Universit´e Pierre et Marie Curie – Paris 6 Examen semestriel
Licence de Math´ematiques Analyse Hilbertienne et Num´erique
5 juin 2009 15h `a 18h
R´ esoudre chaque probl` eme sur une feuille s´ epar´ ee. Les appareils ´electroniques et les documents sont interdits. Les solutions devront ˆetre r´edig´ees de mani`ere ri- goureuse. Lorsque des r´esultats du cours seront utilis´es, ils devront clairement ˆetre
´enonc´es. On notera que certaines questions peuvent ˆetre r´esolues ind´ependamment.
Probl` eme I. (50 points) H et G sont des espaces hilbertiens complexes, et T : H → G est un op´erateur lin´eaire et born´e.
1/ Donner la caract´erisation de l’adjoint de T , que l’on d´esigne par T
∗. 2/ Montrer que T
∗∗= T .
3/ Soient (x
n)
n∈Nune base hilbertienne de H et `
2(N) = ©
(ξ
n)
n∈N∈ C
N| P
n∈N
|ξ
n|
2< +∞ ª . On rappelle que `
2(N) est un espace hilbertien muni du produit salaire
¡ (ξ
n)
n∈N, (η
n)
n∈N¢ 7→ X
n∈N
ξ
nη
n.
On pose
T : H → `
2(N) : x 7→ (hx | x
ni)
n∈N. Calculer T
∗.
4/ Soit V un sous-espace vectoriel ferm´e de H et soit P
Vson projecteur. Montrer que P
V∗= P
V. 5/ Montrer que ker(T
∗◦ T ) = ker T .
6/ Montrer que kT k = kT
∗k = p
kT ◦ T
∗k.
7/ On suppose que l’image Im T de T est ferm´ee, on fixe y ∈ G , et on pose C = ©
x ∈ H | (∀x
0∈ H) kT x − yk
G≤ kT x
0− yk
Gª .
On appelle C l’ensemble des solutions aux moindres carr´e de l’´equation T x = y.
a/ Montrer que les propri´et´es suivantes sont ´equivalentes.
i. x ∈ C.
ii. T x = P
ImTy.
iii. (T
∗◦ T )x = T
∗y.
b/ Montrer que C poss`ede un unique ´el´ement de norme minimale.
c/ On pose f : H → R: x 7→ kT x − yk
2G/2. Quel est l’ensemble des points critiques de f ?
1
Probl` eme II. (50 points)
1/ Soit A ∈ C
n×net soit ρ(A) son rayon spectral. On rappelle tout d’abord que pour tout ε ∈ ]0, +∞[, il existe une norme matricielle subordonn´ee k · k d´ependant de A et de ε telle que
ρ(A) ≤ kAk < ρ(A) + ε. (1)
a/ Montrer que si ρ(A) < 1, alors il existe une norme k · k telle que kAk < 1.
b/ En d´eduire que si ρ(A) < 1, la suite (A
k)
k≥0converge vers la matrice nulle [0].
c/ Montrer la r´eciproque : si la suite (A
k)
k≥0converge vers [0], alors ρ(A) < 1.
2/ Soient A ∈ R
n×n, c ∈ R
net x
(0)∈ R
n. On consid`ere la suite (x
(k))
k≥0de R
nd´efinie par (∀k ∈ N) x
(k+1)= Ax
(k)+ c.
a/ Supposons que la suite (x
(k))
k≥0converge dans R
nvers un certain ¯ x ∈ R
n. De quel syst`eme lin´eaire ¯ x est-il solution ? On suppose dans la suite que ce syst`eme admet une solution unique.
b/ D´eterminer une condition suffisante sur ρ(A) pour que la suite (x
(k))
k≥0converge. Montrer que ce n’est pas une condition n´ecessaire.
c/ On suppose que A est sym´etrique r´eelle et qu’elle v´erifie la condition du 2/b/. Montrer que la suite (x
(k))
k≥0converge d’autant plus vite que ρ(A) est petit (on pourra ´etudier le syst`eme v´erifi´e par P
−1(x
(k)− x), o` ¯ u P est la matrice des vecteurs propres de A).
3/ Soient A et B deux matrices inversibles de R
n×net soient a et b deux vecteurs de R
n. On consid`ere les suites (x
(k))
k≥0et (y
(k))
k≥0d´efinies par
(∀k ∈ N)
( x
(k+1)= By
(k)+ a
y
(k+1)= Ax
(k)+ b, (2)
o` u x
(0)∈ R
net y
(0)∈ R
nsont donn´es.
a/ Supposons que les suites (x
(k))
k≥0et (y
(k))
k≥0convergent respectivement vers ¯ x ∈ R
net
¯
y ∈ R
n. De quels syst`emes lin´eaires ¯ x et ¯ y sont-ils solutions ? On suppose dans la suite que ces syst`emes admettent une solution unique.
b/ D´eterminer une condition suffisante sur ρ(AB) pour que les deux suites convergent.
