• Aucun résultat trouvé

Évaluation des stratégies adaptatives des métazoaires aux faibles disponibilités en nutriments : couplage d’approches d’écologie isotopique et de transcriptomique chez des isopodes épigés et hypogés

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Évaluation des stratégies adaptatives des métazoaires aux faibles disponibilités en nutriments : couplage d’approches d’écologie isotopique et de transcriptomique chez des isopodes épigés et hypogés"

Copied!
248
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: tel-01298543

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01298543

Submitted on 6 Apr 2016

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

aux faibles disponibilités en nutriments : couplage d’approches d’écologie isotopique et de transcriptomique

chez des isopodes épigés et hypogés

Clémentine François

To cite this version:

Clémentine François. Évaluation des stratégies adaptatives des métazoaires aux faibles disponibilités

en nutriments : couplage d’approches d’écologie isotopique et de transcriptomique chez des isopodes

épigés et hypogés. Evolution [q-bio.PE]. Université Claude Bernard - Lyon I, 2015. Français. �NNT :

2015LYO10140�. �tel-01298543�

(2)

N

d’ordre : 140-2015 Ann´ ee 2015

TH` ESE

pr´ esent´ ee devant l’UNIVERSIT´ E CLAUDE BERNARD - LYON 1 pour l’obtention du DIPLOME DE DOCTORAT (arrˆ et´ e du 7 Aoˆ ut 2006)

ECOLE DOCTORALE 341 - E2M2 ´

pr´ esent´ ee et soutenue publiquement le 25 Septembre 2015 par

Cl´ ementine FRANCOIS

TITRE :

Evaluation des strat´egies adaptatives des m´etazoaires ´ aux faibles disponibilit´es en nutriments :

couplage d’approches d’´ ecologie isotopique et de transcriptomique chez des isopodes ´ epig´ es et hypog´ es

Th` ese dirig´ ee par : M. Christophe DOUADY M. Tristan LEF´ EBURE

M. Florian MERMILLOD-BLONDIN M. Laurent SIMON

Jury : M. Michael DANGER, examinateur

M. Emmanuel DESOUHANT, examinateur

M. Christophe DOUADY, examinateur et directeur de th` ese M. Nicolas GALTIER, examinateur

Mme Gwenael PIGANEAU, rapportrice

M. Pascal RIERA, rapporteur

(3)

esum´ e

L’objectif g´ en´ eral de ce travail de th` ese est d’´ etudier les r´ eponses adapta-

tives des m´ etazoaires ` a une diminution de la disponibilit´ e en nutriments dans

leur environnement, tout en consid´ erant de potentielles interactions entre ces

diff´ erentes r´ eponses. Ce travail, couplant des approches d’´ ecologie isotopique et

de transcriptomique haut-d´ ebit, est bas´ e sur l’analyse comparative d’isopodes

de surface (´ epig´ es) et souterrains (hypog´ es) ´ evoluant depuis plusieurs millions

d’ann´ ees dans des environnements pr´ esentant des disponibilit´ es en nutriments tr` es

contrast´ ees (les milieux souterrains ´ etant caract´ eris´ es par une quasi-absence de

productivit´ e primaire). La singuli` ere histoire ´ evolutive de ces isopodes (multiples

colonisations ind´ ependantes du milieu souterrain) permet de d´ efinir 13 couples

compos´ es d’une esp` ece ´ epig´ ee et d’une esp` ece hypog´ ee partageant un ancˆ etre com-

mun ´ epig´ e. Ces couples repr´ esentent ainsi 13 r´ eplicats ind´ ependants d’une tran-

sition environnementale vers un milieu plus pauvre en nutriments. Les r´ esultats

de ce travail ont mis en ´ evidence lors de cette transition environnementale des

adaptations en termes d’am´ elioration de l’acquisition des nutriments (diminu-

tion de la s´ electivit´ e trophique, potentielle s´ election de strat´ egies sp´ ecialistes)

mais ´ egalement en termes de diminution de la demande m´ etabolique en nu-

triments (diminution du taux de croissance). Certaines hypoth` eses adaptatives

ont cependant ´ et´ e r´ efut´ ees (pas de r´ eduction de la taille de g´ enome par allo-

cation pr´ ef´ erentielle du P aux ARN, ni de s´ election

stoechiog´ enomique

des

nucl´ eotides et acides amin´ es les plus ´ economes en N). L’ensemble des r´ esultats

sugg` ere un d´ ecouplage entre un r´ egime s´ electif au niveau comportemental, mor-

phologique et physiologique (choix trophiques, efficacit´ e de l’assimilation, taux de

croissance) et un r´ egime neutre au niveau g´ enomique (taille de g´ enome, compo-

sition ´ el´ ementaire du transcriptome et prot´ eome). Il est possible que la s´ election

naturelle soit inop´ erante sur la composition ´ el´ ementaire et la structure des macro-

mol´ ecules majeures (ADN, ARN et prot´ eines) de par les faibles tailles efficaces

de population (Ne) des m´ etazoaires. Cependant, on peut ´ egalement faire l’hy-

poth` ese que la s´ election serait non pas inop´ erante mais inexistante ` a ce niveau,

de par l’existence d’interactions entre les diff´ erentes r´ eponses adaptatives des

organismes. Sous cette hypoth` ese, l’adoption de certaines r´ eponses adaptatives

assez efficaces et / ou rapides ` a mettre en place pourrait suffire ` a att´ enuer la

limitation trophique subie par les organismes et ainsi relˆ acher ou mˆ eme annuler

la pression de s´ election sur les autres types de r´ eponses adaptatives. Nos r´ esultats

confirment l’existence de ces interactions, l’absence de r´ eduction de la taille de

g´ enome pouvant en effet s’expliquer par la diminution du taux de croissance qui

relˆ acherait la pression de s´ election sur l’allocation du P aux ARN.

(4)

iii

Remerciements

Ce manuscript de th` ese ne serait pas complet sans que je remercie tous les gens qui m’ont accompagn´ ee et soutenue pendant ces 4 ann´ ees, avec une bonne dose de patience, et sans qui cette th` ese n’aurait, pour reprendre la formule consacr´ ee, pas ´ et´ e la mˆ eme !

Tout d’abord, je tiens ` a remercier tout particuli` erement les membres de mon jury de th` ese, mes 2 rapporteurs Gwenael Piganeau et Pascal Riera, ainsi que mes examinateurs Michael Danger, Emmanuel Desouhant et Nico- las Galtier, pour avoir accept´ e d’´ evaluer ce travail de th` ese et l’avoir enrichi de leurs commentaires. J’ai beaucoup appr´ eci´ e que vous vous soyez tous aventur´ es sur des th´ ematiques autres que celles que vous d´ eveloppez habi- tuellement, et que cela ait r´ esult´ e en une discussion enrichissante lors des questions !

Ensuite, je tiens vraiment (non mais vraiment !) ` a remercier mes 4 chefs,

Christophe, Florian, Laurent et Tristan, pour tout ce que vous m’avez ap-

pris, pour le soutien et la bonne humeur sur le terrain comme dans les

manips, pour avoir support´ e (dans tous les sens du terme) mon humour

et mes blagues mˆ eme au bord de la mort (ou du cimeti` ere des ´ el´ ephants),

pour les charmants petits surnoms dont vous m’avez gratifi´ e, et pour le

confiance que vous m’avez accord´ ee en me laissant de la libert´ e et de l’au-

tonomie pour d´ evelopper ce projet de th` ese en or ! Derri` ere les excellents

chercheurs, rigoureux et exigeants, qui ont form´ e la docteure que je suis

maintenant, j’ai d´ ecouvert 4 personnes qui ont toujours ´ et´ e tr` es pr´ esentes,

patientes et impliqu´ ees, et j’esp` ere qu’on aura encore l’occasion de travailler

(et de rigoler) ensemble ! Christophe, merci de m’avoir soutenue mˆ eme dans

les moments de doutes ou de grosses d´ eroutes (

glaciaires

). Ton esprit de

synth` ese et ta grande culture scientifique ont ´ et´ e indispensables tout au long

de cette th` ese ! Laurent, merci de m’avoir fait d´ ecouvrir la beaut´ e (insoup-

conn´ ee) d’un IRMS, chapeau pour ton calme face ` a mes triplicats r´ ep´ et´ es

de mesures (mais l` a tu ne peux blˆ amer que la rigueur scientifique que tu

m’as transmise), et encore une fois merci pour ta disponibilit´ e ! Tristan,

merci de m’avoir initi´ ee aux joies (l` a aussi insoupconn´ ees) de la bioinfo ; ta

(5)

p´ edagogie, ton implication, ta z´ enitude (face aux r´ esultats n´ egatifs / WTF) et ton humour ont ´ et´ e indispensables pour survivre ` a ces milliers de lignes de code (et soit dit en passant, bravo d’avoir r´ eussi ` a garder cette blouse si propre h´ eh´ e). Et enfin Florian, merci pour le phosphore, ton implication de chaque instant et de chaque manip, le phosphore, ces tonnes de biblio que tu as lu pour ce projet de th` ese, le phosphore, tes blagues, le phosphore, ton sto¨ıcisme face ` a mes blagues, le phosphore, ta perp´ etuelle bonne humeur, le phosphore, ta patience et ta pers´ ev´ erance, mais aussi le phosphore ! Derri` ere toutes ces rigolades, j’ai ´ enorm` ement appris avec toi, et sache que tu ne m’as jamais d´ ecu ! Une bonne citation r´ esumant de grandes tirades lyriques et larmoyantes (chose que je maitrise autant que toi), voici la citation de ma th` ese :

They have done studies you know. 60% of the time, it works all the time

(feat. P). Et il y aurait encore tant d’anecdotes ` a raconter et de mercis ` a distribuer...

