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d’expérience de sauveteurs de montagne
Angelo Greco
To cite this version:
Angelo Greco. S’exposer et le dire : expérience, émotions et discours d’expérience de sauveteurs de
montagne. Psychologie. Conservatoire national des arts et metiers - CNAM, 2016. Français. �NNT :
2016CNAM1046�. �tel-01400203�
ÉCOLE DOCTORALE ABBE GREGOIRE
EA-1410-CRF-CENTRE DE RECHERCHE SUR LA FORMATION
THÈSE
présentée par :
Angelo GRECO
soutenue le : 01 Juillet 2016
pour obtenir le grade de : Docteur du Conservatoire National des Arts et Métiers
Discipline/ Spécialité : SCIENCES DE L’EDUCATION
S’EXPOSER ET LE DIRE
Expérience, Emotions et Discours d’expérience de sauveteurs de montagne
THÈSE dirigée par :
M. BARBIER Jean-Marie Professeur, Cnam (CRF) MME. CROS Françoise Professeur, Cnam (CRF) RAPPORTEURS :
M. FRETIGNE Cédric Professeur, Univ. Paris 12 MME. DELORY-MOMBERGER Christine Professeur, Univ. Paris 13 JURY :
M. BOUTINET Jean-Pierre Professeur, UCO
M. DURAND Marc Professeur, Univ. Genève
… dont les sourires n’ont jamais cessé de m’accompagner.
Je tiens avant toute chose à remercier les personnes qui sont à l’origine de ce travail : Jean- Marie Barbier, mon directeur de thèse, que le chaos n’a jamais effrayé et dont l’approche si riche de l’activité m’a durablement contaminé ; Pierre Caspar dont la bienveillance et la grande ouverture d’esprit m’ont encouragé à poursuivre la route après mon DEA et Gérard Klein qui m’a montré le chemin du CNAM et plus particulièrement celui du CRF.
Ce fut un plaisir d’intégrer ce laboratoire cosmopolite, véritable pépinière à idées qui tire sa richesse de la valeur de ses professeurs et de ses doctorants. Je tiens spécialement à remercier Etienne Bourgeois et Françoise Cros pour leur qualité d’écoute et d’échange. Et c’est avec reconnaissance que je salue l’ensemble des doctorants croisés qui m’ont apporté soutien et joie, tout particulièrement Marie-Laure, Maude, Sephora, Martha, Martine, Fabienne…
Un grand merci à Christine Delory Momberger, Cédric Frétigné, Jean-Pierre Boutinet et Marc Durand d’avoir accepté de participer à cette aventure en tant que membres du jury.
Une pensée toute particulière à la communauté des sauveteurs de montagnes qui colore ma thèse de leur extraordinaire métier, au lieutenant Patrick Poirot qui m’a ouvert les portes du CNISAG, aux stagiaires et formateurs de la session de mai 2006 ainsi qu’à l’équipe au complet du PGHM de Luchon durant l’hiver 2005 pour leur disponibilité et leur gentillesse.
Je tiens aussi à remercier chaleureusement une autre communauté, celle des professeurs d’EPS de Lakanal, qui sans hésiter m’a libéré le vendredi pendant de nombreuses années.
Je réserve une place particulière à Sylvana et Catherine, ces travailleuses de l’ombre qui ont relu et traduit mon travail avec tant d’exigence mais surtout à Bruno, mon plus grand relecteur, qui m’a montré combien les liens filiaux étaient plus importants que les convictions scientifiques.
Je salue tous les membres de ma famille et mes amis qui, d’un regard, d’un sourire, d’une oreille, ont toujours su me rassurer dans le bien-fondé de mon travail. Je remercie tout particulièrement Georges, Agnès, Béatrix qui ont mis à ma disposition des lieux de ressourcement et Patrice, l’ami de toujours, qui a ouvert la voie du doctorat.
Ma reconnaissance ne sera jamais assez forte pour compenser les sacrifices qu’ont accepté,
toujours dans la bonne humeur, ma femme Sandra et mes enfants Adelin, Alissa, Maxence et
Ambre, qui se sont jurés d’une seule et même voix, que « jamais ils ne feraient une thèse » !
L’expérience doit s’exposer pour se développer.
La notion d’exposition a ici un double sens : celui de s’exposer pendant son activité, c’est-à- dire en prenant des risques ; mais aussi en exposant, à soi ou à autrui, une expérience vécue.
C’est ainsi que l’accès au discours d’expérience des sauveteurs de montagne est devenu pour nous, par la spécificité de cette activité professionnelle, un espace dynamique, mêlant de façon permanente expérience, discours d’expérience et émotions.
Il nous a fallu, pour mener à bien notre exploration, délimiter différents temps d’expérience et d’émergence des émotions. Nous avons distingué le temps du secours, celui de l’agir du sauveteur et de l’émergence de ses émotions éprouvées, qui ouvre une nouvelle expérience vécue ; le temps du discours sur cette même expérience accompagné de l’apparition d’émotions évoquées et partagées avec le chercheur, qui ouvre une nouvelle expérience de discours ; et celui du temps écoulé entre le secours et le discours s’y rapportant.
La question était de rendre compte de l’influence du poids de l’expérience sur les discours d’expérience et réciproquement, de voir si le rappel discursif de certains événements pouvait contribuer au développement de l’expérience professionnelle du sauveteur.