c/ Soit z
(k)=
· x
(k)y
(k)¸
∈ R
2n. Montrer que (2) peut s’´ecrire
z
(k+1)= Cz
(k)+ c o` u C ∈ R
2n×2net c ∈ R
2n. Expliciter C et c.
d/ i. Montrer que si λ est valeur propre de C, alors λ
2est valeur propre de AB.
ii. Montrer que si µ est valeur propre de AB avec pour vecteur propre associ´e u, et si β
2= µ, alors β est valeur propre de C avec pour vecteur propre associ´e £
Buβu
¤ . iii. En d´eduire que (ρ(C))
2= ρ(AB).
e/ On consid`ere maintenant la m´ethode it´erative suivante :
(∀k ∈ N)
( x
(k+1)= By
(k)+ a
y
(k+1)= Ax
(k+1)+ b, (3)
Reprendre les questions 3/a/, 3/b/ et 3/c/ pour cette m´ethode.
f/ Montrer pour la m´ethode (3) que ρ(C) = ρ(AB).
g/ Dans le cas o` u les m´ethodes (2) et (3) convergent, comparer leurs vitesses de convergence.
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Paris 6 – Licence de Math´ematiques – Analyse Hilbertienne et Num´erique Solution de l’examen de juin 2009
Solution du Pb I :
1/ (∀x∈ H)(∀y∈ G)hT x|yiG =hx|T∗yiH.
2/ Fixons (x, y) ∈ H × G. Alors hT∗∗x|yiG =hy|T∗∗xiG = hT∗y|xiH =hx|T∗yiH = hT x|yiG. Par suiteh(T∗∗−T)x|yiG = 0 et donc (prendrey= (T∗∗−T)x) on obtientT∗∗=T.
3/ Soient x∈ Het y= (ηn)n∈N∈`2(N). On a hT x|yi`2=X
n∈N
hx|xniHηn=X
n∈N
hx|ηnxniH=
* x
¯¯
¯¯
¯ X
n∈N
ηnxn
+
H
=hx|T∗yiH Donc
T∗:`2(N)→ H: (ηn)n∈N7→X
n∈N
ηnxn.
4/ Posons T = PV. Alors (∀x ∈ H), x−T x ⊥ V. Donc, pour tout (x, y) ∈ H2, hT x|y−T yi = hT x−x|T yi= 0. On en d´eduit quehT x|yi=hT x|y−T yi+hT x|T yi=hT x|T yi=hT x−x|T yi+
hx|T yi=hx|T yiet nous obtenonsT∗=T.
5/ Fixons x∈ H. AlorsT x= 0G ⇒T∗(T x) = 0H. Donc kerT ⊂ker(T∗◦T). R´eciproquement, puisque hT∗◦T x|xiH =hT x|T xiG =kT xk2G, (4) T∗◦T x= 0H ⇒T x= 0G. Donc ker(T∗◦T)⊂kerT.
6/ Soit x ∈ H. Alors kT xk2G = hT x|T xiG = hx|T∗◦T xiH ≤ kxkHkT∗◦T xkH ≤ kT∗◦Tk kxk2H ≤ kT∗k kTk kxk2H. Par suite,
kTk2= sup
kxkH≤1
kT xk2G ≤ kT∗◦Tk ≤ kT∗k kTk (5) et donc kTk ≤ kT∗k. De mˆeme, par2/, nous obtenons kT∗k ≤ kT∗∗k=kTk. En r´esum´e,kT∗k=kTk et (5) entraˆıne kT∗◦Tk=kTk2.
7/ a/ Fixons x∈ H. Alors
(∀z∈ H) kT x−ykG ≤ kT z−ykG ⇔ (∀r∈ImT) kT x−ykG ≤ kr−ykG
⇔ T x=PImTy. (6)
Ceci prouve7/(a/)i ⇔7/(a/)ii. De plus, puisque ImT est une s.e.v. ferm´e, le th´eor`eme de pro- jection affirme quePImTyest un point bien d´efini dans ImT. Par suite,C est l’ensemble non-vide T−1({PImTy}).7/(a/)ii ⇔7/(a/)iii : D’apr`es le th´eor`eme de projection,
T x=PImTy ⇔ (∀r∈ImT) hr|T x−yiG = 0
⇔ (∀z∈ H) hT z|T x−yiG = 0
⇔ (∀z∈ H) hz|T∗(T x−y)iH= 0
⇔ T∗◦T x=T∗y.
b/ Il d´ecoule de7/(a/)iii queC=©
x∈ H |T∗◦T x=T∗yª
est un sous-espace affine, donc convexe, ferm´e de H. Donc PC0H, qui est l’´el´ement de norme minimale dansC, est bien d´efini de mani`ere unique par le th´eor`eme de projection.
c/ D’apr`es le cours,∇f:x7→T∗(T x−y). Donc l’ensemble des points critiques def estC.
On retrouve l’expression de ∇f(x) comme suit : on a f(x+y)−f(x) = 1
2
¡kT x−b+T yk2− kT x−bk2¢
= 1
2
¡2hT x−b|T yi+kT yk2¢
= hy|T∗(T x−b)i+1 2kT yk2.