Au gr´ e des p´ erip´ eties de cette th` ese, j’ai aussi eu l’occasion de travailler avec deux autres chercheurs qui m’ont beaucoup aid´ e et que je tiens encore une fois ` a remercier pour leur temps et leur disponibilit´ e : Florian Ma- lard, pour toutes ces discussions o` u l’on d´ ebattait des moindres d´ etails des th´ eories ´ ecologiques et o` u tu m’as forc´ e ` a tout, mais alors vraiment tout, clarifier dans ma tˆ ete avant d’´ ecrire la moindre ligne ; et Laurent Duret, pour toutes ces fois o` u l’on a

caus´ e

de mes r´ esultats et o` u tu as vu de la lumi` ere (ou plus pragmatiquement une solution simple et ´ el´ egante) l` a o` u je tˆ atonnais.

Je tiens aussi ` a remercier Michael Danger et Ludovic Orlando pour leur investissement dans mes comit´ es de pilotage, leurs remarques contructives m’ont aid´ e ` a faire le point et ` a avancer tout au long de cette th` ese.

Je voudrais remercier de tout coeur trois personnes qui m’ont ´ enorm` ement

aid´ ee dans tous les aspects de la vie d’une th´ esarde : Lara, mon phare dans

les (nombreuses) tempˆ etes que j’ai essuy´ ees ` a la paillasse, merci pour ta

disponibilit´ e, ta patience, ton efficacit´ e surhumaine, et pour avoir ´ et´ e mon

dernier rempart contre la folie lors de ces fameuses extractions d’ARNs ;

Dominique, pour ton humour, ton f´ eminisme et tes coups de gueule (apr` es

ton d´ epart il va manquer un petit quelquechose de l’ˆ ame de cette ´ equipe !) ;

(6)

v et Nadjette, notre bonne f´ ee de l’administration, pour ta bonne humeur ` a toute ´ epreuve.

Une pens´ ee sp´ eciale pour Laurence, qui n’est malheureusement arriv´ ee dans notre couloir qu’` a la fin de ma th` ese mais qui s’est vite r´ ev´ el´ ee avoir un sens de l’humour ` a toute ´ epreuve, ˆ etre un pr´ ecieux soutien de chaque instant, et accessoirement une personne ´ epatante. En un mot comme en mille, merci pour tout !

Merci aussi ` a tous les gens de l’´ equipe E3S et du LEHNA, j’ai pass´ e de joyeuses et enrichissantes ann´ ees parmi vous ! Je pense tout particuli` erement

`

a Pierre Marmonier, qui le premier m’a fait d´ ecouvrir ce fameux couloir du 3e Forel qu’il fait r´ esonner de ses vannes et autres coups de gueule, et ` a Fred pour sa bonne humeur communicative.

Et enfin, merci aux organismes qui ont permis de financer ces travaux (Minist` ere de l’Education Nationale, de l’Enseignement Sup´ erieur et de la Recherche, ENS de Lyon, ANR et CNRS APEGE/EC2CO), ainsi qu’aux concepteurs et contributeurs des diff´ erents logiciels libres que j’ai abondam- ment utilis´ es durant ma th` ese.

Il est maintenant temps de rendre justice ` a tous ceux qui m’ont sup-

port´ ee (dans tous les sens du terme) au labo pendant toutes ces ann´ ees :

les amis du Domus (` a qui j’ai pu

emprunter

quelques frites), ceux des

ap´ eros To¨ı To¨ı et des pauses caf´ e, ceux des grandes discussions scientifiques

comme ceux des craquages nerveux, ainsi que les (innombrables) personnes

qui m’ont nourrie lors de ma r´ edaction. . . Une ´ enorme pens´ ee pour David

qui a ´ et´ e ` a la fois une oreille attentive, un cerveau de tr` es bon conseil et

une sacr´ ee paire de mollets pour aller vadrouiller en montagne. Nos sessions

th´ e-conseils biblio me manquent beaucoup mec ! Natacha, un ´ enorme merci

pour ta capacit´ e ` a me faire prendre de la distance sur tous les mini-drames

de la th` ese, j’ai ´ et´ e chanceuse de t’avoir dans les parages pendant toutes ces

ann´ ees. Et merci pour tous ces moments et ces Causette partag´ es cocotte !

C´ ecile, tu m’as toujours impressionn´ ee par ta capacit´ e ` a f´ ed´ erer et ` a orga-

niser la vie sociale du labo, merci pour tous ces moments et pour tous ces

gens que j’ai rencontr´ e grˆ ace ` a toi. Sache qu’une th` ese sans Tatie Danielle

bis aurait ´ et´ e bien moins drˆ ole ! Je me dois aussi de remercier ici Mathilde

(7)

pour sa filiation ´ evidente avec la lign´ ee des Danielles, je ne doute pas qu’elle se montrera digne de cet h´ eritage. Et merci pour le tr` es attendu (et tr` es appr´ eci´ e) mojito de fin de r´ edaction ! Merci aussi ` a J´ erˆ ome pour ses grands

´

eclats / grincements de rire et sa tol´ erance face ` a mes surnoms plus ou moins inspir´ es ; et ` a J´ er´ emy pour sa gentillesse et sa bonne humeur constantes ! Enfin, respect ´ eternel pour l’humour d’Arnaud, tellement caustique qu’` a cˆ ot´ e je passe pour un bisounours... Et merci pour tous tes coups de main sur LaTeX, et surtout pour tes dons

volontaires

de frites et de desserts ! Je pense aussi ` a Claire (Morvan), Chlo´ e, Julia, les Juliens, Ross, Antonin, Ludovic, Hugo, Louise, Pierre-Axel, Soraya, Barbara, M´ elissa, Yannick, Si- mon, Pierre, Mathieu, J´ erˆ ome (Le Grand), et tant d’autres ! Un merci tout particulier ` a mes multiples co-bureaux Simon, Raoul, Pauline, Mathilde, Kathleen, Margot, Nathana¨ elle qui n’a pas eu peur de me recueillir dans son bureau pour la derni` ere ligne droite de ma r´ edaction, et le petit der- nier Val´ erian ! Cher compagnon de labo / caf´ e / to¨ı to¨ı / vol de frites, si je t’ai oubli´ e dans cette liste, sache que j’en suis navr´ ee et que je me ferai pardonner cette bourde ` a coup de pintes la prochaine fois qu’on se verra !

Ces ann´ ees de th` ese auraient ´ et´ e beaucoup plus solitaires (et calmes) sans mes chers et innombrables petits colocs : Laura mon pilier et r´ econfort pendant ces 3 belles ann´ ees de coloc (to be continued...), Gautier mon four- nisseur officiel de pancakes (eh non, ce ne sont toujours pas des crevettes cavernicoles !), Dorine, Ulrike, J´ er´ em, Romaric, Ju, Yannick, Laia, Richard, Marius et enfin Nico, qui m’a soutenue et m’a chang´ e les id´ ees jusque dans les derniers soubresauts de la r´ edaction (et ca vaut bien tous les volets du monde !).

Merci ` a tous mes amis, sur Lyon ou ailleurs, sans vous j’aurais certai-

nement soutenu beaucoup plus rapidement (mais moins joyeusement) ! Une

pens´ ee toute particuli` ere pour Diane et son ind´ eboulonnable joie de vivre, et

pour Charlotte, mon roc dans la tempˆ ete. Je pense aussi ` a tous mes compa-

gnons de voyages / week-ends / soir´ ees / marathon-terrasse-Beers (Cl´ ement,

si tu m’entends. . . ), Mathias, Agn` es, ma camionette, Marion, Adrien, Repi,

Fabian, Anais, Suzanne, Claire, Alice, Ivan, L´ ea, Claire (Mallard), Eug´ enie,

Mailys,. . . Et un ´ enorme merci ` a Am´ elie, pour avoir endur´ e avec le sou-

(8)

vii rire et avec (une relative) patience toutes ces interminables discussions de th´ esards monomaniaques. Merci d’ˆ etre l` a.

Et enfin, un gigantissime merci ` a ma famille : Charlot, qui a support´ e vaillamment toutes les discussions sur mes

cloportes cavernicoles

et a assur´ e sans faillir l’approvisionnement de ma cave ` a vins au moment o` u j’en avais le plus besoin ; ma seurette, qui me soutient ` a sa fa¸con depuis in utero et sans qui tous nos baroudages (avec ou sans genoux) auraient ´ et´ e un peu fades ; et mes parents, PouMou, qui supportent mes stress chroniques et autres paniques de boulot depuis bien trop longtemps mais qui ont encore la patience de les prendre au s´ erieux et de me soutenir inconditionnellement.

Je ne sais pas comment vous faites, mais chapeau !

Sur ce,

pouet pouet la galette

et bonne lecture.

