Cohomologie d’Andr´e-Quillen associ´ee ` a une op´erade
Aur´ elien DJAMENT Janvier 2007
Le but de la cohomologie d’Andr´ e-Quillen est de donner une « bonne » th´ eorie cohomologique sur alg` ebres reli´ ee ` a la notion de lissit´ e. On pr´ esentera d’abord le cas classique des alg` ebres commutatives sur un anneau, avant de d´ ecrire la g´ en´ eralisation aux alg` ebres sur une op´ erade en modules sur un anneau commutatif. Pour l’article de Goerss-Hopkins [3] que ce groupe de travail vise ` a comprendre, c’est le cas des alg` ebres sur une op´ erade en comodules sur une alg´ ebro¨ıde de Hopf qui est utilis´ e ; ce raffinement de la th´ eorie d’Andr´ e-Quillen pr´ esent´ ee ici fera l’objet de l’expos´ e suivant.
Ce survol ne comporte pratiquement pas de d´ emonstrations (on renvoie ` a la bibliographie pour cela) ; cependant, tous les r´ esultats s’´ etablissent par des m´ ethodes standard d’alg` ebre homologique ou homotopique.
Table des mati` eres
I Cohomologie d’Andr´ e-Quillen classique 2
1 D´ erivations, diff´ erentielles et complexe cotangent 2 2 La structure de cat´ egorie de mod` eles sur les alg` ebres simpliciales ; d´ efinition de
la cohomologie d’Andr´ e-Quillen 3
3 Quelques propri´ et´ es de la cohomologie d’Andr´ e-Quillen 4
II Cohomologie d’Andr´ e-Quillen des alg` ebres sur une op´ erade 5
4 Rappels sur le cadre alg´ ebrique 6
5 D´ erivations et diff´ erentielles dans le cadre op´ eradique 7 6 La cat´ egorie de mod` eles simpliciale et la cohomologie d’Andr´ e-Quillen dans le
cadre op´ eradique 7
7 Propri´ et´ es 9
Dans tout cet expos´ e, k d´ esigne un anneau (associatif, unitaire) commutatif et Mod
kla cat´ egorie
des k-modules.
Premi` ere partie
Cohomologie d’Andr´ e-Quillen classique
Cette th´ eorie cohomologique a ´ et´ e introduite ind´ ependamment par Andr´ e et Quillen en 1967.
Dans cette partie, toutes les alg` ebres consid´ er´ ees sont unitaires, associatives et commutatives.
On note Alg
kla cat´ egorie des k-alg` ebres.
1 D´ erivations, diff´ erentielles et complexe cotangent
Si A est une k-alg` ebre et M un A-module, le k-module des (k-)d´ erivations de A ` a valeurs dans M est d´ efini par
Der
k(A, M ) = {f ∈ hom
k(A, M ) | ∀(x, y) ∈ A
2f (xy) = x.f (y) + y.f (x)}. (1) Une autre description de Der
k(A, M ) s’obtient comme suit : notons A n M la k-alg` ebre dont le k-module sous-jacent est A ⊕ M et dont la multiplication est donn´ ee par
(a, m).(a
0, m
0) = (aa
0, am
0+ a
0m).
La projection A n M A est un morphisme de Alg
k, de sorte que A n M est un objet de la cat´ egorie Alg
k/A des k-alg` ebres au-dessus de A (ou A-augment´ ees). On a un isomorphisme canonique
Der
k(A, M ) ' hom
Algk/A
(A, A n M ).
Une troisi` eme description des d´ erivations est fournie par les diff´ erentielles de K¨ ahler de A sur k, qui sont par d´ efinition les ´ el´ ements du A-module Ω
k(A) engendr´ e par des symboles da pour chaque a ∈ A soumis aux relations suivantes :
1. ∀λ ∈ k d(λ.1) = 0 ;
2. ∀(a, b) ∈ A
2d(a + b) = da + db ; 3. ∀(a, b) ∈ A
2d(ab) = adb + bda.
On a un isomorphisme canonique
Der
k(A, M ) ' hom
A(Ω
k(A), M).
