FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1897-1898 N» 103
CONTRIBUTION
L'ÉTUDE ANATOMO-PATHOLOGIQUE
DE
THÈSE POUR
LEDOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue publiquement le 22 juillet 1898
PAR
Pierre-Henri
BANQUET
Préparateur adjoint d'Anatomiepathologique à laFacultédemédecine
de Bordeaux
Né à La Réole (Gironde) le 8 mars 1875
/MM. COYNE, professeur Président.
Examinateurs de la Thèse:
j
f ™^LJ' Professeur■•j
.CASSAET, agrégé \ Juges.
"> AUCHÉ,chargé decours.'
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses
parties de l'Enseignementmédical.
BORDEAUX
G. GOUNOUILHOU, IMPRIMEUR DE LA
FACULTÉ
DEMÉDECINE
Xi, RUE GUIRAUDE. 11 1898
FACULTÉ DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
M. de NABIAS Doyen. | M. PITRES Doyen honoraire.
PROFESSEURS: MM. MIGE . . .
AZAM. . . DUPUY. . .
MOUSSOUS
Professeurs honoraires.
Clinique interne . . .
Clinique externe. . .
Pathologie etthérapeu¬
tiquegénérales. . . Thérapeutique. . . .
Médecineopératoire . Clinique d'accouchements.
Aaatomiepathologique. .
Anatomie
Anatomie générale et histologie
Physiologie Hygiène
MM.
PICOT.
PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
YERGELY.
ARNOZAN.
MASSE.
N...
COYNE.
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VIAULT.
JOLYET.
LAYET.
Médecinelégale . . .
Physique Chimie
Histoire naturelle . .
Pharmacie
Matière médicale. . .
Médecine expérimentale .
Clinique ophtalmologique.
Clinique desmaladies chi¬
rurgicalesdes enfants .
Cliniquegynécologique Clinique médicale des
maladiesdes enfants Chimie biologique . .
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deNABIAS.
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AGRÉGÉS EN EXERCICE:
section de médecine(Pathologie interneetMédecinelégale.)
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section des sciencesanatomiques et physiologiques
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Clinique des maladies cutanées et syphilitiques MM. DUBREUILH.
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Maladies dularynx, des oreilles etdunez MOURE.
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Physiologie PACHON.
Embryologie CANNIEU.
Pathologie oculaire LAGRANGE.
Hydrologieetminéralogie N...
Le Secrétaire de la Faculté: LEMAIRE.
Par délibération du 5 aôùt 1879, la Faculté a arrêté que les opinions émises dans les Thèses qui lui sontprésentées doivent être considérées commepropres à leursauteurs, et qu'ellen'entend leurdonner niapprobation ni improbation.
À TOUS CEUX
QUI ME SONT CHERS
A MON PRÉSIDENT DE THÈSE
M. LE DOCTEUR COYNE
MÉDECIN DE L'INSTITUTION DES SOURDES-MUETTES DE BORDEAUX PROFESSEUR D'ANATOMIE PATHOLOGIQUE A LA FACULTÉ DE MÉDECINE
DE BORDEAUX
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
A M. LE DOCTEUR B.
AUCHÉ
PROFESSEUR AGRÉGÉ
A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE BORDEAUX MÉDECIN DES HOPITAUX
CHEF DES TRAVAUX D'ANATOMIE PATHOLOGIQUE A LA FACULTÉ
i
AYANT-PROPOS
Ce n'est pas pour suivre la tradition des thèses trop courtes
et souvent grossies par une préface volumineuse que nous
mettons un avant-propos à notre travail inaugural; c'est pour
remplir un devoir, donner un juste
témoignage de reconnais¬
sance à toux ceux qui, de près ou de loin, ont
bien voulu
s'intéresser ànous dans lecours de nos études médicales.
Nous avons trop apprécié les qualités
scientifiques
et lecœur de nos maîtres de la Faculté et des Hôpitaux pour ne
point les remercier
aujourd'hui des leçons
etdes exemples
qu'ils nous ont donnés, et,si
noustâchons dans l'avenir de
ne point oublier ce qu'ils nous ont
appris,
nous sommessûr
de toujours noussouvenir de la
bonté qu'ils
ont eue pournous.Qu'il nous soit permis de remercier tout
particulièrement
notre maître M. le professeur Covne de sa
paternelle bien¬
veillance.
En nous nommant préparateur attaché à son laboratoire,
il nous a permis d'apprécier à toute sa
valeur,
nonseulement
son enseignement, mais encore son
indulgente cordialité.