(9)
(10)

Table des mati` eres

Introduction 1

1 Cadre conceptuel 3

1.1 Comment d´ efinir un environnement ` a faible disponibilit´ e en nutriments ? . . . . 3 1.2 Adaptations des organismes aux faibles disponibilit´ es en nu-

triments : ´ etat de l’art . . . . 8 1.2.1 Am´ elioration de l’acquisition des nutriments . . . . . 10 1.2.2 Diminution des besoins en nutriments . . . . 21 1.3 Interactions entre ces diff´ erentes r´ eponses adaptatives . . . . 28 1.4 Limites des ´ etudes publi´ ees . . . . 30

2 Mat´ eriel & M´ ethodes 33

2.1 Les isopodes de la famille Asellidae, un mod` ele biologique original . . . . 33 2.2 Ecologie isotopique : assimilation des nutriments et r´ ´ egimes

alimentaires . . . . 37 2.3 Transcriptomique haut-d´ ebit : un snapshot de la transcrip-

tion des ARN . . . . 44

3 Objectifs de la th` ese 51

4 Sp´ ecialisation trophique en milieu souterrain 55 4.1 Article 1 : Trophic ecology of groundwater species reveals

specialization in a low-productivity environment. . . . 57

ix

(11)

5 electivit´ e trophique et disponibilit´ e en ´ energie 71 5.1 Article 2 : Trophic selectivity increases with energy availa-

bility in aquatic ecosystems . . . . 74

5.1.1 Introduction . . . . 74

5.1.2 Material & Methods . . . . 78

5.1.3 Results . . . . 89

5.1.4 Discussion . . . . 93

6 Coˆ ut en azote du transcriptome et du prot´ eome 99 6.1 Article 3 : Low nitrogen availability does not influence the elemental composition of metazoa transcriptomes and pro- teomes. . . 106

6.1.1 Introduction . . . 106

6.1.2 New Approach . . . 111

6.1.3 Results . . . 112

6.1.4 Discussion . . . 121

6.1.5 Material & Methods . . . 128

7 Synth` ese, discussion et perspectives 137 7.1 Synth` ese des r´ esultats marquants . . . 137

7.2 R´ esultats compl´ ementaires . . . 141

7.2.1 Taille de g´ enome . . . 141

7.2.2 Taux de croissance . . . 142

7.3 Discussion g´ en´ erale . . . 143

7.4 Perspectives de recherche . . . 160 A Mat´ eriel suppl´ ementaire, Article 1 171 B Mat´ eriel suppl´ ementaire, Article 2 177 C Mat´ eriel suppl´ ementaire, Article 3 183

D Annexe D 193

(12)

Table des figures

1.1 Sc´ enario hypoth´ etique des r´ eponses adaptatives d’un orga- nisme lors d’une diminution de la disponibilit´ e en nutriments 11 1.2 S´ electivit´ e trophique : ad´ equation entre l’abondance des res-

sources et leur proportion dans le r´ egime alimentaire. . . . . 13 2.1 D´ efinition des couples d’esp` eces ´ epig´ ee/hypog´ ee . . . . 36 2.2 Exemple de reconstruction de r´ egime alimentaire (` a l’´ echelle

de la population) . . . . 40 2.3 Couplage analyseur ´ el´ ementaire – spectrom` etre de masse iso-

topique pour la mesure de l’abondance relative de deux iso- topes stables. . . . 42 2.4 Principe de la transcriptomique haut-d´ ebit. . . . 48 5.1 Phylogenetic tree of the 16 isopod species and energy availa-

bility in their environments. . . . 90 5.2 Diets and environmental resources availabilities for the 16

isopod species. . . . 91 5.3 Relationships between the selectivity index PS’ and the en-

vironmental variables. . . . . 93 6.1 Principe des deux niveaux d’analyse des transcriptomes. . . 101 6.2 Test du biais brin-sp´ ecifique de substitutions : exemple des

deux substitutions compl´ ementaires C T et G A. . . . 103 6.3 Chronogram of the 13 pairs of isopod species . . . 110 6.4 Asymmetries in substitution rates under the N-economy stoi-

chiogenomic hypothesis. . . . 112

xi

(13)

6.5 Distribution of NARSC and NAB3 in the 26 species. . . . . 117 6.6 Parity plots of the complementary substitutions rates. . . 122 7.1 Bilan des r´ eponses adaptatives des isopodes lors de la colo-

nisation du milieu souterrain . . . 158 C.1 Decrease of NARSC in the 10 % most-expressed proteins . . 184 C.2 Distribution of VNARSC for the 26 species. . . 185 C.3 Distribution of VNAB3 for the 26 species. . . 186 D.1 Relation entre choix trophiques et qualit´ e stœchiom´ etrique

des ressources . . . 195

(14)

Liste des tableaux

5.1 Description of the 16 isopod species. . . . . 79 5.2 Environment characterization : abundance and elemental com-

position of available trophic resources. . . . . 81 5.3 Diet determination : median and 95% credibility interval of

resource contributions to the diet (in %) . . . . 84 6.1 Environmental parameters for the 26 isopods species. . . 113 6.2 Summary of the phylogenetic generalized least-squares mo-

dels testing the influence of environmental parameters on the N cost of the proteome / transcriptome. . . . 115 6.3 Statistical models testing the influence of the habitat on the

number and usage frequency of optimal codons. . . 118 6.4 Medians of VNARSC and VNAB3 for the 26 species. . . 119 6.5 Test of the stoichiogenomic expectations regarding VNARSC

and VNAB3 within each species pair. . . 120 6.6 Bootstrap tests of the stoichiogenomic expectations regarding

ΔAT and ΔGC within each species pair. . . 123 A.1 C and N isotope composition of individuals and labelled food

sources during the laboratory experiment . . . 174 A.2 C and N isotope composition of isopods sampled in the ten

caves. . . . 175 A.3 C and N isotope composition of food sources in the ten caves 176 B.1 Environmental variables and indices of selectivity. . . 179

xiii

(15)

C.1 Description of the 13 isopod species pairs. . . 187 C.2 Relative N budget of the bulk transcriptome and proteome

for the 26 species . . . 188 C.3 Number and usage frequency of the two classes of optimal

codons in the 26 species. . . 189 C.4 Statistical models testing the association between the nu-

trient availabilies and the number / usage frequency of opti- mal codons . . . 190 C.5 Substitution rates and measures of the strand asymmetry in

the 26 species. . . 191 C.6 Parameters of the transcriptome and proteome analyses for

the 26 species. . . 192 D.1 Param` etres ´ ecologiques et ratios stœchiom´ etriques C:N des

26 esp` eces d’isopodes . . . 194

(16)

Introduction

Afin de documenter la complexit´ e du monde vivant et d’en comprendre l’´ evolution, les scientifiques se sont depuis longtemps int´ eress´ es aux pa- trons de biodiversit´ e ` a l’´ echelle plan´ etaire. Au del` a de leur description, de multiples ´ etudes cherchent maintenant ` a comprendre quels processus

´

ecologiques sont ` a l’origine de ces patrons globaux de biodiversit´ e (pour une review, voir Gaston (2000)). Cette compr´ ehension est d’autant plus importante que nous cherchons ` a pr´ edire les effets que pourraient avoir de brusques changements climatiques et environnementaux (li´ es aux activit´ es anthropiques) sur la biodiversit´ e actuelle.

Plusieurs pistes de r´ eflexion ont ´ et´ e propos´ ees, dont l’une a re¸cu beau- coup d’attention (la ‘species-energy theory’) et repose sur l’observation d’une corr´ elation entre ´ energie environnementale et richesse sp´ ecifique (Evans et al. 2005, Cusens et al. 2012, Entling et al. 2012). Cette relation pourrait s’expliquer par une corr´ elation entre la quantit´ e d’´ energie d’un milieu (ou sa productivit´ e) et sa disponibilit´ e en ressources trophiques, sachant que cette disponibilit´ e trophique peut influer sur les strat´ egies trophiques adopt´ ees par les esp` eces r´ esidentes (c’est-` a-dire leurs strat´ egies d’acquisition et d’uti- lisation des nutriments) et permettre ` a plus ou moins d’esp` eces de cohabiter dans un milieu donn´ e (Evans et al. 2005, 2006, Birkhofer & Wolters 2012).

Ainsi l’´ energie d’un milieu impacterait le nombre d’esp` eces qui peuvent s’y maintenir, de par l’influence du niveau en ressources trophiques sur les strat´ egies d’acquisition de ces ressources.

D´ eterminer les crit` eres de s´ election entre les diff´ erentes strat´ egies tro- phiques est fondamental pour notre compr´ ehension des ´ ecosyst` emes, tout d’abord parce que c’est l’ad´ equation entre la strat´ egie trophique d’un or-

1

(17)

aussi car ces strat´ egies vont se r´ epercuter sur l’ensemble de l’´ ecosyst` eme, que ce soit en termes d’interactions biotiques ou de transferts des nutriments

`

a l’int´ erieur du r´ eseau trophique.

Cela nous permettrait ainsi de pr´ edire (tout du moins qualitativement) comment des changements environnementaux modifieraient ces strat´ egies trophiques, ainsi que leurs potentielles r´ epercussions sur les ´ ecosyst` emes.