Les diff´ erentielles de K¨ ahler permettent de d´ efinir le complexe cotangent d’une k-alg` ebre A. Pour cela, on rappelle que le foncteur d’oubli de Alg
kvers la cat´ egorie des ensembles poss` ede un adjoint ` a gauche k[−] ; la k-alg` ebre k[X ] est l’alg` ebre polynomiale construite sur X . Notons ⊥ l’endofoncteur de Alg
kcompos´ e des deux foncteurs pr´ ec´ edents : il s’ins` ere dans une comonade (ou cotriple), i.e.
on a des transformations naturelles ⊥ → id et ⊥ → ⊥
2, d´ eduites formellement de l’adjonction, qui v´ erifient les conditions de co¨ unit´ e et de coassociativit´ e ´ evidentes.
On d´ eduit de cette comonade une k-alg` ebre simpliciale A-augment´ ee ⊥
∗(A) en posant ⊥
n(A) =⊥
n+1(A), en prenant pour faces d
i: ⊥
n+1(A) → ⊥
n(A) les morphismes d´ eduits de la co¨ unit´ e
⊥ → id et pour d´ eg´ en´ erescences s
i: ⊥
n(A) → ⊥
n+1(A) les morphismes d´ eduits de la comultiplica- tion ⊥ → ⊥
2(cf. [6], § 8.6 pour les d´ etails). L’augmentation ⊥
∗(A) → A se d´ eduit de la co¨ unit´ e. Le complexe cotangent de A est par d´ efinition le A-module simplicial
L Ω
k(A) = A ⊗
⊥∗A
Ω
k(⊥
∗A).
L’homologie du complexe de Moore associ´ e ` a ce A-module simplicial sera l’homologie d’Andr´ e-
Quillen de A ; avant de l’´ etudier, nous allons donner le cadre g´ en´ eral d’alg` ebre homotopique qui
permet de travailler efficacement dans ce contexte.
2 La structure de cat´ egorie de mod` eles sur les alg` ebres sim- pliciales ; d´ efinition de la cohomologie d’Andr´ e-Quillen
Un th´ eor` eme g´ en´ eral de Quillen (cf. [4], § II.4) procure le r´ esultat suivant.
Proposition 2.1. On d´ efinit une structure de cat´ egorie de mod` eles ferm´ ee (mˆ eme simpliciale) sur la cat´ egorie sAlg
kdes k-alg` ebres simpliciales en prenant pour :
– ´ equivalences faibles les morphismes dont le morphisme d’ensembles simpliciaux sous-jacent est une ´ equivalence faible (i.e. qui induisent un isomorphisme entre π
∗) ;
– fibrations les morphismes dont le morphisme de modules simpliciaux sous-jacent est une fi- bration, i.e. qui induisent un ´ epimorphisme en degr´ es strictement positifs entre les com- plexes normalis´ es associ´ es (on rappelle que le foncteur de normalisation N est d´ efini par N
i(M ) = T
n−1i=0
ker (d
i: M
n→ M
n−1)) ;
– cofibrations les r´ etractes des morphismes libres, d´ efinis ci-dessous.
D´ efinition 2.2. Un morphisme f : A → B de sAlg
kest dit libre s’il existe une suite d’ensembles (X
n) telle que f
n: A → B
nsoit isomorphe ` a l’inclusion canonique A
n, → A
n[X
n] et que les d´ eg´ en´ erescences s
i: B
n→ B
n+1envoient X
n(assimil´ e ` a un sous-ensemble de B
n' A
n[X
n]) dans X
n+1.
Remarque 2.3. – Tous les objets de sAlg
ksont fibrants.
– On d´ eduit formellement de la proposition une structure de cat´ egorie de mod` eles sur la cat´ egorie sAlg
k/A des k-alg` ebres simpliciales au-dessus d’une alg` ebre A, dont les ´ equivalences faibles (resp. fibrations, cofibrations) sont les morphismes qui vus dans sAlg
ksont des ´ equivalences faibles (resp. fibrations, cofibrations) — cf. [1], § 1.1.
Foncteurs d´ eriv´ es fondamentaux
On v´ erifie que l’on est dans la situation de foncteurs de Quillen, que l’on peut donc d´ eriver de mani` ere standard.
