FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 10OO-19O1 20
TÉQ-SÂRCOME
DU
MAXILLAIRE SUPÉRIEUR CHEZ LES ENFANTS
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
Présentée et soutenue publiquement
le 12 Décembre 1900
PAR
Ernest-Edouard
BALGAM
Né à Lauderneau (Finistère), le 9 Février
1876.
Élève du Service deSantéde la Marine
(MM.
Examinateurs de la Thèse :<
PIÉCHAUD professeur Président.
LANELONGUE professeur—)
VILLAR agrégé >Juges.
CHAVANNAZ agrégé )
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur
les
diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
1MPHIMH1UE DU MIDI — PAUL
CA.SSIGNOL
91 — RUIi PORTE-RURAUX — 91 1900
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DENABIAS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire
S'BSOB 30S S30U 31*
MM. M1GE DUPEY MOUSSOUS.
Professeurs honoraire;
Clinique interne Clinique externe Pathologie et théra-
MM. MM.
t PICOT. Médecine légale MORACHE.
/ PITRES. Physique
BERG0N1É.
\ DEMONS. Chimie BLAREZ.
I LANELONGUE. Histoire naturelle .. GUILLAUD.
Pharmacie .... F1GU1EH.
peutique générales. VERGELY. Matière médicale.... dk NABIAS Thérapeutique ARNOZAN. Médecine expérimen-
Médecine opératoire. MASSE. taie FERRÉ.
Clinique d'accouché- Clinique ophtalmolo-
ments LF1FOUR. gique
Anatomie pathologi- .. Clinique des maladies
que COYNE. chirurgicales des en-
Anatomie CANNIEU fants
Anatomie générale et Clinique gynécologique histologie VIAULT. Cliniquemédicale des Physiologie JOLYET. maladiesdesenfants Hygiène LAYET. Chimie biologique...
\U 5810Ci 30S 30 \ 30\I0K1'B(! 10 :
section dk médecine (Pathologie interneetMédeci)ie légale.)
MM. CASSAET. I MM. HE DANTEC.
AlJCHi^. | HOBBS.
SABRAZÈS. |
«SECTION DE CHIRURGIE HT ACCOUCHEMENTS /MM. DENUCÉ. I
\ VILLAR I . , . \MM. CHAMBRELKN1
BAI) AL.
P1ÉCHABD.
BOURSIER.
A. MOUSSOUS DENIGr.S.
Pathologieexterne) BRAQUEHAYE CHAVANNAZ.
Accouchements.
FIEUX.
Anatomie
SECTION DES SCIENCES ANATOMIQUKS ET PHYSIOLOGIQUES
|MM. PR1NCETEAIJ
|Physiologie MM. PACHON,
•••} N. Histoire naturelle
Physique.
BEILUE.
M. BARTHE.
SECTIONDES SCIENCES PHYSIQUES MAI. S1GALAS. | Pharmacie
< O i 83S 4'33 93 1»I.30II 30K T \ I 3830S
Clinique des maladiescutanéeset syphilitiques MM.
DUBREUjGH
Clinique des maladies des voiesurinaires.
Maladies du larynx,des oreilles etdu nez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements Chimie
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
HydrologieetMinéralogie Pathologie exotique
POUSSON.
MOURE.
RjcjGIS.
RONDOT.
DENUCE.
CHAMBRELEAT.
DUPOUY.
PACHON.
N.
lagrange.
CARDES.
LE DANTEC.
Le Secrétaire de la L'acuité: LEMA1RE.
Pardélibération du 5 août1879, la Faculté aarrêté que les opinions émisés
du
^Thèsesqui luisont présentées doiventêtre considérées commepropres à leurs autei , qu'elle n'entendleur donner ni approbationniimprobation.
A MON PÈRE ET A MA MÈRE
Ge que je suis aujourd'hui c'està
eux, auxsacrificesqu'ilssesontimpo¬
sés queje le dois, jenel'oublie pas,et j'espère m'enmontrerdigne dans toute
macarrière.
A MES PARENTS
A MES AMIS
et à tous ceuoc qui m'ont témoigné cle l'affection.
A MES MAITRES DE LA MARINE ET DE LA
FACULTÉ
Je dédie ce modeste travail.
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR
PIÉCHAUD
PROFESSEUR DE CLINIQUE CHIRURGICALE INFANTILE A LA
FACULTÉ
DE MÉDECINE DE BORDEAUX CHIRURGIEN DES HOPITAUX OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
AVANT-PROPOS
Bien modeste est notre ambition en
présentant
cetravail
à la bienveillance de nosjuges.
Versle moisde mai dernier, nous nous
demandions quel
serait le sujet de notre
thèse inaugurale, lorsque M. le Prof.
Piéchaud, professeur
de clinique chirurgicale infantile,
voulut bien attirer notre attention sur un cas
d'ostéo-
sarcome chez unenfant, pour
lequel il venait de pratiquer
la résection du maxillaire supérieur.
Il
nousfit remarquer
en même temps combien
cette question était peu étudiée.
Nous nous mîmes aussitôt à l'œuvre,
et
enfaisant
nosrecherches nous fûmes
frappé de constater combien sur¬
touton insistait peu dans
les annales de la chirurgie infan¬
tilesur la résection du maxillaire supérieur.
