
Le professeur Bouchard (*) se sert pour cela
de
son seg¬mentanthropométrique que nous avons décrit plus
haut. Des
dimensions de ce cylindre spécialement combinées on
arrive
par le calcul à des formules qui, au moyen
de coefficients de
correction, donnent la surface totaledu corps.
(1) Bouchard. Troublespréalables de la nutrition.
Ces calculs de surface ayant été faits par
Bouchard
pourtous les segments compris entre
1,49 et 10,52,
cas que1
on peut rencontrer, lesrésultats
enont été consignés dans
untableau, ce qui permet en le consultant
de connaître aussi¬
tôt, au moyen de quelques
opérations d'arithmétique très
simples, lasurface du segmentque
l'on désire.
Nous connaissons dès maintenant les deux données qui
nous permettent d'aborder
l'étude de 1 intensité nutritive.
Nous nous servirons de la notionde surfacecorporelle non en la rapportantau poids du corps,
mais
aupoids de l'albumine
fixe. Le quotient de ce rapport nous fera
connaître la surface
d'émission allouée au kilogramme d'albumine fixe.
Nous
verrons aussi que cette surface estplus ou moins
grande sui¬
vantl'âge, lataille, les états
pathologiques d'obésité
oude
marasme ; que par suite l'incitation qui dépend
de la surface
seraplus oumoins grande aussi ; cette
incitation à la des¬
truction nous l'appellerons avec Bouchard «
excitation
cata- lytique ».Il sera intéressant ausside comparer ces incitations chez
diversindividus, puisqu'elles varient d'un homme à l'autre.
Pourconnaître le degré d'incitation chez un sujet que
l'on
étudie, on n'aura qu'à comparer la surface d'émission par kilogramme d'albumine fixe de cet
individu
àla surface
d'émission allouée par kilogramme d'albumine fixe chez
l'homme moyen de même taille. Le rapport nous donnera le
coefficientd'excitation catalytique.
Nous avons considéré au début la nutrition dans sa phase destructive, nous avons vu aussique la seule matière vivante
del'organisme était l'albumine fixe. Il en résulte que la
mesure de l'intensité vitale sera la mesure de la destruction de l'albumine fixe des tissus, « la mesure de l'hystolyse ».
Cette mesure réclame certaines précautions préalables.
D'abord réduire les besoins de calorification, satisfaire à
ceux qui persistent par une alimentation non azotée. On
recueille aussi les urines matinales de sept à dix heures.
Dans ces urines ainsi recueillies, on dose l'azote total. Or
on sait que pour 1 gramme cl'azote urinaire
total il
y a euélaboration de 6 gr. 736 d'albumine. On peut donc
savoir, les
conditions detempérature et d'alimentation étant observées, quelle est la quantité
d'albumine qui
estélaborée
parl'unité
de poids de l'albumine des tissus, la
surface d'incitation
étant normale.
M. le Prof. Bouchard (*) a dressé des tableaux où sont indiqués en regard de l'âge (dernier terme
de comparaison) le
nombre de milligrammes d'albumine détruits en une heure
par kilogramme d'albumine fixe. Dans une
seconde colonne
est notéela fraction de l'albumine totale détruite en vingt- quatre heures.
Le nombre de milligrammesd'albumine réellementdétruits
chezunsujetenune heure parle kilogramme
d'albumine fixe,
divisé par le coefficient d'excitation catalytique,nous donne
le nombre demilligrammes qui seraient détruits si la sur¬
face d'émission étaitmoyenne. Ce dernier nombre, divisé par le chiffre des milligrammes d'albumine que le kilogramme
d'albumine fixeélabore enune heure chez un homme sain de
même âge, nous donne le chiffre de l'activité
hystolytique.
Ce chiffre nous est d'ailleurs donné suivant l'âge dans les
tableaux duprofesseur Bouchard.
La notion de laglycolyse est accessoire, il est vrai, dans la
mesure de l'intensité vitale, mais ellen'en a pas moins son
importance. Elleprouve par sesmodifications que la consom¬
mation du sucre varie suivant les états de santé ou de mala¬
die, qu'elle est moins forte quand l'intensité vitale est dimi¬
nuée : elle varie aussi avec l'âge.
L'unité glycolytique est atteinte quand l'organisme est susceptible de transformeren vingt-quatreheures 62 gr. 2 de glycose. L'homme sain a une consommation toujours infé¬
rieure à l'unité, son activité glycolytique est comprise entre 0,6 et 1. Tout diabétiqueaura une activité inférieure à 0,6.