Pr´ ecis´ ement, soit A une k-alg` ebre. On a des isomorphismes canoniques hom
A(Ω
k(B) ⊗
B
A, M ) ' Der
k(B, M ) ' hom
Algk/A
(B, A n M ) (2)
pour toute k-alg` ebre A-augment´ ee B et tout A-module M (par abus, on note encore M l’image de M par le foncteur de restriction des scalaires Mod
A→ Mod
Bd´ eduit de l’augmentation B → A).
En effet, on a (cf. section pr´ ec´ edente) hom
A(Ω
k(B)⊗
B
A, M ) ' hom
B(Ω
k(B), M ) ' Der
k(B, M ) ' hom
Algk/B
(B, B n M ) ' hom
Algk/A
(B, A n M ).
L’adjonction (2) s’´ etend aux cat´ egories simpliciales : si B est une k-alg` ebre simpliciale au-dessus de A et M un A-module simplicial, on a encore un isomorphisme canonique
hom
A(Ω
k(B) ⊗
B
A, M ) ' hom
Algk/A
(B, A n M ).
De plus, il est ´ evident que le foncteur A n − : sMod
A→ sAlg
k/A pr´ eserve fibrations et
´ equivalences faibles. Par cons´ equent, on est dans la situation d’une adjonction de Quillen ; en parti- culier, le foncteur B 7→ Ω
k(B) ⊗
B
A : sAlg
k/A → sMod
Apr´ eserve les cofibrations et les cofibrations triviales. En d´ erivant ` a gauche ce foncteur, on obtient un foncteur Ho(sAlg
k/A) → Ho(sMod
A).
D´ efinition de la (co)homologie d’Andr´ e-Quillen
L’homologie d’Andr´ e-Quillende A est par d´ efinition l’image de A (assimil´ e ` a un objet simplicial constant) par le foncteur gradu´ e
Ho(sAlg
k/A) → Ho(sMod
A) −−−−→
π∗=H∗Mod
Acompos´ e du pr´ ec´ edent et du foncteur canonique (cf. correspondance de Dold-Kan). Cette homologie est not´ ee D
∗(A/k). Une g´ en´ eralisation ` a coefficients dans un A-module M s’obtient en composant au centre les fl` eches pr´ ec´ edentes par le foncteur d´ eriv´ e de la tensorisation par M . Ainsi, explicitement, D
∗(A/k, M) ' H
∗(Ω
k(X ) ⊗
X
M ), o` u X → A est une r´ esolution cofibrante de A (i.e. une fibration triviale avec X cofibrant).
La variante duale, que nous consid´ ererons plutˆ ot, s’obtient de fa¸ con analogue en rempla¸ cant le foncteur B 7→ Ω
k(B) ⊗
B
M par B 7→ hom
sModA(Ω
k(B) ⊗
A
A, M ). On obtient ainsi la cohomologie d’Andr´ e-Quillen de la k-alg` ebre A ` a coefficients dans le A-module M , d´ efinie par
D
k∗(A, M ) ' H
∗(hom
A(Ω
k(X ) ⊗
X
A, M )),
o` u X → A est une r´ esolution cofibrante. Lorsque M = A, on omet la mention ` a ce module de coefficients.
Retour sur le complexe cotangent
L’augmentation ⊥
∗(A) → A du complexe cotangent de A est une r´ esolution cofibrante fonc- torielle de A. Ce fait est formel (cf. [6], § 8.6) — le caract` ere cofibrant de la k-alg` ebre simpliciale
⊥
∗(A) est d’ailleurs tautologique.
3 Quelques propri´ et´ es de la cohomologie d’Andr´ e-Quillen
Des propri´ et´ es formelles
Suites exactes longues
– Soient A une k-alg` ebre et 0 → M
0→ M → M
00→ 0 une suite exacte courte de A-modules.
On en d´ eduit une suite exacte longue
0 → Der
k(A, M
0) → Der
k(A, M ) → Der
k(A, M
00) → D
k1(A, M
0) → · · ·
· · · → D
ks(A, M
0) → D
sk(A, M ) → D
ks(A, M
00) → D
s+1k(A, M
0) → · · · – Si A → B est un morphisme de k-alg` ebres, on a une suite exacte longue
0 → Der
A(B, M ) → Der
k(B, M ) → Der
k(A, M ) → D
1k(A, M ) → · · ·
· · · → D
sA(B, M ) → D
ks(B, M ) → D
sk(A, M ) → D
s+1A(B, M ) → · · · o` u M est un B-module.
