FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1902-1903 Ho 71
DES
«USITES MAXILLAIRES
chez les Enfants
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE
Présentéeet soutenuepuMuuement le 9 i.nvier 1903
Jean-Marie-Numa BOURRAGUÉ
Né àLabaStide-Villefranche (Basses-Pyrénées), le 16 novembre 1877.
ÉLÈVEDU SERVICEDE SANTÉDE LAMARINE
MM. MÔUSSOUS, professeur, président.
de la Thèse
|
BOURSIER,professeur. jCHAVANNAZ, agrégé. ? Juges.
MOURE, chargé de cours. /
Le Candidatrépondraaux questions qui lui serontfaites sur les diverses parties de l'Enseignementmédieal.
BORDEAUX
Impiimerie J. DURAND, 20, rue Condillac
1903
FACULTÉ
DEMÉDECINE
ET DE PHARMACIE DEBORDEAUX
Doyenhonoraire.
M. de NABIAS Doyen. | M. PITRES.
PROFESSEURS :
MM. MICE
. _ .
DUPUY / Professeurs honoraires.
MOUSSÔÙS '. '. '... '.
Clinique interne.... Clinique externe..., Pathologie et théra¬
peutique générales.
Thérapeutique Médecine opératoire..
Clinique d'accouchements....
Anatomiepathologique Anatomie
Anatomie générale et histologie
Physiologie Hygiène Médecinelégale
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gicales des enfants Clinique gynécologique Clinique médicale des maladies
des enfants
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sectionde médecine (Pathologieinterne etMédecinelégale).
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denuce.
RONDOT.
anderodias.
PACHON
princeteau.
lagrange.
gardes.
Le Secrétaire de la Faculté:LEMA1RE.
Par délibération du 5 août 1879, la Faculté a arrêté que les opinionsémises da ^ Thèsesqui lui sontprésentées doivent être considéréescommepropresàleursauteu~i qu'elle n'entend leur donner ni approbation ni improbation.
A TOUS CEUX DONT J'AI L'AFFECTION
i
A MES CAMARADES DE LA MARINE ET DE L'ARMÉE COLONIALE
A Monsieur le docteur E.-J. MOURE Chargé du cours de laryngologie, d'otologie et de rliinologie
à la Faculté de Médecine de Bordeaux
Officier de l'Instruction publique.
Hommage de gratitude.
V
A MON
PRÉSIDENT
DETHÈSE
Monsieur le docteur André MOUSSOUS Professeur de clinique médicale infantile à la Faculté
deMédecine de Bordeaux Médecin des hôpitaux Officier de VInstruction publique.
Hommage de reconnaissance
INTRODUCTION
Les travaux parus sur les
suppurations plus
oumoins
chroniques des cavités
accessoires clu
nezsont en nombre
considérable. Pas un rhinologiste qui
n'ait voulu contribuer
pour sa part à cette
étude si intéressante, ceux-ci s'occupant
plus spécialement de
l'étiologie et du diagnostic, ceux-là
n'ayanten vue que
le traitement. De telle sorte qu'à l'heure
actuelle l'histoire des sinusites en
général
etdes sinusites
maxillairesen particulier estconnue
à fond, et rares seront
les faitsnouveaux quel'on apportera sur un
point quelconque
de leur évolution.
Mais cettequantité énorme
de travaux parus dans tous les
pays se rapporte presque en
entier à l'étude des sinusites
observées chez les adultes; les cas
signalés chez des enfants
sont très peu nombreux et encorene
s'agit-il là que de sinu¬
sitesàgrand fracas,
accompagnées de phénomènes extérieurs
tels que leur
diagnostic s'impose. Quelques cas ont été relatés
clans la littérature scientifiquede ces
inflammations suppura-
tives aiguës. Mais il
existe aussi chez les enfants, et beaucoup
plus souventqu'on ne se
l'imagine
engénéral, des sinusites
insidieuses, en tout
semblables à
ce quel'on connaît chez
l'adulte sous le nomd'empyèmes
chroniques du sinus maxil¬
laire. Ce fait a été signalé pour
la première fois par M. le
docteur Moure en 1896, ensuite par
M. Emil Meyer, de New-
York, à lafin de l'année
1901.