En acceptant aujourd'hui la
présidence de
notrethèse inau¬
gurale, il nous donne une
nouvelle
preuved'estime
etd'affec¬
tion à laquelle nous ne saurions êtretrop
sensible.
Que M. le professeur agrégé
Auché veuille bien
accepternos remerciements sincères. Seul, nous savons ce que nous lui devons. Nipar des paroles ni dans des
préfaces,
nous nele
remercierons de l'intérêt et de l'amitié qu'ilnous a témoignés.
C'est à lui que nous devons le sujet
de
notrethèse, et si
nous avons un regret, c'est que le temps et
les circonstances
ne nous aient pas permis d'en faire une œuvre
digne du
maître qui l'a inspirée.
1
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CONTRIBUTION
A
L'ÉTUDE
ANATOMO-PATHOLOGIQUEDE
CHAPITRE PREMIER
Danscesdernierstemps,denombreux auteurssesont
occupés
de latuberculose des organes. Le cœur des
bacillaires et
sonendocarde en particulier ontdonné lieu
à de multiples obser¬
vations. C'estainsi qu'on a voulu voir dans
beaucoup de végé¬
tations intra-cardiaques, dans de nombreuses
endocardites, la
trace de processus infectieux
généralisés.
Notre intention n'est pas de nous occuper
des lésions qui
pourraient être rattachées àdes
processusautres
quecelui
du bacille de Koch.
Nous voulons uniquement étudier les
endocardites
essen¬tiellement tuberculeuses, lésions dans
lesquelles la présence
du bacille de Koch sera pour nous le
critérium.
Pour procéder à cette élimination, ce
qui constitue le
pre¬mier travail d'ensemble français fait sur cette question, nous
nous sommesbasé surles réactions histochimiques du
bacille
et les inoculations aseptiques.
Nous ferons cependantuneréserve :
l'inoculation telle qu'on
la pratique couramment est
parfois défectueuse
; on sesert du
même instrument pour ouvrir le
cadavre
et pourouvrir les
organes.
— 10 —
C'est là une cause d'erreur, le germe spécifique pouvant être transporté et semé parl'instrument.
En outre, il est à remarquer que les lésions de l'endo¬
carde sont des lésions toutes en surface, offrant ainsi un
champ d'autant plus vaste à l'infection que, le plus sou¬
vent, on a négligé de lier les gros vaisseaux avant d'extirper l'organe.
Chose assez inexplicable, aucun auteur n'a décrit sa façon
de procéder. Cette omission, volontaire ou non, est pour nous
capitale; c'est souvent d'après ces points de détail, très impor¬
tants à notre avis, que nous classerons les observations citées
dans cette thèse.
Dans une première catégorie, nous rangerons les cas bien observés, complètement décrits.
Nous ne parlerions pas dans ce travail des faits rédigés
d'une façon superficielle et ne donnant que des détails peu
précis et souvent très incomplets, mais, bon nombre d'auteurs
les ayant cités comme spécifiques, nous sommes obligé de
les discuter.
En résumé, ne seront pour nous endocardites tuberculeuses
que celles où l'examen histologique aura démontré la présence
du bacille de Koch, présence contrôlée quand cela aura été possiblepar l'inoculation ou réciproquement.
Quant aux différentes hypothèses justifiées ou justifiables, grâce auxquelles on a voulu expliquer la marche et la propa¬
gation du bacille de Koch d'un organe à l'autre, elles sont actuellement classiques; on les trouve dans tous les manuels;
nous n'en parlerons pas, jugeant inutile de nous attarder à
discuter des faits que tout le monde n'admet pas.
Nous divisons notre travail en deux parties :
La première contient les observations que nous considérons
comme tout à fait probantes.
La deuxième n'est que la discussion des observations qui
ne prouvent nullement, à notre avis, la nature spécifique des
faits qu'elles relatent.
Cette courte discussion sera suivie des observations de la
— 11 —
seconde série, et nous pensons terminer cette thèse par
l'exposé de nos conclusions.
En dernier lieu, nous donnons une planche dont on trou¬
veral'explication dans le texte de l'observation de MM. Auché
et Ghambrelent.
PREMIER GROUPE D'OBSERVATIONS
Observation I.
G. Lyon(1892).
Endocardite tuberculeuse développée à Voccasion d'une poussée
de tuberculoseaiguë.
