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Submitted on 17 Jul 2019
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Assistants de Service Social et travail en réseau
Thierry Tourte
To cite this version:
Thierry Tourte. Assistants de Service Social et travail en réseau. Environnement et Société. Conser- vatoire national des arts et metiers - CNAM, 2014. Français. �NNT : 2014CNAM0920�. �tel-02185967�
ÉCOLE DOCTORALE Abbé Grégoire
Laboratoire Interdisciplinaire pour la Sociologie Economique
THÈSE
présentée par : Thierry TOURTEsoutenue le : 04 juin 2014
pour obtenir le grade de : Docteur du Conservatoire National des Arts et Métiers
Discipline/ Spécialité : SOCIOLOGIE – TRAVAIL SOCIAL
Assistants de Service Social et travail en réseau
THÈSE dirigée par :
Madame Brigitte BOUQUET Professeur émérite, CNAM RAPPORTEURS :
Monsieur Emmanuel JOVELIN Professeur de sociologie, Université de Lorraine.
Monsieur Alain VILBROD Professeur de sociologie, Université de Bretagne occidentale.
JURY :
Monsieur Marcel JAEGER Professeur titulaire de la chaire Travail social / intervention sociale, CNAM
Monsieur Alain VULBEAU Professeur des sciences de l’éducation, Université Paris Ouest Nanterre.
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A Annick, Adèle et Jeanne pour leur patience et leur douceur de vivre.
A Simon pour ses précieux conseils en informatique.
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Remerciements
Je tiens à remercier tout particulièrement ma Directrice de thèse, Madame Brigitte Bouquet. Son enthousiasme contagieux, l’étendue de ses connaissances, sa disponibilité sans faille et la régularité de son accompagnement ont permis que les moments de découragement ne soient qu’éphémères.
Merci à Monsieur Mokhtar Kaddouri qui à l’occasion du suivi de mon mémoire de Master m’a communiqué le goût de la recherche et l’envie d’engager un travail de thèse.
Aux membres du jury d’avoir accepté de participer à la soutenance de la thèse.
A Zaïa Réhiel pour sa disponibilité et sa chaleur humaine.
A Marie-Madeleine Blanchart pour nos rires complices de doctorants de plus de 50 ans ! A Michel Tétuan et Patrice Gandin pour leur relecture attentive.
Je remercie chaleureusement tous les Assistants de Service Social qui ont répondu à mes sollicitations.
En tant qu’ancien travailleur social, je sais que leur participation s’est ajoutée à des charges de travail importantes et à un temps toujours compté. Leur rapidité à retourner le questionnaire et les suites positives données à mes demandes d’entretien ont rendu possible ce travail de recherche.
Aux responsables de formation et aux étudiants Assistants de Service Social pour leurs échanges sur la complexité du travail en réseau en tant qu’objet de formation.
Aux formateurs et aux documentalistes de l’Ecole Régionale du Travail Social (ERTS) d’Olivet (45) pour leur soutien.
A Brigitte David et à Mohamed Kheyi, de l’Institut de Formation Continue dans l’Action Sociale (IFCAS) d’Olivet (45). Tous deux ont largement aménagé ma charge de travail afin de me permettre de concilier ce qui a régulièrement frôlé l’impossible, à savoir le cumul d’une démarche de recherche avec des impératifs professionnels conséquents.
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Résumé :
En lien étroit avec la diversité et la complexité des situations rencontrées dans le cadre des missions qui leur sont confiées, les Assistants de Service Social positionnent les démarches de coopération avec des acteurs ou des services internes ou externes comme une des composantes principales de l’exercice professionnel. Le partenariat et le réseau constituent à ce titre deux recours possibles pour une prise en compte concertée des problématiques présentées par les usagers, et le traitement des situations individuelles se complète par une implication régulière des Assistants de Service Social dans des approches collectives. Ces approches prennent en compte l’inscription de l’usager dans son environnement social et familial et s’appuient sur le collectif pour faciliter la résolution des difficultés posées.
Dans cette conjonction de l’individuel et du collectif, les incitations à s’engager dans des dynamiques réticulaires se multiplient au point d’endosser une dimension injonctive et de désigner le travail en réseau comme un nouveau paradigme de l’action sociale. L’évocation et la mise en œuvre de démarches de réseau émaillent les quotidiens institutionnels, et l’exercice des missions des Assistants de Service Social est traversé par cette évolution.