Pour saisir les enjeux de constructions, nous avons récolté des entretiens auprès de sauveteurs au bagage expérientiel plus ou moins important, des néophytes au plus chevronnés. Dans chaque entretien nous avons été en mesure d’identifier des DIESS (Discours Interactifs d’Expérience Significative de Secours), un outil précieux délimitant les discours spécifiques de secours à l’intérieur des histoires de vie recueillies. Pour en saisir la dynamique nous avons simultanément lancé trois types d’analyses : une analyse de contenu, une analyse des ruptures discursives et une analyse textuelle à l’aide du logiciel ALCESTE. La complémentarité de ces trois analyses nous a permis de sélectionner à l’aveugle un nombre restreint d’énoncés et de recueillir un grand nombre d’informations utiles à leur contextualisation à l’intérieur des discours d’expérience des sauveteurs.
De ces différentes analyses nous avons dégagé deux axes de résultat. Tout d’abord, les DIESS présentent un lexique et des émotions évoquées de même nature, et ce quelle que soit l’expérience du sauveteur. Nous avons interprété cela par la nécessité pour tous les sauveteurs de s’in-corporer à une communauté pour assurer leur sécurité, face aux risques pris dans leur métier.
Le deuxième axe nous a permis de d’identifier à l’intérieur des DIESS, selon des critères de
positionnement identitaire et d’engagement émotionnel, cinq configurations discursives : du
sauveteur expérimenté a accès à l’ensemble de ces configurations. En effet, le néophyte (mais aussi le secouriste chevronné dans certains contextes : secours récent, proximité intime avec la victime…) ne sont pas en mesure de sortir de la simple rétrospection, où le sauveteur existe, corps et âme, à travers ou « par » le secours. En revanche, le sauveteur expérimenté arrive à mettre à distance son corps vécu, porteur d’émotion évoquée et partagée, « dans » ses récits de secours. Il devient alors un acteur porteur d’un «je» dans une scène dont son action passé est le centre.
Nous en avons conclu que les deux processus que nous avons repéré, l’incorporation dans une communauté et le rôle du corps vécu dans le discours d’expérience, participent à la formation et au maintien du personnage professionnel, et ce, d’autant plus rapidement que l’acteur se sera exposé physiquement et psychologiquement dans son agir (émergence de nombreuses émotions) et qu’il se sera confronté à une exposition de soi à soi et de soi à autrui.
Mots clés : Discours - Emotion - Expérience
Experience must be exposed in order to develop.
With the word 'exposed', I mean two things: during an activity, someone can expose themselves to a risk, but I also mean that an experience can be revealed, told to someone else.
Thus, listening to and analyzing the different stories given by mountain rescuers, who have a specific work activity, has become for me a dynamic space where experience, the narration of experience, and the feelings involved are closely linked.
In order to explore this new field, I have had to distinguish different phases : first, the moment of rescue when various emotions are expressed. I have distinguished the time of rescue, when the rescuers are in full action and when their emotions appear. It leads the way to a new experience of life. Second, the time when the rescuers relate their experiences and when their emotions are expressed and shared with the researcher, and, third, the time that has elapsed between the moment of the rescue and its telling.
My purpose was to try to show how the extent of experience influences the narration of experience, and to try to determine whether the fact of telling what happened can develop the rescuers' skills.
Consequently, I have gathered interviews of rescuers, either experienced or newcomers to the job. In every interview I have been able to identify several kinds of DIESS. (Discours Interactifs d'Expérience Significative de Secours: interactive narratives about significant rescue situations. ) The DIESS are a precious tool that can determine the nature of a specific speech inside a storytelling about life. In order to seize the dynamics of the various speeches, I have simultaneously used three types of analysis: 1) a content analysis, 2) an analysis of the breaks in speech and 3) a textual analysis using ALCESTE software. The complementarity of these three types of analysis allowed me to select at random a limited number of statements and to gather an extensive number of informations helping to place them in context within the rescuers' narrations.
From these different analyses, I have drawn two types of results. First, the DIESS show a pattern of words and emotions of the same kind, whatever the experience of the rescuer. I have interpreted that as the necessity for all rescuers to be integrated within a community in order to ensure their safety, faced by the risks of their job.
The second type enabled me to distinguish five specific speech configurations within the
DIESS, according to identity positioning and emotional involvement, ranging from
experienced rescuers could master these different types of speech. In fact,
inexperienced rescuers (but also experienced ones when placed in specific situations such as recent rescue experiences or close relationship with the victims) can only provide a basic narration of what happened , where the rescuers exists, body and soul, through the act of rescuing. On the other hand, experienced rescuers can place their bodies, the bearers of evoked and shared emotions, into perspective, within their accounts of rescue.
I have concluded that the two processes that I have identified, the incorporation into a community, and the role of the body in the account of experience, contribute to the formation and the preservation of the members of the rescue profession. This process works all the quicker if the rescuers have been physically and emotionally exposed during their work (when a lot of emotions have arisen) and if they have been faced with exposing both themselves to themselves and to others through the telling of the experiences they have lived.
