Institut Galilée
Sciences et technologies
Licence 1
èreannée
Cours d’algèbre linéaire : première partie.
Version du 6 février 2014.
Deuxième semestre Département de Mathématiques
www.math.univ-paris13.fr/departement/index.php/fr/
INSTITUT GALILEE, 99 avenue Jean-Baptiste-Clément 93430 VILLETANEUSE 2013/2014c
I. Les nombres complexes
Pour les deux premiers chapitres, le lecteur pourra consulter le livre de Liret et Mar- tinais1.
I.1. Les nombres réels ne suffisent pas
I.1.a. L’équation du second degré à coefficients réels Dans de nombreux problèmes on rencontre une équation du type :
(E) ax2+bx+c= 0,
d’inconnue réelle x, avec a, b, c des réels eta 6= 0. Pour résoudre une telle équation du second degré à une inconnue, on écrit
ax2+bx+c=a
x2+ b ax+ c
a
=a
x2+ 2 b 2ax+ c
a
et on reconnaît le début du développement de
x+ b 2a
2
=x2+ 2 b 2ax+
b 2a
2
d’où
(I.1) ax2+bx+c=a
"
x+ b
2a 2
− b
2a 2
+ c a
#
=a
"
x+ b
2a 2
− b2−4ac 4a2
# .
On note∆le discriminantb2−4ac. Puisqueaest non nul, l’équation (E) est équivalente à sa forme canonique :
(I.2)
x+ b
2a 2
= ∆ 4a2. et on distingue trois cas :
1. François Liret et Dominique Martinais. Algèbre 1re annèe - Cours et exercices avec solutions.
Dunod, deuxième édition, 2003
– Premier cas: si ∆>0, on peut écrire : ∆ 4a2 =
√∆ 2a
!2
et l’équation (E) devient :
(I.3) x+ b
2a+
√
∆ 2a
! x+ b
2a−
√
∆ 2a
!
= 0.
Il y a alors 2 solutions distinctes x1= −b−√
∆
2a et x2 = −b+√
∆ 2a On peut factoriser ax2+bx+c. D’après (I.1) on a :
ax2+bx+c=a(x−x1)(x−x2).
– Deuxième cas: si∆ = 0, l’équation(E)devienta
x+ b 2a
2
= 0. Elle admet une seule solution (double) x0 =− b
2a et on a la factorisation : ax2+bx+c=a(x−x0)2 – Troisième cas: si ∆<0, on a :
ax2+bx+c=a
"
x+ b
2a 2
+−∆
4a2
#
| {z }
strictement positif car∆<0
.
On en déduit que l’équation(E)n’a pas de racine réelle et queax2+bx+cne peut pas se factoriser (sur R). Plus précisément, on ne peut pas écrire ax2 +bx+c = a(x−x1)(x−x2)avec x1, x2 ∈R.
Exemples I.1.1.
a. Résoudre 2x2−8x+ 6 = 0. Peut-on factoriser 2x2−8x+ 6?
Le discriminant de cette équation est ∆ = (−8)2 −4×2×6 = 16 = 42 > 0. Les solutions sont doncx1= −(−8)−4
2×2 = 1 etx2 = −(−8) + 4
2×2 = 3. On en déduit : 2x2−8x+ 6 = 2(x−1)(x−3).
b. Résoudre 3x2−12x+ 12 = 0. Peut-on factoriser (surR) 3x2−12x+ 12?
Le discriminant de cette équation est ∆ = (−12)2−4×3×12 = 0. Elle admet une seule solutionx0 =−−12
2×3 = 2et on a :
3x2−12x+ 12 = 3(x−2)2.
I.1. Les nombres réels ne suffisent pas c. Résoudre 2x2+ 8x+ 9 = 0. Peut-on factoriser (sur R) 2x2+ 8x+ 9?
Le discriminant de cette équation est∆ = 82−4×2×9 =−8<0.
Il n’y a donc pas de solution réelle et2x2+ 8x+ 9ne peut pas se factoriser (sur R).
Exercice I.1.2. Résoudre :
6x2−x−1 = 0, 3x2−2√
3x+ 1 = 0, 1
2x2+ 2x+ 5 = 0.
Peut-on factoriser ?
I.1.b. Un peu d’histoire
Nous venons de voir que toutes les équations de degré 2 n’admettent pas nécessairement de racine réelle. En particulier, l’équation simplex2=−1 soit :
x2+ 1 = 0
n’admet pas de solution dans les nombres réels. Pour y remédier, les mathématiciens ont introduit un nombre dit imaginaire notéitel quei2=−1et construit les nombres complexes.
L’introduction de ces nouveaux nombres remonte au XVIemesiècle. Les algébristes italiens de l’université de Bologne (Del Ferro, Tartaglia, Cardan, ...), ont découvert les formules permettant de résoudre les équations polynomiales du troisième degré, comme par exemple
x3−7x+ 6 = 0.
Ils ont constaté un fait qui leur a paru incompréhensible. Chaque fois qu’une équation de ce type possède trois solutions réelles, comme 1, 2 et -3 pour l’équation précédente, les formules qui leur permettaient de calculer ces solutions faisaient intervenir des racines carrées de nombres négatifs.
Ils ont alors considéré ces racines carrées comme nouveaux nombres qu’ils ont appelés nombres impossibles. Néanmoins l’introduction de ces nouveaux nombres ne s’est pas faite sans mal.
La suite est tirée deImages, imaginaires, imaginations, une perspective historique pour l’in- troduction des nombres complexes IREM, éd. Ellipse. p. 157.
En 1637, Descartes dans saGéométrie, propose d’accepter comme solution d’une équation non seulement les nombres négatifs, mais aussi ceux qui pourraient comporter une racine carrée d’un nombre négatif. Il justifie ceci par un théorème qui ne sera vraiment démontré qu’au XIXeme siècle et qui deviendra le théorème fondamental de l’algèbre :
Une équation de degrénadmetnsolutions, si on accepte les négatives, celles qui comportent une racine carrée d’un nombre négatif et les multiplicités.
La construction rigoureuse des nombres complexes n’a été achevée qu’à la fin du XVIIIeme siècle. La notation définitive est due à Euler. Dans Eléments d’algèbre il écrit en 1774 en s’ins- pirant des règles de calcul pour les racines carrées des nombres positifs :
Maintenant comme−asignifie autant que +amultiplié par−1, et que la racine carrée d’un produit se trouve en multipliant ensemble les racines des facteurs, il s’ensuit que la racine dea multiplié par −1, ou√
−a, est autant que√
amultiplié par√
−1.