Sur la grande valvede la mitrale on trouve unevégétation pédiculée
de la grosseur d'un grain de chènevis. Constituée par un tissu sans structure apparente, se colorant en rouge pâle par le picro-carmin et
par une couche superficielle formée de cellules à noyaux volumineux,
accumulés par places sous forme de petits amas semblant, provenir de
l'endocarde soulevé. L'examen d'une grande quantité de coupes a per¬
mis de trouver quatre ou cinq bacilles siégeant sur les amas cellu¬
laires de la surface.
Observation II.
Leyden (Deutschemed. Wochens1896).
Leyden a observé cinq fois, ou mieuxquatre fois, l'endocardite tuber¬
culeuse, car, dans uncas, il y avait du streptocoque associé. Lesbacilles siègentnon point àla surface,mais dans les couchesprofondesfibrineu-
ses et dans le tissu même de la valvule. Trèspeu de bacillessetrouvent
à l'état libre, la plupart étaient enfermés dans des cellules et, le plus
souvent,quatre ousix dans lamêmecellule. Quelquefois lacelluleparaît
comme bourrée de bacilles et aucune trace de réaction inflammatoire n'apparaît autour de ces cellules. Il semble donc que ces bacilles ont
trouvé dans le corps mêmede la cellule un terrain favorable danslequel
ils se sontdéveloppés.
— 12 —
Observation III.
Tiry (Presse méd., 1897).
Charles Tiry, à la réunion biologique de Nancy, présente la coupe
microscopique d'une petite végétation trouvée dans le cœur droit d'un enfant decinqmois. Il s'agit d'une petite masse fibreuse, grosse comme une tète d'épingle, arrondie, jaunâtre, adhérente à l'endocarde de la face postérieure du ventricule, développée entre l'endocarde et le myo¬
carde. Lecentre de cettevégétation est nettement caséeux. Le bacille de Koch a pu être décelé sur des coupes de cette endocardite. Un cobaye
inoculé avec un fragment est mort tuberculeux au bout devingtjours.
Observation IV.
Benda(Société de médecineinterne de Berlin).
Endocardite tuberculeuse.
L'auteur montre une préparation microscopique dans laquelle on voit
une lésion tuberculeuseavecbacilles dans l'endocarde et non pas seule¬
mentdes bacilles englobésdans de la fibrine.
Chezun enfant atteint de coxalgie tuberculeuse et mort de granulie,
il a découvert, à l'insertion de l'un des cordages tendineux de la valvule mifrale, un nodule jaunâtre, du volume d'un grain de chènevis. Au microscope, ce nodule était constitué par des cellules rondes et épithé- lioïdes, disposéescommedans les nodules tuberculeux; il n'yexistaitpas de cellules géantes, mais on y voyait de très nombreux bacilles. Cette granulation tuberculeuse étaitcaséeuse à sa surface etulcérée, etBenda pense quece foyera été l'origine de la poussée degranulie terminale. Il
a examiné avec soin les viscères du bassin sans y trouver de lésions
osseuses et ne se rappellepasavoirexaminé le canalthoracique.
Observation V.
AccuÈetCiiambrelent(Congrès de Montpellier)*
Examen du cœur d'un enfant né avant terme d'une mère tubercu*
leuse grosse de septmois.
Macroscopiquement, le cœurne présentepas de lésions. 11 est divisé
en deux parties par une section parallèle à la cloison ventriculaire et passant à gauche de celle-ci. Une portion de la paroi ventriculaire gauche estincluse dans laparaffineet débitée en coupes. Le cœur droit
13 —
en totalité est aussi débité en coupes à direction perpendiculaire à la cloison inter-ventriculaire. Surune préparation ainsi faite, on ala cavité du ventricule droit limitée d'un côté par la paroi ventriculaire, de l'autre par la cloison cardiaque, la cavité de l'oreillette, une grande partie de la portion ascendante de l'aorte, moins son origine et une section presque perpendiculaire située dans la concavité de la crosse
aortique.
Sur le trajet des gros vaisseaux, dans la concavité de la crosse de l'aorte, se trouve sur la coupe un petit ganglion lymphatique tuber¬
culeux. Les lésions qu'il présente sont caractérisées par des amas de
cellules épitliélioïdes sans cellules géantes. La partie centrale de ces
îlots épithélioïdes est caséeuse; la partie périphérique est infiltrée de
cellules lymplioïdes. De très nombreux bacilles tuberculeux existent
dans ces lésions.
A l'extrémité inférieure du ventricule droit, entre les colonnes char¬
nues du cœur, fait saillie une petite granulation tuberculeuse irrégu¬
lièrementarrondie, d'environ 1 millimètre de diamètre. Elle estsessile.