Cette opération
présentecependant des
particularités, qui, quoique se mani¬
festant aussi chez l'adulte,
prennent chez l'enfant une impor¬
tance beaucoup
plus considérable. Aussi avons-nous
entrepris de faire
ressortir
cequ'il
y ad'intéressant dans
cette intervention; en effet, bien que
paraissant dangereuse
pourdes organismes en
état d'infériorité par leur âge et par
la nature du mal lui-même, elle n'en
offre
pasmoins des
résultats
appréciables, ainsi
quenous essaierons de le
démontrerdans la suitedecetravail.
Nous serons heureux si nous avons
réussi à mettre en
lumièreun point
de la chirurgie infantile qui nous semble
encoredons l'obscurité.
Mais avant d'aller plus
loin,
nousprofiterons de cette
occasion pour
remercier tout d'abord notre maître le profes-
— 8 —
seurPiéchaud dugrand honneurqu'il nous faiten acceptant la présidence de notre thèse inaugurale. Pendant le trop
court stage que nous avons fait dans son service de
l'hôpital
des Enfants, il a toujours été pour nous un maître plein de bonté, dont les conseils de toute nature resteront gravés dans notre mémoire pendant notre vie entière; nous som¬
mes heureux de pouvoir lui témoigner aujourd'hui toute notre reconnaissance.
M. le Dr Guyot, chef de
clinique
chirurgicale à l'hôpitaldes Enfants, ne nousa ménagé ni son temps, ni ses conseils, en particulier dans l'exécution de ce travail. Nous l'en remer¬cions bien
sincèrement,
et l'assurons de tout notre dévoue¬ment.
Enfin, à M. le Prof, agrégé Dubreuilh, qui a bien voulu pratiquer l'examen
histologique
de la tumeur de notre malade, nous adressons 1 hommage de notre gratitude.En atteignantce qu'on est convenu d'appeler le terme
des
études médicales,nous tenons à assurer ici de notre recon¬
naissance, d'abord nos maîtres de la Faculté de médecinede- Bordeaux, ensuite tous nos maîtres de la marine, tant à Brest qu'à Bordeaux. Nous savons tout ce que nous
leur
devons, etnous ne l'oublieronspas.De tous noscamarades d'école nous prenonscongé,empor¬
tant de notre séjour parmi eux bien des souvenirs
inalté¬
rables.
DIVISION DU SUJET
Nousavonsdivisé notre travail en
quatre parties.
Dans un
premier chapitre
nousavons réuni les observa¬
tions que nous avons pu
recueillir sur notre sujet; une
surtout, relevée dans
le service du professeur Piéchaud,
servira de base à notreétude.
LeChapitre II sera
divisé
endeux parties : l'Etiologie et
l'Anatomie
pathologique de l'ostéo-sarcome du maxillaire.
Nousinsisterons peu surces
points;
nousvoulons surtout
faireune étude
opératoire.
La
symptomatologie fera l'objet du Chapitre III. Nous
dirons aussi quelques
mots, dans
cechapitre, du diagnostic
et du pronostic de
la
tumeurdans le
casspécial qui nous
concerne.
Enfin leChapitre IV sera
consacré
autraitement de l'ostéo-
sarcome, en
particulier la résection du maxillaire supérieur,
ainsi qu'aux
accidents auxquels peut donner lieu cette inter¬
vention.
CHAPITRE PREMIER
OBSERVATIONS
Observation I
(Lewis Marshall, British med.Journ., 24 novembre4883.)
Sarcome du maxillaire supérieur chezune enfant de huitans.
Résection.
Mary J.-G..., âgée de huit ans, de
Ripley dans le Derbyshire, fut
admisele12 avril 1882 àl'hôpital des Enfants de Nottingham, avec un gonflement bien net du volumed'une noix environ, auniveau du
maxil¬
lairesupérieur droit. On avaitconstaté l'existence de cette tumeur
plus
d'unan auparavant etdepuis cette époque
elle augmentait
peuà
peu de volume. L'enfant ne seplaignait d'aucune douleur,la
peaun'était
pas douloureuse au toucher, nullement altérée dans sa coloration, et
non adhérente à la tumeur. Dans la bouche, du côté droit, le palais étaitgonfléetcegonflement présentait les mêmes caractères que sur
la
face. Une rougeole contractée quelques
années auparavant était la
seule maladie dont elle avaitjamais été atteinte. Ce cas
présentait
touslescaractères d'une tumeur de néoformation dans l'antre; toutefois,
en consultation, il fut jugé plus sage de
différer
touteintervention;
l'extractionseule d'une molaire, afin de prouver
l'absence de toute
collection liquide dans le maxillaire, fut admise. Cet
avis
nefut
pas adopté puisque le docteur Marshall avaitla conviction qu'il avait
affaire à une tumeur sarcomateuse; orl'augmentation de
volume, et des hémorragies
dangereusespouvaient en résulter.Cependant la malade fut renvoyée chez elle, avec
ordre de revenir
périodiquement
àla consultation.- 12 —
Trèslentement et graduellement la tumeur augmenta de volume jusqu'au 15 novembre,où la premièregrosse molaire tomba. Latumeur s'était beaucoup développée dans sa portion supérieure et dans sa portion buccale; l'œil était repoussé en bas et en avant, et la paupière inférieure, en ectropion, était entraînée loin du globe. La narine droite était encorelibre. La nature de la tumeur étant indubitable,on recon¬
nut que l'extraction était nécessaire.