S’inscrivant dans le cadre du r´ echauffement climatique, beaucoup d’´ etudes se sont int´ eress´ ees ` a l’effet d’une augmentation de la disponibilit´ e trophique, en partant du principe qu’une augmentation de la temp´ erature moyenne ter- restre et des concentrations de CO

2

atmosph´ erique entraˆınerait une augmen- tation globale de la productivit´ e des ´ ecosyst` emes (Melillo et al. 1993, Keeling et al. 1996). Ces ´ etudes abordent par exemple des questions d’eutrophisation avec de fortes implications soci´ etales (Correll 1998, Smith et al. 1999, Khan

& Ansari 2005, Daggett et al. 2015). Cependant, certaines ´ etudes semblent indiquer que les r´ eponses des ´ ecosyst` emes aquatiques ` a un r´ echauffement global seraient plus complexes que pr´ ec´ edemment envisag´ ees et n’iraient pas syst´ ematiquement dans le sens d’une augmentation de la productivit´ e (O’Reilly et al. 2003) et de la disponibilit´ e en ressources trophiques (Durant et al. 2007). Ce r´ esultat contre-intuitif est li´ e au fait qu’un r´ echauffement glo- bal pourrait modifier les r´ egimes des vents ainsi que la couverture nuageuse, r´ eduisant le m´ elange vertical des diff´ erentes couches d’eau et l’efficacit´ e de la photosynth` ese (Carpenter et al. 1992). Pourtant, peu d’´ etudes abordent cette probl´ ematique sous l’angle d’une diminution des ressources trophiques.

De plus, ces ´ etudes se sont g´ en´ eralement focalis´ ees sur les micro-organismes

avec des approches d’´ evolution exp´ erimentale, n´ egligeant les organismes

pluricellulaires. C’est pr´ ecis´ ement l’objet de cette th` ese d’´ etudier com-

ment les strat´ egies trophiques d’eucaryotes pluricellulaires h´ et´ erotrophes,

les etazoaires, ´ evoluent lors d’une transition environnementale vers

un milieu ` a faible disponibilit´ e en nutriments.

(18)

Chapitre 1

Cadre conceptuel

1.1 Comment d´ efinir un environnement ` a faible disponibilit´ e en nutriments ?

Les nutriments englobent l’ensemble des compos´ es organiques et in- organiques indispensables ` a la maintenance, la croissance et la reproduc- tion d’un organisme vivant. Dans cette introduction, nous nous focaliserons sur les macro-nutriments, c’est-` a-dire les nutriments n´ ecessaires en grande quantit´ e car constituants de base des principales macromol´ ecules de toute cellule (prot´ eines, acides nucl´ eiques, glucides et lipides). Ces nutriments comprennent le carbone (C), l’hydrog` ene (H), l’azote (N), l’oxyg` ene (O), le phosphore (P) ainsi que le soufre (S). Les organismes h´ et´ erotrophes ex- traient ces nutriments des diff´ erentes ressources trophiques disponibles dans leur environnement.

Selon les environnements consid´ er´ es, la nature ainsi que l’abondance de ces sources de nourriture varient fortement, que ce soit en termes de quan- tit´ e absolue (par ex. en grammes de ressource par unit´ e de surface) ou en termes de quantit´ e relative (par ex. en fraction de la quantit´ e totale de C contenu dans une ressource donn´ ee). Selon leur nature biologique, ces sources de nourriture ne sont pas non plus ´ equivalentes en termes d’ap- ports de nutriments pour l’organisme, leur valeur nutritionnelle d´ ependant de leur composition ´ el´ ementaire. Cette composition ´ el´ ementaire est tr` es

3

(19)

souvent exprim´ ee en proportions (en masse) de chaque ´ el´ ement, le % X correspondant au pourcentage massique de l’´ el´ ement X dans la ressource consid´ er´ ee (le mˆ eme raisonnement s’applique aux organismes). De plus, les nutriments contenus dans une ressource donn´ ee peuvent ˆ etre faiblement biodisponibles, par exemple si cette ressource est peu digestible par l’or- ganisme ( ressource

r´ efractaire

). Par exemple, Dodds (2014) a estim´ e que seulement 30 ` a 35 % de du N contenu dans les ressources disponibles ´ etait r´ eellement assimil´ e par les organismes de diff´ erents cours d’eau. ` A masses

´

egales, certaines ressources contiennent donc plus de nutriments potentiel- lement extractibles par l’organisme que d’autres, l’efficacit´ e de cette extrac- tion d´ ependant intrins` equement de chaque organisme et pouvant ´ evoluer, comme nous y reviendrons plus tard.

Les milieux naturels pr´ esentent donc de forts contrastes en termes de quantit´ es de nutriments disponibles. Parmi les nutriments consid´ er´ es, la quantit´ e de C organique (c’est-` a-dire le C contenu dans des compos´ es or- ganiques fabriqu´ es par des ˆ etres vivants) est par ailleurs un proxy de la quantit´ e d’´ energie

productive

disponible dans un environnement (sensu Evans et al. (2005)), c’est-` a-dire l’´ energie produite par les organismes auto- trophes (par ex. par photosynth` ese) et disponible sous forme de ressources trophiques pour les organismes h´ et´ erotrophes. Une description exhaustive de la gamme de disponibilit´ es en nutriments dans les ´ ecosyst` emes fait d´ efaut dans la litt´ erature. Cependant, certaines mesures existantes des quantit´ es de ressources trophiques dans un environnement donn´ e permettent d’ap- proximer les quantit´ es de nutriments correspondantes. ` A titre d’exemple, la disponibilit´ e en C dans les ´ ecosyst` emes aquatiques varie d’environ 0.5 g / m

2

dans les grottes les plus profondes en l’absence de production pri- maire (‘standing stock’, Venarsky et al. (2012)) ` a plus de 3 kg / m

2

dans certains cours d’eau de surface (‘standing stock’, Webster & Meyer (1997)).

Les ´ ecosyst` emes terrestres sont g´ en´ eralement plus riches en C de par leur

couverture v´ eg´ etale ; la disponibilit´ e en C peut y varier de 250 g / m

2

dans

les zones semi-arides ` a plus de 15 kg / m

2

dans les forˆ ets tropicales humides

(‘aboveground biomass’, Nieder & Benbi (2008)). De mˆ eme, la disponibi-

lit´ e en N varie fortement entre ´ ecosyst` emes, d’environ 0.18 g / m

2

dans

(20)

1.1. UNE FAIBLE DISPONIBLIT ´E ? 5 certains ´ ecosyst` emes aquatiques souterrains (‘standing stock’, donn´ ees de cette th` ese) ` a 75 g / m

2

dans les forˆ ets tropicales humides (‘aboveground biomass’, Nieder & Benbi (2008)).

Certains environnements pr´ esentent donc de tr` es faibles disponibilit´ es en nutriments qui peuvent potentiellement contraindre les organismes r´ esidents.

Cependant, au-del` a de la quantit´ e absolue de nutriments disponibles dans leur environnement, les organismes peuvent ´ egalement ˆ etre contraints par l’´ equilibre entre ces diff´ erents nutriments.

L’´ equilibre entre deux nutriments X et Y dans une ressource donn´ ee peut ˆ etre estim´ e grˆ ace au ratio molaire X:Y (par exemple, un ratio C:N de 7 indique qu’il y a 7 moles de C pour 1 mole d’N dans la ressource consid´ er´ ee). Ces ratios molaires (principalement C:N, C:P et N:P), aussi appel´ es ratios ´ el´ ementaires ou stœchiom´ etriques, sont abondamment utilis´ es dans la cadre th´ eorique de la stœchiom´ etrie ´ ecologique (Sterner & Elser 2002, Frost et al. 2005, Sardans et al. 2012, Hessen et al. 2013). Cette th´ eorie s’int´ eresse ` a l’´ equilibre des diff´ erents ´ el´ ements chimiques (ici, les nutriments) dans les ´ ecosyst` emes, afin entre autres d’´ etudier comment cet

´

equilibre affecte le fonctionnement des organismes. Elle repose sur deux grands principes : l’hom´ eostasie des consommateurs et la loi de conservation de la mati` ere.

L’hom´ eostasie d’un consommateur caract´ erise sa capacit´ e ` a main- tenir sa composition ´ el´ ementaire (globale) stable quelle que soit la composi- tion des ressources trophiques utilis´ ees. Les esp` eces diff´ erent dans leur degr´ e d’hom´ eostasie, les organismes autotrophes ayant par exemple tendance ` a ˆ

etre non-hom´ eostatiques, c’est-` a-dire que leur composition ´ el´ ementaire (et donc leurs ratios ´ el´ ementaires) suit celle (ceux) de leurs ressources tro- phiques (Sterner & Elser 2002, Persson et al. 2010). Les organismes h´ et´ erotro- phes sont plus hom´ eostatiques, avec cependant de grandes variations selon les esp` eces (Sterner & Elser 2002, Evans-White et al. 2005, Persson et al.

2010).