Sa surface libre est convexe et libre. Elle est située dans une cavité close, formée par les insertions desfaisceaux musculaires des colonnes charnues, mais ellene laremplit quetrèsincomplètement,etdans toute
sa partie libre, c'est-à-dire sur les trois quarts environ de sa circonfé¬
rence, elleestentourée par un assez large espace vide.
La région superficielle est constituée par une bande de substance
caséeuse qui arrive jusqu'à la surface libre du tubercule ets'étend laté¬
ralement dans toute la partie convexe de la granulation. Elle est peu
épaisse et, profondément,elle estlimitée par une zonedecellules épithé¬
lioïdeset de cellules lymplioïdes qui dissocient les fibresmusculaires les plus voisines. A l'aide d'un fort grossissement, on constateque la zone caséeuse présente superficiellement une surface lisse et nette où l'on distingue quelquescellules endolhéliales.
L'amascaséeux estconstituépardesgranulations irrégulièresopaques, coloréesen rouge par l'éosine; pardes blocs arrondis plus volumineux, dépourvus de noyaux etprésentantdes cellules nécrosées; parquelques
tractus filamenteux opaques, parcourant le champ microscopique et
s'anastomosant entreeux; enfin,par quelquesrareslymphocytes ànoyau fortementcoloré et de nombreux débris de noyaux prenant les réactifs
nucléaires. Toutautourdel'amascaséeux,profondémentet latéralement,
existent des cellules épithélioïdes, d'abord mal limitées, à noyau peu coloré, puis de plus en plus nettes et mélangées avec ungrand nombre
de cellules lymphoïdes. Plus extérieurementon netrouve plus que des lymphocytesetdes leucocytes multinucléés, dissociant les fibres muscu¬
laires, atrophiantet détruisant mêmecelles qui sontle plus directement
en contact avec le processus tuberculeux. Sur les parties latérales du
_ 14 —
tubercule, immédiatement au-dessous des cellules endothéiiales de
l'endocarde légèrement gonflées, se trouve une nappe de plusieurs
couchesde cellules lymphoïdes, diminuant de plus en pluspour dispa¬
raître bientôt dans l'interstice des libres musculaires.
Lesbacilles de Koch sont excessivementabondants dans cette granu¬
lation. A l'aide d'un faible grossissement, on les voit sous l'aspect de
deux zonesrosesbien distinctes: une première zone lenticulaire, située
dans la portion la plus saillanle et la plus superficielle de la masse caséeuse; une deuxième zone formant une mince bande rosée, placée
tout autourde l'amascaséeux,dans la région des cellulesépithélioïdes et lymphoïdes. Les deux zones sont séparéespar une bande où le rose a disparu.
Avecun fortgrossissementet surtoutàl'aide de l'immersion de Zeiss,
onconstate que leszones roséessont le siège d'unequantitéconsidérable
de bacilles, tandis qu'ils sont rares dans la zoneblanche intermédiaire.
Profondément,ils deviennentde moins en moins abondantset dispa¬
raissent avec la zone d'infiltration lymphoïde et leucocytique. Ils sont
intra et extra-cellulaires.
On netrouved'autrestubercules ni dans le myocarde, ni surle péri¬
carde, ni dans le cœurdroit, ni dans le cœurgauche.
Tous les organes du fœtus, ainsi que le placenta, contiennent des
bacilles de Koch, mais l'intestin n'en contient pas.
CHAPITRE II
Nous venons de donner le premier groupe d'observations
absolument indiscutables quant à la nature spécifique des
lésions qu'elles décrivent. Voici maintenant la discussion sommaire d'autres observations qui, sans avoir la certitude
des premières, présentent peut-être quelque intérêt. Nous les
donnerons pource qu'elles valent, après les courtes réflexions qui vont les précéder.
Sinous nous reportons à la thèse de Weber, nous ytrouvons
l'observation de Wagner (Tubercule cle l'endocarde), parue
en 4861.
Wagner parle d'un tubercule gros comme un demi-pois, placé sur une colonne charnue et contenantune matière gris jaunâtre, accompagné de quatre tubercules miliaires. Avec
une telle description nous ne pouvons, à l'exemple de Weber,
considérer cette production comme spécifique.
Weber lui-même prend pour tuberculeux des cas où il
trouve des tubercules miliairesjaunes, quelquefois volumineux
et dont le centre est finement granuleux.
Ces tubercules, dit-il, s'accompagnent d'une prolifération conjonctive assez marquée, avec faisceaux très fins de cellules embryonnaires.