Nous nous proposons
de reprendre la question avec quel¬
ques détails, car
l'anatomie de la région malade, les change¬
ments qu'elle
subit
aufur et à mesure que l'enfant avance en
— 10 —
âge, lesrapports variables des dentsavecla cavité sinusienne,
rendent la
thérapeutique
un peu plus délicate que dans la 'plupart des cas
développés
chez l'adulte.Nous étudierons successivement :
1° Le développement du sinus maxillaire et ses rapports
avec les dents chez l'enfant;
2°
L'étiologie
des sinusites maxillaires infantiles;3° L'anatomie pathologique;
4° Les symptômes et le diagnostic;
5° Le pronostic et les complications; 6° Le traitement.
Nous intercalerons en différents points de notre travail les observations que nous avons recueillies.
Développement du sinus maxillaire.
Pendant fort longtemps on supposa que le sinus maxillaire
n'existait pas au moment de la naissance et qu'il ne se déve¬
loppait qu'après. Ainsi, selon Decauclin, il n'apparaît que
vers le huitième mois de la vie extra-utérine.
Pour Sommering, on l'apercevrait quelquefois chez l'em¬
bryon,mais leplus souventil neferaitson apparition qu'après
la naissance.
Dans une thèse qu'il soutinten 1846, Jamain prétendit qu'il n'existe pas chez l'enfant à terme et dit : « Le maxillaire supérieur n'offre'pas de cavité qu'on appelle sinus, ce qui
prouve son peu de hauteurà cet âge. »
Mais cette théorie fut bientôt battue en brèche. Portai, le premier, mentionna que les sinus de la face chez un enfant
deneuf mois sont petits au point d'être à peine aperçus, à
l'exception
toutefois des sinusmaxillaires, assezgrands pour contenir une petite fève. L'antre d'Highmore existe en effet àla naissance et, d'après Bourgois, on le trouve nettement
accusé au septième mois de la vie intra-utérine. Sa forme
serait alors celle d'une cavité dont les dimensions égalent
celles d'ungrain de blé et s'ouvrant par une large ouverture dans les fosses nasales.
Tillaux à son tour admet les dimensionsde cet espace, mais
il pense
qu'elles n'augmentent guère de la naissance à la
puberté. « Le sinus existe, dit-il, sous forme d'une petite lente à direction antéro-postérieure qui s'accroîtpeu dans les
premières années de la vie et augmente d'une manière beau¬
coup plus sensible à la puberté. »
On peut donc juger, d'après ces derniers auteurs, que
le
— 12 —
sinus maxillaire existeavant la naissance. Ilest représentéen
première ébaucheparuneinvaginationlatérale de la muqueuse buccale à laquelle correspond une excavationà parois assez épaisses de la capsule cartilagineuse du nez. Peu à peu, le tissu osseux vientremplacer le tissu cartilagineux, si bien
que finalement la muqueuse sacciforme est logée dans un diverticule osseux
(Zuckerkandl).
A terme, le sinus a déjà pris une forme reconnaissable; il est situé au-dessus et endedans de la première prémolaire, affectant la forme d'une fente
antéro-postérieure.triangulaire
à trois parois: dentaire, orbitaire et nasale.Les anatomistes ne sont pas d'accord sur le point de savoir quelle paroi on doit considérer comme base; à la vérité, que
nous importe, puisque nous voulons simplement prouver que l'antre existe dès la naissance et se développe régulièrement jusqu'à la puberté. En effet, plus on prend des crânes de sujets âgés, plus le sinus s'enfonce, c'est-à-dire qu'ils'ampli¬
fie surtout dans la profondeur du maxillaire, dans unedirec¬
tion interne-externe. Vers le septième mois on peut constater
la présence d'une légère cloison orbitaire, sous forme d'une
mince lame osseuse, tandis que la paroi nasale se forme par
l'augmentation de volume de l'apophyse unciforme et
de
la bulle ethmoïdale. Et ainsi le sinus maxillaire va s'agran-
dissant progressivement d'avant en arrière sans attendre la puberté; le tableau comparatif de Bourgois que nous tenons
à ajouter à notre travail est, à cet égard, très convaincant.
Sinus fœtal : sept mois, grosseur d'ungrain de
blé.
Après la naissance : longueur, 12 à 14
millimètres.