La réforme du Diplôme d’Etat d’Assistant de Service Social (DEASS) de juin 2004 notifie le travail en réseau dans les référentiels d’activités, de compétences, de formation et de certification. Cette évolution reconnaît le travail en réseau comme étant pleinement associé à la profession et lui confère le double statut de démarche à mettre en place dans l’exercice professionnel et de contenu de formation à intégrer.
Le travail en réseau devient de fait reconnu en tant que compétence professionnelle et l’étendue sémantique du terme « réseau » autant que ses déclinaisons protéiformes interrogent les perceptions des Assistants de Service Social quant à sa définition, son opportunité, ses conditions de mise en œuvre dans l’exercice des missions et le positionnement des différents professionnels concernés.
L’étude des représentations sociales d’Assistants de Service Social en poste dans des secteurs d’intervention différents est au cœur de notre travail de recherche. La thèse vise à déterminer le schéma représentationnel de ces professionnels sur le travail en réseau pour préciser le rapport qu’ils entretiennent avec cette démarche de coopération et préciser l’impact de sa reconnaissance référentielle sur l’identité professionnelle.
Mots-clés : Travail en réseau – Assistants de Service Social - Représentations sociales – Référentiels – Identité professionnelle.
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Abstract:
Social workers are given tasks in which they face complex and varied situations leading them to cooperate with reference to persons as well as with internal or external services and thus leading them to consider this type of cooperation as part and parcel of their job. As a consequence, partnership and network are the two possibilities available so as to take into account the problems of social service users. Each case can then be treated specifically with the social workers’ involvement in trying to act within a group. These approaches will pay particular attention to the social service users’ family and social environment and they will rely on group work to solve the problems they face.
The combination of the individual and the group provides an incentive for the social workers who will get involved in networks becoming so indispensable that they have become the cornerstone of social working. Today, working in partnership has become a priority for all administrations which necessarily affects and transforms social workers’ missions.
The 2004 reform of the national diploma (DEASS) insists on the necessity of a joined work in many ways from skills to reference activities, training and graduating. Such an evolution acknowledges the fact that social work is a multi-faced job with at least two essential aspects: the setting of a process for the profession and the training of social workers.
Therefore, working within a network becomes a professional skill. The many definitions of the word
“network” calls in many ways into question the social workers’ perception of working within a network job: defining its role, its appropriateness, and the way they perceive the other actors.
This dissertation aims at focusing on the social representations of social workers concerning the link between network and the specificity of their job and then insist on the impact of the 2004 reform on the professional identity.
KEY WORDS: group work; network; social workers; social representations; references; professional sphere; job specificity.
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Table des matières
REMERCIEMENTS. ………. 3
RESUME. ………. 4
RESUME EN ANGLAIS. ………... 5
TABLE DES MATIERES. ………. 6
LISTE DES TABLEAUX. ……….. 13
LISTE DES ANNEXES. ……….. 16
INTRODUCTION. ……… 17
PREMIERE PARTIE. GENESE, EVOLUTION SEMANTIQUE ET AVENEMENT METAPHORIQUE DU RESEAU. ………. 30
CHAPITRE 1. Approche diachronique du réseau : un terme ancien marqué par un symbolisme fort. ……… 33
1. Réseau et filet : de la dimension fonctionnelle à l’usage métaphorique. ……….. 33
2. La métis ou l’intelligence des contraires : le réseau entre croisement et entrecroisement… 34