Le second pilier de la stœchiom´ etrie ´ ecologique est la loi de conser-

vation de la mati` ere, de laquelle il d´ ecoule que lorsqu’un consommateur

hom´ eostatique se nourrit sur des ressources ayant des ratios ´ el´ ementaires

(21)

diff´ erents des siens, le d´ ecalage entre la composition de ses ressources et ses besoins va engendrer des contraintes stœchiom´ etriques (‘stoichiometric mismatch’). Ces contraintes traduisent un d´ es´ equilibre ´ el´ ementaire (‘ele- mental imbalance’) plus ou moins fort selon l’amplitude du d´ ecalage entre le consommateur et ses ressources. Plus ce d´ ecalage est grand et plus l’or- ganisme doit adapter son fonctionnement physiologique pour g´ erer ` a la fois le(s) nutriment(s) en exc` es et le(s) nutriment(s) limitant(s), par exemple en modifiant la composition des substances excr´ et´ ees (Knoll et al. 2009).

Il en d´ ecoule que chaque ressource disponible dans l’environnement d’un organisme repr´ esente un d´ es´ equilibre ´ el´ ementaire sp´ ecifique, ind´ ependant de la quantit´ e absolue de cette ressource. Ce d´ es´ equilibre ´ el´ ementaire est fr´ equemment calcul´ e comme la diff´ erence arithm´ etique entre le ratio stœ- chiom´ etrique de l’organisme et celui de la ou des ressource(s) consid´ er´ ee(s) (Elser & Hassett 1994, Hassett et al. 1997, Dobberfuhl & Elser 2000, Cross et al. 2003, Liess et al. 2009, Mehler et al. 2013). Ce d´ es´ equilibre varie selon la composition ´ el´ ementaire de l’organisme et celle de la ressource (le ratio C:N de restes animaux ´ etant par exemple beaucoup plus faible que celui de la liti` ere v´ eg´ etale). Les consommateurs concentrant les nutriments ing´ er´ es (N, P) dans leur organisme, leurs ratios C:X sont en g´ en´ eral inf´ erieurs ` a ceux de leurs ressources. Lorsque ce d´ es´ equilibre est calcul´ e ` a l’´ echelle du r´ egime alimentaire d’un organisme (c’est-` a-dire int´ egr´ e sur toutes les res- sources utilis´ ees), il refl` ete aussi la strat´ egie trophique adopt´ ee. A titre d’exemple, les d´ es´ equilibres ´ el´ ementaires (en termes de ratios C:N) aux- quels sont confront´ es les organismes aquatiques peuvent ainsi varier de 0-1 pour des pr´ edateurs (qui se nourrissent sur des ressources ayant une com- position ´ el´ ementaire similaire ` a la leur) ` a plus de 65 pour des d´ echiqueteurs se nourrissant en partie sur de la mati` ere organique r´ efractaire (Cross et al.

2003). Par comparaison, ce d´ es´ equilibre est d’environ 30 pour les herbivores terrestres (Elser et al. 2000).

Tout comme la quantit´ e de nutriments disponibles, ces d´ es´ equilibres

´

el´ ementaires peuvent impacter les strat´ egies trophiques adopt´ ees par les

organismes et donc in fine leur performance, sachant que la pr´ epond´ erance

de l’un ou de l’autre de ces facteurs (quantit´ e/qualit´ e) d´ epend des condi-

(22)

1.1. UNE FAIBLE DISPONIBLIT ´E ? 7 tions environnementales (Sterner 1997, Frost & Elser 2002). Ainsi, Sterner

& Elser (2002) (p.31) affirment que ‘the C:P of food, for exemple, is basically irrelevant to animal growth if there is next to nothing to eat’. Au contraire, Urabe et al. (2002) ont soulign´ e l’effet de la qualit´ e stœchiom´ etrique en d´ emontrant que la performance de certains herbivores aquatiques diminuait quand l’intensit´ e de la lumi` ere augmentait. Ce r´ esultat peut sembler para- doxal quand on r´ efl´ echit en termes de productivit´ e primaire algale (et donc de la quantit´ e de ressources pour ces herbivores) car celle-ci devrait augmen- ter avec l’intensit´ e lumineuse. Cependant, ce r´ esultat doit ˆ etre interpr´ et´ e en termes de qualit´ e stœchiom´ etrique de cette ressource ; en effet, le d´ ecouplage entre la fixation photosynth´ etique de C par les algues et leur assimilation de nutriments (ici, le P) provoque une augmentation de leur ratio C:P avec l’intensit´ e lumineuse et donc une augmentation du d´ ecalage ´ el´ ementaire pour les herbivores. Enfin, Boersma & Kreutzer (2002) ont d´ emontr´ e que la croissance de Daphnia pouvait ˆ etre limit´ ee par la qualit´ e de ses ressources trophiques mˆ eme lorsque celles-ci ne sont pr´ esentes qu’en tr` es faibles quan- tit´ es.

Dans ce travail, la disponibilit´ e en nutriments est donc envisag´ ee sous ces deux aspects compl´ ementaires de quantit´ e de nutriments et de qualit´ e stœchiom´ etrique des ressources. Nous sommes conscients qu’il existe par ailleurs de multiples fa¸cons de consid´ erer la qualit´ e d’une ressource, que ce soit par des approches univari´ ees (par ex. contenu en acides amin´ es es- sentiels) ou multivari´ ees (la ‘nutritional geometry’ ; Raubenheimer (2011), Rothman (2015)). Cependant, de par l’attention qu’a re¸cue cette th´ eorie de l’´ ecologie stœchiom´ etrique et l’importance du corpus de litt´ erature s’y r´ ef´ erant, nous nous sommes focalis´ es sur cette d´ efinition de la qualit´ e d’une ressource par ses ratios stœchiom´ etriques.

Une faible disponibilit´ e en nutriments peut ainsi se traduire par une

faible quantit´ e de nutriments contenus dans les ressources disponibles

et/ou par une faible qualit´ e stœchiom´ etrique de ces ressources. Dans

ces conditions, l’organisme ´ eprouve potentiellement des difficult´ es pour ex-

traire de son environnement les nutriments indispensables ` a son fonction-

nement, dans les quantit´ es et les proportions n´ ecessaires.

(23)

C’est ici qu’il nous faut faire une distinction entre environnements ` a faible disponibilit´ e en nutriments (environnements pauvres) et environ- nements limitants pour l’organisme. Les premiers correspondent ` a des environnements situ´ es dans l’extr´ emit´ e inf´ erieure de la gamme de dispo- nibilit´ es environnementales, ils sont d´ efinis comme des milieux extrˆ emes sans consid´ eration des besoins physiologiques des organismes y r´ esidant, au contraire des environnements limitants. En effet, un milieu est consid´ er´ e li- mitant si la composition de ses ressources trophiques limite la performance des consommateurs, en termes de productivit´ e, de croissance ou encore de reproduction. Une telle limitation est ais´ ement mise en ´ evidence par des exp´ eriences de suppl´ ementation en nutriments en laboratoire (cf. toutes les

´

etudes sur Daphnia, par ex. Sterner et al. (1993), DeMott et al. (1998), El- ser et al. (2001), Boersma & Kreutzer (2002)), mais les ´ etudes in situ sont par d´ efinition d´ elicates ` a mener. Un environnement tr` es pauvre n’est pas forc´ ement limitant actuellement pour les organismes y r´ esidant, car ils peuvent s’ˆ etre adapt´ es ` a ces conditions trophiques qui seraient d´ efavorables pour tout autre organisme (par ex. Tessier & Woodruff (2002)). Cependant, les ancˆ etres de ces organismes r´ esidents ont tr` es certainement ´ et´ e limit´ es par les conditions trophiques r´ egnant dans ces environnements pauvres s’ils les ont colonis´ es depuis des environnements plus riches. Lors de cette tran- sition environnementale, ces ancˆ etres ont probablement d´ evelopp´ e des eponses adaptatives aux faibles disponibilit´ es en nutriments, r´ eponses que nous allons maintenant aborder.

1.2 Adaptations des organismes aux faibles disponibilit´ es en nutriments : ´ etat de l’art

En effet, des conditions environnementales inhabituelles pour l’orga-

nisme colonisateur peuvent entraˆıner la s´ election de certains traits biolo-

giques qui lui conf` erent une meilleure fitness (valeur s´ elective) dans ce nouvel

environnement. Ce processus adaptatif repose sur des modifications de traits

pr´ e-existants ou sur l’apparition de nouveaut´ es (les mutations) qui seront

(24)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 9 transmises et se r´ epandront dans la population en fonction de l’avantage s´ electif qu’elles conf` erent ; c’est le processus de s´ election naturelle th´ eoris´ ee par Darwin il y a plus de 150 ans (Darwin 1859). Le maintien d’une mutation avantageuse apparue dans une population d´ epend de la balance entre l’effi- cacit´ e de la s´ election naturelle (tri des mutations en fonction de leur valeur s´ elective) et la force de la d´ erive g´ en´ etique (tri al´ eatoire de ces mutations).