*
Enlargeur Enhauteur Dimensions
j
Deprémolaire
2 millimètres. 1 millimètre,au niveau de la / 2e _ 3 — 4 _
Dimensions
auniveaude la
— 13 —
Vcinq mois : longueur,
14
à15 millimètres.
(Commence enavant delapremière prémolaire.)
Enlargeur Enhauteur lreprémolaire 5 millimètres. 4millimètres.
2e — 6 *— 6 —
l>'e molaire 5.5 — 5 —
A onze mois : longueur : 21 à 22
millimètres.
(Lapartie antérieure commence auniveau de la canine.)
Dimensions
au
niveau de la
Enlargeur Enhauteur Canine 2.5millimètres. 3millimètres, lreprémolaire 3.5à 4 — 5
2e 8 — 8 —
Iremolaire 7 — 7 —
A cleux ans : longueur, 29
millimètres.
(Commence au-dessus de la caninedéfinitive et finit au-dessous
dela première molaire.)
Enlargeur Enhauteur Dimensions (
Janine 5 à 7 millimètres. 6 à 8 millimètres.
lreprémolaire 6à7 — 7 à 8 —
2e_10 - 10 —
Ire molaire 12 — 11 à 12 —
au
niveau de la
A trois ans et demi : longueur 22
millimètres.
(Commence àlacanineetfinità ladeuxièmemolaire.)
Enlargeur Enhauteur
1 Canine
lreprémolaire3
5millimètres.
—4
6millimètre»,
—2e^ _ 5 —
8
—niveau de la I lremolaire 8 —
6
—f 2e — 7 — 7 —
A cinq ans : longueur,
30
à32 millimètres.
(Lesinuss'arrondit.)
Enlargeur Enhauteur
I Canine 4 millimètres. 6 millimètres.
Dimensions V lreprémolaire 4 — 6
au 2e — 6 — 8 —
niveau de la '/ lromolaire
12.5
—12
—2e _ 12.5 — 13
A sept ans et demi : longueur,
22 millimètres.
(Commenceau-dessus de la canine, finitau-dessus de ladeuxième
molaire.)
En largeur Enhauteur Dimensions ( Janine
^ millimètres. 10 millimètres.
|
lreprémolaire8
—10
—dU
, 2e - 12 —
14
—niveau de,1a * .Iremolaire, . lo — 11,, —
« Ce tableau montre assez l'évolution des dimensionsdu
sinus; mais comme il a été tait d'après un très petit nombre de crânes, il est impossible de prendre ces chiffres comme moyenne. On les voit différer trop considérablement àcause de la différence des crânes et de la
rapidité plus 011 moins grande du développement. »
Le sinus ne prend sa forme définitive qu'après la deuxième dentition, lorsque les follicules des dents permanentes ont- abandonné l'épaisseur de sa paroi jugale.
Rapport des dentsavec le sinus.
Les dents temporaires n'affectent avec le sinus maxillaire que des rapports éloignés; si l'on prend une coupe de crâne d'enfant de trois ans et demi
passant au niveau de la pre¬
mière ou deuxième prémolaire, l'on peut juger, par les dimensions restreintes de l'antre, le peu de rapports que les dents ont avec cette cavité. Malgré cela il arrive parfois que leur
inflammation,
même durant qu'elles sont incluses clansl'épaisseur du maxillaire, produise de la suppuration de l'antre. Les observations suivantes recueillies dans la littéra¬
ture scientifique en sont la preuve.
Observation I — (G.-A. Rees) parue en 1847.
Empyème clu sinus maxillaire gauche chez un enfant de deux semaines.
S. R..., âgé de deux semaines, présente un gonflement consi¬
dérable et une inflammation de la joue gauche, la rougeur s'étendant jusque sous l'œil. Le gonflement est profondément
situé etcomprend le plancherde l'orbite, detelle sorte cpiel'œil
est projeté en avant au point que les paupières ne peuventle
recouvrir. La conjonctive est enflammée et présente du ché-
mosis. On constate que le côté gauche de la bouche estdéformé,
car il forme de ce côté une tumeur descendant au-dessous du
- 15 —
rebord alvéolaire. Le long du sillon dentaire il y a une ulcéra¬
tion; l'une des premières molaires apparaît. On l'enlève et par cette ouverture un explorateur est facilement introduit dans l'antre; son entrée est suivie par une évacuation de matière épaisse.