3. Imagerie du réseau et description du vivant. ……… 37
4. De la description du vivant à la symbolique sociétale : l’image du réseau au service de l’organisation sociale……… 39
CHAPITRE 2. Acception conceptuelle du réseau et organisation de la société. ………… 42
1. Vers une dimension politique du réseau. ………. … 42
2. Saint-Simon et le concept de réseau. ……….... 43
2.1. Une trajectoire personnelle et professionnelle en lien étroit avec le réseau. ……….. 43
2.2. Politique et réseau dans l’approche de Saint-Simon. ………. 44
CHAPITRE 3. Du culte du réseau à sa traduction en sociologie. ………... 48
1. Centralité symbolique du réseau et religion saint-simonienne. ………... 48
2. Le réseau et les saint-simoniens : tentatives de déclinaisons de la figure du réseau comme un modèle de société. ……….. 50
2.1. De Saint-Simon à la doctrine des saint-simoniens : la réification du réseau. ………. 50
2.2. Vers une religion du réseau? ………... 51
2.3. Le réseau saint-simonien dans ses réalisations concrètes. ………. 53
2.4. Les limites de la pensée saint-simonienne comme fondements de la complexité du travail en réseau. ……… 56
2.5. Le réseau saint-simonien comme prémices d’un traitement de la question sociale. .. 58
3. Approches sociologiques de l’individu réticulé. ……….. 60
3.1. Le réseau et les fondements de la sociologie. ………. 61
7
3.2. Simmel et la sociologie formelle : le réseau dans ses caractéristiques interactionnistes. 63
3.3. Analyse structurale et réseau : le réseau comme objet de théorisation. ……….. 65
3.3.1. Définition et portée de l’analyse structurale. ………. 65
3.3.2. Théorisation du réseau : la question problématique des frontières. ………... 68
3.3.3. Réseau formel et réseau informel. ………. 70
3.3.4. Réseau complet et réseau personnel. ………. 71
CHAPITRE 4. Le réseau dans le travail social : l’imagerie réticulaire entre lecture croisée des problématiques et organisation des missions. ………. 74
1. Le réseau dans le secteur sanitaire : une volonté de décloisonnement des pratiques et des structures soutenue par l’évolution des représentations sur le malade. ………. 75
1.1. Entre partition et décloisonnement : l’exemple de la psychiatrie. ………. 76
1.2. Le secteur sanitaire : genèse d’une ouverture sur le social. ……… 77
2. Le réseau et le secteur social. ……….. 82
2.1. Le réseau dans le secteur social : une émergence liée à la détermination complexe des champs social et médico-social. ………... 83
2.2. Une figure du réseau associée à des organisations non traditionnelles : l’exemple des Réseaux d’Echanges Réciproques de Savoirs (RERS) et des Réseaux d’Ecoute d’Appui et d’Accompagnement des Parents (REAAP). ……….. 85
2.3. Travail social et évolution de la figure du réseau : vers un paradigme du réseau en tant que support organisationnel du décloisonnement des missions et de gouvernance des secteurs. ……….. 88
DEUXIEME PARTIE. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE. ……… 95
CHAPITRE 5. Méthodologie de la recherche : questionnaires et entretiens. …………... 98
1. Modalités d’élaboration du questionnaire. ………... 99
1.1. Des items visant un univers représentationnel en lien avec les pratiques. …………... 99
1.2. Des questions ouvertes visant une expression libre. ………... 101
2. Modalités de diffusion du questionnaire. ………. 101
2.1. Choix du secteur géographique. ………... 101
2.2. Catégorie de professionnels sollicités. ………. 102
2.3. Protocole de diffusion du questionnaire. ………. 102
3. Méthodologie de l’entretien. ……… 103
CHAPITRE 6. Profil des professionnels ayant renseigné le questionnaire. ……… 106
1. Accueil et appropriation du questionnaire. ……….. 106
2. Caractéristiques des professionnels. ……… 107
2.1. Répartition Hommes / Femmes. ………... 107
2.2. Répartition par âge. ……….. 108
2.3. Ancienneté du diplôme. ……… 108
2.4. Répartition par secteurs d’activité. ………... 108
2.5. Ancienneté dans l’emploi occupé. ………... 108
2.6. Expérience professionnelle en tant qu’AS. ……….. 109
2.7. Ancienneté moyenne par secteur d’activité. ……… 112
2.8. Expériences professionnelles autres que celle d’AS. ………... 113
2.9. Implication des AS dans des réseaux hors activité professionnelle. ……… 114
8
3. Travail en réseau et description des missions. ………. 115