Or √
a est un nombre possible ou réel, par conséquent ce qu’il y a d’impossible dans une quantité imaginaire, peut toujours se réduire à√
−1. Par cette raison donc,√
−4est autant que
√4multiplié par √
−1et autant que 2.√
−1, à cause de√
4 égale à 2. Par la même raison√
−9 se réduit à√
9.√
−1, ou3√
−1 et√
−16signifie4√
−1.
De plus comme√
amultipliée par√ bfait√
ab, on aura√
6pour la valeur de√
−2multipliée par√
−3.
Exercice I.1.3.
a. D’après la définition, à quoi est égal(√
−1)2? En appliquant les règles du calcul algébrique calculez√
−1 .√
−1.
Ces deux résultats sont-ils compatibles ? b. Euler écrit aussi√
−2.√
−3 =√
6! Or, suivant la démarche d’Euler, on va écrire
√−2.√
−3 =√ 2.√
−1.√ 3.√
−1 =√ 2.√
3.(√
−1)2=...=...
Ces deux égalités sont-elles compatibles ? Il est donc difficile d’utiliser la notation √
−a pour un réel a > 0, et de continuer à utiliser les règles de calcul connues pour les nombres positifs. Euler va lui-même s’apercevoir de ces contradictions. Aussi décidera-t-il de noter pari(début d’imaginaire ou impossible) la quantité qu’il notait√
−1.
On peut tout de suite noter la règle suivante : La notationracine carrée √
ne s’utilise qu’avec des nombres réels positifs
I.2. Forme cartésienne d’un nombre complexe, addition et multiplication
I.2.a. Rappel : produit cartésien de deux ensembles
Définition I.2.1. SoitAetBdeux ensembles. Le produit cartésienA×Best l’ensemble des couples(a, b) avec a∈A etb∈B. On noteA2=A×A.
En particulierR2 est l’ensemble des couples de réels(x, y). L’ordre est important : par définition,(x, y) = (x0, y0) si et seulement six=x0 ety =y0. Ainsi,(1,2)6= (2,1).
I.2.b. Construction des nombres complexes
Nous avons vu qu’il a été nécessaire d’introduire des nombres ayant un carré négatif.
Pour ce faire, on va construire un ensemble muni de deux opérations, l’ensemble des nombres complexes, qui contient les nombres réels et des nombres dits imaginaires, dont le nombreivérifiant i2=−1.
Par définition,C(l’ensemble desnombres complexes) est l’ensembleR2 muni des deux opérations suivantes.
– Addition :
(x, y) + (x0, y0) = (x+x0, y+y0).
– Multiplication :
(x, y).(x0, y0) = (xx0−yy0, xy0+yx0).
Si z = (x, y) ∈ C, le nombre réel x est appelé partie réelle de z et noté Rez. Le nombre réelyest appelépartie imaginaire de zet notéImz. Par définition, deux nombres complexesz etz0 sont égaux lorsque leurs parties réelle et imaginaire sont égales.
I.2. Forme cartésienne d’un nombre complexe, addition et multiplication Un nombre complexe de la forme(x,0)est dit réel et simplement notéx, ce qui permet d’identifierRà un sous-ensemble deC. En effet, l’addition et la multiplication complexes restreintes aux nombres réels coïncident avec l’addition et la multiplication réelles :
(x,0) + (x0,0) = (x+x0,0), (x,0).(x0,0) = (xx0,0).
Un nombre complexe de la forme(0, y) est appelé nombre imaginaire pur et noté iy.
Le seule nombre réel et imaginaire pur est le nombre (0,0), noté simplement0. On note i le nombre complexe1i. Par définition de la multiplication sur les nombres complexes, on a :
i2 =−1.
Compte tenu de l’identification précédente et de la définition de l’addition complexe, tout nombre complexe s’écrit(x, y) =x+iy: cette écriture est appeléeforme cartésienne d’un nombre complexe. Elle est unique : si x, x0, y ety0 sont des nombres réels,
x+iy=x0+iy0 ⇐⇒ x=x0 ety=y0 .
On utilisera désormais systématiquement la notation x+iy, au lieu de (x, y).
Pour récapituler, on peut oublier la construction précédente, et décrireCcomme suit.
Les nombres complexes sont les nombres z =x+iy où x (la partie réelle de z) et y (la partie imaginaire de z) sont des nombres réels, et i2 = −1. Ils s’additionnent et se multiplient de la manière suivante :
(x+iy) + (x0+iy0) =x+x0+i(y+y0) (I.4)
(x+iy).(x0+iy0) =xx0−yy0+i(xy0+yx0).
(I.5)
Remarque I.2.2. Le produitz.z0 de deux nombres complexesz etz0 est aussi notézz0 ou z×z0.
I.2.c. Propriétés de l’addition et de la multiplication
Toutes les propriétés de l’addition et de la mutiplication dansR(commutativité, asso- ciativité, distributivité...) restent vraies dansC. Ainsi, il est facile de vérifier que (à faire au moins une fois) :
i. z+ 0 = 0 +z=z,1z=z1 =z et0z=z0 = 0.
ii. z+z0 =z0+z et zz0 =z0z.
iii. z+ (z0+z00) = (z+z0) +z00 et z(z0z00) = (zz0)z00. iv. z(z0+z00) =zz0+zz00.
Remarque I.2.3. On peut écrire la somme (respectivement le produit) de trois nombres complexesz,z0 etz00, sans parenthèse :z+z0+z00 (respectivementz z0z00). Ces notations ne sont pas ambiguës du fait de l’associativité de l’addition et de la multiplication iii.
Remarque I.2.4. Il est inutile d’apprendre par coeur la formule (I.5) définissant la mul- tiplication de deux nombres complexes. Elle se retrouve immédiatement en utilisant les propriétés précédentes et le fait quei2 =−1 :
(x+iy)(x0+iy0) =xx0+iyx0+xiy0+iyiy0 =xx0−yy0+i(xy0+x0y).
Remarque I.2.5. La formule du binôme ainsi que les formules des sommes de suites arith- métiques et géométriques découlent des propriétés standard de l’addition et de la multi- plication : elles restent vraies pour des nombres complexes. Ces formules sont à savoir.
Elles sont rappelées en appendice (cf I.7.b, I.7.c).