L'opération fut pratiquée le 20 novembre 1882. L'incision recom¬
mandée par Health fut employée; une hémorragie abondante étantpro¬
duiteparles vaisseaux faciaux, le tronc principalfutliéavecdu catgut, lesautres branchesfurent tordues.Leplancher de l'orbiteetune portion
du maxillaire supérieur furent laissés en place; en effet, après avoir enlevé lesportions frontales etpalatales, etaprès examende la tumeur,
on reconnut que cette dernière avait son origine dans la membrane de
revêtement de l'antre; l'os était seulement usé par la pressionvenuede l'intérieur,et n'étaitpasinclus dans la substance même de la tumeur.
La portion de l'os qu'il fut permis de conserver fut bien grattée, puis
lavée avec une solutionde chlorurede zinc etensuitebourréeavec de la gaze trempée dans unesolution boriquée; puis le lambeau fut relevé et
attaché avec des épingles àla lèvre; des sutures au fil d'argent et au crin de Florence furentemployées pourlaface. Un pansement
boriqué
fut appliquésur la plaie. Immédiatement après l'opération on
admi¬
nistra un suppositoire morphiné. Des vomissements commencèrent bientôtaprès le transport de l'enfant au lit, et durèrent un certain temps. Le «shock» dû àl'opération demeura alarmant tout le reste
dujour.
Acinq heures de l'après-midi, des injections de jus de
viande
etde
lait, contenant des «sels aromatiques d'ammoniaque»furentordonnées
chaque demi-heure, parce que le pouls radial pouvait à peineêtre
senti; la surface du corps était froide, le collapsus presque
complet. En
outre des mesures générales adoptées, telles que la chaleur, la
nourri¬
ture par le rectum au moyen de lavements nutritifs contenant
de
l'ammoniaque, les jambes furent maintenues élevées, et l'artèrefémo¬
ralecomprimée durant trois heures. L'état s'améliora peu à peu,
et à
dix heures du soir un mieux sensible fut noté. Les vomissements
cessèrent à une heure du matin, et du laitglacé put être
absorbé
parla
— 13 —
bouche en petite
quantité. Durant le reste de la nuit, l'opérée dormit
par
intervalle; la réaction fut presque achevée le lendemain matin.
Le 27novembre, la température
était 101°8 Fahr. Le pouls radial
était très bon. Les lavements
nutritifs furent cessés,
on commençaà
alimenter fréquemment, etpar
petites quantités,
parla bouche.
28 novembre. Latempérature
était 94°4 Fahr. Les intestins avaient
fonctionné. Le pansement
fut levé
; onenleva aussi les épingles.
Laplaie de la
face était partiellement cicatrisée. La malade alla de
mieux en mieux depuis cejour; tous
les crins et fils d'argent furent
enlevés le 3décembre,et un pansement
boriqué fut appliqué
surles
par¬tiesnon cicatrisées. Le 7 décembre on l'assit dansun
fauteuil,
etle 20
elleétaitrétablie.
Je suisen mesure, dit M. Marshallà la
fin de l'année 1883, d'assurer
qu'il n'y aaucune
récidive
;la fillette est dans
unétat de santé excel¬
lent, età peinedéfiguréepar
l'opération.
J'attire l'attention sur le traitement
post-opératoire employé
pour faciliterla circulation dans les centres nerveux et le cœur,tantqu'a
duré le shock opératoire; cette
méthode n'est
pasgénéralement mise en
pratique.Observation II
(Kummer,Revue médicale de la
Suisse Romande, 1892.)
M. Kummer présenteune
jeune fille âgée de neuf
ans,qui a subi, le
13 avril1892, la résection de la
moitié gauche de la mâchoire supé¬
rieure. Le diagnostic
avait hésité entre hydropisie de l'antre d'High-
more et sarcome. Par une incision exploratrice, on constate
dans le
sinus la présence d'unetumeur
dont
onextirpe
unmorceau. L'examen
de celui-ci fait reconnaîtrequ'il estde nature
sarcomateuse. On procède-
doncle lendemainàlarésection de la mâchoiresupérieurepar une
inci¬
sion qui est une
modification de celle de 0. Nélaton et de celle de
0. Weber. La résection faite, la plaie fut
tamponnée
avecde la
gaze iodoformée, etl'incision cutanéefermée.
Laguérison survint sans
encombre
;la cicatrice est maintenant peu
apparente àlaface. Dansla
partie gauche du palais
setrouve un enfon¬
cement assez considérablecorrespondant à
la moitié réséquée de la mâ-
- 14 —
choire supérieure. Cette dépression présente partoutunrevêtementépi-
thélial. L'enfantporte unappareilprothétique fort bien réussi,
fabriqué
sous la direction de M. le Prof. Redard. L'opérée est moins défigurée qu'on nepourrait sele représenter, eu égard à l'étendue de la lésion.
M. Kummerattribue ce bon résultat esthétiqueà ce fait que l'os zygo-
matique a pu être conservé.
L'examen de la piècequel'orateur présente montre que le néoplasme
aprobablement pris son point de départà la partie supérieure de l'ar¬
cade alvéolaire, il a ensuite fait irruption dans l'antre d'Highmore après avoir partiellement détruit la paroi inférieure et antérieure de cette cavité.
Observation III
(Recueillie dansle service du professeur Piéchaud, etdueà l'obligeance de M. Carles, internedes Hôpitaux )
Vers le mois de mai 1900 fut admis dans le service de M. le Prof.
Piéchaudunpetitgarçon âgé desixans, pour unetumeurdu maxillaire.
Comme antécédents héréditaires il n'y arien de spécial à relever; le pèreet la mèrejouissent d'une santé excellente; deux autres enfants
sonttrès bien portants. Pas de tare familiale d'aucune sorte.