Dans la première partie de cette étude nous avons analysé
(!) Bouchard, Troublespréalables de la nutrition.
- 22 —
la nutrition et ses éléments., nous avons établi par quelles
recherches (dosage du carbone
urinaire, recherche de la
toxicité) il estpossible d'apprécier la
perfection des métamor¬
phoses de la matière. Puis nousavons vu que
l'intensité de
lanutrition varie selon la plus ou moins grande
élaboration
de lasubstance constitutive de l'organisme. Nous avons
dit
aussi que cette destruction dans l'unité de temps
varie
avec l'âge, le besoin d'énergie, l'étenduede la surface allouée
au kilogramme d'albumine fixe. C'est la mesurede l'intensité de
la vie.
Nous avonsinsisté assezlonguementsurcespréliminaires,
parce qu'ils nous paraissent utiles à la
compréhension de
ce quivasuivre: il nous fallait connaître la nutritionnormale
avant de la déceler dans ses états pathologiques. Nous abor¬
derons maintenantl'étude de la mesure du segment anthro¬
pométrique.
CHAPITRE II
Mesure du Segment anthropométrique.
Dans notre premier chapitre, nous avons
défini le segment
anthropométrique, « ce cylindre élémentaire inventé commeterme de comparaison pour étudier les
modifications
quesubit le corps d'un individu dans les différentes phases
de
sacroissance et dans ses divers degrés de développement ».
Nousavons dit que saformule algébrique était 2#
-j|-, c'est-
à-dire le poids exprimé en kilogrammes, divisé parle
nombre
de décimètres de la taille.
Il nous faut donc déterminer le poids et mesurer la taille.
Pourcela, nous emploierons les procédés de mesure etles
instruments que nous avons biensouventvu mettre enusage
àla Clinique électrothérapique et aux travaux
pratiques de
physique médicale, où les étudiants apprennent à mesurerle
segmentanthropométrique; nous les avons d'ailleurs nous-
même employés tant que cela nous a été possible pour cette
étude.
Nous commencerons par la détermination du poids.
Pour cette mesure, on a pu et on peut employer de nom¬
breux instruments, depuis la balance à fléau que Monneret
faisait transporterau lit du malade à la Charité jusqu'à
la
balance deQuintenz ordinairetous les instrumentsdemesure ont le manque de précision.
La balance à fléau était lourde et encombrante; elle per¬
mettait d'ailleurs des variations de plusde 10 grammes.
Nous ne citerons que pour mémoirelabalance de
Roberval,
— 24 —
avec laquelle on ne peut peser que des enfants, et le peson
qui n'estpas très pratique.
La balance de Quintenz ordinaire a une sensibilité insuffi¬
sante; il est rare que la sensibilité de cet appareil aille à
25 grammes.
M. le Prof. Bergonié, dans son Cours de Mécanique ani¬
male, signale encore ses autresinconvénients : «Il n'y apas, dit-il, surleplateau de siège approprié dont il faille faire la
tare ; il fautse tenir debout, ce qui ne permet pas une immo¬
bilité suffisante et parsuite une pesée précise. Enfin, avec la
balance de Quintenz, le malade peutlire enmêmetemps que le médecin; il en résulte des inconvénients au point de vue
suggestif. »
Pénétré de ces inconvénients, M. le Prof. Bergonié a fait
construire suivant ses idées une balance de Quintenz modi¬
fiée. Elle est très simple, donneune grande exactitude etune sensibilité suffisante pourdéceler des variations de 10gram¬
mes sur 150 kilogrammes de poids maximum. C'est cet
instrument que nous avons employé dans nos mesures.
Nous empruntons la description auprofesseur Bergonié Q):
« Elle se composeessentiellement d'une plateforme, montée
sur unetable suffisamment basse pour que le sujet puisse s'y
asseoirfacilement. -La table est construite de telle façon que toutes ses parties soient en dedans de l'aplomb de la plate¬
forme oscillante sur laquelle il est assis. Le sujet est assis
et repose sur sonsiège et sur ses fémurs, le genou dépassant
la plateforme; ses reins portent contre un petit dossier qui permetune immobilité facile etcomplète.