I.2.d. Représentation dans le plan
Le plan est muni d’un repère orthonormé(O,−→e1,−→e2).
i. Par construction deC(I.2.b plus haut), le nombre complexezde forme cartésienne x+i y est naturellement associée au pointM de coordonnées(x, y).
M estl’image ponctuellede z etz estl’affixede M.
ii. On associe aussi le nombre complexez de forme cartésiennex+i y avec le vecteur
~
v =−−→
OM =x−→e1 +y−→e2.~v estl’image vectoriellede z etzest l’affixedu vecteur~v.
Par définition, deux nombres complexes sont égaux s’ils ont même partie réelle et même partie imaginaire.
x+iy=x0+iy0 si et seulement si x=x0 ety=y0,
c’est à dire si et seulement si leurs images (ponctuelle ou vectorielle) sont confondues.
On peut facilement interpréter géométriquement l’addition surC. Étant donnés deux nombres complexesz = x+iy et z0 = x0 +iy0, si on note ~v et~v0 les vecteurs du plan complexe d’affixeszetz0, le nombrez+z0 est l’affixe du vecteur~v+~v0(la somme s’obtient par la loi du parallélogramme) (c.f. figure I.1 p. 7).
I.3. Autres opérations sur les nombres complexes
On a vu la définition de l’addition et la multiplication de deux nombres complexes.
On définit ici d’autres opérations sur ces nombres : opposé, différence, conjugaison et module.
I.3.a. Opposé, différence de nombres complexes
Pour toutz=x+yi∈C, le nombre complexe−1z=−x+ (−y)iest l’unique nombre complexe z0 tel que z+z0 = 0; ce nombre complexe est l’opposé de z et on le note simplement −z. La différence z−z0 de deux nombres complexes, est alors définie par z−z0 =z+ (−z0).
I.3. Autres opérations sur les nombres complexes
I.3.b. Conjugaison et module Définition I.3.1.
Si z ∈ C, x = Rez, y = Imz, le nombre complexe z = x−yi est appelé le complexe conjugué de z.
Le nombre réel positif |z|=p
x2+y2 est appelé le module dez.
La conjugaison est une involution :
z =z.
Un calcul simple (à faire) montre :
(I.6) |z|2 =zz.
Par ailleurs
|z|2 = 0 ⇐⇒ x= 0 ety= 0 ⇐⇒ z= 0.
Interprétation géométrique
Soitz un nombre complexe, d’affixe M. Le conjugué z dez a pour affixe M0, l’image de M par la symétrie d’axe Ox. Le module de z est la distanceOM (cf figure I.1 p. 7).
z=x+iy
z+z’
z’
z=z-iy iz=-y+ix
x
-y y
x -y
i
FigureI.1.: Le plan complexe : coordonnées cartésiennes
Compatibilité avec l’addition et la multiplication – Concernant la conjugaison on a :
i. z+z0 = ¯z+ ¯z0 et z.z0 = ¯z.¯z0. ii. Rez= z+ ¯z
2 et Imz= z−z¯ 2i . iii. z= ¯z si et seulement siz est réel.
iv. z=−¯z si et seulement siz est imaginaire pur.
Les preuves sont laissées au lecteur. On retiendra que la conjugaison est compatible avec les opérations (propriétés i), et permet avec les trois dernières relations de déterminer si un nombre complexe est réel ou imaginaire pur.
– Concernant le module, on a déjà vu que|z|2 =z¯z (I.6), on a aussi : v. |Rez| ≤ |z|, |Imz| ≤ |z| et |z|=|¯z|.
vi. |z.z0|=|z|.|z0|.
vii. |z+z0| ≤ |z|+|z0|, (inégalité triangulaire).
viii. ||z| − |z0|| ≤ |z−z0|.
Le module est donc compatible avec le produit et le quotient (propriété vi). Par contre, on a seulement une inégalité pour la somme, l’inégalité triangulaire vii.
Démonstration. – La propriété v s’obtient par des calculs directs.
– Pour vi on peut par exemple utiliser (I.6) et la propriété i.
– La démonstration de l’inégalité triangulaire n’est pas directe :
On a avec (I.6) :|z+z0|2= (z+z0)(z+z0) = (z+z0)(¯z+ ¯z0) =|z|2+|z0|2+z¯z0+ ¯zz0. Or par izz¯ 0 =zz0. Donc par ii,
zz¯0+ ¯zz0=z¯z0+z¯z0 = 2 Re(z¯z0)≤2|z¯z0|= 2|z||z0|.
Ainsi, on obtient avec la première égalité
|z+z0|2 ≤ |z|2+|z0|2+ 2|z||z0|= (|z|+|z0|)2
ce qui donne l’inégalité triangulaire puisque deux nombres positifs sont dans le même ordre que leurs carrés (car la fonctionx7→x2 est croissante surR+).
– La dernière inégalité viii se déduit de la précédente, en écrivantz= (z−z0) +z0.
I.3.c. Inverse et quotient
Inverse d’un nombre complexe non nul
Proposition I.3.2. Pour tout nombre complexe z∈C\ {0}, il existe un unique z0 ∈C tel que zz0= 1. De plus, z0 = |z|12z.¯
Remarque I.3.3. L’expression |z|12z¯dans la proposition désigne le produit du nombre réel
1
|z|2 (bien défini, car |z|est un réel non nul) par le nombre complexez.¯
I.3. Autres opérations sur les nombres complexes Démonstration. Commençons par montrer l’unicité. Soit z ∈ C non nul, et z0 tel que zz0 = 1. En multipliant par z¯ et en utilisant la formule (I.6) zz = |z|2, on obtient
|z|2z0 = ¯z. On multiplie ensuite par le nombre réel |z|12, ce qui donne
(I.7) z0 = 1
|z|2z.¯
Si z0 est un inverse de z, il est donc obligatoirement donné par la formule (I.7) ce qui donne l’unicité.
Réciproquement, en utilisant encore la formule (I.6), on a bienz|z|12z= 1.
Définition I.3.4. Pour tout nombre complexez non nul, l’uniquez0 tel quezz0 = 1est appelé inverse de z et noté 1
z.
Corollaire I.3.5. Si zz0= 0 alors z= 0 ou z0 = 0.
Démonstration. Supposons zz0 = 0 etz 6= 0. En multipliant l’équation zz0 = 0 par 1/z on obtientz0 = 0.