3.1. Caractéristiques rurales ou urbaines des territoires d’intervention. ………. 116
3.2. Description des missions. ………. 117
3.2.1. La fiche de poste : une référence faible. ………. 118
3.2.2. Description des missions et travail en réseau : un lien relativement ténu. …... 122
3.3. Inscription des d’AS dans le travail en réseau : une revendication partagée. ……….. 123
3.4. Travail en réseau et partenariat : une association récurrente dans la description des missions. ………. 124
TROISIEME PARTIE. STRUCTURE ET ORGANISATION DES REPRESENTATIONS SOCIALES SUR LE RESEAU. ……….. 127
CHAPITRE 7. Diversité des représentations sociales et définition minimale consensuelle. ……….. 129
1. Structure de la représentation sociale : le noyau central. ………. 130
2. Structure de la représentation sociale : les éléments périphériques et les zones potentielles de changement. ………. 131
CHAPITRE 8. Détermination du noyau central et des éléments périphériques : analyse prototypique et catégorielle. ……….. 133
1. Caractéristiques du corpus et critères de constitution. ………. 133
2. Analyse prototypique. ……….. 134
2.1. Sériation des items par fréquence et par rang. ………... 135
2.2. Répartition par fréquence et par rang d’items constitutifs d’un corpus restreint. ……. 137
2.3. Analyse du corpus restreint : proximité représentationnelle du réseau et du partenariat.. ……… 137
2.4. Le réseau : une affaire de liens. ………. 138
2.5. Réseau et coordination. ……….. 139
2.6. Les acteurs du réseau. ……… 140
2.7. Organisation de la représentation. ………. 141
2.7.1. Structure du noyau central. ………... 141
2.7.2. Composition des éléments périphériques. ……… 142
2.7.3. Les zones potentielles de changement. ………. 142
3. L’analyse catégorielle comme approche complémentaire de l’analyse prototypique. …… 143
3.1. Catégorisation sous contrainte des items. ……….. 144
3.2. Analyse des catégories. ……….. 144
3.2.1. Catégorisation des éléments constitutifs du noyau central. ……….. 145
a. Une prédominance du partenariat confirmée. ………... 146
b. Le réseau entre communication, lien et relations : les enjeux de la réciprocité. ………... 148
c. Le réseau et les différentes orientations de la réciprocité : une circulation d’informations et de compétences. ……….. 150
d. Un engagement dans le réseau dans une perspective d’aide et de soutien. ……… 152
e. Les acteurs du réseau en tant qu’éléments d’un collectif. ……… 153
3.2.2. Catégorisation des items périphériques. ………... 155
a. Fonction de concrétisation. ………... 156
9
b. Fonction de régulation et fonction défensive. ……….. 157
3.2.3. Catégorisation des items des zones potentielles de changement. ………. 160
a. La dimension « amicale » du réseau. ……… 160
b. Technicité du réseau. ……… 162
c. Réseau, réflexion et connaissances. ……….. 163
d. Réseau et associations. ………. 164
CHAPITRE 9. Les tris hiérarchisés successifs. ……… 166
1. Choix des items et protocole de passation du test. ……….. 166
2. Analyse des résultats. ………... 168
2.1. Tris des éléments du noyau central. ………... 168
2.2. Tris des éléments périphériques. ……… 170
2.3. Tris des éléments des zones potentielles de changement. ………. 172
2.4. Classement des items « compétence » et « concertation ». ………... 174
QUATRIEME PARTIE. APPROCHES DEFINITIONNELLES COMPARATIVES DU TRAVAIL EN RESEAU DANS LES QUESTIONNAIRES ET LES ENTRETIENS. ………. 176
CHAPITRE 10. Travail en réseau et partenariat : un enchevêtrement définitionnel. …. 178 1. Approche du partenariat et du travail en réseau dans une définition réciproque et inclusive. ……….. 179
2. Une approche du réseau en tant que réseau de partenaires. ………. 181
3. Réseau et partenariat : une différenciation basée sur une répartition entre démarches formelles et démarches informelles. ……… 182
4. Le réseau aux frontières de l’institution. ………. 185
CHAPITRE 11. Les motifs de sollicitation du réseau comme indicateurs définitionnels. 189
1. Le travail en réseau en tant qu’outil de traitement de problématiques spécifiques. ……... 189
1.1. Une modalité d’intervention définie par les différents temps de traitement de la problématique. ………... 189
1.2. Les motifs d’activation du réseau : entre urgence et complexité des situations. ……... 191