Keywords : Discourse -Emotion - Experience
REMERCIEMENTS ... 5
RESUME ... 7
RESUME EN ANGLAIS ... 9
TABLE DES MATIERES ... 11
LISTE DES TABLEAUX ... 17
LISTE DES FIGURES ... 19
LISTE DES ANNEXES ... 21
INTRODUCTION ... 23
PREMIERE PARTIE EXPERIENCE, EMOTIONS ET DISCOURS D’EXPERIENCE SIGNIFICATIVE : CONSTRUCTION DE L’OBJET ... 29
P
REMIER CHAPITRE: L’EXPERIENCE ... 31
Section 1 : Définition générale de la notion d’expérience ... 32
1. Approche philosophique : le sensible face à l’objectivité ... 32
2. Expérience sociale indivisible de l’expérience singulière... 34
3. Erlebnis et erfahrung ... 37
4. Une première modélisation de la notion d’expérience autour de l’activité d’un sauveteur : dynamique historique plurielle ... 38
Section 2 : Produit, Processus et potentialité de l’expérience ... 44
1. De l’expérience comme produit, à l’expérience comme potentialité ... 44
2. Expérience comme processus ... 45
3. Une des fonctions de l’expérience en secours : Appréhension et mise en représentation de l’environnement . 52
Section 3 : Les temporalités de l’expérience : à travers le secours situé. ... 56
1. Temporalité et rupture ... 57
2. Un cadre construit sur la temporalité : Le cours d’action et le cours d’expérience ... 58
3. Le secours situé dans sa temporalité ... 60
D
EUXIEMEC
HAPITRE: E
XPERIENCES SIGNIFICATIVES DE SECOURS ET EMOTIONS... 71
Section 1 : Sens, Signes, Signification ... 71
1. Sens et Signes : l’intentionnalité du dire ... 72
2. Les champs notionnels de la sémantique et de la sémiotique ... 76
Section 2 : Les émotions... 77
1. Une épistémologie des émotions et ses conséquences. ... 77
2. Vers notre délimitation notionnelle et notre classification des émotions... 79
Section 3 : Les émotions comme inductrices et révélatrices d’expérience ... 94
1. Des premiers questionnements pour discriminer l’émotion de l’expérience ... 94
Section 4 : Expérience significative et temporalité des émotions : le cadre du secours ... 128
1. Vers une définition des expériences significatives ... 128
2. Un aperçu des recherches sur la temporalité des émotions ... 131
3. Temporalité des émotions éprouvées et des émotions partagées du secours ... 132
T
ROISIEME CHAPITRE: LE DISCOURS D’EXPERIENCE SIGNIFICATIVE ... 135
Section 1 : Communication, discours et récit ... 136
1. Le monde de la communication ... 136
2. Récit de vie ... 140
Section 2 : Récit de secours et discours interactifs ... 143
1. Les discours d’expériences ... 143
2. Les discours interactifs : ... 144
Q
UATRIEME CHAPITRE: UNE UNITE DU DISCOURS D’EXPERIENCE :
LE DISCOURS INTERACTIF D’
EXPERIENCE SIGNIFICATIVE DE SECOURS... 149
Section 1 : L’intentionnalité dans le contexte du discours ... 149
1. Diachronie et chronologie ... 150
2. Le sauveteur et le chercheur ... 152
Section 2 : Le langage des émotions ... 153
1. Le non-verbal et les émotions partagées : la magie de la prosodie ... 154
2. Le verbal et les émotions évoquées versus les émotions partagées ... 158
C
INQUIEME CHAPITRE: INSCRIPTION TEMPORELLE DU DISCOURS D’EXPERIENCE ET EMERGENCE DES EMOTIONS ... 161
DEUXIEME PARTIE TENIR A DISTANCE UNE APPROCHE SUBJECTIVE DE LA SUBJECTIVITE : CONDUITE DE LA RECHERCHE ... 165
P
REMIER CHAPITRE: OPTIONS EPISTEMOLOGIQUES ... 167
1. Une recherche en intelligibilité ... 167
1.1. Une distanciation vis-à-vis de la formation ... 167
1.2. Notre positionnement de chercheur ... 168
1.3. L’adoption d’une sémantique de l’intelligibilité ... 169
2. L’historicité du sujet apprenant ... 170
3. Une vision holiste de la construction de l’expérience de l’individu ... 171
4. L’étude du discours d’expérience : un appel à la transdisciplinarité et à la prudence ... 173
4.1. Un cadre de pensée : les théories du chaos ... 173
4.2. Des théories du chaos vers une nouvelle culture de recherche transdisciplinaire ... 175