Quotient
– Siz, z0 ∈Cet si z0 6= 0, le quotient dez parz0 noté z
z0 est défini par z
z0 =z× 1 z0. – Méthode pour trouver la forme cartésienne d’un quotient :
siz=x+iy,z0 =x0+iy0 6= 0 alors z
z0 =zz0
z0z0 = (x+iy)(x0−iy0) (x0+iy0)(x0−iy0)
=xx0+yy0+i(x0y−xy0) (x0)2+ (y0)2
= xx0+yy0
(x0)2+ (y0)2 +i x0y−xy0 (x0)2+ (y0)2.
– Compatibilité avec la conjugaison et le module Si z, z0 ∈ C avec z0 6= 0, alors (z
z0) = z¯
¯ z0 et
z z0 = |z|
|z0|. (ceci découle des formules ab = ¯a¯b et |ab| = |a||b|
appliquées à a=z0,b= zz0).
Exercices
Exercice I.3.6. Calculer z
z0 dans chacun des cas suivants : i. z= 1−i, z0 =√
2 +√ 2i.
ii. z= 1−i, z0 = 1 +i√ 3.
iii. z=−√
3−i, z0=i.
iv. z= 3 + 2i, z0 = 3−2i.
Solution du premier cas : 1−i
√2 +√
2i = (1−i)(√ 2−√
2i) (√
2 +√ 2i)(√
2−√ 2i) =
√2−√
2 +i(−√ 2−√
√ 2) 22+√
22
=−i
√2 2 . Exercice I.3.7.
a. Soit M un point du plan d’affixez6= 0. Construire le point M’ d’affixe 1/z.
b. Comment faut-il choisirz pour que Z = 5z−2
z−1 soit réel ?
c. Déterminer l’ensemble des nombres complexesztels que(z+1)(¯z−i)soit un imaginaire pur.
I.4. Forme polaire d’un nombre complexe
I.4.a. Rappels
Pour repérer un point M dans le plan, on peut utiliser les coordonnées cartésiennes (x, y), mais aussi les coordonnées polaires(r, θ) où r est la longueur du segmentOM et θest une mesure de l’angle (−→
Ox,−−→
OM).
Les relations entre coordonnées cartésiennes et coordonnées polaires sont : x=rcosθety=rsinθ.
Tout nombre complexez=x+i ypeut donc s’écrire sous la formez=r(cosθ+isinθ), avecr un nombre réel positif.
I.4.b. Définition
– Cette écriturez=r(cosθ+isinθ)avec r≥0est appelée la forme polaire de z.
– r =p
x2+y2 est exactement le module dez.
– θ , notéarg(z), est un argument de z. Remarquons queθ est défini modulo2π.
Notation I.4.1. On notea≡b mod 2π (oua=b mod 2π) quand
∃k∈Z, a=b+ 2kπ.
I.4.c. Propriétés
– Égalité : deux nombres complexes non nuls, exprimés sous forme polaire, sont égaux si et seulement s’ils ont même module et si leurs arguments diffèrent de 2kπ, où k est un nombre entier.
– Produit : siz1 =r1(cosθ1+isinθ1) etz2 =r2(cosθ2+isinθ2) sont deux nombres complexes non nuls, exprimés sous forme polaire, le calcul de leur produit donne
z1z2 =r1r2h
cosθ1cosθ2−sinθ1sinθ2+i(cosθ1sinθ2+ cosθ2sinθ1)i
=r1r2(cos(θ1+θ2) +isin(θ1+θ2)),
I.4. Forme polaire d’un nombre complexe
par des formules trigonométriques classiques. On en déduit les relations : (I.8) |z1z2|=|z1| |z2| et arg(z1z2)≡arg(z1) + arg(z2) mod 2π.
Siz6= 0
1 z
= 1
|z| etarg(1
z) =−arg(z) mod 2π (d’après l’égalitéz 1 z = 1).
– Conjugaison : siz6= 0,arg(z) =−arg(z) mod 2π.
Ceci découle immédiatement des formulescos(−θ) = cosθ,sin(−θ) =−sinθ.
– Méthode pour trouver la forme polaire d’un nombre complexez=x+yi6= 0: siθ est un argument dez, on a :z=|z| z
|z| =|z| x
px2+y2 +i y px2+y2
! ainsi : cosθ= x
px2+y2 et sinθ= y px2+y2. Exercice I.4.2. Écrire sous forme polaire :1−i, −1 +i, i, 1 +i√
3, −√ 3−i.
I.4.d. Écriture exponentielle de la forme polaire
iθ
-iθ i ( +π)
2 θ __
z = r e z = r e
θ i r iz = r e
x y
-
Figure I.2.: Le plan complexe : coordonnées polaires Par convention, on note tout nombre complexe de module1 sous la forme
cosθ+isinθ=eiθ.
Cette exponentielle complexe vérifie les mêmes règles de calcul que l’exponentielle réelle.
Par (I.8), on a :
(I.9) ei(α+β) =eiαeiβ.
Pour représenter un nombre complexe sous forme polaire, on utilisera désormais l’écriture exponentielle :
z=r ei θ.
(c.f. figure I.2 p. 11). Avec cette écriture, les différentes propriétés que nous avons rencon- trées s’écrivent (r, r1, r2sont des nombres réels strictement positifs,θ,θ1,θ2 des nombres réels) :
– égalité : r1ei θ1 =r2ei θ2 ⇔
r1=r2
θ1 =θ2 (mod 2π) – conjugaison :eiθ =e−iθ
– module : |reiθ|=r
– produit :(r1 eiθ1) (r2 eiθ2) =r1r2ei(θ1+θ2) – quotient : pour r2 6= 0 , r1 eiθ1
r2eiθ2 = r1
r2
ei(θ1−θ2)
Exercice I.4.3. Écrire sous forme cartésienne :2ei π
6, 3e−2i π 3, e−i
π
6, 3eiπ, √ 3ei
π 4. I.4.e. Formule de Moivre
On établit par récurrence que, pour tout n∈N,einθ= (eiθ)n, soit : Pour toutn∈N, cosnθ+isinnθ= (cosθ+isinθ)n. C’est ce qu’on appelle la formule de De Moivre.
Application de la formule de Moivre
Calcul decosn θ etsinn θ en fonction decosθetsinθ.
C’est l’opération inverse de la linéarisation, décrite plus bas.
Pour la réaliser, on utilise le fait que cosn θ est la partie réelle (et sinn θ la partie imaginaire) de(cosθ+isinθ)n, que l’on développe à l’aide de la formule du binôme.