L’´ equilibre de cette balance est r´ egl´ e par la taille efficace de population (Ne), d´ efinie th´ eoriquement comme la taille d’une population id´ eale (c’est-

`

a-dire de Wright-Fisher) qui montre le mˆ eme comportement ´ evolutif (par ex.

degr´ e de d´ erive g´ en´ etique) que la population r´ eelle non-id´ eale. Ce param` etre peut ˆ etre vu comme une mod´ elisation du nombre de reproducteurs

effec- tifs

d’une population, c’est-` a-dire le nombre de reproducteurs

id´ eaux

de la g´ en´ eration n r´ esumant toute la diversit´ e g´ en´ etique qui sera transmise ` a la g´ en´ eration n+1. Une faible taille efficace de population entraˆıne une forte d´ erive g´ en´ etique et une faible efficacit´ e de la s´ election, les mutations sont donc retenues al´ eatoirement dans la population, ind´ ependamment de leur avantage s´ electif (r´ egime neutre). A l’inverse, un grand Ne indique une forte efficacit´ e de la s´ election naturelle et une faible d´ erive, les mutations avan- tageuses ´ etant alors retenues s´ electivement dans la population alors que les mutations d´ esavantageuses sont filtr´ ees (r´ egime s´ electif).

Sous ce r´ egime s´ electif, une transition environnementale vers de faibles disponibilit´ es en nutriments serait accompagn´ ee de r´ eponses adaptatives des organismes, r´ eponses qui sont pr´ ecis´ ement l’objet de ce travail de th` ese.

Des modifications non adaptatives de certains traits biologiques peuvent aussi ˆ etre observ´ ees lors de ces transitions environnementales, mais elles ne sont pas le sujet de ce chapitre. Par ailleurs, cette introduction ne se veut pas exhaustive sur tous les types d’adaptations observ´ es ou th´ eoriquement observables lors d’une transition environnementale (cf. Frost et al. (2005), Merchant & Helmann (2012), Wagner et al. (2013) pour un aper¸cu complet de ces adaptations). En particulier, nous ne nous appesantirons pas ici sur les m´ ecanismes de d´ etection et d’´ evaluation des contraintes nutritionnelles ainsi que sur les m´ ecanismes d’ajustement de l’excr´ etion.

La premi` ere cat´ egorie d’adaptations que nous allons consid´ erer concerne

(25)

l’acquisition des nutriments et l’efficacit´ e de leur assimilation ` a par- tir des ressources trophiques disponibles dans l’environnement. Cette partie correspond au cadre A de la Figure 1.1.

La seconde cat´ egorie d’adaptations concerne les besoins en nutri- ments de l’organisme et les strat´ egies d’

aust´ erit´ e

, c’est-` a-dire de eduction de cette demande m´ etabolique (cadre B de la Figure 1.1).

Nous allons maintenant aborder en d´ etail ces deux types de r´ eponses adaptatives et examiner les diff´ erentes hypoth` eses propos´ ees dans la litt´ erature existante (tous types d’organismes confondus).

1.2.1 Am´ elioration de l’acquisition des nutriments

Dans cette partie, nous allons traiter de concepts de sp´ ecialisation et de s´ electivit´ e trophiques, ainsi que de dissimilarit´ e inter-individuelle. Ces concepts ´ etant centraux ` a ce travail mais abord´ es et d´ efinis de mani` eres tr` es disparates dans la litt´ erature, il paraˆıt tout d’abord n´ ecessaire d’en expliciter la d´ efinition.

Nous allons ici consid´ erer qu’une esp` ece sp´ ecialiste maximise sa per-

formance sur une ou quelques-unes des ressources disponibles, alors qu’une

esp` ece en´ eraliste pr´ esente des performances similaires mais moindres sur

toutes les ressources disponibles (Devictor et al. 2010, Poisot et al. 2011). Le

degr´ e de sp´ ecialisation d’une esp` ece est donc quantifiable par des exp´ eriences

en laboratoire, o` u les performances des individus sur leurs diff´ erentes res-

sources trophiques peuvent ˆ etre mesur´ ees et compar´ ees. Le choix du proxy

de la performance doit ˆ etre adapt´ e aux caract´ eristiques biologiques de l’or-

ganisme ´ etudi´ e (taux de croissance, survie, reproduction ...). Avec cette

d´ efinition, nous nous d´ etachons du concept de largeur de la niche trophique

(‘niche breadth’) qui est souvent utilis´ e dans la litt´ erature pour d´ efinir les

strat´ egies trophiques des organismes en se basant uniquement sur la com-

position de leur r´ egime alimentaire. Cependant, ce concept de largeur de la

niche n’int` egre pas la sp´ ecificit´ e de chaque ressource pour le consommateur,

que ce soit en termes de performance du consommateur sur cette ressource

(26)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 11

! "

# !""#$

$

%&&"

! "

'

# ( ))

##$

)

Figure 1.1 – Sc´ enario hypoth´ etique des r´ eponses adaptatives d’un orga-

nisme lors d’une diminution de la disponibilit´ e en nutriments.

Les hypoth`eses sont indiqu´ees en vert. Les doubles fl`eches mat´erialisent les potentielles interactions entre ces diff´erentes r´eponses.

(27)

ou encore d’abondance de cette ressource dans l’environnement (Irschick et al. 2005).

Prendre en compte les abondances relatives des ressources quand on s’int´ eresse ` a la niche trophique r´ ealis´ ee d’un organisme, c’est-` a-dire ` a son r´ egime alimentaire, revient ` a ´ etudier la s´ electivit´ e trophique de cet or- ganisme. Le degr´ e de s´ electivit´ e trophique refl` ete l’ad´ equation entre l’abondance des ressources dans l’environnement et leur utilisation par l’or- ganisme (Jones & Norman 1986, Pennings et al. 1993, Zandon` a et al. 2011).

Ainsi, un organisme non-s´ electif consomme les ressources disponibles dans les proportions o` u elles sont pr´ esentes dans l’environnement (Figure 1.2, sc´ enario A en vert), alors qu’un organisme electif d´ ecouple son utilisa- tion des ressources de leurs abondances dans l’environnement (Figure 1.2, sc´ enario B en rouge), ce d´ ecouplage pouvant aller jusqu’au cas de s´ electivit´ e extrˆ eme o` u l’organisme se concentre sur une ou deux ressources relative- ment rares (ici les ressources 5 et 6) et ´ evite les ressources relativement abondantes (ici les ressources 1, 2 et 3 ; Figure 1.2, sc´ enario B en rouge). Ce concept de s´ electivit´ e trophique est similaire au concept de ‘niche position specialist / generalist’ d´ evelopp´ e par Evans et al. (2005), mais nous avons pr´ ef´ er´ e ´ eviter cette terminologie pour ´ eviter toute confusion avec le concept de sp´ ecialisation d´ efini ci-dessus. Ces deux concepts de sp´ ecialisation et de s´ electivit´ e sont compl´ ementaires, un organisme peut donc ˆ etre ` a la fois non- s´ electif (il se nourrit indiff´ eremment sur toutes les ressources disponibles dans l’environnement) et sp´ ecialiste (sa performance est maximale sur une seule de ces ressources).

Enfin, il faut distinguer la strat´ egie trophique d´ efinie ` a l’´ echelle de l’in- dividu de celle d´ efinie ` a l’´ echelle de la population ou de l’esp` ece. En effet, une population consid´ er´ ee comme g´ en´ eraliste peut ˆ etre compos´ ee d’indivi- dus eux-mˆ emes sp´ ecialis´ es sur des ressources diff´ erentes (Roughgarden 1974, Bolnick et al. 2003). De la mˆ eme fa¸con, une population non-s´ elective peut ˆ

etre compos´ ee d’individus se nourrissant s´ electivement sur des ressources

diff´ erentes. Quand nous abordons ces diff´ erences trophiques entre individus

d’une mˆ eme population/esp` ece, nous ´ eviterons le terme de

sp´ ecialisation

inter-individuelle

(Bolnick et al. 2002, Svanb¨ ack & Persson 2004, Svanb¨ ack

(28)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 13

ENVIRONNEMENT R É GIME ALIMENT A IRE

Abondance relative des ressourcesUtilisation des ressources

(B) (A)

1 2 3 4 5 6

1 2 3 4 5 6

1 2 3 4 5 6

Figure 1.2 – S´ electivit´ e trophique d’un organisme : ad´ equation entre

l’abondance (relative) des ressources dans son environnement et leur pro-

portion dans son r´ egime alimentaire. Pour un environnement donn´ e (panel

du haut) comprenant 6 ressources disponibles (num´ erot´ ees de 1 ` a 6), le

sc´ enario A (panel du milieu) correspond ` a un organisme non-s´ electif alors

que le sc´ enario B (panel du bas) correspond ` a un organisme hautement

s´ electif.

(29)

& Bolnick 2005, Layman et al. 2015) pour pr´ ef´ erer celui de

dissimilarit´ e inter-individuelle

l` a aussi pour ´ eviter toute confusion avec le concept de sp´ ecialisation ´ evoqu´ e pr´ ec´ edemment.