Le jour suivant, incision de l'abcès qui se trouve près du grand angle de l'œil ; de l'eau chaude injectée dans l'antre
■ressort par la joue, entraînant du pus. Au bout de quelques semaines, les ouvertures se refermèrent et lepatient fut guéri.
Observation II — (Rudaux).
f
^Empyème du sinus maxillaire chez -un enfant âgé de trois semaines.
Fillettenée àterme qui, trois semaines après la naissance, a lespaupières du côté gauche rouges et œdématiées. M. Frey, interne à Lariboisière, constate au niveau de la losse canine droitela présence d'une denten éruption prématurée. Quelques jours plus tard, en appuyant sous la région sous-orbitaire, on fait sortir parla narine gauche dupus qui, cinqjours après, se frayeunautre passage au-dessous de lapaupièreinférieure. On
enlève la dent cause de la suppuration.
Le 25 août 1894, intervention : une petite curette est intro¬
duite!parla fistule agrandie dans le sinus maxillaire et ramène quelquespetits séquestres osseux ainsi qu'une dent mobile sur laparoi inférieure de la cavité ; cette dentparaît être une petite
molaire. Pansement à la gaze iodoformée. Lavages abondants
tous les jours. La suppuration persistant, on fait le 9 octobre
uneintervention plus radicale : on établit une large communi¬
cation entre le sinus et la fosse nasale correspondante ; on curette le sinus. Griêrisoncomplète à la fin de décembre.
Observation III — (G-reidenberg).
Empyème du sinus maxillaire gauche chez un enfant dé
trois semaines.
\
Enfant né à terme d'une mère bien portante et d'un père syphilitique trois ans auparavant. Trois semaines après la
nais-
— 16 —
sance, apparition d'une tuméfaction autour de l'œil gauche, envahissant ensuite la moitié gauche de la face, puis d'une rou¬
geur sous l'œil de cecôté. En même temps, on constate sur la gencive supérieure gauche un point qui grossit dans l'espace
d'une nuit et est reconnu pour une dent. Elle tombe d'elle- même: c'est l'incisive latérale. A la pression de la joue on fait sortir du pus fétide par la narine gauche. Greidenberg diagnos¬
tique un empyème du sinus maxillaire reconnaissantpour cause
l'apparitionprécoce d'une dent.
On opère l'enfant quatre jours après le début des accidents, alors qu'il y a fluctuation très nette au niveau de lapaupière
inférieure. On incise la partie tuméfiée et fluctuante et l'on
ouvre le sinus maxillaire à travers l'alvéole de la dent qui est
tombée ; curettage soigne, mise en place d'un drain allant de
l'incision supérieure à l'ouverture alvéolaire, puis bourrage à
la gaze iodoformée et pansement.
Le lendemain, 011 remplacele drain par une mèche de gaze;à la sonde, on découvre uneportion d'os nécrosé dans le sinus.
La température redevient normale au bout de cinq jours, mais la suppuration est entretenue longtemps par des séques¬
tres; 011 enretire cinq en l'espace de vingt-huitjours. Une fois
l e dernierenlevé, guerison très rapide; elle fut complète en un mois et demi.
Au contraire, les dents
définitives
affectent avecle sinusdes
rapports plus ou inoins directs qu'il est assez
intéressant
d'étudier suivant chaque espèce de dent. Toutefois nous
feronscet exposé assez rapidement,carles affections
dentaires
sont, ainsi que nous le verrons auchapitre suivant, les
moins
importantes des causes qui produisent la sinusite
maxillaire
chez les enfants.
Les incisives ontleur alvéole creuséedans l'os incisif; donc
aucun rapport avec la cavité sinusienne.
La canine, de par sa position etla longueur de sa
racine, se
rapproche beaucoup du sinus durant l'évolution de sonfolli¬
cule. Ainsi à cinq mois la canine définitive se trouve à trois
ou quatre millimètres en avar.t du sinus; maisà six
mois la
lame osseuse n'a plus que un àdeux millimètres, l'alvéole
étant au-clessous de laparoi antérieure de l'antre. A sept ans il n'y a plus entre le folliculeet la cavitéquel'épaisseur d'une simple feuille osseuse, la canine paraissant avoir effectué un mouvement d'avant en arrière, maiselle n'esten rapportavec le sinus que par sa face latérale, non par l'extrémité de sa racine, chose importanteau point de vuede l'infection.
