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Circulation des connaissances entre chercheurs, communicants et professionnels de la santé : une expérience canadienne

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Academic year: 2021

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Circulation des connaissances entre chercheurs, communicants et professionnels de la santé : une expérience canadienne

L’univers de la santé et celui des médias fonctionnent bien souvent isolé- ment et rares sont les occasions qui leur sont offertes de se rencontrer et de trou- ver des points de jonction. Ce constat se trouve à l’origine de la création du Groupe de recherche Médias et santé (GRMS) de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) qui prône une colla- boration entre chercheurs, partenaires médiatiques et partenaires de santé. Cet article vise à exposer les différentes stra- tégies et outils de circulation des connais- sances mis en place par le GRMS, instau- rant ainsi un espace de rencontre entre les partenaires suivants :

s intervenants médiatiques œuvrant à la conception, production et diffusion de contenus en presse écrite, télévision, radio et Internet : télédiffuseurs, pro- ducteurs d’émissions, scénaristes, jour- nalistes, etc. ;

s intervenants de santé concevant, implantant et évaluant des programmes de santé populationnelle : ministère, agences de santé, direction de santé publique, organismes non gouverne- mentaux, etc. ;

s chercheurs intéressés par le domaine de la santé ou par celui des médias, issus de diverses disciplines et exerçant dans plusieurs universités, collèges ou organisations partenaires.

Objectifs du GRMS

Le GRMS conçoit le travail avec l’en- semble des partenaires comme un pro-

cessus dynamique, planifié, continu et interactif visant notamment à faire cir- culer les connaissances dans le but de : s développer un capital d’échange et d’entraide entre les partenaires du groupe afin de générer un enrichisse- ment mutuel ;

s développer une culture de collabora- tion et de co-construction des connais- sances entre les milieux de pratiques et universitaires ;

s améliorer les attitudes des chercheurs vis-à-vis des réalités et des préoccupa- tions des milieux de pratiques ; s améliorer les attitudes des partenaires et de leurs milieux quant à la réceptivité et à l’utilisation des connaissances scientifiques.

Stratégies et moyens mis en place

Ainsi, par la circulation des connais- sances entre trois groupes : recherche, médias et santé, le GRMS vise à générer de nouvelles compréhensions des phé- nomènes émanant autant des expé- riences personnelles, des pratiques de terrain que des recherches ancrées dans les contextes de chaque organisa- tion, ceci afin d’améliorer, si nécessaire, les pratiques.

Dans sa démarche de circulation des connaissances, le GRMS fait appel à des stratégies de mise en réseau, d’échange et de valorisation (transfert et diffusion) dont le but ultime est de susciter plu-

sieurs types d’utilisation des connais - sances.

Mise en réseau et échange La mise en réseau vise l’établisse- ment de liens de confiance et la circu- lation fluide des informations entre les individus et leurs organisations.

L’échange implique une interaction ponctuelle et réciproque entre des per- sonnes ou des organisations.

La création d’un espace de rencontre, où intervenants médiatiques, de santé et chercheurs se côtoient, permet, d’une part, une meilleure compréhension des dynamiques, des réalités, des contextes et des contraintes de chaque milieu de travail (santé, médias, recherche) et, d’autre part, offre à chacun l’occasion de faire valoir son expertise favorisant l’en- richissement mutuel et le respect des compétences de chacun.

Le groupe de recherche a recours à trois outils spécifiques à la mise en réseau et à l’échange :

s les rencontres de partenaires : temps privilégiés pour encourager l’échange et le réseautage des intervenants, créer des ponts entre eux, cerner les contraintes et exposer les objectifs de chacun ; s la référence : en réponse aux demandes régulières qui lui sont faites d’identifier des ressources en communi- cation et santé, le GRMS relaie des infor- mations vers les chercheurs et les pro- Au Canada, un groupe de chercheurs de l’université du Québec à Montréal a créé le Groupe de recherche Médias et santé (GRMS). Ce groupe encourage le partage et la diffusion des connaissances sur la santé entre les chercheurs, les communicants et les professionnels de la santé. Il fait office de catalyseur des connaissances auprès de leurs utilisateurs potentiels.

L’un des objectifs est aussi de permettre aux journalistes de s’approprier ces informations afin de pouvoir les répercuter ensuite auprès du grand public.

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 410 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010

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fessionnels de la santé et des médias ; s l’organisation en commun de col- loques ou de formations avec des par- tenaires permet d’accroître notre connaissance mutuelle et de mieux rejoindre nos publics cibles par la mise en commun de nos réseaux.

Valorisation des connaissances La valorisation est une démarche pour optimiser l’identification et, ulti- mement, l’utilisation des connaissances dans les différentes organisations parti- cipantes (médiatiques, de recherche, de santé). « La valorisation de la recherche peut être définie comme l’en- semble des actions et des activités ayant pour but d’augmenter la valeur des résultats de recherche et, plus générale- ment, de mettre en valeur les connais- sances (…) elle réfère plus globalement à l’ensemble des activités qui mettent en relation le monde de la recherche et la sphère économique et sociale (…) elle s’appuie, de façon générale, sur le déploiement et l’échange de connais- sances et ce, dans tous les domaines de développement du savoir » (1).