Efficacit´ e de l’assimilation : strat´ egie sp´ ecialiste ou g´ en´ eraliste ? (Figure 1.1, cadre A.1)

Une optimisation de l’assimilation de nutriments ` a partir des ressources disponibles constitue l’une des strat´ egies adaptatives possibles face ` a une faible disponibilit´ e en nutriments. Ce qu’on appelle assimilation corres- pond ici ` a l’incorporation dans les tissus de l’organisme d’un ´ el´ ement prove- nant d’une ressource trophique. L’assimilation int` egre donc la composition

´

el´ ementaire de cette ressource, son taux d’ingestion, sa digestion (par les en- zymes digestives de l’organisme et par l’action de son microbiote digestif), son absorption ` a travers les parois digestives ainsi que son incorporation dans les tissus. L’efficacit´ e de l’assimilation sur une ressource donn´ ee est un trait biologique relativement intrins` eque ` a un organisme (cf. la partie sur le microbiote digestif dont la composition peut ´ evoluer au cours de la vie d’un individu), qui refl` ete sa capacit´ e ` a extraire plus ou moins efficacement les nutriments ` a partir de cette ressource. Elle est donc mesur´ ee lorsque la res- source consid´ er´ ee est disponible ad libitum, ce qui veut dire que l’abondance de la ressource n’est pas prise en compte. On peut consid´ erer l’efficacit´ e (ou le taux) d’assimilation des nutriments comme un proxy de la performance de l’organisme sur les diff´ erentes ressources, car la quantit´ e de nutriments assi- mil´ es par unit´ e de temps contrˆ ole leur allocation ` a la maintenance, ainsi qu’` a la croissance et ` a la reproduction. ´ Etudier la strat´ egie d’assimilation d’un organisme revient alors ` a estimer sa position sur le continuum en´ eraliste (efficacit´ e d’assimilation identique sur toutes les ressources) - sp´ ecialiste (optimisation de l’assimilation sur une seule ressource).

La majorit´ e des articles abordant cette probl´ ematique supposent qu’une

diminution des ressources trophiques devrait s´ electionner des strat´ egies en´ e-

ralistes (Futuyma & Moreno 1988, Sherry 1990, Poisot et al. 2011). Dans

les environnements pauvres, adopter une strat´ egie g´ en´ eraliste serait le seul

moyen d’acqu´ erir assez de nutriments pour satisfaire ses besoins physiolo-

(30)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 15 giques, les organismes ne pouvant pas se permettre de d´ ependre uniquement de la pr´ esence d’une ou deux ressources faiblement abondantes (en quantit´ e absolue, par d´ efinition des milieux pauvres). L’acquisition des nutriments serait alors optimis´ ee par un investissement identique (en termes d’inges- tion, de s´ ecr´ etion d’enzymes digestives ou encore de voies m´ etaboliques sp´ ecifiques) sur toutes les ressources disponibles, ce qui r´ esulterait en une efficacit´ e d’assimilation similaire sur toutes ces ressources.

Cependant, un autre sc´ enario adaptatif peut aussi ˆ etre sugg´ er´ e, o` u un organisme sp´ ecialiste satisferait ses besoins en nutriments en se concen- trant sur une ou quelques ressources certes quantitativement peu abon- dantes dans son environnement (pauvre), mais qui seraient exploit´ ees de fa¸con optimale car cet organisme sp´ ecialiste aurait (par d´ efinition) maximis´ e son assimilation sur ces quelques ressources. G´ en´ eralement, cette strat´ egie sp´ ecialiste n’est viable que si la/les ressources de pr´ edilection sont relati- vement constantes dans l’environnement (sauf aptitudes de r´ esistance au jeˆ une). Sur sa ressource de pr´ edilection, le sp´ ecialiste aurait alors un avan- tage s´ electif (en termes d’extraction de nutriments) par rapport au g´ en´ eraliste.

En effet, comme le r´ esume bien la formule ‘Jack of all trades, master of none’

(Huey & Hertz 1984), le sp´ ecialiste est plus performant sur la ressource sur laquelle il est sp´ ecialis´ e que le g´ en´ eraliste quand il est restreint ` a une seule des ressources qu’il utilise (comme cela a ´ et´ e prouv´ e in situ chez des guˆ epes parasito¨ıdes par Rossinelli & Bacher (2015)). Cette diff´ erence s’explique par le coˆ ut inh´ erent au maintien de voies m´ etaboliques efficaces et sp´ ecifiques pour chaque ressource disponible, et donc les compromis ` a faire (‘trade-offs’) entre le nombre de voies d’extraction ` a maintenir et leur efficacit´ e (par ex.

Ward et al. (2011)).

Cette divergence de vues (entre adoption de strat´ egies g´ en´ eralistes ou sp´ ecialistes) n’a pas encore ´ et´ e clairement r´ esolue dans la litt´ erature par manque d’´ etudes de terrain confrontant les deux points de vue.

Nous allons maintenant passer en revue les diff´ erents niveaux biologiques

qui sont int´ egr´ es au travers de l’efficacit´ e d’assimilation des nutriments, et

qui peuvent donc expliquer ses variations.

(31)

Taux d’ingestion. Comme l’ont ´ evoqu´ e Cummins & Klug (1979) et Frost et al. (2005), des modifications de leur taux d’ingestion pourraient permettre aux organismes d’adapter leur acquisition de nutriments. On s’attend par exemple ` a une augmentation de la consommation de ressources ` a faible b´ en´ efice nutritionnel lorsque les ressources nutritionnellement plus avanta- geuses pour les organismes ne sont plus disponibles dans leur environnement.

Cette strat´ egie est appel´ ee

alimentation compensatoire

(‘compensatory feeding’). Cependant, elle a ´ et´ e mise en ´ evidence principalement dans des exp´ eriences ` a court-terme en laboratoire, par exemple avec des arthropodes (Cruz-rivera et al. 2000, Berner et al. 2005) ou des mollusques (Fink & Von Elert 2006).

Digestibilit´ e et microbiote du syst` eme digestif. La modulation de l’acquisition des nutriments peut aussi s’effectuer au niveau des processus post-ingestion, par exemple au travers de l’investissement dans la produc- tion d’enzymes digestives par l’organisme. Ces enzymes digestive sont re- lativement sp´ ecifiques au type de ressources/compos´ es qu’elles permettent de d´ egrader. La composition du r´ egime alimentaire influence donc la nature ainsi que l’activit´ e de ces enzymes s´ ecr´ et´ ees (Frost et al. 2005), comme cela a par exemple ´ et´ e mis en ´ evidence lors du changement de r´ egime alimentaire qui a accompagn´ e la domestication du chien (Axelsson et al. 2013). La pro- duction et l’activit´ e de ces enzymes digestives pourrait aussi th´ eoriquement ˆ

etre influenc´ ee par la disponibilit´ e des ressources trophiques dans l’environ- nement, ce qui permettrait une maximisation de l’apport nutritionnel en conditions trophiques faibles. Cette hypoth` ese est ´ etay´ ee par des approches de mod´ elisation de l’investissement ´ energ´ etique dans les processus diges- tifs chez des bivalves (Willows 1992). Ces mod` eles sugg` erent que l’efficacit´ e d’absorption est maximale aux plus faibles concentrations en nourriture, bien que cela implique des coˆ uts physiologiques plus importants pour l’or- ganisme.

La composition du r´ egime alimentaire influence aussi celle du micro-

biote du syst` eme digestif, c’est-` a-dire de l’ensemble des micro-organismes

pr´ esents dans le tube digestif de l’organisme et qui participent pour une large

(32)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 17 part ` a ses fonctions digestives. En effet, cette communaut´ e microbienne per- met entre autres ` a l’organisme de d´ egrader des compos´ es de base de son r´ egime alimentaire pour lesquels il ne poss` ede pas les enzymes digestives n´ ecessaires (par ex. la majorit´ e des polysaccharides tels que la cellulose ; Flint et al. (2008)). Cette d´ egradation par leur microbiote repr´ esente ainsi plus de 70 % de l’apport ´ energ´ etique des herbivores (Flint et al. 2008). La composition de ce microbiote et les fonctions biologiques associ´ ees sont in- fluenc´ ees par le r´ egime alimentaire de l’organisme-hˆ ote (De Filippo et al.

2010, Bertino-Grimaldi et al. 2013, Delsuc et al. 2014), et peuvent en retour influencer l’efficacit´ e d’absorption des nutriments. En effet, chez la souris et l’humain un lien a ´ et´ e r´ ecemment ´ etabli entre ob´ esit´ e et composition de cette communaut´ e microbienne, les fonctions port´ ees par cette commu- naut´ e r´ egulant le rendement ´ energ´ etique ` a partir de l’alimentation (Turn- baugh et al. 2006, Jumpertz et al. 2011, DiBaise et al. 2012). Des variations de cette communaut´ e ou de ses fonctions associ´ ees pourraient ainsi per- mettre ` a l’organisme-hˆ ote de s’adapter ` a des environnements pauvres par am´ elioration de la d´ egradation des ressources disponibles et de l’absorption ult´ erieure des nutriments extraits (Cummins & Klug 1979).

Voies m´ etaboliques impliqu´ ees dans l’assimilation des nutriments.

Une faible disponibilit´ e environnementale pourrait aussi s´ electionner des modifications de la nature et/ou de l’efficacit´ e des voies m´ etaboliques d’ac- quisition des nutriments (Merchant & Helmann 2012). Cette r´ eponse adap- tative comporte g´ en´ eralement une augmentation de l’expression des voies m´ etaboliques sp´ ecifiques aux nutriments peu abondants (Coleman & Chi- sholm 2010, Merchant & Helmann 2012), mais elle peut aussi inclure l’induc- tion de nouvelles voies m´ etaboliques pr´ esentant une meilleure affinit´ e pour leur substrat. Ainsi, Gianoulis et al. (2009) ont observ´ e sur un jeu de donn´ ees de m´ etag´ enomique d’´ echantillons oc´ eaniques que les voies m´ etaboliques ex- prim´ ees diff´ eraient selon les conditions environnementales. Il a ´ egalement

´

et´ e d´ emontr´ e qu’une faible disponibilit´ e en N entraˆıne chez la levure Sac-

charomyces cerevisiae l’induction d’une voie d’assimilation de l’ammonium

(GS/GOGAT) ` a haute affinit´ e mais peu efficace ´ energ´ etiquement (Boer

(33)

et al. 2003).