4.3. Le statut épistémologique du discours vis-à-vis de l’action de référence ... 175
D
EUXIEME CHAPITRE: CHOIX DU TERRAIN ET DE RECUEIL DES DONNEES ... 177
1. Comment approcher l’activité du sauveteur en montagne ... 177
2. Vers la recherche de l’activité discursive d’un sauveteur... 178
T
ROISIEME CHAPITRE: CIRCONSCRIPTION DES OBJETS ET RAPPORT AUX OUTILS ... 187
1. Construction de l’objet de recherche et hypothèses ... 187
2. Délimitation de notre outil : Les discours interactifs d’expérience significative de secours (DIESS) ... 189
2.1. Une définition opérationnelle des DIESS ... 189
2.2. Une pluralité de Discours d’expérience chez les sauveteurs ? ... 190
3. Un découpage a priori des discours d’expériences ... 192
3.1. Le contenu des DIESS : « ce qui est donné à savoir » ... 193
3.2. La structure des DIESS : « ce qui est donné à voir » ... 195
3.3. La prosodie des DIESS : « ce qui est donné à partager » ... 197
Q
UATRIEME CHAPITRE: OPTIONS DE TRAITEMENT ET D’ANALYSE DES DONNEES ... 199
Section 1 : Une intention, s’émanciper de la subjectivité du chercheur... 200
1. Choix à l’aveugle de nos énoncés de référence ... 200
2. Le couplage méthodologique : analyse de données textuelles et analyse des ruptures discursives ... 204
Section 2 : Analyse de contenu et discours sur les émotions ... 205
1. Les données issues de l’analyse des DIESS ... 206
2. Reconstruire la quiddité de chaque DIESS ... 207
Section 3 : Un modèle personnel d’analyse des ruptures discursives : à la recherche des émotions dans le discours ... 208
1. Codage de la diachronie et des ruptures prosodiques ... 209
2. Opérationnalisation de notre analyse des ruptures discursives ... 214
Section 4 : ALCESTE, utilisation et limite pour analyser les DIESS ... 218
1. L’origine théorique d’ALCESTE ... 218
2. Les grands principes de fonctionnements du logiciel ALCESTE ... 219
3. Les limites et les avantages de l’utilisation d’ALCESTE ... 219
4. Notre corpus et le logiciel ALCESTE ... 221
5. Les différents plans et leurs rapports ... 223
6. Nos modalités de sélection des plans d’analyse et des UCE les plus significatifs ... 226
Section 5 : Principes méthodologiques régissant le couplage de l’analyse des ruptures discursives et du logiciel ALCESTE ... 231
1. Notre mécanique de croisement pour définir les énoncés de référence ... 232
2. La vérification de la pertinence de l’échantillon d’énoncés sélectionnés ... 234
3. La répartition de nos énoncé significatifs : ... 236
Section 6 : Analyse contextuelle des énoncés sélectionnés ... 243
1. Une rencontre entre nos démarches théorique et méthodologique ... 243
2. La fiche d’un énoncé : un verbatim habillé d’une pluralité d’information ... 244
3. L’analyse contextuelle comme moteur de nos résultats ... 248
TROISIEME PARTIE EXPERIENCE(S) COMMUNIQUEE(S) ET EMOTIONS INCORPOREES : RESULTATS ... 251
3. La présence de discours sur les émotions, une constante dans l’expérience communiqué des sauveteurs
... 257
3.1. Une émotion évoquée commune : la peur ... 257
3.2. Les émotions différées évoquées : étude de leur valence ... 258
3.3. Pluralité et valence des émotions évoquées au sein d’un même discours d’expérience ... 259
4. Observation de convergences et de divergences selon le poids d’expérience des sauveteurs... 263
5. Des étonnements en guise de conclusion ... 266
D
EUXIEME CHAPITRE: LE POIDS DE L’EXPERIENCE ELABOREE DANS L’EXPERIENCE COMMUNIQUEE ... 267
Section 1 : Présence de ruptures dans les dires et poids d’expérience... 267
Section 2 : Enjeu de positionnement et discours d’expérience ... 271
1. S’affirmer par le secours ... 272
2. Se justifier par le secours ... 275
3. S’opposer par le secours ... 278
4. S’installer dans le secours ... 280
5. Se réinvestir dans le secours... 282
6. Un accès limité aux discours d’expérience selon le poids d’expérience : la polyphonie limitative ... 285