Coefficients universels. Il existe une suite spectrale du premier quadrant E
p,q2= Ext
pA(D
q(A/k), M) ⇒ D
p+q(A, M ) naturelle en la k-alg` ebre A et le A-module M .
En particulier, si A est un corps, D
sk(A, M ) ' hom
A(D
s(A/k), M).
Changement plat d’anneau. Soient A et B deux k-alg` ebres telles que Tor
ik(A, B) = 0 pour tout i > 0 (cas typique : A ou B est k-plate). Il existe un isomorphisme naturel D
∗A(B ⊗
k
A, M ) ' D
∗k(B, M ) pour tout B ⊗
k
A-module M .
Ingr´ edient : si X → B est une r´ esolution cofibrante de B comme k-alg` ebre, alors X ⊗
k
A → B ⊗
k
A est une r´ esolution cofibrante de B ⊗
k
A comme A-alg` ebre.
Des exemples « concrets » fondamentaux
Cohomologie d’Andr´ e-Quillen d’une alg` ebre sym´ etrique. Soient N un k-module, S
k(N ) son alg` ebre sym´ etrique (sur k) et M un S
k(N )-module. Il existe un isomorphisme gradu´ e canonique
D
k∗(S
k(N), M ) ' Ext
∗k(N, M).
Ingr´ edients : soit P → N une r´ esolution projective de N , i.e. une r´ esolution cofibrante de N dans sMod
k. Alors S
k(P) → S
k(N) est une r´ esolution cofibrante de la k-alg` ebre S
k(N). De plus, Der
k(S
k(N ), M ) ' hom
k(N, M ), ou, de fa¸ con ´ equivalente, Ω
k(S
kN ) ' N ⊗
k
S
k(N ).
Interpr´ etation de D
1k(A, M ) en termes d’extensions. Comme ensemble, D
1k(A, M ) est en bijection avec les classes d’´ equivalence d’extensions M − →
ιE − →
πA, o` u :
1. la suite 0 → M − →
ιE − →
πA → 0 de k-modules est exacte ; 2. π est un morphisme d’alg` ebres ;
3. on a ι(M )
2= 0 dans E.
L’exemple typique d’une telle extension est M , → A n M → A ; on peut d´ ecrire explicitement la structure de A-module de D
k1(A, M ) dans cette identification.
Ingr´ edients : en utilisant le complexe cotangent, on voit que D
1k(A, M ) est l’homologie d’un com- plexe M
A→ M
k[A]→ M
k[k[A]], grˆ ace ` a l’isomorphisme canonique Der
k(k[A], M ) ' M
A.
Soit s : A → E une section ensembliste de π. Pour a
1, . . . , a
i∈ A, on a π(s(a
1. . . a
i) − s(a
1) . . . s(a
i)) = 0, donc il existe un unique ´ el´ ement θ(a
1, . . . , a
i) de M tel que s(a
1. . . a
i) − s(a
1) . . . s(a
i) = ι(θ(a
1, . . . , a
i)). En prolongeant θ par lin´ earit´ e, on obtient une fonction k[A] → M dont on v´ erifie qu’elle est un cycle dans le complexe ci-dessus ; changer de section s modifie ce cycle par un bord. On obtient ainsi une fl` eche des classes d’extensions de A par M vers D
1k(A, M ), qui est bijective.
Un cas particulier. Supposons que k est un anneau local d’id´ eal maximal m et de corps r´ esiduel K = k/m. Il existe alors un isomorphisme canonique D
k1(K) ' (m/m
2)
∗, o` u (−)
∗d´ esigne le dual d’un K-espace vectoriel (on comprend ainsi l’apparition du terme « cotangent » dans la th´ eorie).