1.3. Nosographie des situations complexes à l’origine de l’activation du réseau. ………... 193
1.3.1. Les situations d’enfants en danger ou en risque de danger : le réseau à l’épreuve de la complexité. ……….. 195
1.3.2. Le « réseau-bricolage » en réponse aux situations de grande précarité. …….. 197
2. La réflexion collective et l’orientation concertée comme éléments de clarification définitionnelle. ……… 200
2.1. Une activation du réseau fondée sur une recherche de réflexion. ……….. 200
2.2. Les questions d’orientation au centre de l’activité réticulaire. ……….. 203
2.2.1. Le réseau comme outil d’optimisation du partenariat. ………. 204
2.2.2. Le réseau comme outil d’humanisation du partenariat. ………... 206
10
CHAPITRE 12. Définitions du travail en réseau en fonction des acteurs concernés
par sa mise en œuvre. ………... 209
1. Répartition des acteurs par secteurs d’activité. ……… 209
2. Approche du nombre moyen d’acteurs impliqués dans les démarches de réseau. ... 213
3. Profil des acteurs du réseau : entre structures et personnes physiques, approche de quelques facteurs déterminants. ………... 214
3.1. Une répartition structures / personnes physiques fluctuante. ………... 214
3.2. Marqueurs identitaires des AS et qualité des acteurs. ……….. 216
3.3. Influence des territoires d’intervention sur la caractérisation des acteurs du réseau : l’exemple des secteurs ruraux. ……… 217
3.3.1. Des interventions marquées par la prépondérance des acteurs physiques. …... 218
3.3.2. Une caractérisation des acteurs par défaut de réponses institutionnelles. ……. 219
3.3.3. Une coopération avec des acteurs singuliers. ……… 221
3.3.4. Une détermination des acteurs très marquée par l’affinitaire. ……….. 225
3.4. Caractérisation des acteurs : une dimension professionnelle faisant référence. …….. 227
3.4.1. Une dimension professionnelle justifiée par la compétence : l’exemple du secteur soin. ………. 228
3.4.2. Importance et influence des travailleurs sociaux. ……… 230
a. Un choix préférentiel réactif à une méconnaissance des partenaires. …… 232
b. Une sollicitation des travailleurs sociaux révélatrice de choix stratégiques. 235 c. De l’importance des acteurs AS : l’entre-soi comme processus d’activation des réseaux. ……… 236
3.4.3. Dimension non professionnelle des acteurs du réseau. ………... 240
a. Le réseau primaire de l’usager. ………. 240
aa. Le réseau primaire comme source d’informations. ……… 241
ab. Les interventions sur le réseau primaire : un développement très confidentiel. ……… 242
b. Le réseau primaire de l’AS. ……… 245
c. Les bénévoles et le secteur associatif. ………. 245
4. Place et rôle de l’usager dans les démarches de réseau. ………. 247
4.1. Position et positionnement de l’usager dans le système représentationnel. …………. 248
4.1.1. L’usager comme élément fondateur du travail en réseau. ……… 249
4.1.2. Centralité et engagement de l’usager. ……….. 252
a. Un engagement proportionnel à l’espace d’évolution défini par les autres acteurs. ………. 253
b. Une centralité définie par les compétences de l’usager. ……….. 255
4.2. L’information faite à l’usager. ………. 257
4.3. L’association de l’usager aux démarches de réseau : vers une éthique de l’accompagnement. ……… 259
4.3.1. Une volonté partagée mais une concrétisation subjective. ………... 259
4.3.2. L’orientation vers un tiers comme association privilégiée de l’usager aux démarches de réseau. ……… 262
4.3.3. L’orientation de l’usager vers des réseaux constitués : le risque d’un accompagnement par défaut. ……… 263
11
CINQUIEME PARTIE. REPRESENTATIONS SUR LE TRAVAIL EN RESEAU ET IDENTITE PROFESSIONNELLE : L’INFLUENCE DES REFERENTIELS D’ACTIVITE, DE COMPETENCES, DE FORMATION
ET DE CERTIFICATION. ………... 267
CHAPITRE 13. De la reconnaissance de l’intervention sociale à la professionnalisation des acteurs : genèse d’une identité de métier. ………. 272
1. Les prémices de l’intervention sociale : une réponse aux besoins marquée par une volonté d’émancipation féminine. ……….. 274
2. Vers une reconnaissance de la profession : de l’enseignement des savoirs à la délivrance d’un diplôme d’Etat. ……… 275