Le petitgarçon qui nousoccupe n'a présenté rien de particulier pen¬
dantses premières années; il était sain et robuste.
Enoctobre dernier, sept mois environ avantl'époqueà laquelle il
fut
amené à la consultation, l'enfantestatteint de rougeole. Au moment de
la convalescence,les parents remarquent par hasard l'existence d'une légère tuméfaction de lagencive gauche; quelques jours après
l'incisive
correspondante tombe; cettechute fut accompagnée d'une légère hémor¬ragie.
Lesjours suivants la tumeur continue à s'accroître, puis successive¬
ment, en l'espace de quelques mois, s'étend à tout le rebord alvéolaire gauche; les dents ébranlées à ce niveau disparaissent les unes après
les
autres. Enfin la tuméfaction fait saillieaudehors,lajoue gauche
devient
fortementproéminente. Enprésence de cette marcherapide les parents s'alarment, etc'est ainsi que l'enfantestconduit à M. le Prof. Piéchaud.
A ce moment le petit garçon a conservé les apparences d'une
santé
— 15 —
excellente; il estgai, a un trèsbon
appétit,
nesouffre
pas ;il continue
àjoueravec ses
camarades
commeparle passé. Cependant il lui est im¬
possible de
mastiquer les aliments du côté gauche,
non pasà
causede la
douleur qui n'existe pas,
mais bien
enraison de petites hémorragies qui
surviennent à chaqueinstant, et pour
le plus petit traumatisme. D'ail¬
leurs elles durentfort peu et se bornent à un
très léger écoulement de
sang.
La tumeursemble avoirenvahitoutle maxillairesupérieur qui paraît
commedistendu. La joue gauche
fait
uneforte saillie. L'aile du
nez correspondante esteffacée etprojetée
en avant ;la lèvre supérieure est
déviée etproéminente à gauche. La
tuméfaction
seprolonge
enarrière
du côté de laparotide et va se perdre
dans
cetterégion
; enhaut elle
remonte jusqu'à la racine
du
nez.La cavité orbitaire
neparaît
pasenvahie et lefonctionnement del'œil gauche resteintact.
La narine gauche estrestée
perméable
;l'air pénètre bien et ressort
facilementàce niveau.
Du côté de la cavité buccale, on voit une tumeur violacée, grosse
commeun œuf; elle faitune sorte de saillie
uniforme
etrégulière qui
semble constituée parlerebord
alvéolaire légèrement distendu.
Lesdentscorrespondantes sont
tombées et il
nereste plus
quedeux
molaires qui sontelles-mêmes
fortement ébranlées.
La tumeur nedépasse pas la
ligne médiane et s'arrête
presquebrus¬
quementen ce point.
Ala palpation on a une
sensation d'élasticité,
presquede fluctuation.
D'ailleurs aucune douleur, ni spontanée,
ni provoquée. Pas de
gan¬glions.
Aucun trouble du côté des divers appareils ; aucun
signe de généra¬
lisation.
L'examen ainsi pratiqué,
l'opération fut décidée, et le professeur
Piéchaudprocéda àla résection
du maxillaire supérieur. Tous les soins
préliminaires ayant été pris,
l'opération fut pratiquée suivant le mode
quenous décrivons en détail au Chapitre IV de ce
travail.
Tout d'abord la premièrepartie de
l'incision fut tracée, c'est-à-dire de l'angle
externe del'œiljusqu'àla
lèvresupérieure au-dessous de la cloi¬
sondes fosses nasales. Cette section des parties
molles donna lieu à
un écoulementde sang très abondantqu'on arrêta
au moyendes pinces,
puis on procéda au détachement de l'os; là l'hémorragie fut beaucoup
moins forte.
Ensuiteon attaqua les portions buccales, ainsi qu'il seradit plus loin.
Le sujetest mis dans la position de Rose, puis l'incision de la lèvre supérieure achevée, enfin la section des portions buccales et du maxil¬
laire fut faite. On n'eutplus qu'à arracher l'os. L'opération fut ainsi
menée à bon termesansaucunealerte. La cavitéfutbien lavée et bourrée
avecde la gaze aseptique. Le lambeau fut ensuite suturéavec des crins
de Florence,etun pansementcollodionné fut appliquésurtoutel'étendue
de l'incision.
L'enfant fut ramené dansson lit; il n'yeut pas le moindre shock opé¬
ratoire. Lesjours suivants il n'eut pas la moindre fièvre. L'enfant put êtrealimenté par labouche, au moyen d'aliments liquides, lait,etc. Des lavagestrèsfréquents àl'eau boriquée furent faits dans l'intérieur de la bouche.
Le pansement fut levé trois ou quatre jours après l'opération; on enleva les points de suture; la cicatrisation se faisait fort bien; un seul point desuture suppura légèrement dans l'angle interne de l'œil. On en eut facilementraison, grâce à des soins antiseptiques.
Pendant quelques semaines l'enfant présenta un léger ectropion de
la paupière inférieure du côté opéré. Cette difformité disparut d'elle- même.au bout de peu detemps.