Ingr´ edient : soient K − →
ιE − →
πK une extension comme ci-avant et a un ant´ ec´ edent de 1 ∈ K par π : pour t ∈ m, on a ta ∈ ker π, et si t, t
0∈ m, alors tt
0a = 0. Ainsi, t 7→ ι
−1(ta) d´ efinit un morphisme m/m
2→ K.
Deux remarques culturelles
– Si k est un corps de caract´ eristique nulle, alors D
∗kest facteur direct naturel de la cohomologie de Hochschild (cf. [6]).
– Il existe un analogue de la cohomologie d’Andr´ e-Quillen pour les k-alg` ebres (unitaires associa- tives) non n´ ecessairement commutatives (` a coefficients dans un bimodule). Pour une alg` ebre commutative, les deux notions de cohomologie d’Andr´ e-Quillen commutative et associative sont reli´ ees par une suite spectrale, qui est pr´ esent´ ee et utilis´ ee dans un cadre topologique dans [5].
La g´ en´ eralisation op´ eradique expos´ ee dans la deuxi` eme partie de cet expos´ e d’introduction
g´ en´ eralise les cas commutatif et associatif.
Deuxi` eme partie
Cohomologie d’Andr´ e-Quillen des alg` ebres sur une op´ erade
Dans cette partie, on suit essentiellement la deuxi` eme section de [2].
4 Rappels sur le cadre alg´ ebrique
La cat´ egorie mono¨ıdale sym´ etrique ferm´ ee de base sera toujours, dans cet expos´ e, la cat´ egorie C = Mod
kdes modules sur l’anneau commutatif k, munie de ⊗
k
. La difficult´ e suppl´ ementaire qui apparaˆıt dans le cas des comodules sur une alg´ ebro¨ıde de Hopf r´ eside dans le fait qu’il n’y a plus assez de projectifs dans ce cas, ce qui impose de modifier la structure de cat´ egorie de mod` eles consid´ er´ ee sur les alg` ebres simpliciales, tandis que pour les alg` ebres sur une op´ erade en k-modules, tout fonctionne comme dans le cadre classique.
On rappelle que C
Σd´ esigne la cat´ egorie des objets sym´ etriques de C, i.e. des suites (M
n)
n∈N, o` u M
nest un k[Σ
n]-module ` a gauche ; le foncteur ⊗
Σ: C
Σ× C
Σ→ C est donn´ e par
S ⊗
ΣT = M
n∈N
S
n⊗
k[Σn]
T
n(on identifie ici implicitement le k[Σ
n]-module ` a gauche S
nqui apparaˆıt dans le produit tensoriel au k[Σ
n]-module ` a droite qui lui correspond canoniquement).
On dispose ´ egalement d’un foncteur ⊗ : C
Σ× C
Σ→ C
Σqui fait de C
Σune cat´ egorie mono¨ıdale sym´ etrique ferm´ ee, d´ efini par
(S ⊗ T )
n= M
p+q=n
k[Σ
n] ⊗
k[Σp×Σq]
(S
p⊗ T
q).
Le produit de composition ◦ : C
Σ× C
Σ→ C
Σest d´ efini par (S ◦ T )
q= S ⊗
Σ((T
⊗n)
q)
n. Une op´ erade T dans C = Mod
kest un mono¨ıde de la cat´ egorie C
Σpour la structure (non sym´ etrique) d´ efinie par ◦.
Une T-alg` ebre est un k-module A qui est une alg` ebre sur la monade d´ efinie par T — concr` etement, c’est la donn´ ee d’un morphisme T (A) −→
AA v´ erifiant les axiomes habituels. On rappelle que T(A) = T ⊗
Σ(A
⊗n)
n. Les T -alg` ebres forment une cat´ egorie A
T.
Exemple 4.1. Si T = (k)
n∈Nd´ esigne l’op´ erade commutative, une T -alg` ebre est une k-alg` ebre com- mutative et T (M ) = S
k(M ) pour tout k-module M . Cette traduction ´ evidente de la suite de cet expos´ e redonne la th´ eorie classique d’Andr´ e-Quillen.