Exemple pourn= 3 :
cos 3θ+isin 3θ=(cosθ+isinθ)3
= cos3θ+ 3icos2θsinθ+ 3i2cosθsin2θ+i3sin3θ
= cos3θ−3 cosθsin2θ+i(3 cos2θsinθ−sin3θ).
En identifiant les parties réelles et imaginaires des deux membres, on obtient cos 3θ= cos3θ−3 cosθsin2θ
sin 3θ=3 cos2θsinθ−sin3θ.
Si on le souhaite, on peut améliorer ces égalités en utilisant cos2θ+ sin2θ = 1, ce qui donne alors
cos 3θ=4 cos3θ−3 cosθ sin 3θ=3 sinθ−4 sin3θ.
Exercice I.4.4. Écrirecos 4θ, sin 4θ etcos 3θsin 2θ en fonction de puissances de cosθ et sinθ.
I.5. Racinesnièmes d’un nombre complexe
I.4.f. Formule d’Euler
Siθ∈Ron a la formule d’Euler : cosθ= eiθ+e−iθ
2 et sinθ= eiθ−e−iθ 2i .
Démonstration. On a cosθ = Reeiθ et sinθ = Imeiθ ; on obtient les dites formules en utilisant la relation ii p. 8.
Linéarisation de cosnθ et sinnθ
Linéariser cosnθ ou sinnθ, c’est en donner une expression qui ne contient aucun produit de fonctions circulaires. Cette opération est possible, en développant cosnθ = eiθ+e−iθ
2
n
à l’aide de la formule du binôme (proposition I.7.4 p. 19).
Exemple I.4.5.
cos3θ=
eiθ+e−iθ 2
3
= (eiθ+e−iθ)3 23
=1 23
h
e3iθ+ 3e2iθe−iθ+ 3eiθe−2iθ+e−3iθi
=1 23
h
e3iθ+e−3iθ+ 3(eiθ+e−iθ)i
=1
4cos 3θ+3 4cosθ
sin3θ=
eiθ−e−iθ 2i
3
= (eiθ−e−iθ)3 23i3
=−1 23i h
e3iθ−e−3iθ−3(eiθ−e−iθ)i
=−1
4 sin 3θ+3 4sinθ
Exercice I.4.6. Linéariser cos4θ,sin4θetcos3θsin2θ.
I.5. Racines n
ièmesd’un nombre complexe
I.5.a. Cas général
Définition I.5.1. Soitz0 ∈Cetn∈N∗, on appelle racine nième du nombre complexe z0 tout nombre complexe ω tel que ωn=z0.
Par exemple
√ 2
2 (1 +i)est une racine carrée de i,iest une racine carrée de−1et donc
√2
2 (1 +i) est une racine quatrième de -1.
Les racinesnièmes de z0 sont les nombres complexes ω solutions de l’équation en z : zn−z0 = 0.
Le nombre 0 est la seule racine nième de 0 car : zn = 0⇔ |zn|= 0 ⇔ |z|n = 0 ⇔
|z|= 0⇔z= 0.
Proposition I.5.2. Tout nombre complexe z0 non nul possède exactement n racines nièmes distinctes. De plus si ρ0eiθ0 est la forme polaire dez0, elles sont de la forme
ωk= √n
ρ0ei(θn0+kn2π), k∈ {0,1,· · · , n−1}.
Démonstration. On cherche tous les nombres complexesω=r eitqui vérifient l’équation ωn = ρ0ei θ0. D’après la propriété d’égalité de deux nombres complexes, sous forme polaire, on a :
rnen i t=ρ0eiθ0 ⇐⇒ rn=ρ0 et ∃k∈Z, nt=θ0+ 2kπ
⇐⇒ r= √n
ρ0 et ∃k∈Z, t= θ0
n +2kπ n . Ainsi pour toutk∈Z, le nombre complexeωk= √n
ρ0ei(θn0+kn2π) est racine et toutes les racines sont de cette forme.
Montrons qu’il n’y a, en fait, que n racines distinctes : posons tk = θn0 + nk2π pour 0 ≤ k ≤ n−1. Chaque reitk est racine, et ils sont deux à deux distincts : en effet, supposons quereitk =reit`,k6=`, alors(tk−t`) = 2p π, soitk−`=p npour un certain p∈Z. Mais comme0≤k, `≤n−1, on a|k−`| ≤n−1, donc|p|n≤n−1, ce qui force p= 0.
Il reste à montrer que toutes racinesnième dez0 est de la formeωj, avec0≤j ≤n−1.
Soit ωk une telle racine, d’argument tk = θn0 + kn2π, k ∈ Z. Alors avec la division euclidienne de k par n, il existe 0 ≤ k0 ≤ n−1 et p ∈ Z tels que k = n p+k0, et l’argumenttk s’écrit donc θn0 +kn02π+p2π. Ainsi
ωk = √n
ρ0ei(θn0+k
0
n2π+p2π) = √n
ρ0ei(θn0+k
0
n2π)=ωk0, ce qui achève la preuve.
Exemple I.5.3 (Calcul des racines carrées de 1−i). 1−i = √
2e−iπ4. Si z = reiθ est solution de z2 = 1−i alors z2 = r2e2iθ = √
2e−iπ4. D’après ce qui précède, on a deux solutions :
z1 =√4
2e−iπ8 etz2 =√4 2ei7π8 I.5.b. Racines nièmes de l’unité.
On s’intéresse ici au cas où z0 = 1 c’est à dire aux solutions complexes de l’équation enz
zn−1 = 0.
La précédente proposition nous donne :
I.5. Racinesnièmes d’un nombre complexe
Proposition I.5.4. Le nombre 1 possède exactement n racines nièmes distinctes : ωk=eink2π k∈ {0,1,· · ·, n−1}
Propriété
Siωk est une racinenième de l’unité autre que 1 (soitk non multiple den), alors 1 +ωk+ω2k+· · ·+ωn−1k = 0.
Pour la preuve, il suffit d’utiliser la formule de la somme d’une suite géométrique (I.19) rappelée dans l’appendice p. 20. Puisque ωk6= 1 etωkn= 1, on a :
1 +ωk+ωk2+· · ·+ωkn−1 = 1−ωkn 1−ωk
= 0.
Lorsque k= 1 on obtient la formule :
1 +ω1+ω2+· · ·+ωn−1= 0.