Lapremière petite molaire, selon Bourgois, n'est
éloignée
du sinus que de deux millimètres, chez l'enfant à terme;
cette distance augmente par la suite pour être de un
centimè¬
tre à trois ans etdemi, de un centimètreet demi à 7 ans.
La deuxième petite molaire occupe vis-à-vis de l'antre, et jusqu'à deux ans, la même situation que la dent
précédente.
La distance double jusqu'à trois ans, puis reste toujours
la
même, quatre millimètres; et cette épaisseur ne peut que diminuer avec la résorption des parois sinusiennes.
Ici, c'est
l'extrémité libre de la racinede ladentqui est le plus près du sinus, d'où il suit que l'infection se transportera directement
de la pulpe à la cavité.
La première grossemolaireest à cinq mois à deux
millimè¬
tres du sinus, à onze mois à un millimètre. Cette distance est
encore abaissée à trois ans et demi, oùon ne trouve qu'une
lame osseuse; mais la situation change brusquement vers sept et huit ans, chaqueracine se portant à cinq à
six milli¬
mètres du sinus.
Ladeuxièmegrosse molaire se forme à
trois
ans etdemi
seu¬lement; elle est alors à quatre ou cinq
millimètres de l'antre.
Acinq ans et demi, la distance est réduiteà un
millimètre
etelle diminue encore vers sept ans par suite de
l'accroissement
du sinus dans l'apophyse molaire du
maxillaire supérieur.
Nous n'avons pas àparler de la
dent de
sagessequi
sedéve¬
loppetrès tard.
Pour de Croës, voici, par ordre de fréquence
d'apport infectieux,
les dents qui sont le plus souvent encause :1° La première grosse molaire.
2° La deuxième prémolaire,
3° La deuxième grosse molaire.
4° La première prémolaire.
5° La canine.
Il fait remarquer en outre que les dents qui sontle plus
souvent la cause de l'état pathologique du sinus sont aussi celles qui soutle plusfréquemment atteintes de carie. La pre¬
mière grosse molaire oudent de six ans et la deuxième pré¬
molaire sont les principaux facteurs de l'infection sinùsienne.
Attirons encore l'attention surle fait que les folliculesdes dents définitives sont non pas juxtaposés, mais superposés
aux dents temporaires dans l'épaisseur de la paroi jugalede
l'antre. Quand il s'agira de discuter le traitement de la sinu¬
site maxillaire chez les enfants, nous jugerons combien ce
point pourra intluer sur l'esprit du médecin traitant dans le choix de la méthode à suivre.
Etiologie.
Il nous semble, dans l'étude étiologique que nous entrepre¬
nons ici des sinusites maxillaires infantiles, qu'il n'est pas
possible d'étudier séparément les causes des inflammations chroniques sous peine des'exposer à desredites
continuelles.
Car si la guérison peut survenir après une
atteinte aiguë, il
arrive souventqu'à cette formesuccède une
lésion chronique,
soit que le terrain envahi n'ait pu réagir assez
vigoureuse¬
ment,soit qu'il yait eu secondairement
association de
germes pathogènes.Nous savons qu'il y a grande divergence
d'idées
entretous les auteurs qui se sont occupés de
l'étiologie de l'infec¬
tion sinusienne. Les uns, et ce sont la plupart des rhinolo- gistes, Hartmann, Boyer, Zuckerkandl, Bosworth,
font venir
le mal d'une causepresque exclusivement
nasale. Les autres,
Luc, Dubois, Frey, donnent à l'originede l'empyème
unecause presque exclusivement dentaire.
Prenant
uneopinion
moyenne, nous croyons qu'en général on peut
invoquer l'un
et l'autre mécanisme; mais le fait seul que chez les
enfants
les dentstemporaires sont éloignéesdu
sinus
parles follicules
des dents permanentes nous permet
d'affirmer
queles
causesdentaires seront, dans l'étude présente, et
tout
aumoins
jusqu'à 8 ou 10 ans, moment d'apparitionde la deuxième
dentition, beaucoup moinsimportantes queles
causesnasales.