Si A est une telle alg` ebre, on s’int´ eresse aussi ` a la cat´ egorie M
TAdes A-alg` ebres (sur T ), i.e.
des k-modules munis d’un morphisme
M: T (A, M ) → M satisfaisant aux conditions usuelles. On rappelle que T (A, M ) = T ⊗
Σ(k[Σ
n] ⊗
k[Σn−1]
(A
⊗n−1⊗
k
M ))
n∈N.
Le foncteur d’oubli M
TA→ Mod
kposs` ede un adjoint ` a gauche not´ e M 7→ A ⊗
TM . Cela se v´ erifie ` a partir du cas libre A = T (N ), dans lequel on a A ⊗
TM ' T (N, M). Le cas g´ en´ eral s’en d´ eduit ` a l’aide du diagramme co´ egalisateur r´ eflexif canonique
(T ◦ T )(A) ⇒ T (A) → A (3)
d´ eduit de la structure d’alg` ebre de A (cf. la r´ esolution canonique ⊥
∗(A) → A donn´ ee par le com- plexe cotangent dans le cas commutatif). Ce principe ´ el´ ementaire est omnipr´ esent pour toutes les constructions de base.
De fa¸ con analogue, si A → B est un morphisme de T -alg` ebres, le foncteur d’oubli (restriction des scalaires) M
TB→ M
TAposs` ede un adjoint ` a gauche not´ e B ⊗
A
− par analogie avec le cas usuel.
5 D´ erivations et diff´ erentielles dans le cadre op´ eradique
Soient T une op´ erade en k-modules et A une T-alg` ebre, on note A
T/A la cat´ egorie des T-alg` ebres au-dessus de A. On d´ efinit les d´ erivations de A dans un A-module M en ´ etendant la construction A n M utilis´ ee dans le cas classique.
Pour cela, on commence par remarquer que (A ⊕ M )
⊗ncontient comme facteur direct naturel A
⊗n⊕ L
ni=1
A
⊗i−1⊗M ⊗A
⊗n−i, d’o` u un ´ epimorphisme scind´ e naturel T (A⊕M ) T (A)⊕T (A, M ).
D´ efinition 5.1. On note A n M l’objet de A
T/A dont le k-module sous-jacent est A ⊕ M , dont la structure de T-alg` ebre est donn´ ee par la multiplication
T (A ⊕ M ) T (A) ⊕ T (A, M ) −
−−−−
A⊕M→ A ⊕ M et l’augmentation par la projection A ⊕ M A.
On pose alors Der
T(A, M ) = hom
AT/A(A, A n M ) et plus g´ en´ eralement, si B est un objet de A
T/A,
Der
T(B, M ) = hom
AT/A(B, A n M ).
Remarque 5.2. On peut donner une d´ efinition directe des d´ erivations analogue ` a (1) — cf. [2], § 2 : une d´ erivation de A dans M correspond canoniquement ` a une application k-lin´ eaire d : A → M telle que le diagramme
T (A)
∆//
A
T (A, A)
T(A,d)// T (A, M )
M
A
d// M
commute, o` u ∆ : T (A) → T (A, A) d´ esigne la diagonale (induite par la collection des diagonales A
⊗n→ (A
⊗n)
⊕n).
Proposition 5.3. – Pour toute T-alg` ebre A, il existe Ω
T(A) ∈ M
TAtel que hom
MTA
(Ω
T(A), M ) ' Der
T(A, M ) pour tout A-module M .
– Soit A → B un morphisme de A
T. La transformation naturelle Der
T(B, −) → Der
T(A, −) qu’il induit provient via l’isomorphisme pr´ ec´ edent d’un morphisme de B-modules B ⊗
A
Ω
T(A) → Ω
T(B).
Ingr´ edients (pour le premier point) : on commence par le cas o` u A est une T -alg` ebre libre T(N ) : on a explicitement Ω
T(T N ) ' T (N ) ⊗
TN ' T (N, N ). Le cas g´ en´ eral s’en d´ eduit par le co´ egalisateur r´ eflexif (3).
Le A-module Ω
T(A) est encore appel´ e module des diff´ erentielles k¨ ahl´ eriennes de A (sur T ).
Comme dans le cas classique, le but de la (co)homologie d’Andr´ e-Quillen est de d´ eriver les foncteurs Ω
Tou Der
T.