Aujourd'hui, l'enfant se porte fort bien; la dernière fois que nous
le
vîmes, il dévorait à belles dents une tartine de pain ; l'absence dela
moitié desa mâchoire ne semblait nullementle gêner dans
l'accomplis¬
sementde cet acte important. La face est à peine déformée par
l'opéra¬
tion, ainsi qu'on peut le voir dans la photographie du sujet que nous produisons. La cicatrice tend de plus en plus àdisparaître. Les mouve¬
ments de la face sont parfaitement conservés ; l'œil du côté droit se ferme aussi bien que le gauche. Aucune douleur provoquéeou spon¬
tanée n'estressentie. Du côté de la bouche, la moitié gauche delà voûte palatine s'est seulement un peu aplatie, mais n'est à peine plus
élevée
que la droite. Une muqueuse absolument sainelarecouvre dans toute
son étendue. Le voiledu palais est absolument intact; en somme,
là
aussi, ilya fortpeu de déformation, si l'on tient compte de
l'absence
des dents dececôté.
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— 17 -
Ensomme, six mois à peuprès aprèsFopération,le sujet est clansun étatsatisfaisant, rien ne permetde supposer quelarécidive sefera.
L'examen dela tumeur,pratiquéparle professeur agrégé Dubreuilh,
adonné les résultats suivants :
La tumeurprésente à peu près partout le même aspect, ne différant
d'unpoint à un autre que parle plus ou moins de condensation ou
de
dissociation des éléments. Elle est séparée de la surface muqueuse normale par unecouche assezépaisse de tissu dermique normal.
La tumeur estessentiellement formée par des cellules à
protoplasme
peuabondant, irrégulier, quelquefois ranïifié, et un noyau volumineux ovalaire, clair et comme vésiculeux, muni d'un ou deux nucléoles. La partie centrale de ce noyau paraît généralement assezclaire, et sapéri¬
phérie fortement colorée lui forme une limite bien nette. Parmi ces cellules se trouvent irrégulièrement disséminées un grand nombre de
cellules géantes, volumineuses, formées d'un protoplasme granuleux,
etde noyaux semblables àceux des cellulesmononucléaires au nombre
de 5ou 6, mais pouvant aller jusqu'à 20 ou 30. Ces noyauxsont
irré¬
gulièrement groupés aucentre de la cellule, et neformentpas une cou¬
ronneà son pourtour. Le contour de la cellule géante estirrégulier,
mal délimité, desorte qu'il est quelquefois difficile de distinguer ce qui appartient à la cellule géante ou aux cellules voisines. Ces éléments cellulaires sont généralement très unis entre eux, et cela bien que la pièce se soit réduite de plus de moitié. Ailleurs, les cellules se sont
tassées toutes au contact, les unes avec les autres ; mais dans tous lescas leur dispositionest irrégulière et nulle part on ne les
voit for¬
mées de traînées oude tourbillons àorientationrégulière. Dansles inter¬
valles des cellules on trouve quelques noyaux décolorés, appartenant évidemment à des cellules nécrosées, et beaucoup de globules rouges infiltrés, Pas de cellulesplasmatiques, peu de cellules en voie
de karyo-
kinèse; les vaisseaux sont assez nombreux, et généralement
laissent
apercevoir uneébauche de paroi conjonctive. On trouve,
du
reste,des
traînéesde tissu conjonctif très fin éparses entre les
cellules.
En somme,il s'agit d'un type assezordinaire
de
sarcomeà myélo-
plaxes.
B.
ObservationIV
(Lerouge)
Sarcome encéphaloïde du maxillaire
supérieur, développé
au niveau d'une dent en ectopie chez un enfant.
Le 21
juillet 1899, entrait à l'hôpital de la Charité, dans le service de
M. le Prof. Duret, unenfant de
neuf
ans,Emile D...,
ayantété élevé
ausein et ne présentantaucunetare
morbide personnelle
ouhéréditaire.
Il y atrois mois,
l'enfant
seplaignait d'avoir le
« nezbouché
» ;il ne
pouvaitrespirerdu côté gauche. Survenaient alors quelques épistaxis.
Peu à peu,le côté gauche se
gonflait,
setuméfiait, l'œil devenait très
saillantetla situationallait s'aggravant.
Lors de son entrée àl'hôpital, on constate que
la face
estélargie, elle
présente une
saillie
àla région malaire. L'œil est rejeté
enhaut,comme
chassé de l'orbite ; cependant la visionreste
bonne, nullement modifiée.
L'arcade dentaire est un peu abaissée à gauche.
Dans la narine
gaucheonvoit une masse
rougeâtre et de consistance ferme, qui obstrue
complètement
l'orifice. 11 n'y
arien dans le naso-pharynx, rien à la
voûte palatine.
L'ensemble
est toutà fait indolore
;il n'existe pas
d'autre troubleetles épistaxis du début
n'ont plus
reparu.La rapidité du
développement fait
penserà
unetumeur maligne, et
depréférence à un sarcome, eu
égard
àl'âge du sujet
; sarcomequi se
serait développéaux dépens du
maxillaire supérieur,
etayant tendance
àrefouler cetos en bas et en dehors, et en même temps à
soulever le
plancher orbitaire
d'arrière
en avant etde bas
enhaut.
Lediagnosticporté
fut
donc : sarcomedu maxillaire supérieur, déve¬
loppé probablement au niveau
du sinus. Dans l'espérance où l'on se
trouvait que la tumeurfût limitée ou
diffuse, il
yavait tout intérêt a
pratiquer la résection du
maxillaire supérieur. On s'efforcerait de
conserver l'œilgauche et de ménager l'orifice
buccal.
L'opération fut exécutée le 24juillet 1899.
M. le Prof. Duret pratique une incision,laquelle,
partant du milieu
de la lèvre supérieure, monte en traçant un Z sous
le
nez,le long de
l'aile gauche du nezet se terminesur le rebord
orbitaire inférieur. C est
l'incisionclassique de Liston.