Et afin d'observer un ordre d'infection décroissante, nous allons envisager successivement :
1° Lescauses nasales; 2" Les causes dentaires.
THÈSE BOURRAGUÉ. ~
CAUSES NASALES
Le coryza aigu infantile, que l'on observe si fréquemment, s'accompagne presque toujours de sinusite catarrhale due au
mécanisme d'infection par continuité. Il y a d'abord hypersé¬
crétion muqueusede la muqueuse sinusale, puis hypersécré¬
tion muco-purulente; en même temps la tuméfaction de la pituitaire rétrécit l'orifice du sinus, d'où accumulation de sécrétions dans son intérieur, circonstance favorable à l'éta¬
blissement d'une lésion chronique.
Le coryza
syphilitique
infantile, semblable au précédentdans les premiers jours de son évolution, ne tarde pas à se manifester par un écoulement muco-purulent qui devient plus tard purulent, sanieux et plus ou moins fétide suivant
la gravité des lésions. On conçoit combien facilement se
produira la contamination de l'antre d'Highmore par cette
sécrétion essentiellement infectieuse.
Les adénoïdites aiguës, à supposer que l'inflammation se propage du naso-pharynx vers les fosses nasales, seront
encore un des facteurs de la sinusite maxillaire aiguëqui
pourra devenirchronique.
Les coryzas infectieux, appelés encore rhinites purulentes secondaires, sontune des plus importantes causes d'infection
par voie nasale.
Au moment de la naissance de l'enfantla muqueuse
nasale
peut être infectée au passage par les mêmes causes qui pro¬
duisent l'ophtalmie, nous voulons dire par les sécrétions leucorrhéiques ou blennorrhagiques de la mère. Ilseproduit
alors de la rhinite
blennorrhagique,
fort rare heureusement,car le jetage purulent des fosses nasales qui irrite la lèvre supérieure ne tarde pas à gagner de proche en proche
la
muqueuse du sinusaveclaquelle secontinue la pituitaire
et à
en occasionner l'infection.
L'observation ci-jointe mentionne cette éliologie.
— 21 —
Observation IV (W. Platt, de Baltimore).
Empyèmedu sinus maxillaire droit chez un enfantde cinq mois.
L'auteur cite l'observationde la nommée T. L..âgéede cinq mois, qui présente du gonflement du côté droit de la face, de
l'écoulement purulent par la narine de ce côté, unefistulesur le bord inférieur de l'orbite droit, et une ouverture de la gen¬
cive supérieure droite, à la hauteur de la deuxième petite molaire, par où s'échappe du pus. Onagrandit l'ouverture alvéo¬
laire jusqu'à l'antre et on enlève une dent rudimentaire et quelques morceaux d'os nécrosé. Guérison endeux mois, après l'extraction de deuxséquestres.
Le gonflement de la face ayant débutépeu de temps après la naissance, on porte le diagnosticd'empyème de l'antre dû, selon
toute probabilité, à l'infection gonorrhéique du nez au moment
del'accouchement.
Nous savons que, dans la rougeole, la scarlatine, la grippe,
le coryza l'orme l'un des éléments constitutifs de l'affection ; mais on le trouve aussi, presque toujours, chez les enfants
atteints de variole, diphtérie, érysipèle, typhoïde.
Pour
peu que la maladie soit grave et se prolonge, le coryza aigudu
début fera place à un coryza chronique avec
écoulement
muco-purulent oupurulent,et demême la sinusitecatarrhale
sera remplacée par une sinusite chronique.
Les statistiques
que nous allons rapporter prouvent combien est
fréquente la
suppuration de l'antre au cours de ces diverses maladies infectieuses.
Harke fait l'autopsie de trente enfants morts
de diphtérie,
rougeole, coqueluche, variole et scarlatine;
il
netrouve
pasune seule des cavités annexes des fosses nasales exempte de suppuration et l'antre est le plus fréquemment et
le plus
profondément affecté.
Dans cinq cas de rougeole, Moritz Wolfï constate que la
muqueuse du sinus maxillaire est en état d'infiltration œdémateuse.
Il examine vingt-trois enfants mort de diphtérie, et trouve que les sinus maxillaires de vingt-deux d'entre eux contien¬
nent du pus ou du muco-pus; en même temps inflammation plus ou moins grande de la muqueuse. Ce pus renferme des bacilles de Klebs-Lôffler, des streptocoques et des staphylo¬
coques.