Nous ne voyons rien qui puisse affirmer ici la tuberculose
et nous dirons de même pour les trois observations publiées
en 1862 par Potain, où toute description manque totalement
et que nous considérerons comme sans valeur pour notre sujet.
.La description macroscopique de Lanceraux rappelle assez l'évolution du bacille de Ivoch dans les tissus; mais les dépôts jaunâtres, qui, incisés, présentent un petit foyer de
substance blanchâtre, et les dépôts crayeux, effervescents
— 46 —
avec l'acide acétique, rappellent aussi les
plaques calcaires
de l'endocarde.
Dans son Traité d'anatomie pathologique, Lanceraux
parle
d'un malade rhumatisant et tuberculeux dont la mitrale présente une guirlande de
végétations à la face supérieure.
L'auteur concluant plutôt à la nature
rhumatismale de
ces lésions, nous n'insisterons donc pas.Quant à l'observation de Letulle, il nous
serait difficile
d'être plus affirmatifque l'auteur,
qui
estloin d'être fixé
sur l'origine réelle des massesprobablement caséeuses de
ses végétations.Nous avons tenu à relater l'observation de Perroud, parce que beaucoup d'auteurs
semblent lui accorder
unecertaine
importance. L'auteur conclut
à
uneendocardite secondaire
à l'infection granulique et soumise à
l'intoxication sanguine.
Nous ne voyons là qu'une endocardite
végétante tout à fait
ordinaire.
Colomiati (1882) ne donne aucune
relation histologique ni
bactériologique dans son observation, et
dans
toutescelles de
Percy Kid(1887), il est simplement
question de rhumatisme
mêlé à de la tuberculose. Ces observations sont trop peu
caractéristiques pour être citées.
Examinons l'observation de Clirode. D'après Lion, l'auteur
se base sur la dépendance anatomique qui
semble exister
entre la détermination cardiaque et les lésions récentes
de
tuberculose aiguë hématogène.
L'ulcération endocardique pré¬
sente une mince couche granuleuse, avec quelques
éléments
de fibrine.
Plus profondémentestune zone
à petites cellules
secolorant
énergiquement,rappelant l'aspect
du tubercule embryonnaire,
mais sans cellules géantes.
L'examen répété ne détermine pas la présence
du bacille
;l'ensemencement ne donne aucun résultat; l'endocardite, à
notre avis, n'estpas tuberculeuse ici.
La Berliner klinischô Wochènschrift de 1886 nous apprend
que le professeur Heller a trouvé
dans l'endocardite qui
— 17 —
survient chez les tuberculeux desbacillesde Koch qu'il regarde
comme la cause de l'affection valvulaire. Mais, dit le journal,
Heller a dû mettre beaucoup de soin dans ces recherches,
parce que, dans les caillots qui surmontent les excroissances, peuvent être contenus desbacilles déposés par le sang et sans
rapport direct avec la lésion locale.
Voici, d'autre part, une communication de Heller au doc¬
teur Teissier : « Dans tous les cas de tuberculose compliquée d'endocardite, Heller note un cas où les quatre valvules
étaient atteintes. Cette endocardite était peut-être de nature tuberculeuse,car, en examinant les végétations, il a trouvé des
bacilles qu'il ne faut pas confondre avec ceux que le sang contenait. Ces bacilles sont-ils des bacilles de Koch? C'est là
un point difficile à résoudre. Macroscopiquement et microsco- piquement, les végétations ne peuvent être distinguées des végétations banales. L'auteur pose lui-même des conclusions dubitatives, ne trouve pas de caractères spécifiques à ces lésions et se demande si la caséification est plus tardive ou si
l'endocarde l'empêche, attendu qu'il ne la trouve pas dans les
tubercules de la dure-mère. »
Tripier publie, en 1890, une observation très détaillée et
d'autantplus intéressante qu'elle est suivie de considérations
dans lesquelles il conclut à l'analogie des processus de sa
végétation et des processus tuberculeux.
Contrairement à la conception de Wirchow sur le nodule tuberculeux, il n'y apoint ici de cellules dégénérées,
mais des
éléments dont la densité augmente à mesure qu'on s'éloigne
du centre de la végétation. Constitué comme
les exsudats
inflammatoires, le nodule de Tripier est forméd'un
amas albumino-fibreux coagulé post mortem etformant
unesubs¬
tance granuleuse coupée
de trabécules irrégulières.