Ainsi, |f(x+y)−f(x)− hy|T∗(T x−b)i | = 12kT yk2 ≤ 12kTk2kyk2. D’apr`es la d´efinition du gradient, on a bien ∇f(x) =T∗(T x−b).
3
Solution du Pb II :
1/ a/ Comme ρ(A)<1, il existeε∈]0,+∞[ tel queρ(A) = 1−2ε. En utilisant (1), on obtientkAk= 1−ε <1.
b/ La norme de la question pr´ec´edente ´etant une norme matricielle, on a kAkk ≤ kAkk. Comme kAk<1 on obtient bien la convergence de la suite (Ak)k≥0 vers [0].
c/ Si ρ(A)≥1, il existeλ∈Cet u∈Cn\ {0} tels que|λ| ≥1 etAu=λu, c’est-`a-direAku=λku.
Donc|||u||| ≤ |λ|k· |||u|||=|||λku|||=|||Aku||| ≤ kAkk · |||u|||o`u||| · |||d´esigne une norme surCnetk · kla norme matricielle qui lui est subordonn´ee. On obtient donc 1≤ kAkk, ce qui contredit l’hypoth`ese de convergenceAk →0.
2/ a/ On obtient ¯x=A¯x+c, c’est-`a-dire (I−A)¯x=c.
b/ La condition suffisante est ρ(A) < 1. D´efinissons e(k) = x(k)−x. On a alors¯ e(k) = Ae(k−1) = Ak(x(0) −x), ce qui donne¯ |||e(k)||| ≤ kAkk · |||x(0)−x|||. Ainsi, si¯ ρ(A) < 1, alors e(k) → 0 et la m´ethode it´erative converge vers ¯x. En outre, on voit dans l’in´egalit´e pr´ec´edente que si x(0) = ¯x, alors (∀k∈N)e(k)= 0.
c/ La matriceA´etant sym´etrique r´eelle, elle est diagonalisable dansR:A=P DP−1. Notonsf(k)= P−1e(k). On a alorsf(k)=Dkf(0) dont on d´eduitkf(k)k2≤ρ(A)kkf(0)k2puisque Dest normale.
Donc plus ρ(A) est petit, plusf(k)(et donce(k)) converge vers 0.
3/ a/ On a ¯x = By¯+a et ¯y = Bx¯+b, ce qui donne apr`es remplacement (I−BA)¯x = Bb+a et (I−AB)¯y=Aa+b.
b/ On a (
x(k+1)=B(Ax(k−1)+b) +a=BAx(k−1)+Bb+a y(k+1)=A(By(k−1)+a) +b=ABy(k−1)+Aa+b
et donc (x(k))k converge si ρ(BA) <1 et (y(k))k converge si ρ(AB) <1. Soit (λ, u) un ´el´ement propre deAB, i.e.ABu=λu, alors si v=Buon a BAv=λv (v6= 0 caru6= 0 etB inversible).
Doncρ(AB) =ρ(BA). Il suffit donc queρ(AB)<1.
c/ On a z(k+1)=Cz(k)+c avecC=
·0 B A 0
¸ et c=
·a b
¸ . d/ i. Soitλune valeur propre deC et z=
·x y
¸
∈C2n un vecteur propre associ´e. On a
Cz=λz⇐⇒
(By=λx
Ax=λy =⇒ABy=λAx=λ2y.
On en d´eduit donc queλ2est valeur propre deAB.
ii. Soit maintenant µ une valeur propre de AB et u ∈Cn un vecteur propre associ´e. On pose x=Buet y=βu, o`uβ2=µ(noter queµ∈C). On a alors
C
·x y
¸
=
·By Ax
¸
=
·βBu ABu
¸
=
·βBu µu
¸
=β
· Bu (µ/β)u
¸
=β
·x y
¸ . iii. Par d´efinition du rayon spectral.
e/ i. Les limites ¯xet ¯y sont les solutions des mˆemes syst`emes lin´eaires que pr´ec´edemment.
ii. En suivant le mˆeme raisonnement : il suffit queρ(AB)<1.
iii. On aC=
·0 B 0 AB
¸ etc=
· a Aa+b
¸ .
f/ Soitz = (x, y). AlorsCz=λz⇒ABy=λy et x=By. Commexet y ne peuvent pas ˆetre tous les deux nuls et quex=By,B ´etant inversible, on en d´eduit quey6= 0. Doncλest valeur propre deAB. Inversement, si (λ, u) est un ´el´ement propre deAB, on voit facilement que (λ,(Bu, u)) est un ´el´ement propre de C. Doncρ(C) =ρ(AB).
g/ On suppose donc queρ(AB)<1. On a vu que la vitesse de convergence d´epend du rayon spectral de la matrice d’it´erationC. On d´eduit des questions3/(d/)iii et3/f/que la m´ethode (3) converge plus rapidement que la m´ethode (2) puisque 0< ρ(AB)<p
ρ(AB)<1.