3. Renforcement des contours identitaires de la profession : de la multivalence à la polyvalence. ……….. 279
4. Les organisations professionnelles au service de la reconnaissance. ……… 281
5. Structuration et consolidation de l’identité professionnelle : reconnaissance statutaire et organisation de l’action sociale. ………. 283
6. Le Service Social entre quadrillage des populations et défense du service rendu à l’usager. 287 CHAPITRE 14. Approche par référentiels de la profession d’AS : une articulation complexe entre transversalité des contenus et singularité des métiers. ……….. 291
1. Genèse des référentiels : vers une approche exhaustive des contenus de métiers. ………. 291
2. Notification du réseau dans les référentiels et influence du travail social collectif. ……… 295
CHAPITRE 15. Positionnement des AS par rapport à la notification du travail en réseau dans les référentiels. ……… 300
1. Une connaissance partagée des référentiels mais des écarts avec les pratiques de réseau. . 300
2. Notification du travail en réseau dans les référentiels : un intérêt mitigé. ………... 302
CHAPITRE 16. Regards croisés sur le travail en réseau en tant que contenu de formation. ……….. 306
1. Un contenu de formation peu aisé à définir et en décalage avec les réalités de terrain. …. 306 2. Une intégration des référentiels de formation dépendante de l’ancienneté du diplôme : le signe d’une identité professionnelle en questionnement. ……….. 307
3. Représentations d’étudiants AS sur le travail en réseau. ………... 311
3.1. Une association du réseau avec les partenaires. ………. 312
3.2. Une dimension relationnelle constitutive des représentations. ………... 313
3.3. Une logique d’acteurs professionnels. ……… 313
3.4. Travail en réseau et aide. ………. 313
4. Représentations de deux responsables de formation sur le travail en réseau en tant que contenu de formation. ……….. 314
4.1. Regards croisés sur l’inscription du travail en réseau dans les référentiels de formation. ……… 315
4.2. Eléments de distinction entre travail en réseau et partenariat. ………... 317
4.3. Orientations de formation concernant le travail en réseau. ………. 322
12
CHAPITRE 17. Représentations sociales et identité professionnelle : un lien fort
soutenu par le travail en réseau. ……… 329
1. L’identité professionnelle entre identité personnelle et identité sociale. ……… 329
2. Identité professionnelle et représentations sociales. ……….. 330
3. Les référentiels : les craintes d’un détournement de sens du travail en réseau. ………….. 332
4. Référentiels et travail en réseau : une menace pour l’autonomie professionnelle. ………. 336
4.1. Les référentiels comme facteurs potentiels de modification du réseau relationnel. ……….. 340
4.2. Des référentiels à même de modifier le rapport à l’usager. ………. 342
5. Le travail en réseau comme espace d’expression identitaire. ………. 346
5.1. Le travail en réseau comme espace de mise en œuvre de la professionnalité. 347
5.2. Travail en réseau et référentiels : vers une utilité contestée de l’AS ? ……… 351
CONCLUSION. ………... 355
BIBLIOGRAPHIE. ………. 371
TABLE DES SIGLES. ………. 391
ANNEXES. ………... 395
13
Liste des tableaux
Tableau 1 : Dénomination des secteurs d’activité des AS ayant renseigné le questionnaire. .. 103
Tableau 2 : Répartition par secteur d’activité des AS reçus en entretien. ……… 104
Tableau 3 : Répartition Hommes / Femmes. ………... 108
Tableau 4 : Répartition par âge. ………... 108
Tableau 5 : Répartition par ancienneté de diplôme. ………. 108
Tableau 6 : Répartition par secteur d’activité. ………. 108
Tableau 7 : Ancienneté dans l’emploi actuellement occupé. ……… 109
Tableau 8 : Expériences professionnelles en tant qu’AS. ……….. 110
Tableau 9 : Nombre d’expériences professionnelles précédant l’emploi actuel. ……….. 110
Tableau 10 : Répartition par secteur d’activité des AS en situation de premier emploi. …….. 110
Tableau 11 : Motifs de mobilité professionnelle. ……….. 111
Tableau 12 : Ancienneté moyenne par secteur d’activité. ………. 113
Tableau 13 : Expériences professionnelles autres qu’AS. ………. 114
Tableau 14 : Répartition par secteur des réseaux hors activités professionnelles mobilisant les AS. ……… 115
Tableau 15: Répartition géographique des territoires d’intervention. ……… 116