L'auteur admet que c'est le sang et non
le tissu valvulaire
qui a fourni les cellules nodulaires
semblables
auxleucocytes
et affirme lanaturetuberculeusedeson nodule, sanss'êtretrès préoccupé derechercher des
bacilles dans les
coupes.Comme
beaucoup d'endocardites
végétantes pourraient rentrer dans
— 18 —
la catégorie des faits de
Tripier,
nous neconclurons
pasà
la nature tuberculeuse de cette endocardite.
Dans une des observations de Hanot, l'auteur parle d'un
bacille droit, dont il n'est pas
possible de déterminer les
caractères.
Plusieurs auteurs ont remarqué que les bacilles,
dans
l'observation Londe et Petit, étaient situés entre la
végéta¬
tion et un repli de l'endocarde dans des
blocs fibrineux. Ces
mêmes auteurs ont été les premiers à pratiquer des inocula¬
tions de végétations supposées
tuberculeuses. Un cobaye
aété
tuberculisé, mais il n'est nullement fait mention des chancres d'inoculation; et, les eût-on observés, le fait n'en est point plus démonstratif, ainsi qu'il ressort de notre manièred'envi¬
sager la technique actuelle des atopsies.
Les Archives de médecine expérimentale de 18J8 publient cinq observations du professeur Etienne. Nous remarquons l'insuffisance des descriptions histologiques des lésions, et s'il
est parlé de bâtonnets dans la troisième observation, l'auteur
ne détermine pas la nature de ces mêmes bâtonnets. Les
ensemencements pratiqués par l'auteur ne donnent
rien,
etles inoculations ont donné des résultats positifs; si le mode opératoire a été excellent, il n'est fait aucune mention
de la
manière dont les végétations ont été recueillies à
l'autopsie.
Au moment de terminer cette courte discussion, nous
regrettons vivement de n'avoir pu trouverque
l'analyse
som¬maire des observations de Kundrat et Fraëntzel. Bien que,
d'après Teissier, cesauteurs oientdonnéune
sanction bactério¬
logique aux lésions qu'ils ont rencontrées, il nous est
impos¬
sible d'assigner une place exacte à ces faits
dans la série
d'observations que nous reproduisons.
Nous voyons donc, en résumé, que, dans tous ces faits,
les
lésions ne sontpas démonstratives et que les bacilles tubercu¬
leux, s'ils ont été trouvés, ne siègent jamais dans le tissu
même de l'endocarde.
RESUME DES OBSERVATIONS
IIe GROUPE
Observation I.
Wagner (Archiv d. Heilkunde,1861).
Il est question d'un tubercule gros comme la moitié d'un pois, placé
sur une colonne charnue, entre l'orifice aortique et la pointe du cœur,
et contenant une matière ramollie d'un gris jaunâtre. Quatre tuber¬
cules miliaires très petitsoccupaient cemême ventricule.
Observation ii.
Lanceraux(1866).
Endocardite probable par infection secondaire.
Dépôts jaunâtres agglomérés au nombre de quatreou
six
surchacun
des prolongements de la face auriculaire
de la tricuspide. Ces dépôts,
incisés, présentent à leur centre un petit foyer
de substance liquide
blanchâtre, composée de granulations
moléculaires
etgraisseuses,
de cellules et de noyaux arrondis et granuleux.
Observation iii.
Lanceraux.
La valvule mitrale est injectée et présente des dépôts jaunâtres,
irréguliers, granulés, crayeux. Dépôts
analogues
surdeux des valves
aortiques au niveau des tubercules
d'Aranzy. Légère effervescence de
ces dépôts par l'acide acétique.
Observation IV.
Letelle(1874).
Tuberculisation généralisée chez un enfant de
cinq mois.
Granulations sur l'endocarde.
Sur l'endocarde qui tapisse le ventricule
gauche,
ontrouve deux
petites masses dures d'un jaune
verdâtre siégeant l'une au niveau de
— 20 —
la paroi inter-ventriculaire, l'autre près du sommet d'un des piliers
de la valvule mitrale. L'examen ultérieurement pratiqué de ces petits
noyaux a fait reconnaître qu'ils étaient formés de matière caséeuse
probablement tuberculeuse.
Observation V.
Perroud(1875).
Endocardite végétante. Enfant de douze ans.
Valvule mitrale garnie près de son bord libre d'une multitude de petites végétations contluentes, rosées, qui forment un liseré épais,
finement découpé et des plus élégants.
Observation VI.
IIeller(Berlin. klin. Wochens., 1886).