Bryan, Lothrop admettent, après de nombreuses autopsies,
que la scarlatine, la rougeole et la diphtérie s'accompagnent
presque toujours d'infection purulente streptococcique ou
staphylococcique
de l'antre.L'érysipèle de la face
s'accompagne
en général d'un coryza intense pouvant provoquer une sinusite catarrhale. Dansquelques cas même, il peut sévir sur la pituitaire avant d'envahirla face. Rien par suite d'étonnantà cequel'infection streptococcique, que l'on sait toujours si énergique, aille produire la suppuration d'une cavité dont la muqueuse est
en continuitéavec la muqueuse nasale.
Nous n'insisterons pas davantage sur ces coryzas infec¬
tieux, car nous pensons avoir suffisamment prouvé leur importance dansl'étiologie de la sinusite maxillaire infantile.
Il faudra donc toujours essayer d'arrêter leur évolution au moyen de soins antiseptiques.Maisn'est-il pas juste decroire
que, dans beaucoup de cas, ces exanthèmes peuvent altérer
la muqueuse de l'antre d'Highmore de telle façon que plus
tard la moindre inflammationaiguë des fosses nasales serala
cause d'une inflammation chronique du sinus?
Observation Y (Emil Mayer).
Hélène May P. âgée de deux ans et demi, née à New-York,
est présentée à l'infirmerie pour maladesétrangers du « New-
York eve and ear infirmery », le 11 mai 1890. Sa mère laporta a
— 23 —
la clinique ophtalmologique parce qu'elle avait une éversion de lapaupière inférieure droite. L'enfant fut examinée par le doc¬
teur Skeel, quienvoya le cas à la cliniquede la gorge où ilme futprésenté. Comme symptômes généraux, on remarqua une éversion de lapaupièreinférieure droite,un trajet fistuleuxdans lajoue du côté droit, d'où sortait du pus, etune odeur très péné¬
trante du côté droit dunez.
L'enfant avait été bien portante jusqu'à il y a six semaines, où elle eut une attaque de scarlatine compliquée au deuxièmejour de pneumonie. Deux semaines après, elle fut prise de diphtérie
trèslégère dans la gorge, très grave dans le nez.A cette époque
on lit avec le mucus de la gorge des ensemencements qui furent envoyés au « Health Department» de la ville de New-York. Je tiens le résultat de l'examen de mon chef de clinique, M. le doc¬
teurDelgraff; le voici:
« HélèneMay P..., fut signalée le 21 avril 1899, comme ayant scarlatine et diphtérie. Des cultures faites avec le mucus de sa gorge, le sixième jour, montrèrent le bacille de Klebs-Lôffler. Il
y avait une fausse membrane surles amygdales et un exsudât disséminé dans le naso-pharynx. On fit une injection de sérum antidiphtérique. Beaucoup de troublesdu côté dunez ».
Un abcès se forma sur la joue et fut incisé le 5 mai ; il ne guérit jamais et forma l'ouverture iistuleuse mentionnée plus haut.A l'examen, côté gauchedu neznormal. Dans le côté droit
on voit une masse de sécrétions desséchées qui répandent une odeurinfecte. Pharynx normal. Une petite sonde entre facile¬
ment dans l'ouverture fistuleu.se et révèle la présence d'une large cavité située plus bas. Ona, avec cettesonde, la sensation qu'on touche un os nécrosé. Dans le pus, streptocoqueset sta¬
phylocoques en abondance. Onne trouve ni bacilles de Klebs- Lôffler,ni bacilles de la tuberculose. L'état général est excellent
l'enfant esten très bonne santé soustous les autres rapports.