6 La cat´ egorie de mod` eles simpliciale et la cohomologie d’Andr´ e- Quillen dans le cadre op´ eradique
Soit T = (T
n)
n∈Nune op´ erade simpliciale (en k-modules) ; si X est un k-module simplicial, on
note T (X) le k-module simplicial (T
n(X
n)). On a une notion d’alg` ebre simpliciale sur T : c’est un
k-module simplicial X muni d’une fl` eche T (X ) → X v´ erifiant les conditions usuelles. On note sA
Tla cat´ egorie des alg` ebres simpliciales sur T.
Pour A ∈ sA
T, un A-module simplicial est un k-module simplicial M muni d’un morphisme : T (A, M ) = (T
n(A
n, M
n)) → M v´ erifiant les conditions usuelles. Les A-modules simpliciaux forment une cat´ egorie not´ ee sM
TA.
Variante augment´ ee : on rappelle qu’un objet simplicial augment´ e est un objet simplial Z muni d’une fl` eche d
0: Z
0→ Z
−1telle que les compos´ ees d
0d
0et d
0d
1: Z
1→ Z
−1co¨ıncident. L’augmen- tation canonique d’un objet simplicial Z est donn´ ee par Z → π
0(Z ) = coeg(d
0, d
1: Z
1→ Z
0).
On d´ efinit comme pr´ ec´ edemment les alg` ebres X → X
−1sur une op´ erade augment´ ee T → T
−1. Si A est une alg` ebre sur une op´ erade simpliciale T , alors A → π
0(A) est canoniquement une alg` ebre sur l’op´ erade simpliciale augment´ ee T → π
0(T ).
La proposition 2.1 se g´ en´ eralise sans changement ` a notre contexte op´ eradique :
Proposition 6.1. On d´ efinit une structure de cat´ egorie de mod` eles ferm´ ee (mˆ eme simpliciale) sur la cat´ egorie sA
Ten prenant pour :
– ´ equivalences faibles les morphismes dont le morphisme d’ensembles simpliciaux sous-jacent est une ´ equivalence faible ;
– fibrations les morphismes dont le morphisme de k-modules simpliciaux sous-jacent est une fibration, i.e. qui induisent un ´ epimorphisme en degr´ es strictement positifs entre les complexes normalis´ es associ´ es ;
– cofibrations les r´ etractes des morphismes libres, d´ efinis ci-dessous.
D´ efinition 6.2. – Un objet X de sA
Test dit libre s’il est de la forme T (M ) avec M
n' M
[n][m]
Z
mo` u les Z
msont des k-modules projectifs pr´ eserv´ es par les d´ eg´ en´ erescences.
– Un morphisme f : A → B de sA
Test dit libre s’il est isomorphe ` a un morphisme du type A → A `
X, o` u X est un objet libre de sA
T.
Remarque 6.3. – Comme dans le cas classique, tous les objets de sA
Tsont fibrants, et on d´ eduit de la proposition une structure de cat´ egorie de mod` eles sur sA
T/A pour toute T -alg` ebre A.
– La cat´ egorie sM
TAdes modules sur une T-alg` ebre A est une cat´ egorie de mod` ele pour une structure analogue ` a celle des modules simpliciaux usuels.
Le complexe cotangent de A ∈ sA
Test d´ efini par L Ω
T(A) ' A ⊗
X
Ω
T(X),
o` u X → A est une r´ esolution cofibrante. On peut donner une description explicite d’une telle r´ esolution, analogue au cas classique, qui permet de retrouver le complexe cotangent d´ ej` a introduit lorsque T est l’op´ erade commutative.
L’homologie d’Andr´ e-Quillen de A est d´ efinie par
D
T∗(A) = H
∗( L Ω
TA)(' π
∗( L Ω
TA)).
Cohomologie. Supposons que T → T
−1est une op´ erade simpliciale augment´ ee, que A → A
−1est une T -alg` ebre et que M est un A
−1-module sur T
−1. M devient un A
n-module sur T
n, pour tout n, puis un X
n-module (o` u X → A est toujours une r´ esolution cofibrante). La cohomologie d’Andr´ e-Quillen de A sur T ` a coefficients dans M est d´ efinie par
D
∗T(A, M ) = H
∗Der
T(X, M ) = H
∗hom
sMTA
( L Ω
TA, M ).