Dans l'endocardite qui survient chezles tuberculeux, Heller a trouvé dans les valvules des bacilles de Kocli regardés par lui comme la cause de l'affection valvulaire.
Il fautmettre beaucoup de soin àces recherches, les bacilles pouvant
être sans rapport direct avec la lésion locale s'ils sont contenus dans les caillots fibrineux qui surmontent les excroissances.
Observation VII.
Girode (Thèse Lion, 1889).
Pneumonie du sommet. Endocardite infectieuse.
L'endocarde est trèsaltéré; toutle bord librede la tricuspide du côté auriculaire est occupé par des ulcérationsà pic et des ulcérations en chou-fleur. Quelques-unes semblent naître du fond d'une ulcération
bourgeonnante ou sont enchâssées à leur base par un bourrelet de muqueuse dont les sépare une étroite fissure.
Au bord libre de la valve postérieure existe une ulcération plus large
d'où naît un énorme mamelon végétant, gros comme un index, large
de5 à 6centimètres. Cette saillie est marbrée de noir et de gris jaune
et semble formée pardes coagulations fibrineusesd'âge différent mêlées de quelques dépôts cruoriques. A l'incision, quelques saillies semblent formées par des néoplasies vraies, du tissu de bourgeon charnu;
d'autres, au contraire, sont constituéespar des dépôtsfibrineux.
— 21 —
L'examen d'une ulcération de l'endocardite sur fragment conservé
et durci à l'alcool montre une mince couche granuleuse avecquelques
filaments de fibrine. Plus profondément, une zone à petites cellules
se colorant énergiquement, rappelant l'aspect d'un tubercule embryon¬
naire, mais sans cellules géantes. Les végétations proprement
dites
nese distinguent en rien d'une coupe de bourgeons charnus.
Examen répété, aucun bacille. Ensemencement, rien.
Observation VIII.
Bernheim(Bull. Soc.anat.,1890).
Tuberculosepulmonaire. Végétations surla tricuspide.
Autour de l'orifice auriculo-ventriculaire droit existe un bourrelet
énorme, irrégulier, semblable à une couronne d'hémorroïdes,
dont les
végétations remplissent en partie l'oreillette et recouvrent
entièrement
l'orificetricuspide.
Observation IX.
Tripier(Archiv.mëd.expëriment.,1890).
Tuberculose miliaire. Sur la mitrale, lésionsd'endocardite végétante,
ainsiqu'un petit noduletuberculeux parfaitement
caractérisé. Ce nodule
estsituésurlaface inférieure de lavalvule, àl'union dutiers interne et
desdeux tiers externes, dans un point limité par deuxcordages
tendi¬
neux, à undemi-millimètre de diamètre.
Constitué
par uncentre
com¬pact, granuleux, nettementcoloré parle
carmin,
assezréfringent, et, de
dedans en dehors, par une zone claire au milieu de
laquelle
setrou¬
vaient des cellules géantes, puis par une zone extérieure
de cellules
rondes très contluentes, plus colorées. Le centre compact
était formé
d'une série deblocsirréguliers desubstancedecolorationrouge
grenade,
assez analogue àcelle des amas
albumino-fibrineux, situés
surla végé¬
tationendocardique etqui,àun plusfortgrossissement,
sont composées
de fines granulations colorées. Par une
partie de
sasurface,
cenodule
se trouvait en rapport avec le sang de la cavité
ventriculaire,
savalvule
était épaissie, le tissu fîbro-élastique
avait perdu
sacohésion et
sonhomogénéité normales. En certains points
très vascularisés existaient
des îlotsd'infiltration embryonnaire. Les altérations, moins
prononcées
au niveau de l'insertion de la valvule à l'anneau fibreux, augmentaient
graduellement jusqu'aux végétations.
Le tissu valvulaire resté distinct
du nodule tuberculeux seconfondait progressivement avec le tissu
des
végétations. Lestroma,perdant peu à peuson
aspect fibreux, prenait les
— 22 —
caractères d'un tissujeune où se trouvaientdes cellules plusou moins y nombreuses,avec des fibrilles etdes vaisseaux volumineuxà la base des
végétations.
Observation X.
Hanot (Archiv. gén. méd.,1893).
N° 1. Tuberculose pulmonaire. Sur une valve aortique, à3 millimé- ' trèsdubord,onvoit des végétationsassez dures, irrégulières,du volume
d'une grosse tèted'épingle.
Ensemencements nuls. Sur les coupes, un bacille droit dont il n'a pasété possible de déterminer les caractères.