— 19 —
Lechirurgien forme ainsi deux
volets qui découvrent
toutle maxil¬
lairesupérieur gauche. On gratte, à
la rugine, la surface de l'os et
on lerésèque àcoupsde pincede Liston. On tombe ainsi dans le sinus. Là,
ontrouve une dent incomplète qui estle centre,le noyau, d'une produc¬
tionnéoplasique absolument diffuse qui
envahit
tout,même le plancher
de l'orbite, etqui estsurtout abondante à la
face inférieure du globe
oculaire ; néanmoins, la masse n'engaine pas complètement
celui-ci.
Pouréviter autant quepossible touterécidive, 011 est
cependant forcé
d'énucléer l'œil après ablation du plancher de l'orbite; on
enlève
àla
curette et à la gougeles massesnéoplasiques qui restent
dans la cavité
formée par le toit orbitaire, la voûte palatine (qu'on a
conservée), la
cloison de la fosse nasale gauche et le pharynx. Enfin on laveet on referme le tout.
L'enfantest rentré dansle service de M. Duret en octobre, avec une récidiveremplissant la région du sinus et venant distendre et
refouler
la paupière inférieure. Dans unenouvelle intervention, on enleva une partie de la voûte palatine, qui avait été respectéeune première
fois.
Les os dunez furentruginés mais laissés en place. Enfin, du côté
de
l'orbite, on réséquauneportion dufrontal dans la région du sinus. Unesemaineaprès cette nouvelle opération, l'enfant quittait
l'hôpital
dans d'excellentes conditions. Depuis on n'a plus eu de ses nouvelles.Observation Y
(Marsh, The Lancet, 1875.)
M. Marsh présente àla Pathological SocietyofLondon unspécimen
dostéo-sarcome du maxillaire supérieur qu'il avait enlevé à un jeune
garçonde quatorze ans. Le mal avaitprogressé pendant six mois, et, quand il l'avait examinée,la tumeur se présentait sous l'aspect d'une
saillieau niveau de la face, au-devant de la première molaire. Elle
natteignait pas le fond du palais. Une ponction exploratrice ayant
montréqu'onse trouvaitenprésence d'un tissu de formation nouvelle
dans1antre, M. Marsh enleva le maxillaire supérieur tout entier, ce qui futfait avec
facilité,
puisqu'ilne futpasjugé nécessaire de prolon¬ger 1incision le long de0 l'orbite. M./ Butlin examina la tumeur et
— 20 -
reconnut un ostéo-sarcome. M. Marsh rapportaunautrecasdesarcome de l'antre, chez un enfantqu'il avait guéripar la résection.
Il
n'y eut pas de récidive dans l'un ni dans l'autre cas.ObservationYI
(Michaux, Bulletin de l'Académie de Médecine, 1840.)
Mâchoire supérieure enlevée chez un enfant de onze ans avec succès complet.
Quatre ansavantla résection du maxillairesupérieur, nous avions détruit chez ce petit malade, à l'aide de l'instrument tranchant et du
cautère actuel, unetumeur qui, occupantla gencive gauche,recouvrait plusieurs dents; il fut guéri en apparence; mais la maladie
s'étant
reproduite, il vintnous retrouver, et, le 27juin 1840, nous lui prati¬quâmes la résection detoutle maxillaire. Aucun accident n'estsurvenu et, le 27 juillet, ce petitjeune homme est retourné chez lui complète¬
mentguéri, et neprésentant à la face quedeux cicatrices linéaires. Le
sinus maxillaire renfermait unetumeur fibreuse qui était adhérente
à
sesparois, etqu'on ne pouvait détruire qu'en enlevantavecelle lacoque
osseuse formée par la mâchoire supérieure.
Observation YII
(New-York MédicalJournal, 1886.)
Tumeur du maxillaire supérieur. Petite fille de treize ans.
Le docteur Stimsonprésente à la Société chirurgicale de
New-York
une fillettede treize ans, dont la maladiea commencé il ya
trois
anset
demi par un petit gonflement de la paroi antérieure du
maxillaire
supérieur gauche; le gonflement aaugmenté de volume,
lentement
pen¬dant les deuxpremières années, puis plus rapidement pendant
les dix-
huit derniers mois. L'extraction de la tumeur avaitété entreprise
deux
ansauparavant,mais abandonnée parce que la tumeur
paraissait être
un os solide. Legonflement intéressait tout le côté gauche et presque
tout le droit, saufle plancher etle bord de l'orbite. Le nez était
déjete
vers la droite, et laligne des incisivesétait de 1 pouce
1/2
enavant de
— 21 -
celledu maxillaire inférieur. La
bouche était complètement entr'ouverte
parsuite
de la tumeur
;celle-ci semblait dure au toucher, résistante à la
pression;
la concavité de la voûte palatine était remplacée par une
convexité surtoutmarquée à gauche.
Plusieurs dents de la mâchoire
supérieure
étaient tombées
;il
yavait trois ulcères superficiels de la
voûtepalatine. La muqueuse
était injectée et plus foncée que normale¬
ment. L'orateur demande à la Société un examen plus
approfondi de
cecas, son avis sur
la
naturede la tumeur et
surla nécessité de
l'intervention.
Pourlamajorité,le
pronostic étant fatal si l'on n'intervenait pas,
l'opération était indiquée,quoiqu'elle fût dangereuse
parsuite de
l'hémorragie et de crainte de
l'introduction du
sangdans les conduits
respiratoires.