Le GRMS adhère à cette définition en insistant sur le fait que les connais- sances dont il s’agit ne sont pas exclu- sivement issues du milieu scientifique.

Le groupe de recherche fait office de catalyseur entre les connaissances et leurs utilisateurs potentiels. Il œuvre alors à trouver les mécanismes favori- sant la mise en valeur de certaines don- nées de recherche et de certaines pra- tiques et initiatives de terrain. Ce qui fait entre autres la spécificité de la valorisa-

tion est que les connaissances sont sélectionnées selon leur pertinence perçue par le GRMS et exprimée par les publics cibles.

La valorisation des connaissances se décline en deux stratégies : le transfert et la diffusion des connaissances.

Transfert des connaissances Dans le domaine sociosanitaire, le transfert des connaissances correspond à une démarche systémique, articulée et structurée autour des données pro- bantes, pour générer des changements de pratiques, de compétences ou de comportements. Le GRMS considère que les connaissances sont obligatoire- ment reconstruites et que leur transfert vise à « l’intégration des connaissances dans la pratique des individus et des organisations et, ultimement, un chan- gement dans les comportements indivi- duels ou organisationnels ou des déci- sions d’ordre institutionnel ou poli - tique » (2).

Pour le groupe de recherche, le trans- fert des connaissances est une démarche continue, ponctuée par des allers- retours entre chercheurs, intervenants de la santé et médias. Il s’agit d’une démarche bidirectionnelle entre cher- cheurs et/ou milieux. En effet, une étude qui ne tiendrait pas compte des connais- sances des partenaires de terrain aurait peu de chances d’intéresser les milieux de pratiques et de leur être utile.

Le groupe de recherche met en place différents moyens pour soutenir

le transfert des connaissances, comme les recherches menées en partenariat avec les milieux de pratiques et le tra- vail collaboratif entre chercheurs issus de divers champs disciplinaires.

Diffusion des connaissances L’Alliance de recherche université- communauté en économie sociale mentionne que « la diffusion des connaissances consiste à rendre acces- sibles et à faire connaître à des audi- toires susceptibles d’y être intéressés l’existence et les résultats d’une recherche, qu’ils soient préliminaires ou finaux » (2). La diffusion peut être une action ciblée en fonction des inté- rêts des destinataires ; le GRMS opte pour des moyens de diffusion adaptés à ses publics cibles.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rejoindre les publics non naturels des productions universitaires.

Elle implique un travail important de sélection et d’adaptation des résultats de recherche (qu’ils soient prélimi- naires ou finaux) pour les rendre acces- sibles et les faire connaître à des audi- toires susceptibles d’y être intéressés.

De plus, cette démarche assure un ancrage des dynamiques dans les milieux et prépare leur pérennité.

Plusieurs outils

Le groupe de recherche met en place plusieurs moyens pour soutenir la diffusion des connaissances : s site Internet et page Facebook : le site Internet du GRMS fait office de vitrine des activités. La majorité de ses publi- cations y est aussi téléchargeable et il donne accès aux outils de diffusion développés par le groupe. La page Facebook permet de publiciser les acti- vités, de susciter l’interaction et d’élar- gir le réseau de diffusion ;

s blogues : le groupe de recherche a développé deux blogues qui visent à diffuser des contenus (issus de la recherche scientifique et d’interven- tions) de manière synthétique et à inci- ter l’interaction avec ses publics cibles.

Le blogue « Internet et Santé » destiné aux intervenants de santé vise à com- prendre, partager et s’inspirer pour mieux intervenir sur Internet en matière de santé. Il est développé en collabo- ration avec l’Association pour la santé publique du Québec. Le blogue « C’est malade ! » destiné aux professionnels des médias jeunesse vise à outiller,

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informer, inspirer et susciter des réflexions critiques à propos des médias, des jeunes et de leur santé. Il propose des contenus susceptibles d’influencer les pratiques des profes- sionnels médiatiques ciblés et, in fine, la santé des jeunes ;

s faits saillants de recherche : ces résu- més de recherche destinés aux profes- sionnels de l’information (journalistes, chroniqueurs, recherchistes, etc.) visent à mettre en lumière et à rendre acces- sibles des recherches parfois peu consultées mais de grande qualité. Ils sont rédigés par des communicateurs scientifiques formés à cet effet ; s service de veille : une veille média- tique et scientifique est réalisée en fonc- tion des intérêts et des préoccupations des partenaires et des chercheurs, puis est acheminée aux personnes intéres- sées. Ce service permet notamment d’attirer l’attention des praticiens sur des données probantes, d’enrichir les recherches et de faire circuler des infor- mations au sein de réseaux qui ne pos- sèdent pas toujours l’accès aux sources de données.

Enfin, notons que le groupe de recherche adopte également les canaux traditionnels de diffusion des résultats de recherches : articles, recueils de textes, rapports de recherche et partici- pations à des conférences.