On pose le diagnostic d'abcès de l'antre d'LIigmore dû à
1infection diphtérique. On fait des lavagesavec des solutions antiseptiques jusqu'au 13juillet où j'opérai l'enfant endormie à l'éther. Incision de quinze millimètres de longueur, de gauche à droite,à travers la fistule ; j'enlève le périoste et épanche le
sang répandu. L'ouverture fistuleuse de l'os est élargie à la
gouge, la cavité entièrement curettée, l'os nécrosé enlevé, etla
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cavité abondamment lavée. Le stylet courbé à angle droit,est introduit dans l'antre ; avec un léger effort on lui fait traverser 'la paroi nasale du sinus et il entre dans le nez. L'ouverture est
élargie et un drain est placé dans la plaie externe, passerions le nez, de façon qu'on bout pend sur la joue, l'autre sur la lèvre supérieure. Le reste de l'incision estsuturé, et on appliqueun
pansement sec, L'enfant enlève le drain le deuxièmejour ; on le remet en place, l'enfant endormie de nouveauà l'éther. Onpra¬
tique journellement des irrigations avec des solutions salines
antiseptiques chaudes, et le septième jour après l'opération
l'enfant quittel'hôpital. Le drainage est continué. L'odeur avait
promptement cessé et le dix-huitième jour après l'opération, le drain est enlevé.
Il n'y eut pas de complication. Deux ans se sont écoulés
depuis, et aucun symptôme n'indique un retour de l'affection.
On ne constate plus qu'un peud'éversion de la paupière et une
petite cicatrice à la place du trajet fistuleux.
Le coryza purulent est, le plus souvent, lacontinuation ou
l'aggravation de l'inflammation aiguë de la pituitaire; rare¬
ment il est dû à une contagion directe. Mais une de ses causes prédisposantes est l'âge, car on l'observe surtout de 7 à 12 ans, pendant l'évolution de la deuxième dentition; il
est à croire que la suractivité fonctionnelle existant à cette
époque de la vie constitue une prédisposition à l'inflamma¬
tion et au catarrhe de la pituitaire (Bosworth). Les sécrétions muco-purulentes et surtout purulentes sont, on le comprend facilement, un facteur important de l'infection sinusienne.
Voici deux observations très nettes de sinusites suites de coryzas purulents.
Observation VI
(Due àl'obligeancede M. le docteur Bp.indel).
MademoiselleB..., âgée de dix ans, m'estprésentée le 31 dé¬
cembre 1896, pour être soignée d'un coryza purulent datant de plusieurs années. Il y a du pus en abondance dans les méats
moyens et lafillette mouchejaunâtre, épais, un peu
grumeleux.
Soupçonnant que les sinus maxillaires sont
atteints d'empyème
latent,je fais la cliaphanoscopie : obscurité des deux côtés,
mais
surtout à gauche. La ponction des sinus n'étant pas admise par lafamille, je me borne à prescrire des irrigations nasales au borate de soude. Au bout de quelque temps, j'y ajoute des mas¬
sagesde la muqueusedes cornets etd,espulvérisationsau
nitrate
d'argent; amélioration rapide.
La fillette est guérie enjuillet 1897.
Observation VII
(Due à l'obligeance de M. le docteur Brindel).
Mademoiselle P..., âgée de quinze ans, se présente à moi en février 1902,parce que, depuis quatre àcinq mois, elle
mouche
enabondance du muco-pus assez épais et jaunâtre. Cet état a succédé à un coryzaordinaire nonsoigné,
L'examenrhinoscopique antérieurme montre que la
paroi des
fosses nasales est recouvertedemuco-pus, mais celui-ci est plus
abondant et plus épais dans le méat moyen droit. La
diaphanos-
copie est immédiatement pratiquée ; le sinus maxillaire
droit
s'éclaire moins bien quele gauche.
Après uneirrigation nasale, ponction du sinus droitau
niveau
du méat inférieur; l'injection ramène du muco-pus assez sem¬
blable à celui quemouchela malade. Desirrigations
journalières
chaudes et abondantes, des pulvérisations au nitrate
d'argent
sontprescrites. Huit jours après, deuxièmeponction
qui ramène
unpeudepus ; unetroisième, quelques jours après,
montre
que l'empyème du sinus estguéri. Après un mois detraitement, le
coryzalui-même a disparu.
Mais il peut arriverque la matière
sécrétée du
coryza puru¬lent soit incomplètement expulsée en
raison du gonflement
âe la muqueuse; alors il se
produira
unedécomposition du
pus et nous aurons le coryza casêeux,
susceptible d'occa¬
sionner lui aussi l'inflammation de la muqueuse du
sinus. Toutefois ajoutons que cette
forme est
rarechez
1enfant, à moins qu'il n'y ait un corps