Observation VIII
(Revuede Chirurgie, 1881.)
M. Trélat présente à laSociété de
Chirurgie
unenfant de
onze ans quiasubi une amputation de la cuisse,pour tumeurblanche du
genou,et la résection du maxillaire supérieur pour tumeur
myéloïcfe,
tumeur àmyéloplaxes, tumeur énorme
développée dans le
corpsde l'os.
L'enfantseportefort bien, etl'état
général
est envoie d'amélioration
rapide depuis l'opération.
Observation IX
(Santesson, Nordiskt médicinArkiv.)
Résection du maxillaire supérieur chez un
enfant de douze
ans,pour un sarcome caverneux; conservation dupérioste et de
l'apophyse
palatine; reproduction d'une voûte palatine osseuse. Pasde récidive dix
ans après.
CHAPITRE II
ÉTIOLOGIE
Le motsarcome,
quoique remontant à l'antiquité grecque,
futemployé sans
signification précise jusqu'en 1851, où, dans
un Traité desmaladies
cancéreuses, le sarcome de l'enfant
estréputé
extrêmement
rare.Nous avons
signalé, dans notre Chapitre premier, une
observation de tumeur du
maxillaire, due à Michaux et
remontantà 1840.
L'histoire du sarcome de
l'enfance
nedate donc pas d'une
époque bien
reculée.
Est-ce une tumeur aussi rare
qu'on veut bien le dire?
Citons en passant
quelques chiffres. Schwartz, dans sa thèse
d'agrégation, sur
170
casd'ostéo-sarcomes est arrivé aux
résultats suivants :
De0à 10 ans
3
De 10 à 20 ans
45
On le voit, c'est
surtout dans la deuxième enfance et dans
l'adolescenceque se
montrent
cestumeurs.
Parmi les différentes
parties du squelette, les maxillaires
tiennentsinon le premier,
du moins un rang très avancé.
Sur 100 cas de tumeurs malignes
chez les enfants, Picot
relève 17cas de tumeurs du
maxillaire.
Enfin, RogerWilliams,
dans
unarticle sur les tumeurs
malignesdu jeuneâge,
réunit 7
casde sarcome du maxillaire
supérieur; de ceux-ci, 2
sont congénitaux, 1 sur un enfant
detrois ans etdemi, 2 entre dix et quinze ans,et 2au-dessus de quinze ans.
En somme, lesarcome du maxillaireestplus
fréquent
chez l'enfantqu'on ne serait porté à le croire au premierabord;
c'est
l'opinion
de Letailleurdans sa thèse inaugurale. D'ail¬leurs ce fait peut
s'expliquer jusqu'à
uncertain point parles phénomènesdedéveloppement
de l'os maxillaire supérieur.L'antre
d'Highmore,
formé par l'écartement des lames osseuses qui constituent le maxillaire supérieur, n'existe pas encore chez le fœtus; mais il apparaît pendant la pre¬mière enfance et se
développe
peu à peu. Pendant ce temps,l'os est le siège d'une sorte decongestion
physiologique
en rapportavecle travaildedéveloppement
des paroisosseuses, qui favorise la formation de tumeurs de tissu nouveau.Les tumeurs malignes s'éloignent
beaucoup,
aupoint de
vue du sexe, de ce que l'on observe chez l'adulte; on sait, en
effet,quechezla femmela
fréquence
ducancerestplus grandeque chez l'homme ; dans les premières années de la vie, au
contraire, les garçons sontplussouvent atteints queles filles.
Quant à la cause de ces tumeurs, elle n'est pas mieux
connue pour l'enfant qu'elle ne Lest pour l'adulte. Tout
d'abord,
letraumatisme,
peut-êtreinvoqué
trop souventpour expliquer un rôle dans la production du néoplasme, appa¬raît très nettement, dans certains cas, comme véritable agent provocateur.
Suivant
Estlander,
sur 100 cas,dans 70 c'est le côté gauchede la mâchoire qui est le siège de la tumeur. « En effet, dit
cemême auteur, la
plupart
des gens se servant de la main gauche pourporter à la bouche lesaliments,
placentd'abord
naturellement ceux-ci entre les deux arcades dentaires du côté gauche; c'est donc de ce côté que se produisent
les^
pre¬miers et les plus
énergiques
de tous les mouvements de la mastication »(1).
Nous rapportons ici cet avis d'un maître,sans chercher aucunement à
l'apprécier.
(i) Estlander, Etude clinique sur le sarcome du maxillaire supérieur (Revuede méd. etdechir., 1879).
- 25 -
Dans certains cas,
le
sarcomepeut prendre naissance
autour d'une dent déviée ou en
mauvais état, ou d'une
dent en ectopie, comme
le montre l'Observation IV, due à
Lerouge.
Le refroidissement peut,
lui aussi, être incriminé dans
certains cas.
La question
de l'hérédité, déjà si discutée pour les néo¬
plasmes en
général, l'est peut-être davantage quand il s'agit
del'enfance; en effet,
alors
queSaint-Germain estime que
«l'hérédité paraît manquer
d'une façon absolue au point
devuede l'étiologie »,
Hutchinson
pense que «l'hérédité est
manifeste dans la grande
majorité de
cancerchez les
enfants ». Il existe,
paraît-il, des
casoù l'hérédité semble
très nette; à côtéde
cela, c'est
cequi arrive le plus souvent,
on ne trouve aucun antécédent héréditaire.
L'enfant
quenous avonspu
examiner
neprésente rien de particulier sur
cepoint.