Tableau 16 : Répartition par secteur d’activité et par nombre d’AS des territoires géographiques d’intervention. ………. 117
Tableau 17 : Degré de connaissance par les AS de l’existence de leur fiche de poste. ……… 118
Tableau 18 : Répartition par secteur d’activité du degré de connaissance par les AS de l’existence de leur fiche de poste. ……… 118
Tableau 19 : Répartition par secteur d’activité de l’obtention de la fiche de poste. ………… 119
Tableau 20 : Répartition par secteur d’activité du décalage entre entrée en fonction et obtention de la fiche de poste. ………... Annexe 6 Tableau 21 : Répartition par secteur d’activité des modifications apportées à la fiche de poste. ………... 120
Tableau 22 : Répartition par secteur d’activité des AS ayant notifié le travail en réseau dans la description de leurs missions. ………... 122
Tableau 23 : Estimation du travail en réseau. ……….. 123
Tableau 24 : Nombre d’associations produites à partir du mot « réseau ». ………. 133
Tableau 25 : Rang moyen général de l’ensemble des items recensés. ……….. 135
14
Tableau 26 : Fréquence des items et pourcentages des associations produites. ……… Annexe 8 Tableau 27 : Fréquence de citation des items. ……….. 136 Tableau 28 : Répartition par fréquence et par rang des 50 items retenus pour
l’analyse prototypique. ………... Annexe 9 Tableau 29 : Liste des catégories retenues pour l’analyse catégorielle. ……… Annexe 10 Tableau 30 : Analyse catégorielle : pourcentage fréquence et rang de chaque
catégorie. ………... Annexe 12 Tableau 31 : Fréquence moyenne et rang moyen des catégories
représentatives du noyau central. ………... 146 Tableau 32 : Catégories représentatives des éléments périphériques. ………. 156 Tableau 33 : Catégories représentatives des zones potentielles de changement. ………. 160 Tableau 34 : Présentation des 32 items retenus pour les tris hiérarchisés successifs. ………. 167 Tableau 35 : Tris hiérarchisés successifs des éléments figurant dans le noyau central. Annexe 13 Tableau 36 : Tris hiérarchisés successifs des éléments figurant parmi les éléments
périphériques. ………... Annexe 13
Tableau 37 : Tris hiérarchisés successifs des éléments figurant dans les zones
potentielles de changement. ………... Annexe 13
Tableau 38: Tris hiérarchisés successifs des items « concertation » et
« compétences ». ……… Annexe 13 Tableau 39 : Répartition par secteur d’activité des situations d’enfance en
danger considérées comme facteur d’activation du réseau. ………... 195 Tableau 40 : Répartition des réponses au questionnaire mentionnant l’orientation
comme facteur de mobilisation du réseau. ………. 204 Tableau 41 : Répartition par secteur des acteurs cités à l’évocation des démarches de
réseau. ………. 211
Tableau 42 : Ventilation des 155 acteurs représentant des collectivités territoriales. ………. 211 Tableau 43 : Répartition par secteur d’activité du nombre moyen d’acteurs
constitutifs du réseau. ………. 214 Tableau 44 : Pourcentage d’acteurs professionnels cités selon les secteurs d’activité. ……... 228 Tableau 45: Nombre de professionnels du secteur médical et paramédical cités par les AS. .. 229 Tableau 46 : Répartition par secteur d’activité des acteurs professionnels et
des acteurs « travailleurs sociaux ». ……… 231 Tableau 47 : Répartition par métier des acteurs « travailleurs sociaux » cités dans une
démarche d’activation du réseau. ………... 231
15
Tableau 48 : Nombre d’AS cités en tant que professionnels sollicités dans une
démarche de réseau. ………... 236
Tableau 49 : Nombre d’AS par secteur d’activité ayant cité un ou des acteur(s)
relevant du secteur associatif. ………. 246 Tableau 50 : Information de l’usager sur les démarches de réseau le concernant. …………. 257 Tableau 51 : Implication de l’usager dans les démarches de réseau le concernant. ………… 259 Tableau 52 : Connaissance par les AS de la notification du travail en réseau dans les
référentiels. ……….. 301
Tableau 53 : Nombre d’associations produites par les étudiants AS à partir
du mot « réseau ». ……… Annexe 17 Tableau 54 : Fréquence de citation des items. [Corpus Etudiants]. ……….. Annexe 17 Tableau 55 : Liste des 20 items de fréquence 1apparaissant en rang 1.
