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Article pp.265-269 du Vol.28 n°3 (2008)

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Texte intégral

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© Lavoisier – La photocopie non autorisée est un délit

Le « bio » nous met-il à l’abri des contaminants ?

F. Le Curieux1,2, F. Nesslany1*

SUMMARY

Is organic food free from contaminants ?

Organic food is obtained from organic agriculture, a form of agriculture that excludes or limits strictly the use of synthetic substances (fertilizers, pesticides, plant growth regulators, livestock feed additives) and geneti- cally modified organisms, and relies on compost, crop rotation and biolog- ical pest control. This document first presents the improvements obtained thanks to organic agriculture in terms of reduction of level of contaminants generally found in food from conventional agriculture, and then reminds that, on the other hand, organic farming is not completely satisfactory, as organic food can also contain contaminants. Pesticides, either natural (allowed in organic farming) or synthetic, are discussed first, before treat- ing of nitrates or mycotoxins, which can be found in organic food. This text focuses on chemicals and does not discuss microbial and parasitic aspects.

Keywords

organic food, contaminants, pesticides, mycotoxins.

RÉSUMÉ

Les produits « bio » sont issus de l’agriculture biologique, un label garantis- sant la non-utilisation de produits chimiques de synthèse ou de dérivés d’OGM, le recyclage des matières organiques, la rotation des cultures et la lutte biologique. Ce document résume les avancées permises par l’agricul- ture biologique en termes de réduction de certains contaminants retrouvés en agriculture conventionnelle mais rappelle cependant que ce type de prati- que agricole n’est pas totalement satisfaisant car un produit « bio » peut également contenir des contaminants. Nous traitons d’abord des produits phytosanitaires, soit synthétiques soit naturels, et abordons ensuite d’autres

1. Laboratoire de Toxicologie – EA2690 – Institut Pasteur de Lille – 1, rue du Professeur Calmette – BP 245 – 59019 Lille Cedex – France.

2. Université Lille Nord de France – Département Toxicologie-Santé Publique-Environnement – EA2690 – Faculté des Sciences Biologiques et Pharmaceutiques – Université Lille 2 – France.

* Correspondance : Fabrice Nesslany – Laboratoire de Toxicologie – Institut Pasteur de Lille – 1, rue du Professeur Calmette – BP 245 – 59019 Lille Cedex – France – Courriel : fabrice.nesslany@pasteur-lille.fr

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types de contaminants tels que les nitrates ou mycotoxines qui peuvent être retrouvés dans les produits « bio ». Ce texte se limite aux produits chimi- ques et n’aborde pas les aspects microbiologiques et parasitaires.

Mots clés

produit « bio », contaminants, produits phytosanitaires, mycotoxines.

INTRODUCTION

Les produits « bio » sont les produits agricoles issus de l’agriculture biologi- que. Ce mode de production respecte une réglementation européenne (CEE 1991a) qui est complétée en France par un cahier national des charges. L’agri- culture biologique est un mode d’exploitation agricole qui privilégie les prati- ques de gestion plutôt que le recours à des intrants chimiques. Ce label garantit en particulier la non-utilisation de produits chimiques de synthèse et de dérivés d’OGM, le recyclage des matières organiques, la rotation des cultures et la lutte biologique.

L’objet de ce texte synthétique est d’une part de présenter les principales avancées permises par l’agriculture biologique en termes de réduction de cer- tains contaminants retrouvés en agriculture conventionnelle, et d’autre part de rappeler que ce type de pratique agricole ne constitue pas la panacée car un produit « bio » peut contenir des contaminants. Nous abordons d’abord les pro- duits phytosanitaires puis d’autres types de contaminants (nitrates, mycotoxi- nes…) pouvant être retrouvés dans le « bio ». Dans ce document, nous ne traitons que des aspects qualitatifs concernant les produits chimiques et n’abordons pas les aspects microbiologiques et parasitaires.

1 – CONTAMINATION PAR LES PRODUITS PHYTOSANITAIRES

Les produits phytosanitaires sont destinés à protéger les végétaux contre les organismes nuisibles ou les végétaux indésirables ou à assurer la conserva- tion des produits végétaux. Il faut ici distinguer les produits phytosanitaires syn- thétiques, utilisés exclusivement en agriculture conventionnelle, et les produits phytosanitaires naturels, les seuls autorisés en agriculture biologique.