L'origine congénitale des sarcomes
est des plus rares, et
cependant, nous relevons
parmi les
cascités plus haut
ceuxde RogerWilliams, où
l'on voit deux sarcomes congé¬
nitaux du maxillaire supérieur.
Enfin, nousciterons en passant, comme
facteurs pouvant
avoir une action sur le développement
de l'ostéo-sarcome,
l'influence du pays,
la diathèse rhumatismale, peut-être
même la syphilis, puisque, nous
le
verronsplus loin à pro¬
pos du traitement, de
Saint-Germain cite
un casde sarcome
qui disparutcomplètement
parles frictions mercurielles.
Nous ne donnons ce dernier agent que sous
d'immenses
réserves; le cas, en effet, paraît assezextraordinaire pour
qu'il soitpermis de sedemander si quelque erreur de diag¬
nostic n'avait pas
fait prendre la tumeur
pource qu'elle
n'était pas.
Quoi qu'il en soit, dans la
plupart des
cas, cequi ressort
de tout ce chapitre, c'est que
l'origine bien nette des sarco¬
mes ne peut être bien
clairement montrée. Nous insistons
en terminant sur ce fait que.
le plus souvent,
onne trouve
aucun point de départ ni dans les
antécédents,
ni du côté de lamâchoire,
ou même dans les récits des parents, qui ne se sont aperçus de l'existence de la tumeur quelorsqu'elle
avait déjàatteintun certain degré de
développement.
ANATOMIË
PATHOLOGIQUE
Etudions tout d'abord les sarcomes
du maxillaire supé¬
rieur au point
de
vuemacroscopique : ce sont des tumeurs
charnues, de volume
très variable, arrondies, lisses, bosse¬
lées. En
général, elles sont entourées par une capsule
fibreuse qui
limite le tissu néoplasique d'avec les tissus
voisins. A la coupe on
voit
unedivision lobulaire correspon¬
dant aux bosselures extérieures.
Leur couleur est rouge
violacé, elles sont
très vascularisées. Le (issu présente une
consistance molle, il est
friable et
selaisse facilement
déchirer, en laissant
échapper
unegrande quantité de sang.
Au pointde vue
microscopique, on peut rencontrer chez
l'enfant le sarcome
encéphaloïde, le
sarcomefasciculé, le
sarcome
myéloïde, qui, lui-même, s'ossifie quelquefois pour
former le sarcome ossifiant.
Tous présentent
des vaisseaux très abondants, sans paroi
propre,creusés dans
la substance même du sarcome. Les
éléments cellulaires sont réunis par une
substance peu
abondante et molle.
Quant aux cellules
elles-mêmes, elles varient suivant la
nature du sarcome. Dans le sarcome
encéphaloïde, on a
des cellules arrondies, en
général petites, constituées par
une masse
protoplasmique englobant un ou plusieurs
noyaux.
Le sarcomefasciculé est formé de
cellules fusiformes avec
les extrémités allongées.
Enfin lesarcome
myéloïde
ouà myéloplaxes, qui est celui
quel'on rencontre dans
la
presquetotalité des cas, est cons-
— 28 —
titué d'abord de cellules semblables à celles des variétés précédentes. Mais on y trouve en outre des cellules
géantes,
à contour irrégulier, renfermant
cinq
ou six noyaux. Ces noyaux sont disséminées au hasard dans l'intérieur de la cellule,point
important qui distinguecescellules des cellules de la tuberculose, dont les noyaux sont rangés à la péri¬phérie. Ces cellules géantes sont appelées les
myéloplaxes
de Robin.
Quelquefois
ony rencontre des cellules anguleuses correspondant aux ostéoblastes. C'est un stade de passage entre le sarcome myéloïde et le sarcome ossifiant. Celui-ci,en effet, que l'on rencontre dans l'épulis présente des trabé- cules osseuses en forme de rayon.
Nous n'insisterons pas
davantage
sur ce point de l'ana- tomiepathologique
du sarcome; noussortirions,enle faisant,du but que nousnous sommes tracé.
CHAPITRE III
SYMPTOMES
Les sarcomes du
maxillaire supérieur peuvent se dévelop¬
perde
deux façons
:tantôt ils prennent naissance au centre
même del'os, c'estlesarcome
central
;tantôt ils apparaissent
sous le
périoste
: on aalors le sarcome périostique.
Mais quelque
soit le degré de développement de la tumeur,
nous pouvons
toujours diviser son évolution en trois phrases
bientranchées, que nous
allons maintenant examiner suc¬
cessivement :
La première
période,
quenous appellerons période de
début, passe dans
la plupart des cas totalement inaperçue;
elle n'est découverte que par
hasard
;l'enfant n'accuse
aucunegêne, aucune
douleur; aucun symptôme inquiétant
ne se manifeste, ni du
côté de l'extérieur ni du côté de la
bouche. L'état
général du malade n'est nullement troublé.
Cependant, il est
des
cas,assez rares il est vrai, où l'on
voit se produire
des épistaxis qui se renouvellent fréquem¬
ment et au moindre effort, toujours par
la narine du même
côté, habituellement le
gauche. La respiration devient peu à
peudifficile par cette
même narine; le petit malade cherche
à se débarrasser ; il ne
mouche qu'un liquide muco-puru-
lent, souvent infect et
strié de
sang.L'ouïe du côté corres¬
pondantdevient dure. L'on se
croit alors en présence d'un
polype
nasal(*). On extrait alors ce qu'on prend pour un
(h Voir Le Dentu, Leçons surles