7. Le rappel émotionnel comme animateur des changements de positionnements dans les discours d’expérience ... 288
Section 3 : Les formes d’engagement émotionnel dans le dire ... 291
1. Dire sur le plaisir ... 292
2. Etre submergé par le dire ... 293
3. Partager le dire ... 294
4. Partager sans dire ... 295
5. Le plaisir dans le dire ... 296
6. Des émotions évoquées et partagées aux émotions incorporées dans le discours d’expérience des sauveteurs ... 297
T
ROISIEME CHAPITRE: FORME ET TEMPORALITE DU DISCOURS D’EXPERIENCE S
YNTHESE DES RESULTATS... 299
1. Le temps d’un discours d’une expérience vécue ... 299
2. Le temps d’élaboration d’expérience d’un discours d’une expérience vécue ... 301
3. Le temps des discours d’expérience tout au long de la vie ... 302
QUATRIEME PARTIE DISCOURS D’EXPERIENCE ET EXPERIENCE : DISCUSSION GENERALE ... 305
P
REMIER CHAPITRE: IN-CORPORATION ET RECITS ... 309
1. In-corporer une communauté à risque ... 309
1.1. La communauté : un espace d’écoute des émotions ... 310
1.2. La communauté : un espace de protection de l’intégrité physique ... 311
1.3. L’appel au discours dans le processus d’in-corporation ... 311
2. Temporalité d’incorporation des émotions dans les discours d’expérience ... 312
2.1. Une distanciation progressive vis-à-vis des émotions éprouvées ... 313
D
EUXIEME CHAPITRE: CONFIGURATIONS DE DISCOURS ET EXPERIENCE ... 319
1. Les configurations de discours : révélation d’une polyphonie ... 319
2. Les configurations de discours : un accès limité ... 320
2.1. Les possibles offerts aux sauveteurs selon leur poids d’expérience ... 320
2.2. Les effets du contexte sur l’accès aux configurations de discours... 322
T
ROISIEME CHAPITRE: EXPOSITION DE SOI ET DEVELOPPEMENT DE L'EXPERIENCE ... 327
1. S’exposer dans l’agir : un appel au risque ... 328
1.1. Un prérequis : Le maintien d’un investissement sans faille, le plaisir dans l’agir ... 329
1.2. Des conséquences : Des traces et des images vives ... 330
2. S’exposer dans le dire : un appel au « je » ... 331
2.1. Le désir d’exposer ... 331
2.2. Le développement d’un personnage professionnel ... 332
CONCLUSION ... 335
BIBLIOGRAPHIE ... 341
RESUME ... 360
RESUME EN ANGLAIS ... 360
Première partie : EXPERIENCES, EMOTIONS ET DISCOURS D’EXPERIENCE SIGNIFICATIVE la construction de l’objet
T
ABLEAU1- 1 : S
YNTHESE DES CHAMPS NOTIONNELS DE LA SEMANTIQUE ET DE LA SEMIOTIQUE... 76
T
ABLEAU1- 2 : L
ES DIFFERENTES PROPOSITIONS DE CLASSIFICATIONS DES EMOTIONS FONDAMENTALES... 91
T
ABLEAU1- 3 : L
ESM
ONDES DISCURSIFS CONCEPTUALISES PARJ.P. B
RONCKART... 147
T
ABLEAU1- 4 : V
ARIATIONS DE LA VOIX PAR EMOTION SELONM
URRAY ETA
MOTT... 157
Deuxième partie : TENIR A DISTANCE UNE APPROCHE SUBJECTIVE DE LA SUBJECTIVITE Conduite de la recherche
T
ABLEAU2- 1 : C
ATEGORISATION DES SAUVETEURS EN FONCTION DE LEUR POIDS D’
ERFAHRUNG... 183
T
ABLEAU2- 2 : P
REMIERES DONNEES QUANTITATIVES DU CORPUS APRES LA RETRANSCRIPTION DES ENTRETIENS... 185
T
ABLEAU2- 3 : A
CRONYMES DESDIESS ... 192
T
ABLEAU2- 4 : T
ABLEAU D’
ANALYSE ET CODAGE DESDIESS ... 206
T
ABLEAU2- 5 : R
ECAPITULATIF DES CODAGES DIACHRONIQUES... 211
T
ABLEAU2- 6 : E
XEMPLE DE TRAITEMENT PROSODIQUE D’
UN PARAGRAPHE... 212
T
ABLEAU2- 7 : L
ES DIFFERENTS MARQUEURS PROSODIQUES ET ANNEXES... 213
T
ABLEAU2- 8 : F
ICHE DE SYNTHESE DU RECIT DE VIE DU SAUVETEURGOM ... 215
T
ABLEAU2- 9 : L
ES13
PLANS D’
ANALYSE REALISES(
EN GRIS CEUX QUI ONT ETE SELECTIONNES PAR LA SUITE)... 225
T
ABLEAU2- 10 : L
ES INFORMATIONS ASSOCIEES AUX QUATRE PLANS D’
ANALYSE SELECTIONNES... 227
T
ABLEAU2- 11 : L
ES INFORMATIONS RELATIVES A CHAQUE CLASSE... 228
T
ABLEAU2- 12 : E
XEMPLE D’
UNUCE
AVEC UN FORTC
HI2
SELECTIONNE PARALCESTE ... 229
T
ABLEAU2- 13 : S
YNTHESE SUR LA SELECTION DESUCE
EN FONCTION DE LEURC
HI2 ... 231
T
ABLEAU2- 14 : R