1.1 Produits phytosanitaires synthétiques

Du fait de l’interdiction d’utiliser des produits phytosanitaires synthétiques en agriculture biologique, il est logique que les produits « bio », contrairement à ceux provenant de l’agriculture conventionnelle, soient généralement exempts de résidus de produits phytosanitaires synthétiques. Toutefois, et malgré le fait

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que l’interdiction d’utilisation de produits phytosanitaires de synthèse soit dou- blée d’une interdiction pour un sol de recevoir des produits chimiques pendant deux ou trois ans avant la production biologique, de faibles niveaux de résidus de produits phytosanitaires de synthèse ont été retrouvés sur ces produits

« bio » (SETRABIO, 2000 ; AFSSA, 2003 ; Lairon, 2009). La présence de ces composés chimiques pourrait être due à des contaminations environnementa- les accidentelles, à l’historique particulier de la parcelle ou encore à un détour- nement d’usage.

1.2 Produits phytosanitaires naturels (autorisés en agriculture biologique)

Dans l’agriculture biologique, la protection des végétaux est d’abord basée sur la mise en œuvre de mesures préventives telles que la rotation de cultures diversifiées, le choix d’espèces appropriées, l’adaptation des techniques cultu- rales ou l’apport de fertilisants privilégiant l’activité biologique du sol. Le règle- ment CEE 2092/91 autorise l’utilisation en agriculture biologique de produits de traitement d’origine naturelle uniquement en cas de danger immédiat menaçant la culture et lorsque le besoin est reconnu par l’autorité de contrôle. Nous rap- pelons qu’il est interdit d’utiliser des produits phytosanitaires de synthèse en agriculture biologique. Cependant, en fonction des conditions climatiques parti- culières, l’usage de produits phytosanitaires synthétiques peut faire l’objet d’une dérogation du ministère de l’Agriculture : par exemple, l’utilisation de cer- tains fongicides a été autorisée en France en 2007 pour la culture de pommes de terre « bio ».

Les produits phytosanitaires naturels autorisés en agriculture biologique en France sont les pyrèthres, la roténone, les sels de cuivre et le soufre. Les pyrèthres naturels sont des extraits de Chrysanthemum cinerariaefolium qui ont un effet insecticide par une action neurotoxique. Ils sont peu rémanents et très sensibles à la lumière. La roténone est un insecticide neurotoxique naturel extrait de Derris ou Cubé. Ce composé est reprotoxique, sensibilisant et toxi- que pour l’environnement, en particulier pour les poissons.

L’évaluation des risques est difficile à mener pour les produits phytosanitai- res naturels en raison de l’insuffisance de données sur les résidus. Les quel- ques études existantes n’ont pas permis de détecter les résidus de ces composés (DGAL, 2001 ; Moore et al., 2000 ; Baker et al., 2002). Les sels de cuivre constituent des produits phytosanitaires très utilisés comme fongicides à la fois en agriculture biologique et en agriculture conventionnelle (bouillie borde- laise et bourguignonne). La contamination en cuivre des fruits et légumes est peu documentée, sauf pour le raisin et dans une moindre mesure la tomate. Les limites d’utilisation réglementaires sont actuellement de 6 kg/ha/an en agriculture biologique et de 10 kg/ha/an en agriculture conventionnelle. En ce qui concerne le soufre, également très utilisé à la fois en pratique biologique et conventionnelle, les résidus sont peu fréquents dans les fruits et légumes.

Dans le cadre du processus de réévaluation progressive de l’ensemble des pesticides, conformément à la directive 91/414/CEE (CEE, 1991b), les sels de cuivre, le soufre, la roténone, les pyrèthres doivent faire l’objet, au même titre que de nombreux autres pesticides de synthèse, d’une réévaluation toxicologi- que selon les exigences actuellement en vigueur. Il est à noter que l’inscription

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de la roténone à l’annexe I de la directive 91/414 n’a pas été renouvelée, et la commercialisation de ce produit a été interdite en Europe en octobre 2008, la France bénéficiant d’un délai supplémentaire jusqu’en avril 2011.