Cas particulier : racines cubiques de l’unité
D’après I.5.2 , les racines cubiques de l’unité sont 1, e2iπ/3 , e4iπ/3. Par convention, on pose
j=e2iπ/3.
On en déduit : j2 =j = e4iπ/3. On retiendra que les racines cubiques de l’unité sont : 1, jetj2 et qu’elles vérifient la relation
1 +j+j2= 0.
Exercices
Exercice I.5.5. Soit z un nombre complexe non nul etdune racinenième dez.
Montrer qu’il suffit de multiplier d par les racines nièmes de l’unité pour obtenir les racines nièmes de z.
Exercice I.5.6. Déterminer les racines cubiques de −8.
I.5.c. Racines carrées d’un nombre complexe, sous forme cartésienne Étant donné un nombre complexe z0 = x0 +iy0, on cherche les nombres complexes z=x+iytels que z2 =z0.
Commez2=x2−y2+ 2ixy, on obtient les équations x2 − y2 = x0
2xy = y0.
Remarquons par ailleurs que si z2 =z0 alors|z|2=|z0|c’est à dire quex2+y2 =|z0|.
On est donc amené à résoudre le système
x2 − y2 = x0
x2 + y2 = |z0| 2xy = y0.
d’oùx2 = x0+|z0|
2 = |z0|+ Rez0
2 ety2= |z0| −x0
2 = |z0| −Rez0
2 .
Comme on a toujours |Rez0| ≤ |z0|, |z0|+ Rez0
2 ≥ 0 et |z0| −Rez0
2 ≥ 0, on peut donc calculer leur racine carrée dansR. On trouve
x = ±
q|z0|+Rez0
2
y = ±
q|z0|−Rez0
2 .
La condition 2xy = y0 = Imz0 permet de déterminer les signes ±. Ainsi, si Imz0 ≥0 alorsxy≥0 donc x ety sont de même signe. Les solutions sont
z=x+iy=
r|z0|+ Rez0
2 +i
r|z0| −Rez0
2 et z=−
r|z0|+ Rez0
2 −i
r|z0| −Rez0
2 .
Par contre, siImz0 ≤0alorsxy≤0donc xety sont de signe opposé. Les solutions sont z=x+iy=
r|z0|+ Rez0
2 −i
r|z0| −Rez0
2 et z=−
r|z0|+ Rez0
2 +i
r|z0| −Rez0
2 .
Ces formules ne sont évidemment pas à savoir, par contre la méthode est à connaître.
Exemple I.5.7 (retour au calcul des racines carrées de 1−i). Siz =x+iy est solution dez2=z0 alorsz2 = (x2−y2) + 2ixy= 1−i.
On en déduit :x2−y2 = 1 etxy=−1 2. Par ailleurs,|z|2 =|1−i|donne x2+y2=√
2.
On trouve x2 = 1+
√2
2 soit x=±
r1 +√ 2
2 ety2= −1 +√ 2
2 soit y=±
r−1 +√ 2
2 .
Enfin, comme2xy =−1,x ety sont de signe opposé.
Ainsi, les solutions sont z1=
s 1 +√
2
2 − i
q
2(1 +√ 2)
et z2 =− s
1 +√ 2
2 + i
q
2(1 +√ 2)
.
(comparer avec le résultat de l’exemple I.5.3).
I.6. Équation du second degré à coefficients complexes
Proposition I.6.1. Soient a, b, c ∈ C, avec a 6= 0. Alors l’équation az2 +bz+c = 0 admet deux solutions complexes (qui peuvent être identiques).
I.6. Équation du second degré à coefficients complexes
On procède comme dans le cas réel : (I.10) az2+bz+c=a
z+ b 2a
2
− b2
4a+c=a
z+ b 2a
2
−b2−4ac 4a2
,
donc az2+bz+c= 0 est équivalent à (z+ b
2a)2− ∆ 4a2 = 0,
où ∆est le discriminant∆ =b2−4ac. On distingue deux cas :
– Si∆6= 0, alors∆ =b2−4acadmet deux racines carrées complexes distinctes, notées δ et−δ. Alors les solutions sont
(I.11) z1 =− b
2a+ δ
2a etz2 =− b 2a− δ
2a et elles sont distinctes.
– Si∆ = 0, alors
(I.12) − b
2a
est racine double (l’expressionracine double est définie rigoureusement dans le pro- chain chapitre sur les polynômes).
Les formules (I.11), (I.12) sont à retenir.
Remarque I.6.2. Dans le cas particulier des coefficients réels, ∆ ∈ R. Si ∆ > 0, il y a deux racines réelles distinctes, si ∆ < 0, δ = i√
−∆ et il y a deux racines complexes conjuguées.
Exemple I.6.3. Résoudre l’équationz2−(2 +i)z−1 + 7i= 0.
Calcul du discriminant :∆ = (2 +i)2−4(−1 + 7i) = 7−24i. On cherche un complexe δ =x+iy tel que δ2= ∆. On utilise la méthode vue en I.5.c.
(x+iy)2= 7−24i ⇐⇒( x2−y2 = 7 et 2xy=−24 ) En rajoutant l’égalité des modules : x2+y2=√
49 + 576 =√
625 = 25, on obtient le système
x2+y2 = 25 x2−y2 = 7
xy=−12
⇔
x2= 16 y2 = 9 xy =−12
⇔
x=±4 y=±3 xy =−12.
Par conséquent,∆admet deux racines carrées : δ= 4−3iet−δ =−4 + 3i.
Les solutions de l’équation sont : z1 = −b+δ
2a = 2 +i+ 4−3i
2 = 3−ietz2 = −b−δ
2a = 2 +i−4 + 3i
2 =−1 + 2i.
I.7. Appendice : quelques rappels
I.7.a. Principe du raisonnement par récurrence
Supposons que l’on veuille prouver qu’une propriétéPn, dépendant d’un entier n, est vraie pour toutn≥n0.
On procède en 2 étapes :
– Initialisation.On montre que la propriété Pn0 est vraie.
– Hérédité. On montre : siPn est vraie pour un entiern,alors Pn+1 est vraie.
Cette méthode est la méthode de récurrence simple, mais parfois, elle est insuffisante et il faut utiliser une récurrence généralisée, dans laquelle la seconde étape est remplacée par :
– Hérédité. Pour tout n ≥ n0, si la propriété Pk est vraie pour tous les entiers k compris entre n0 etn ,alors Pn+1 est vraie.