EPRESENTATIVITE DES DIFFERENTS CODAGES APRES CROISEMENT... 234
T
ABLEAU2- 15 : L
ES TROIS PREMIERS ENSEMBLES D’
ENONCES EN FONCTION DES DOUBLONSALCESTE ... 238
T
ABLEAU2- 16 : L
ES4
ENSEMBLES A PARTIR DES DOUBLONS CROISEMENT... 239
T
ABLEAU2- 17 : L
ES4
ENSEMBLES A PARTIR DES MOTS CLES ET LE MODE DE NARRATION DES CLASSES D’ALCESTE ... 240
T
ABLEAU2- 18 : R
EPARTITION DES ENONCES DANS PLUSIEURS NIVEAUX DE DISCOURS... 242
T
ABLEAU2- 19 : L
E TABLEAU RECAPITULATIF D'
UN ENONCE LORS DE L’
ANALYSE CONTEXTUELLE... 245
Troisième partie : EXPERIENCE(S) COMMUNIQUEE(S) ET EMOTIONS INCORPOREES Les résultats
T
ABLEAU3- 1 : N
OMBRE DEDIESS
PAR NIVEAU D’
EXPERIENCE... 253
T
ABLEAU3- 2 : S
YNTHESE DU TRAITEMENT D'
UN DISCOURS D'
EXPERIENCE(SAT) ... 254
T
ABLEAU3- 3 : C
ARACTERISATION DES TRAITS SAILLANTS DES DISCOURS D’
EXPERIENCE DE SECOURS... 256
T
ABLEAU3- 4 : S
YNTHESE DES EMOTIONS EVOQUEES... 257
T
ABLEAU3- 5 : V
ALENCE DES EMOTIONS DIFFEREES EVOQUEES... 258
T
ABLEAU3- 6 : S
YNTHESE DU TRAITEMENT D'
UN DISCOURS D'
EXPERIENCE(CAS) ... 260
T
ABLEAU3- 9 : C
ONVERGENCE ET DIVERGENCE DANS L’
EXPERIENCE COMMUNIQUEE SELON LE POIDS D’
EXPERIENCE... 264
T
ABLEAU3- 10: S
YNTHESE DE NOS ETONNEMENTS A L’
ISSUE DE NOS ANALYSES DES DISCOURS SUR LES EMOTIONS... 266
T
ABLEAU3- 11 : P
ROPORTION DE RUPTURES PAR MINUTE ENTRE LES DIFFERENTS GROUPES DE POIDS D’
ERFAHRUNG... 269
T
ABLEAU3- 12 : R
EPRESENTATIVITE DES NATURES DE DISCOURS EN FONCTION DU POIDS D’
ERFAHRUNG DES SAUVETEURS... 270
T
ABLEAU3- 13 : S
YNTHESE DE L’
ANALYSE CONTEXTUELLE DES ENONCES DUN
IVEAU1
DE DISCOURS... 274
T
ABLEAU3- 14 : L’
ENONCE DE TRANSITION ENTRE LEN
IVEAU1
ET LEN
IVEAU2
DE DISCOURS... 275
T
ABLEAU3- 15 : C
ARACTERISTIQUES TYPIQUES DU NIVEAU2
DE DISCOURS... 276
T
ABLEAU3- 16 : L
ES ENONCES DE TRANSITION ENTRE LEN
IVEAU2
ET LEN
IVEAU3
DE DISCOURS... 278
T
ABLEAU3- 17 : C
ARACTERISTIQUES TYPIQUES DU NIVEAU3
DE DISCOURS... 278
T
ABLEAU3- 18 : L’
ENONCE DE TRANSITION ENTRE LEN
IVEAU3
ET LEN
IVEAU4
DE DISCOURS... 280
T
ABLEAU3- 19 : C
ARACTERISTIQUES TYPIQUES DU NIVEAU4
DE DISCOURS... 280
T
ABLEAU3- 20 : L’
ENONCE DE TRANSITION ENTRE LEN
IVEAU4
ET LEN
IVEAU5
DE DISCOURS... 282
T
ABLEAU3- 21 : C
ARACTERISTIQUES TYPIQUES DU NIVEAU5
DE DISCOURS... 283
T
ABLEAU3- 22 : S
YNTHESE DES CARACTERISTIQUES TYPIQUES DES5
NIVEAUX DE DISCOURS... 286
T
ABLEAU3- 23 : A
NALYSE D'
UNE SUCCESSION DE DOUBLONS ETRANGES... 289
T
ABLEAU3- 24 : L
ES ASSOCIATIONS ENTRE EMOTIONS DANS LEN
IVEAU1 ... 292
T
ABLEAU3- 25 : L
ES ASSOCIATIONS ENTRE EMOTIONS DANS LEN
IVEAU2 ... 293
T
ABLEAU3- 26 : L
ES ASSOCIATIONS ENTRE EMOTIONS DANS LEN
IVEAU3 ... 294
T
ABLEAU3- 27 : L
ES ASSOCIATIONS ENTRE EMOTIONS DANS LEN
IVEAU4 ... 295
T
ABLEAU3- 28 : L
ES ASSOCIATIONS ENTRE EMOTIONS DANS LEN
IVEAU5 ... 296
Première partie : EXPERIENCES, EMOTIONS ET DISCOURS D’EXPERIENCE SIGNIFICATIVE la construction de l’objet
F
IGURE1- 1 : M
ODELISATION DE L’
EXPERIENCE: L’
EXEMPLE DE L’
ENCHEVETREMENT DES SPHERES D’
ERFAHRUNG D’
UN SAUVETEUR42
F
IGURE1- 2 L
E ROLE DE L’
EXPERIENCE DANS LA PERCEPTION DE L’
ENVIRONNEMENT PAR UN INDIVIDU... 54
F
IGURE1- 3 : L
ES TEMPORALITES DE L’
EXPERIENCE DE SECOURS... 61
F
IGURE1- 4: L’
ARBRE HOMEOSTATIQUE DED
AMASIO(2003) ... 99
F
IGURE1- 5 : D
YNAMIQUE D’
UN EPISODE EMOTIONNEL... 101
F
IGURE1- 6 : E
PISODE EMOTIONNEL ET MEMOIRE... 104
F
IGURE1- 7 : L
ES DIFFERENTES MEMOIRES... 106
F
IGURE1- 8 : E
XPERIENCES
IGNIFICATIVE DES
ECOURS, DIESS
ET EMOTIONS... 162
Deuxième partie : TENIR A DISTANCE UNE APPROCHE SUBJECTIVE DE LA SUBJECTIVITE Conduite de la recherche
F
IGURE2- 1 : L
A LOGIQUE DE L’
ENTONNOIR DE NOS DONNEES... 204
Les annexes sont présentées dans un livret à part, elles sont organisées par ordre d’apparition dans la thèse, chaque annexe étant indépendante. Une table des matières, présente dans le livret aide à la situer par rapport aux autres.