» Enfin il tourne le dos auxtiges graduées sur lesquelles se font les lectures. Pour opérerla pesée, on fait asseoir son
sujetsur le plateau, on déplace le premier curseur sur la tige graduée en dizaines de kilogrammes jusqu'au cran immédia¬
tementinférieurau poids du sujet, puis c'est le tour du cur¬
seur mobile sur la tige des dizaines de grammes, dont
p) Bergonié, Traité de mécanique animale.
25
chacune des divisions porte des subdivisions en dix parties, qui est placé au point donnant
l'équilibre parfait, c'est-à-dire
met en regard les deux alilades. On
fait alors la
sommedes
poids. L'intervalle des poids que peut mesurercettebalance
varie de 10 grammes à 150 kilogrammes. »
Mais il ne suffit pas d'avoir une balance précise pour avoir
le poids vrai, il y a des causes d'erreur qui peuvent
fausser
les résultats. Ces causes d'erreurpeuvent se classer en deux catégories : dans la première, nous rangeons
celles qui
augmententle poidsvrai ;dans la seconde,
celles qui le dimi¬
nuent.
Etudions lespremières ;
D'abord, le malade peut avoir mangé avant la pesée, et
cette erreur en plus, par suite d'ingestion d'aliments, peut
être assez considérable.
M. le Prof. Bergonié, étudiant ces causes d'erreur, a
établi
la moyenne des poids des différents repasde la journée :
Poids moyens :
Petitdéjeuner oscille entre 150et850 grammes.
Second déjeuner oscille entre450et 700grammes.
Dîner oscille entre600à 1.100 grammes.
Dînerde ville oscille entre 1.000à 1.350 grammes.
Nous voyonscombien sont importantes cescauses d'erreur
par ingestion d'aliments. 11 en est encore une qui fausse davantage l'évaluation du poids vrai : c'est le poids surajouté
duvêtement. Les observations du professeur Bergonié sont
instructives à ce point de vue ; le vêtement d'intérieur
moyen comprenant : caleçon, chemise,pantalon, chaussettes, pantoufles, veston, pèse 2kil. 500. Le vêtement deville, com¬
prenant en plus pardessus, chapeau, souliers, pèse moyen¬
nement 5 kil.500.
Parmi les erreurs en moins, nous citerons tout d'abord les
évacuations alvines et les mictions. Suivant les observations desphysiologistes, un homme de 70 kilogrammes, mis à la
ration d'entretien, perd environ de 250 à 450 grammes par
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évacuation alvine, et cle 150 à 400 grammes par miction.
Nous savons aussi que le poids de l'homme diminue cons¬
tamment par évaporation de l'eau à la surface pulmonaire
et par rejet d'acide carbonique.
On voit par cet exposé combien sont nombreuses les
causes d'erreur. Aussi importe-t-il de les éviter le plus pos¬
sible ou d'effectuer les corrections si on ne peut les éviter.
Pour cela, on détermine le poids minimum du sujet, c'est-
à-dire celui qu'il a le matin au réveil, nu, après miction et défécation, et avanttoutrepas. Ces conditions étant remplies,
onprocède à la pesée du sujet comme il a été indiqué plus
haut.
Il nous faut nous occuper maintenant de la mesure de la
taille : « La taille, dit le professeur Bergonié dans son Traité
de mécanique animale, est la longueur de la verticale entre
les deux plans horizontaux qui passentl'un par la plante des pieds du sujet déchaussé, l'autre qui est tangent au vertex ou
point culminant de la tête, lorsque le sujet est adossé et regarde droit devant lui. »
Lataille varie, nous le savons, avec les divers individus,
avec l'âge. D'après les tableaux de Quetelet (1830), on voit
quela taille croîtjusqu'à quarante-cinq ans et décroît ensuite.
La taille de la femme est plus petite que celle de l'homme.
La taille d'un sujet fatigué par la marche est moindre que celle qu'il possède au moment où il est dispos. La mesure de
la taille se faitau moyen d'un instrument appelé toise (a).
La toise consiste en une règle verticale graduée sur laquelle glisse une équerrehorizontale qu'on amène au contact avec la tête. La tige verticale possède la graduation en millimè¬
tres, ce quen'ont pas les toises des conseils de revision qui
ne sont graduées qu'en centimètres.
Le sujet étant déchaussé, adossé à la règle verticale, regar¬
dant droit devant lui, on abaisse l'équerre horizontale jus¬
qu'à contact parfaitavecla tête. On faitunelecture qui donne
(!) Bkrgonié, Traité de mécaniqueanimale.