Exercice I.7.1. Démontrer par récurrence (simple) sur nles propriétés suivantes :
∀n≥0, 2n≥n; ∀n≥4, n!≥2n oùn!(lirefactorielle n) est défini par
0! = 1, ∀n≥0, (n+ 1)! = (n+ 1)n!
i.e.n! = 1.2. . . n.
I.7.b. Formule du binôme
On rappelle que les coefficients du binômes nk
sont définis par n0
= nn
= 1, nk
= 0 sik <0et si k > n, et la relation :
(I.13)
n k
=
n−1 k−1
+
n−1 k
, 0≤k≤n.
Remarque I.7.2. On note parfoisCnk au lieu de nk .
On calcule les coefficients du binôme à l’aide du triangle de Pascal : on met des1 sur le bord du triangle, et chaque élément est la somme des deux éléments situés au-dessus de lui. Ainsi
1
1 1
1 2 1
1 3 3 1
1 4 6 4 1
1 5 10 10 5 1
1 6 15 20 15 6 1
I.7. Appendice : quelques rappels le coefficient nk
est lek-ième élément de lan-ième ligne (les lignes sont comptées à partir de 0, de même que les éléments de chaque ligne, par exemple 62
= 15).
Sinetk sont des entiers tels que 0≤k≤n, les coefficients du binôme peuvent aussi être définis par la formule suivante
(I.14)
n k
= n!
k!(n−k)!
Exercice I.7.3. Démontrer (I.14) par récurrence généralisée sur n+k. On utilisera en particulier la formule (I.13).
On a alors la formule du binôme de Newton surC: Proposition I.7.4. Soient z, z0 ∈C, n∈N,
(z+z0)n=
n
X
k=0
n k
zk(z0)n−k.
La preuve se fait par récurrence surn, comme dans le cas oùzetz0 sont réels. Elle est laissée au lecteur.
I.7.c. Suites arithmétiques et géométriques
Une suitearithmétique (un)n∈Nest une suite définie par une relation de récurrence de la forme :
(I.15) un+1 =un+a, n∈N
où aest un nombre (réel ou plus généralement complexe) fixé, appelé raison de la suite (un). Par une récurrence élémentaire (à faire !), on peut montrer
un=u0+n a, n∈N.
La somme des termes d’une telle suite est donnée par la formule : (I.16)
q
X
n=p
un= (q−p+ 1)up+uq
2 , 0≤p≤q.
On peut retenir que la somme des termes d’une suite arithmétique est égale au nombre de termesq−p+ 1multiplié par la moyenne up+u2 q du premier terme et du dernier terme.
Exercice I.7.5. Démontrer par récurrence (sur q ≥p,p étant fixé) la formule (I.16).
Exemple I.7.6.
3 + 5 + 7 +. . .+ 17 =
8
X
k=1
(2k+ 1) = 8×3 + 17 2 = 80.
Exercice I.7.7. CalculerP30
j=20(3j+ 5).
Une suitegéométrique (vn)n∈N est une suite définie par une relation de récurrence de la forme :
(I.17) vn+1=bvn,
où le nombre complexe non nulbest encore appeléraison de la suite (vn). On démontre, à nouveau par récurrence :
vn=bnv0, n∈N.
Sib= 1, la suite est constante. Lorsqueb6= 1, la somme de ses termes est donnée par la formule
(I.18)
q
X
n=p
vn= 1−bq−p+1
1−b ×v0bp, 0≤p≤q, qui se déduit immédiatement de la formule
(I.19)
N
X
n=0
bn= 1−bN+1 1−b .
Pour démontrer (I.19) remarquer que cette formule est équivalente à (1−b)
N
X
n=0
bn= 1−bN+1.
Or
(1−b)
N
X
n=0
bn=
N
X
n=0
bn−
N+1
X
n=1
bn= 1−bN+1.
Exercice I.7.8. On considère un échiquier de 64 cases. On pose 1 grain de blé sur la première case, 2grains sur la deuxième, 4 sur la troisième et ainsi de suite, en doublant le nombre de grains de blé à chaque nouvelle case. Combien y aura-t-il de grains de blé sur l’échiquier une fois les64 cases remplies ?
Les formules (I.16) et (I.19) sont à retenir.
II. Les polynômes
Dans ce chapitre, la lettreKdésigneRouC. Les éléments deKsont appelés “nombres”
ou “scalaires”.
II.1. Définitions
II.1.a. Polynômes comme suites finies
Un polynôme P sur K (ou à coefficients dans K) est la donnée d’une suite (ak)k≥0
d’éléments de Ktelle qu’il existe un entier p≥0 avec
∀k > p, ak= 0.
Les nombresaksont appelés lescoefficients deP. Le plus grand nombredtel quead6= 0 est appelédegré deP et notédegP oudeg(P). Le coefficientadcorrespondant à ce degré est appelé coefficient dominant de P. Le polynôme (ak)k≥0 tel que ak = 0 pour tout k est appelé le polynôme nul et noté0. Par convention deg 0 =−∞.
Exemple II.1.1. La suite(1,2,0,0,0, . . .)est un polynôme de degré1(a0 = 1,a1= 2, les . . . signifient ici queak= 0 sik≥2).
La suite(2k)k≥0 n’est pas un polynôme.
II.1.b. Addition
SoitP = (ak)k≥0 etQ= (bk)k≥0 deux polynômes. Lasomme P+QdeP etQest par définition la suite (ak+bk)k≥0. C’est aussi un polynôme. Ceci définit une addition sur l’ensemble des polynômes, qui est commutative et associative :
P +Q=Q+P, (P +Q) +R=P+ (Q+R).
Du fait de l’associativité, on peut noter sans ambiguïté P +Q+R la somme de trois polynômes.
Proposition II.1.2. SoitP etQ deux polynômes à coefficients dans K. deg(P +Q)≤max(degP,degQ).
De plus, si degP 6= degQ,
deg(P +Q) = max(degP,degQ).
Démonstration. On note P = (ak)k≥0, Q = (bk)k≥0, p = degP et q = degQ. Par définition du degré,
ap 6= 0, bq 6= 0, k > p=⇒ak= 0, k > q=⇒bk= 0.
Par définition,P+Q= (ak+bk)k≥0. De plus
k >max(p, q) =⇒ak=bk= 0 =⇒ak+bk= 0.
DoncP+Qest bien un polynôme, de degré inférieur ou égal àmax(p, q).