A
NNEXE1 : F
ICHE DE SYNTHESE PAR SAUVETEUR... 214 A
NNEXE2 : T
ABLEAUX DE SYNTHESE DE NOTRE ANALYSE DES RUPTURES DISCURSIVES... 217 A
NNEXE3 : U
N DEVELOPPEMENT SUR LES INFORMATIONS EXTRAITES DES RAPPORTS DU LOGICIELALCESTE ... 225 A
NNEXE4 : I
NTEGRALITE DU RAPPORT RESUME ET DETAILLE DU PLANV
EC1 ... 225 A
NNEXE5
ET6 : T
ABLEAUX STATISTIQUES METTANT EN PERSPECTIVE NOTRE DEMARCHE METHODOLOGIQUE CROISEE. ... 235 A
NNEXE7 : A
NALYSE CONTEXTUELLE DES ENONCES,
UN EXEMPLE PAR SAUVETEUR. ... 244 A
NNEXE8 : T
ABLEAU INTEGRAL DES ASSOCIATIONS... 260 A
NNEXE9 : T
ABLEAU INTEGRAL DES REGROUPEMENTS DES QUIDDITES AFFERENTES AUXDIESS ... 263 A
NNEXE10 : L'
EVOLUTION STATISTIQUE DES INDICATEURS DE L’
ANALYSE DES RUPTURES DISCURSIVES SELON NOS TEMPSMETHODOLOGIQUES
... 267
A
NNEXE11 : S
YNTHESE DE L'
ENSEMBLE DES RUPTURES PRESENTES DANS LES DISCOURS DES SAUVETEURS... 269
A
NNEXE12 : A
NALYSE DE TOUS LES ENONCES APPARTENANT A UN NIVEAU DE DISCOURS... 271
A
NNEXE13 : L'
ENSEMBLE DES DOUBLONS ETRANGES ET LEUR ANALYSE... 288
Le don de soi, c’est ainsi qu’un sauveteur de montagne (LAV) décrit le fondement de sa vocation professionnelle. Donner de sa personne n’est pas neutre, surtout lorsqu’il s’agit de mettre en jeu sa propre intégrité physique au service des autres. Il faut donc à cela un pendant, et c’est tout naturellement que l’ensemble des sauveteurs interrogés parle du plaisir que procure l’acte même de sauver son prochain. Au-delà de cela, c’est la confrontation d’un champ d’activité, le secours, avec un espace d’activité, la montagne, qui les amènent à nous parler d’un métier passion. En définitive, il s’agit d’une activité où le nœud de l’engagement se situe dans la passion du risque. Cette notion est étudiée dans de nombreux champs, essentiellement celui des activités sportives dites à risque dont celles de montagne fait partie.
Or, à la différence de ces pratiques de loisirs, le secours en montagne est une activité professionnelle où l’on ne parle pas de session mais bien de mission. Une mission dont les sauveteurs sont investis et qui tend vers une obligation de résultat.
Etre un sauveteur en montagne est un métier particulièrement gratifiant mais qui est soumis à de fortes contraintes, c’est un choix professionnel, mais également un choix de vie (…) tel est le message transmis aux « apprentis sauveteurs » au début et tout au long de leur formation.
Cette mise au point d’un commandant chargé de la formation des secouristes nous amène à nous intéresser à ladite formation. Quels sont les moyens, les aménagements mis en place pour donner aux jeunes sauveteurs les « armes » techniques et psychologiques indispensables à l’exercice de leur métier ? Qu’est ce qui permet aux secouristes expérimentés de maintenir leur engagement dans ce métier si particulier entre risque et danger, entre peur et plaisir ? Pour tenter de répondre à ces premiers questionnements, décrivons brièvement la formation des gendarmes sauveteurs de montagne que nous avons interrogés en 2005, au CNISAG (Centre National d’Instruction de Ski et d’Alpinisme de la Gendarmerie) situé à Chamonix, et au sein d’un PGHM (Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne), celui de Luchon dans les Pyrénées.
Elle s’inscrivait dans un double parcours. Le premier concerne la construction de l’expérience
d’alpiniste. Elle peut avoir commencé dès leur premier âge, mais elle est encadrée à partir du
moment où un gendarme en fonction en exprime l’envie. Il devra effectuer pas moins de
quatre stages en conditions hivernales et estivales, en un minimum de deux ans, pour acquérir
des bases suffisantes et avoir accès au test d’entrée de sauveteur de montagne (qui porte
uniquement sur des techniques d’alpinisme). Si le test est réussi, l’apprenti sauveteur se verra
proposer immédiatement le deuxième parcours de formation, qui commence avec un stage
d’un mois spécifique au secours en montagne (membre de caravane été) avant d’être affecté dans un peloton pour y exercer son nouveau métier. Dès lors, la construction d’expérience du sauveteur de montagne se poursuivra en alternance entre des stages spécifiques au secours en montagne (membre de caravane hiver et chef de caravane été et hiver), formation sur le terrain (dans les pelotons) et préparation à certains diplômes et test de montagne (aspirant guide, guide et un test de renouvellement tous les cinq ans).
Cette présentation du métier de sauveteur de montagne n’est pas anodine, au-delà de son aspect informatif, elle initie la démarche inductive que nous avons mené tout au long de ce travail de recherche. Nous sommes parti d’une activité professionnelle qui présentait pour nous un double attrait, celui de la montagne dont nous sommes un amateur passionné et celui d’un champ professionnel complexe (prise de décision collective et individuelle dans un milieu incertain).
Nous avions l’intuition que ce métier pouvait être une voie d’accès privilégiée vers la compréhension des processus d’apprentissage et de développement de l’expérience ; nous pensions que l’étude de l’activité des sauveteurs de montagne serait une sorte de laboratoire grossissant, par ses spécificités énoncées, des processus facilitateurs de l’apprentissage, potentiellement inhérents à d’autres domaines.