Comme dans le cas classique, ces d´ efinitions ne d´ ependent pas du choix de la r´ esolution cofibrante
`
a cause de l’adjonction de Quillen mettant en jeu Ω
Tet n .
En pratique, on consid` ere toujours le cas canonique T
−1= π
0(T ) et A
−1= π
0(A).
Cas relatif. Soit A → X un morphisme de sA
Tet M un π
0(X)-module sur π
0(T ). On d´ efinit Der
A(X, M) = ker (Der
T(X, M) → Der
T(A, M ))
et
Ω
T(X/A) = coker (X ⊗
A
Ω
T(A) → Ω
T(X)), de sorte que Der
A(X, M ) ' hom
sMTA
(Ω
T(X/A), M).
Le complexe cotangent relatif est L Ω
T(X/A) = X ⊗
X0
Ω
T(X
0/A
0), o` u l’on s’est donn´ e une r´ esolution cofibrante A
0→ A et une factorisation de A
0→ A → X en une cofibration A
0→ X
0suivie d’une fibration triviale X
0→ X . On pose enfin
D
∗T(X/A) = H
∗( L Ω
T(X/A)) et
D
∗T(X/A, M ) = H
∗hom
sMTX
( L Ω
T(X/A), M ).
7 Propri´ et´ es
T d´ esigne toujours une op´ erade simpliciale en k-modules.
Repr´ esentabilit´ e
Proposition 7.1. Soient A une T -alg` ebre et M un π
0(A)-module sur π
0(T ). Pour tout n ∈ N , il existe K
A(M, n) ∈ sA
T/A tel que
[−, K
A(M, n)]
sAT/A' D
nT(−, M).
D´ emonstration. Soit K(M, n) un Eilenberg-Mac Lane (simplicial et op´ eradique) « ordinaire », i.e. un objet de sM
TAqui repr´ esente (dans la cat´ egorie homotopique) H
n(−, M ). Explicitement, K(M, n) est un A-module dont le complexe normalis´ e associ´ e est concentr´ e en degr´ e n, o` u il est isomorphe ` a M .
On pose alors K
A(M, n) = A n K(M, n) : on a par adjonction de Quillen [Y, K
A(M, n)]
sAT/A' [ L Ω
T(Y ), K (M, n)]
sMTA
' H
n( L Ω
T(Y ), M) ' D
nT(Y, M).
Suites exactes longues
Proposition 7.2. Soient A ∈ sA
Tet 0 → M
0→ M → M
00→ 0 une suite exacte courte de π
0(A)-modules sur π
0(T ). Il existe une suite exacte longue
0 → Der
T(A, M
0) → Der
T(A, M ) → Der
T(A, M
00) → D
1T(A, M
0) → · · ·
· · · → D
Ts(A, M
0) → D
Ts(A, M ) → D
sT(A, M
00) → D
Ts+1(A, M
0) → · · · Proposition 7.3. Soit A → B → C une suite de morphismes de sA
T. La suite
C ⊗
B
L Ω
T(B/A) → L Ω
T(C/A) → L Ω
T(C/B)
de sM
TCqui lui est associ´ ee est une suite cofibre.
Corollaire 7.4. Sous les mˆ emes hypoth` eses, si M est un π
0(C)-module sur π
0(T ), on a une suite exacte longue
0 → Der
T(C/B, M ) → Der
T(C/A, M ) → Der
T(B/A, M ) → D
T1(C/B, M ) → · · ·
· · · → D
Ts(C/B, M) → D
sT(C/A, M ) → D
Ts(B/A, M) → D
s+1T(C/B, M ) → · · · Proposition 7.5. Soient A une T -alg` ebre et
B
f//
j
X
C // Y
un diagramme commutatif cocart´ esien de sA
T/A. On suppose que A est cofibrant (dans sA
T), que B et X sont cofibrants dans sA
T/A et que j est une cofibration. On a alors une suite cofibre
Y ⊗
B
L Ω
T(B/A) → Y ⊗
C
L Ω
T(C/A) ⊕ Y ⊗
X