2 – AUTRES TYPES DE CONTAMINANTS

Parmi les autres produits pouvant contaminer les produits « bio », nous pou- vons distinguer trois types de contaminants : les nitrates, les polluants environ- nementaux et les mycotoxines.

2.1 Nitrates

La production de légumes en agriculture biologique conduit généralement à une réduction des teneurs en nitrates (AFSSA, 2003 ; Lairon, 2009). Ce point peut s’avérer important car il est recommandé d’augmenter la consommation en légumes alors que l’apport journalier moyen en nitrates est déjà proche de la dose journalière admissible.

2.2 Polluants environnementaux

Parmi les polluants de l’environnement qui peuvent être retrouvés dans ou sur les produits agricoles, qu’ils soient « bio » ou conventionnels, nous trouvons les radioéléments et les composés apparentés aux dioxines (AFSSA, 2003).

2.3 Mycotoxines

On regroupe classiquement sous le terme de mycotoxines les toxines pro- duites par les champignons et moisissures qui se développent sur les cultures.

Les principales mycotoxines pouvant être retrouvées dans les produits « bio » sont produites par des champignons du type Claviceps ou ergot (alcaloïdes), Fusarium (fumonisines, trichothécènes tels que la toxine T2 ou les dérivés du nivalénol, zéaralénone, etc.), Penicillium ou Aspergillus (aflatoxines, ochratoxine, patuline, etc.) et Alternaria (acide tenuazonique, alternariol monométhylester, alternariol, altertoxine I, altenuène…). Ces mycotoxines émergentes, voire ré- émergentes, constituent aujourd’hui un sujet de préoccupation, particulière- ment du fait de leur fort potentiel génotoxique, voire cancérogène et reprotoxi- que, et toxique pour de nombreux organes (foie, rein, moelle…). Bien qu’aucune étude ne permette de trancher définitivement, il semblerait que les aliments « bio » contiennent globalement plus de mycotoxines que les aliments issus de l’agriculture conventionnelle du fait d’une moins bonne protection contre l’atteinte fongique des plantes.

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3 – CONCLUSIONS

Si les produits « bio » bénéficient d’une image généralement très positive, les différentes évaluations menées par diverses instances nationales ou interna- tionales ne permettent pas de démontrer, en termes de qualité nutritionnelle ou de qualité sanitaire, un bénéfice significatif et reproductible des aliments « bio » par rapport à ceux issus de l’agriculture conventionnelle. En conclusion, si l’agriculture biologique permet de réduire la présence de certains contaminants, ce type de pratique agricole n’en garantit pas l’absence totale.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

AFSSA, 2003, Évaluation nutritionnelle et sani- taire des aliments issus de l’agriculture biologique, Rapport de l’Agence Fran- çaise de Sécurité Sanitaire des Aliments, Juillet 2003.

BAKER B.P., BENBROOK C.M., GROTH E., LUTZ BENBROOK K., 2002. Pesticide residues in conventional, integrated pest management (IPM)-grown and organic foods: insights from three US data sets.

Food Additives and Contaminants, 19, 427-446.

CEE 1991a, Règlement CEE N° 2092/91 du Conseil du 24 juin 1991 concernant le mode de production biologique de pro- duits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimen- taires, JO L 198 du 22.7.1991.

CEE 1991b, directive 91/414/CEE du Conseil du 15 juillet 1991 concernant la mise sur

le marché des produits phytopharmaceu- tiques, JO L 230 du 19.8.1991.

DGAL 2001, INRA/Coopagri/Esmisab. Évalua- tion de l’exposition des consommateurs et produits issus de l’agriculture biologique et de l’agriculture conventionnelle aux résidus de pesticides, métaux lourds, nitrates, nitrites et mycotoxines. Notre Ali- mentation, 37, I-VI.

LAIRON D., 2009. La qualité des produits de l’agriculture biologique. Innovations Agro- nomiques, 4, 281-287.

MOORE V.K., ZABIK M.E., ZABICK M.J., 2000. Évaluation of conventional and

« organic » baby food brands for eight organochlorine and five botanical pesti- cides. Food Chemistry, 71, 443-447.

SETRABIO 2000. Études des teneurs en rési- dus de pesticides dans les produits biolo- giques bruts et transformés, 1993-2000.

115 p.

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Références

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