Transport des nutriments. De la mˆ eme fa¸con, des modifications de l’expression et/ou de l’affinit´ e des transporteurs de nutriments pourraient permettre d’optimiser leur acquisition (Merchant & Helmann 2012). Une augmentation de l’expression des transporteurs de P ou de compos´ es phos- phor´ es a ainsi ´ et´ e observ´ ee lors d’une diminution de la disponibilit´ e en P, chez la cyanobact´ erie Prochlorococcus (Coelho et al. 2013), la truite Onco- rhynchus mykiss (Sugiura et al. 2003) ou encore la diatom´ ee Thalassiosira pseudonana (Dyhrman et al. 2012). De la mˆ eme fa¸con, certains transpor- teurs de compos´ es azot´ es sont exprim´ es par des alphaprot´ eobact´ eries (Pe- lagibacter ) marines mais absents chez leurs homologues d’eaux douces, les milieux d’eau douce ´ etant plus riches en N que les milieux marins (Luo et al.

2015). De plus, une induction des transporteurs ` a haute affinit´ e pour leur substrat en parall` ele d’une diminution de l’expression des transporteurs ` a affinit´ e faible ou mod´ er´ ee ont ´ et´ e observ´ ees chez S. cerevisiae lors d’une limitation de la disponibilit´ e en glucose (Boer et al. 2003, Jansen et al.

2005).

Diminution de la s´ electivit´ e trophique (Figure 1.1, cadre A.2)

La r´ eponse adaptative des organismes ` a une diminution de la disponibi- lit´ e en nutriments peut ´ egalement passer par une modification des crit` eres de choix des ressources, l’organisme pouvant s´ electionner ses ressources uni- quement en fonction de leur avantage nutritionnel (contenu en nutriments ou qualit´ e stœchiom´ etrique) ind´ ependamment de leur abondance dans l’en- vironnement (s´ electivit´ e, Figure 2.B), mais aussi uniquement en fonction de leur abondance ind´ ependamment de leur avantage nutritionnel (non- electivit´ e, Figure 2.A). Toute la gamme de s´ electivit´ e trophique est pos- sible entre ces deux extrˆ emes, le degr´ e de s´ electivit´ e ´ etant la r´ esultante de multiples facteurs (environnementaux, morphologiques, biotiques ...).

Une diminution de ce degr´ e de s´ electivit´ e peut constituer une r´ eponse

adaptative des organismes transitant vers un environnement pauvre (Frost

(34)

1.2. R ´EPONSES ADAPTATIVES 19 et al. 2005). En effet, quelles que soient leurs abondances relatives, les res- sources de ces environnements pauvres sont potentiellement pr´ esentes en trop faibles quantit´ es absolues pour qu’un organisme puisse se nourrir ex- clusivement sur elles. Se nourrir non-s´ electivement sur toutes les ressources disponibles serait alors le seul moyen pour un organisme ´ evoluant dans un environnement pauvre d’acqu´ erir assez de nutriments pour satisfaire sa demande m´ etabolique. Selon les caract´ eristiques trophiques de l’environ- nement, l’organisme serait alors contraint de se nourrir sur des ressources potentiellement peu avantageuses (

r´ efractaires

, ` a faible contenu en nu- triments, ...). ` A l’inverse, on s’attend ` a ce qu’un organisme vivant dans un milieu plus riche soit ` a mˆ eme de se nourrir s´ electivement sur sa ou ses ressources de pr´ edilection (leurs quantit´ es absolues ´ etant g´ en´ eralement sup´ erieures), diminuant par ailleurs la pression de comp´ etition sur l’usage des ressources. La proportion des ressources

pr´ ef´ er´ ees

dans le r´ egime ali- mentaire augmenterait donc avec la disponibilit´ e globale en ressources.

Cette hypoth` ese est support´ ee par des exp´ eriences en laboratoire (par ex. Lacher (1982), Sih & Christensen (2001), Armstrong & Stamp (2003)) et par quelques ´ etudes de terrain (Srivastava & Lawton 1998, Sih & Chris- tensen 2001, Wiklund & Friberg 2009) visant ` a tester l’ ‘Optimal Foraging Theory’ (MacArthur et al. 1966, Schoener 1971, Pyke et al. 1977). Cette th´ eorie cherche ` a comprendre et ` a d´ ecrire, ` a l’´ echelle de l’individu, quels sont les crit` eres de choix entre toutes les ressources disponibles, en faisant l’hypoth` ese que cet individu cherche ` a maximiser son gain ´ energ´ etique ` a travers ses choix trophiques. Ce gain ´ energ´ etique d´ epend entre autres de l’abondance de la ressource, de sa composition ´ el´ ementaire, du temps et de l’´ energie n´ ecessaires pour l’obtenir ou encore des risques associ´ es ` a sa re- cherche (pr´ edation). Cependant, cette th´ eorie n’int` egre pas de composante

´

evolutive. Il serait donc int´ eressant d’´ etudier le degr´ e de s´ electivit´ e d’orga-

nismes r´ epartis le long d’un gradient environnemental de disponibilit´ e en nu-

triments, ce degr´ e de s´ electivit´ e pouvant ˆ etre la r´ esultante d’une s´ election sur

l’utilisation des ressources trophiques. On peut n´ eanmoins faire l’hypoth` ese

qu’une transition environnementale vers des environnements pauvres s’ac-

compagnerait d’une diminution du degr´ e de s´ electivit´ e trophique.

(35)

Dissimilarit´ e inter-individuelle des r´ egimes alimentaires

(Figure 1.1, cadre A.3)

Une autre hypoth` ese de la litt´ erature (quelque peu incompatible avec la pr´ ec´ edente) est que les r´ egimes alimentaires des individus d’une mˆ eme population se diff´ erencieraient d’autant plus que la disponibilit´ e globale en ressources diminue (Svanb¨ ack & Bolnick 2007, Robertson et al. 2015).

Cette dissimilarit´ e trophique entre individus permettrait ainsi de diminuer la pression de comp´ etition intra-populationnelle en situation de restriction trophique. Par exemple, Tinker et al. (2008) ont ´ etudi´ e deux populations de loutres vivant dans des environnements contrast´ es en termes de quantit´ es de proies pr´ esentes (la diversit´ e de ces proies restant identique). Ils ont ob- serv´ e que les individus de la population en environnement pauvre avaient tendance ` a restreindre leur r´ egime alimentaire ` a une ou deux proies et que ces proies n’´ etaient pas les mˆ emes selon les individus. Cette hypoth` ese de dissimilarit´ e inter-individuelle peut paraˆıtre incoh´ erente au regard du rai- sonnement d´ evelopp´ e dans le paragraphe pr´ ec´ edent (les ressources pr´ esentes dans les environnements pauvres ne seraient pas disponibles en assez grande quantit´ e (absolue) pour qu’un organisme puisse se nourrir exclusivement dessus). Cependant, on peut aussi penser que ces diff´ erents individus

dis- similaires

d’une mˆ eme population ne choisissent que des ressources qui sont parmi les plus abondantes du milieu (mˆ eme si elles restent faiblement dispo- nibles en quantit´ e absolue). De plus, ces ressources ne sont potentiellement pas assez abondantes pour soutenir la totalit´ e de la population, mais elles peuvent l’ˆ etre suffisamment pour soutenir une fraction de cette population.

On peut donc faire l’hypoth` ese qu’une transition environnementale vers

des environnements plus pauvres pourrait entraˆıner une plus forte dissi-

milarit´ e inter-individuelle en termes de r´ egimes alimentaires.

Références

Documents relatifs

Despite these strong arguments supporting that MNCs’ R&D operations in foreign locations may positively influence their productivity growth at home, evidence on the

Prenant en compte certains acquis de la sociologie des sciences et des techniques, notamment le socioconstructivisme ou la notion de social shaping of technology, cette

En fait, il faudrait plutôt parler d’emplois « verdissants », c’est-à-dire, prendre les emplois actuels et les transformer, les faire évoluer progressivement vers des emplois

La CSC Liège Huy Waremme, en partenariat avec la convention RISE, vous invite le vendredi 13 novembre 2015 à une matinée d’étude pour réfléchir aux pistes d’avenir en

D’où cette question complémentaire : « Quelle place pour l’économie sociale dans les leviers à mettre en œuvre pour assu- rer une transition juste pour les travailleurs et

Vérification graphique : Utilisation de GeoGebra Il faut trouver la valeur du rayon du cylindre qui donne comme volume

c’est appliquer la tactique R´ e´ ecrire de fa¸con intelligente jusqu’` a obtenir une forme que tout le monde est d’accord pour trouver optimale. On peut donner un sens pr´ ecis `

 L’hétérogénéité des services : Le secteur des services est d’une extrême diversité. Les différences en matière d’innovation semblent parfois plus importantes au sein