Supposonsp6=q, par exemple p < q. Alorsaq = 0,bq6= 0 et donc aq+bq6= 0,
ce qui montredeg(P+Q)≥q= max(p, q)et finalement deg(P +Q) = max(p, q).
La preuve est identique lorsquep > q.
Notation II.1.3. Si P = (ak)k≥0 est un polynôme, on note −P le polynôme (−ak)k≥0. C’est l’unique polynômeA tel queP+A= 0. SiP etQsont deux polynômes, on note P−Q le polynômeP+ (−Q).
II.1.c. Indéterminée
On s’empresse d’adopter une notation plus commode que la notation (ak)k≥0 pour désigner les polynômes. On fixe une lettre, généralement X, appelée indéterminée. Soit P = (ak)k≥0 un polynôme de degréd. On note ce polynôme :
(II.1) P =adXd+ad−1Xd−1+. . .+a1X+a0=
d
X
j=0
ajXj.
Exemple II.1.4. Le polynôme(1,2,0,0,0, . . .) est noté 2X+ 1. Le polynôme (0,0,0,9,4,0,3,0,0,0, . . .)
est noté3X6+ 0X5+ 4X4+ 9X3+ 0X2+ 0X+ 0 ou plus simplement3X6+ 4X4+ 9X3. Dans (II.1), les puissances sont rangées dans l’ordre décroissant. On peut aussi les ranger dans l’ordre croissant. De fait, par la définition et la commutativité de l’addition des polynômes, on a :
adXd+ad−1Xd−1+. . .+a1X+a0=a0+a1X+. . .+ad−1Xd−1+adXd. Notation II.1.5. L’ensemble des polynômes à coefficients dansKet d’indéterminéeX est notéK[X]. Un polynômeP est parfois noté P(X) lorsqu’on veut insister sur le fait que la lettreX désigne l’indéterminée.
II.1. Définitions
II.1.d. Multiplication SoitP =Pd
j=0ajXj et Q=Pd0
j=0bjXj deux polynômes, d= degP, d0 = degQ. Par définition, le produit P QdeP etQest le polynôme
(II.2) P Q=
d+d0
X
j=0
X
k+`=j
akb`
Xj.
Il s’obtient en développant l’expression Pd
k=0akXkPd0
`=0b`X` et en utilisant les règles de calcul usuelles sur l’addition et la multiplication, et la règle :XkX`=Xk+`.
Remarque II.1.6. Dans l’expression (II.2), P
k+`=j signifie que la somme porte sur tous les indices (entiers naturels) ket`tels quek+`=j. Par exemple :
X
k+`=2
akb`=a0b2+a1b1+a2b0.
Il est très important de maîtriser ce genre de notation.
La formule
(II.3) deg(P Q) = degP + degQ
découle immédiatement de la définition de la multiplication des polynômes. Le coefficient dominant de P Qestadbd0. On déduit immédiatement de (II.3) :
P Q= 0 =⇒(P = 0 ou Q= 0).
La multiplication des polynômes vérifie aussi les règles de calcul usuelles :
Proposition II.1.7. La multiplication des polynômes est commutative, associative, et distributive par rapport à l’addition : si P, Q, R∈K[X],
P Q=QP, (P Q)R=P(QR) et P(Q+R) =P Q+P R
Démonstration. On ne démontre que l’associativité, la preuve des autres propriétés est laissée au lecteur. Soit P = Pd1
k=0akXk, Q = Pd2
`=0b`X` et R = Pd3
m=0cmXm trois polynômes. On doit vérifier
(II.4) (P Q)R=P(QR).
En utilisant la définition de la multiplication, on obtientP Q=Pd1+d2
j=0
P
k+`=jakb`
Xj, puis
(P Q)R=
d1+d2+d3
X
r=0
X
j+m=r
X
k+`=j
akb`
cmXr=
F
d1+d2+d3
X
r=0
X
k+`+m=r
akb`cmXr.
De même,QR=Pd2+d3
s=0
P
`+m=sb`cmXs et donc P(QR) =
d1+d2+d3
X
r=0
X
k+s=r
ak X
`+m=s
b`cm
! Xr =
F
d1+d2+d3
X
r=0
X
k+`+m=r
akb`cmXr.
D’où(P Q)R=P(QR).
Exercice II.1.8. Se convaincre des deux égalités F ci-dessus. On pourra commencer par écrire explicitement ces égalitésd1 =d2 =d3 = 1.
En pratique, pour calculer le produit de deux polynômes, on n’utilise pas directement la formule (II.2), mais simplement les règles de calcul usuelles.
Par exemple :
(X3+ 2X2−1)(X2+ 7) =X3X2+ 7X3+ 2X2X2+ 14X2−X2−7
=X5+ 7X3+ 2X4+ 13X2−7.
II.2. Premières propriétés
II.2.a. Division euclidienne
Théorème II.2.1. Soient A etB deux polynômes deK[X], avecB non nul. Il existe un unique polynôme Qet un unique polynôme R dans K[X] tels que :
A=QB+R deg(R)<deg(B).
Définition II.2.2. LorsqueR= 0dans le théorème ci-dessus, c’est à dire lorsqu’il existe QdansK[X]tel que A=QB, on dit que B divise A, que Aest divisible parB, ou que B est un diviseur de A.
Démonstration. Existence. LorsqueA = 0, on peut choisirQ = 0 et R = 0. Supposons Anon nul, et notonsA=anXn+an−1Xn−1+. . .+a1X+a0,B =bpXp+bp−1Xp−1+ . . .+b1X+b0, avecn= degA,p= degB. On commence par montrer :
Lemme II.2.3. SoitAe∈K[X]tel que degAe≥degB. Il exists Qe∈K[X]tel que (II.5) deg(Ae−BQ)e <degA.e
Preuve du lemme. Soitdle degré deA. On notee Ae=Pd
k=0a˜kXk.On poseQe = ˜abd
pXd−p. Le polynômeQ Be est de degré d−p+p=d, et son coefficient dominant (le coefficient deXd) est ˜abd
p ×bp= ˜ad. On en déduit comme annoncé queAe−BQe est au plus de degré d−1.
Pour montrer l’existence de Q et R, on construit deux suites finies (Aj)j=0...J et (Qj)j=1...J en posant A0 = A et en définissant les Aj, Qj, j ≥ 1 par récurrence de la manière suivante. Soitj ≥0tel que Aj est connu.