Les modalités de la formation des sauveteurs de montagne ont déclenché notre premier étonnement : comment se fait-il qu’une durée de deux ans minimum soit nécessaire pour obtenir le niveau requis en techniques d’alpinisme, alors que quatre semaines suffisent pour incorporer un peloton en tant que sauveteur de montagne ? Nous faisons l’hypothèse que dans la formation des sauveteurs de montagne, lors du premier stage de quatre semaines et sur le terrain, il y aurait des conditions qui ancreraient plus rapidement les techniques utiles au secours. Le fait d’agir au sein d’une communauté en direction de victimes vient à l’esprit.
Beaucoup de recherches, dans le milieu hospitalier par exemple, ont montré que cet agir était porteur d’émotions intenses et nombreuses.
« S’exprime avec force la représentation d’une affectivité parasite, avec la conviction que les sentiments
ne relèvent pas de l’ordre de la connaissance et qu’ils ont donc à être éliminés. Ils n’ont rien à faire dans
cet espace balisé de l’action professionnelle où devraient régner la rationalité, la compétence, et donc
essentiellement la cognition ». (Cifali Bega, 2009, p.74).
Notre recherche tentera de prendre le contre-pied de cette représentation : les émotions peuvent être une ressource pour l’action mais surtout un accélérateur dans le développement de l’expérience professionnelle du sauveteur.
Un accès limité à l’activité des sauveteurs de montagne nous a conduit au seul recueil d’entretiens uniques assimilés à des histoires de vie : plusieurs chercheurs (Pineau, Dominicé, Bertaux) les ont identifiées comme révélatrices de la construction d’un individu et comme des espaces de formation à part entière.
Ainsi « de fil en aiguille » s’est construit l’objet de notre recherche : comprendre les processus de construction des discours d’expérience, vus comme des espaces où s’expriment la réciprocité entre l’expérience du sauveteur et les émotions qu’il éprouve ou qu’il évoque.
Dans ce but, nous avons fait deux choix méthodologiques importants. Le premier choix a été de recueillir les histoires de vie de sauveteurs de montagne ayant des âges, un nombre de secours réalisés, des lieux d’affectations différents, pour comparer les discours d’expérience selon le poids d’expérience des sauveteurs. Le deuxième choix a été de tenter de mettre à distance la subjectivité inhérente à la sélection des énoncés du corpus. Pour ce faire, nous avons simultanément lancé et croisé trois types d’analyses : une analyse de contenu, une analyse des ruptures discursives et une analyse textuelle à l’aide du logiciel ALCESTE.
Pour conclure cette introduction nous vous proposons plusieurs guides de lecture pour varier les expériences d’appréhension de cette thèse :
En 1 minute, la plus rapide, le résumé page 6, la première ou la dernière des lectures à faire ?
En 10 minutes, une mise en bouche, voir le petit parcours ci-dessous…, la lecture qui permet d’aller à l’essentiel !
En 1 heure, un grand choix d’entrée, voir ci-dessous, peut-être la lecture qui donnera envie de tout lire ensuite ?
En mode aléatoire, la plus ludique, ouvrir une page au hasard et cela dix fois (en laissant reposer entre chaque), arrêter la lecture à partir du moment où l’on comprend ce que le chercheur développe. Surement la lecture la plus risquée mais que nous conseillons vivement de réaliser en premier !
En mode classique, la plus fastidieuse, la lecture intégrale de la thèse de cette page à la
dernière page de la conclusion, celle qui ne sera peut-être jamais faite ?
La lecture en 10 minutes est plutôt conçue dans le sens de lecture de la thèse, mais il ne s’agit pas de lire automatiquement l’intégralité des pages :
- Page 62 ; Fin 119-120 ; Milieu à fin 133 ;143-144 ; Fin 147-148 ; 156 - Fin 181-182 ; 188, 200 ; 204 ; 244
- 266 ; Début 288 ; Fin 290 ; Fin 297-299
- 306-307 ; 325-326 ; 331 ; 333 ; Bonus/Conclusion.
La lecture en 60 minutes est moins classique, elle peut s’effectuer dans l’ordre que l’on veut, le but n’étant pas de tout lire en une heure, mais plutôt de s’arrêter au bout du temps imparti en ayant pioché dans chacun de ces alinéas.
- Page 61-63 ; 114-116 ; Fin 119-125 ; Fin 132-134 ; 143-mi 144 ; 147-148 ; 152 ; mi154-159.
- 170-171 ; 180-183 ; 188-mi 192 ; 200-204 ; 214-215 ; 244 - 257-258 ; 261-262 ; 266 ; 272-287 ; Fin 290 ; 292-303
- 311-mi 312 ; 321 ; Fin 324-326 ; 330-333 ; Bonus/Conclusion
Bonne lecture…
Première partie
EXPERIENCE, EMOTIONS ET DISCOURS D’EXPERIENCE SIGNIFICATIVE :
Construction de l’objet
Premier chapitre : L’EXPERIENCE
«
T’es rarement surpris et plus tu es entraîné et plus… Moins tu seras surpris, et moins t’auras de problème au niveau euh… de la gestion du stress... Donc si… Si déjà tu commences à gérer ton stress…Tu peux pas aller faire du secours pour sauver quelqu'un d'autre… si t’es pas… Pas stable dans ta, dans ta tête et au niveau physique quoi… parce que…(silence) au niveau musculaire, si on a un défaut musculaire, ben la tête ne suit plus et vice versa quoi… donc… euh… C'est notre fond d'entraînement, c'est notre expérience qui nous crée… Nous crée une certaine sagesse par rapport à… l'événement ».