Noa 2, 3, 4. Aucune recherche bactériologique n'a abouti dans ces numéros.
Observation XI.
Londe etpetit(Archiv. gén.méd., 1894.) Endocardite végétante tuberculeuse.
Hémiplégie infantile. Insuffisance tricuspide. Lésions caséeuses du poumon. Sur la face auriculaire des deux valves de la mitrale, troisou
quatre végétations, dont la plus grosse atteint, le volume d'une lentille, y:
les plus petitesayant la grosseurd'une tète d'épingle. Ces végétations
sont pâles, uniformes, molles. Pasde granulations de l'endocarde.
Inoculation. — L'une de ces végétations, inoculée à un cobaye, fut éliminée de laplaie trois jours après.
Trois mois environ après l'inoculation,on trouva des tubercules dans
tous les organes. L'examen bactériologiquemontral'existencede bacilles.
Une deces végétations,écrasée lepremier jour surla lamelle,n'a donné
aucun résultat. On ne chercha pas les autres micro-organismes. Sur la coupe de l'une des végétations, on vit, après la coloration au picro- carmin, quela végétationétait enpartie formée par un magmajaunâtre, qui l'enveloppait irrégulièrement et était vraisemblablement constituée pardes blocs fibrineux. Lacouche superficiellede l'endocardeestaltérée.
Le corpsde la végétationest rouge ourosé,d'aspectfibreux,etsecontinue
avec le tissu fibro-élastique de la valvule; çà et là, cellules embryon- J,
naires qui sont surtout agglomérées en deux points situés au-dessous de la végétation. Nulle part ces noyaux ne rappellent la granulation tuberculeuse.
Par le Ziehl et le bleu, la coloration d'une coupe montre l'existence
de bacilles groupésau niveau de l'un des renflements correspondantaux amas embryonnaires sus-indiqués. A ce niveau on trouvait quatre ou
— '23 —
cinqbâtonnets trèsnets. Sur les bords dela végétationetdans les dépôts
fibrineux, on trouvait aussi quelques bacilles. Suraucunecoupe, il n'y
avait de bacilleà l'intérieur de la végétation.
Observation XII.
G.Etienne(Archiv. méd.exp.,1898).
N° 1. Fille quinze ans,tuberculeuse. La valvule mitrale a son bord
libre entouré d'un anneau de fines végétations fibrineuses frangées,
grosses comme de petites têtes d'épingleassez adhérentes. Sur lavalvule
sigmoïde aortique, existe au niveau des facettes de juxtaposition une
trèsfinecollerettede végétations semblables, rouges, peu friables. Pour
chacune de ces valves, la collerette part de chacun des angles de la sigmoïde,et, s'incurvant, suit la valvule suivant le trajet indiqué. A
la
valvuletricuspideexiste unanneau analogue à celui quioccupe le
bord
de la valvule mitrale, mais les végétations sont un peu moins nom¬
breuses, moins denses.
Recherches bactériologiques.— Des fragments de végétation sont
ensemencés dans des bouillons de culture. Les tubes restent stériles.
Unfragment,aprèsavoir été soigneusement lavéparagitation dans
l'eau
stérilisée, estintroduit par laparatomie aseptiquedans le péritoined'un
cobaye. Le cinquième jour, ulcération légèrement fongueuse.
Un mois
après, le cobaye meurt avecde la granulie
péritonéo-pulmonaire
et unchancre d'inoculation caractéristique.
N°2. Les deux valvules auriculo-ventriculaires sont épaisses; sur le
bord libre de la mitraleetde la tricuspide sont de petites végétations
fibrineuses très minces. Rien aux sigmoïdes.
Recherches bactériologiques.— Ensemencements, résultats néga¬
tifs. Un fragmentd'endocarditemitrale, lavé à l'eau stérilisée,est
inoculé
sous le péritoine d'un cobaye par laparotomie aseptique. Assez
rapide¬
ment, développement d'un chancre d'inoculation
caractéristique. Trois
mois après, mort etbacillose généralisée.
N° 3. G-arçon vingt ans, tuberculeux. Sur la mitrale, végétation du
volume d'un pois, constituée par un amasde fibrine appliqué à
la
faceventriculaire de lavalvule et déterminant un légerdegré d'insuffisance
etderétrécissement. La valvule estcependantassez souple.
Recherches bactériologiques.— Un fragment est inclus. Aucun
bacille avec le Gram et l'Ehrlich. Par contre, on trouve sur les coupes
un certainnombre de bâtonnets indéterminés.