Discussion

Bien que cette démarche de circula- tion des connaissances n’ait pas été évaluée de façon formelle, l’expérience des dernières années en démontre la faisabilité. Dans un premier temps, ces initiatives ont permis de faire se ren- contrer des intervenants qui en ont peu l’occasion. Ainsi, le GRMS offre un espace où se côtoient plus d’une dizaine de chercheurs de différentes disciplines, plusieurs partenaires de santé et des partenaires médiatiques.

Les échanges sur les intérêts de chacun et leur participation active aux travaux de mise en circulation des connais- sances permettent de générer une pers- pective commune et d’appréhender de manière novatrice la recherche sur les médias et la santé.

La mise en place des stratégies et des moyens décrits dans cet article est tou- tefois conditionnelle à la présence de ressources humaines et financières dédiées à la circulation des connais-

sances. Le GRMS emploie ainsi un agent de mobilisation des connaissances dont les tâches se centrent autour de cette mission. Enfin, il s’efforce de rechercher du financement directement lié à ce type d’actions. Force est de constater l’intérêt croissant des organismes subvention- naires pour ce genre d’initiatives.

La circulation des connaissances nécessite une évolution des pratiques ainsi que du temps, autant pour les cher- cheurs que pour les partenaires. Les chercheurs du groupe modifient leurs habitudes de travail afin de tenir compte du déploiement particulier des actions liées à la circulation des connaissances (présentations aux partenaires, disponi- bilité pour les journalistes, relecture de contenus vulgarisés, etc.). De leur côté, les partenaires prennent conscience du temps nécessaire à l’élaboration des recherches et conçoivent de manière plus précise ce que celles-ci peuvent apporter à leurs pratiques. Ils sont invi- tés à partager leurs connaissances des milieux, leur savoir-faire, mais aussi leurs questionnements. Par ailleurs, des résultats de recherche les amènent par- fois à poser un regard critique sur leurs propres pratiques et invitent à modifier certaines stratégies d’action.

Le fait de réunir trois groupes issus d’univers différents (médias, santé et recherche) offre une grande richesse, tout en soulevant cependant d’impor- tants défis de communication. Les inter- venants qui se côtoient sont issus de

disciplines variées et leurs champs d’ex- pertise sont souvent bien distincts.

Diverses cultures organisationnelles se croisent alors et l’intérêt pour le traite- ment médiatique des thématiques de santé est motivé par des logiques différentes.

Enfin, nous croyons que le fait de prendre du temps pour connaître les contextes de travail de chacun (en accord avec notre philosophie d’action collaborative et interactionniste) est gagnant. Les relations de confiance, l’at- mosphère de collégialité, la confiden- tialité de certains propos représentent des facteurs qui ont favorisé la formation de réseaux et la collaboration.

Lise Renaud, Ph. D.1 Jérôme Elissalde, M. Sc.2, 3 Judith Gaudet, Ph. D.2, 4 Sylvie Louise Desrochers, M. Sc.2, 5

1. Directrice-fondatrice du Groupe de recherche Médias et santé (GRMS) et professeure titulaire au département de communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal (UQAM).

2. Membre du GRMS.

3. Agent de recherche et de planification en mobilisa- tion des connaissances, Service de la recherche et de la création, UQAM.

4. Professeure associée au département de communi- cation sociale et publique, UQAM.

5. Coordonnatrice du GRMS.

Pour en savoir plus : http://www.grms.uqam.ca

(1) Ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Politique québécoise de la science et de l’innovation : savoir changer le monde. MRST : 2001 : p. 86. En ligne : http://

www.mdeie.gouv.qc.ca/fileadmin/sites/

internet/documents/publications/pdf/

science_technologie/fr/pqsi/mrst_savoir- changer.pdf [dernière visite le 21 mars 2010]

(2) Alliance de recherche université-commu- nauté en économie sociale (Aruc-ÉS), Réseau québécois de recherche partenariale en écono- mie sociale. Guide pour la valorisation des connaissances en contexte de recherche par- tenariale. Montréal : Aruc-ÉS/RQRP-ÉS, 2007 : 7-8. En ligne : http://www.aruc-es.uqam.ca/

Portals/0/docs/pdf/Guide_Valorisation.pdf [dernière visite le 3 mars 2010]

Pour plus de détails :

s Elissalde J., Renaud L. Les démarches de circulation des connaissances : mobilisation et valorisation des connaissances. In : Renaud L.

dir. Les médias et la santé. De l’émergence à l’appropriation des normes sociales. Québec : Presses de l’Université du Québec, coll. Santé et société, 2010 : p. 409-429. En ligne : http://

www.grms.uqam.ca/production/publications / livres/42-les-medias-et-la-sante-de-lemer- gence.html

s Elissalde J., Gaudet J., Renaud L. Circulation des connaissances : modèle et stratégies.

Revue internationale de communication sociale et publique, 2010, n° 3-4 : p. 135-149.

En ligne : http://www.revuecsp.uqam.ca/

numero/n3-4/pdf/RICSP_ElisaldeGaudetRe- naud_2010.pdf

Z Références bibliographiques

LA SANTÉ DE L’HOMME - N° 410 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010

Références

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