[Corpus Etudiants]. ……… Annexe 17 Tableau 56 : Comparaison entre corpus Professionnels et corpus Etudiants
des pourcentages d’items cités 5 fois et plus, et 10 fois et plus. …………. Annexe 17 Tableau 57 : Présentation des 8 items les plus cités par les professionnels et
par les étudiants. ……….. Annexe 17 Tableau 58 : Répartition par fréquence et par rang des 33 items cités 3 fois
ou plus. [Corpus Etudiants]. ………. Annexe 17
Tableau 59: Comparaison des noyaux centraux Professionnels et Etudiants…………. Annexe 17 Tableau 60 : Répartition des items des zones potentielles de changement schéma
Etudiants/schéma Professionnels. ………... Annexe 17 Tableau 61 : Analyse catégorielle : pourcentage fréquence et rang de chaque
catégorie du schéma Etudiants. ……… Annexe 19 Tableau 62 : Comparaison schéma Etudiants / schéma Professionnels des
fréquences moyennes des items du noyau central. ……… Annexe 17 Tableau 63 : Comparaison schéma Etudiants / schéma Professionnels des
rapports pourcentage des fréquences / pourcentage d’items des
catégories représentant le noyau central. ……….. Annexe 17 Tableau 64 : Comparaison schéma Etudiants / schéma Professionnels des
pourcentages d’items apparaissant au moins une fois en rang 1
dans les catégories représentant le noyau central. ………... Annexe 17
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Liste des annexes
ANNEXE 1. Décret n°2004-533 du 11 juin 2004 relatif au Diplôme d’Etat et à l’exercice
de la profession d’Assistant de Service Social. ……… 396
ANNEXE 2. Arrêté du 29 juin 2004 relatif au Diplôme d’Etat d’Assistant de Service Social. …. 400
ANNEXE 3. Présentation du questionnaire et questionnaire. ………... 406
ANNEXE 4. Grille d’entretien. ……….. 412
ANNEXE 5. Exemple d’entretien. ……….. 415
ANNEXE 6. Répartition par secteur d’activité du décalage entre entrée en fonction et obtention de la fiche de poste (Tableau 20). ………. 426
ANNEXE 7. Liste des 319 items et classement par fréquence et par rang moyen. ……….. 427
ANNEXE 8. Fréquence des items et pourcentages des associations produites (Tableau 26). ….. 431
ANNEXE 9. Répartition par fréquence et par rang des 50 items retenus pour l’analyse prototypique. (Tableau 28). ……….. 432
ANNEXE 10. Liste des catégories retenues pour l’analyse catégorielle (Tableau 29). …………. 433
ANNEXE 11. Analyse catégorielle : catégorisation sous contrainte des 319 items. ……….. 435
ANNEXE 12. Analyse catégorielle : pourcentage fréquence et rang de chaque catégorie. (Tableau 30). ………... 441
ANNEXE 13. Résultats des tris hiérarchisés successifs. (Tableaux 35 à 38). ……… 442
ANNEXE 14. Référentiel professionnel des Assistants de Service Social. ……….. 445
ANNEXE 15. Code de déontologie des Assistants de Service Social. ………. 458
ANNEXE 16. Annexe III à la circulaire DGAS/4A/2008/392 du 31 décembre 2008 relative à la formation et à la certification du diplôme d’Etat d’Assistant de Service Social. ………... 462
ANNEXE 17. Analyse prototypique et catégorielle des représentations sociales sur le travail en réseau d’étudiants Assistants de Service Social. ……….. 468
ANNEXE 18. Analyse catégorielle : catégorisation sous contrainte des 184 items du schéma Etudiants. ……… 486
ANNEXE 19. Analyse catégorielle : pourcentage fréquence et rang de chaque catégorie du schéma Etudiants (Tableau 61). ……… 490
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Introduction
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« Fonctionnellement, chaque fois la mise en réseau réalise une économie. Une telle constance fait loi : la liaison n’est pas le malheur : on gagne à s’unir, c’est-à-dire à se déposséder. » (Daniel Parrochia)1.
‘évolution des secteurs social et médico-social se caractérise depuis plusieurs années par la pénétration grandissante de la figure du réseau en tant qu’outil d’appréhension des problématiques présentées par les usagers et en tant que modèle d’organisation des missions confiées aux professionnels, notamment aux Assistants de Service Social.
Pour comprendre l’approche du réseau dans l’exercice des missions et mesurer le positionnement de ces professionnels vis-à-vis de cette pratique, il est important de saisir l’étendue de ses définitions ainsi que leur portée. La caractéristique pluri-définitionnelle du réseau nécessite un repérage des composantes sémantiques qui lui sont attachées par des Assistants de Service Social amenés à intégrer cette dimension dans leurs pratiques quotidiennes. Le sens conféré au travail en réseau oriente en effet les conditions de ses différentes mises en œuvre ainsi que l’appréciation par les professionnels concernés de sa portée, de ses enjeux, de son intérêt et de ses limites.
Nous optons pour une détermination du sens conféré au réseau par des Assistants de Service Social et non pour un repérage et une analyse comparée des applications concrètes du travail en réseau dans le quotidien des missions. Cette orientation résulte d’un questionnement général qu’il convient en premier lieu de préciser pour expliciter l’émergence de l’objet de recherche2. Nous présenterons ensuite les hypothèses conductrices de nos travaux et les orientations heuristiques retenues.
Le travail en réseau comme objet de recherche : genèse d’un questionnement.
La question à la base de notre démarche de recherche s’est structurée à partir d’une intuition issue de notre propre expérience de travailleur social3, intuition portant sur une référence de plus en plus appuyée à une pratique professionnelle singulière, le travail en réseau. Cette pratique que nous associions spontanément à l’exercice quotidien des missions faisait en effet l’objet d’un intérêt grandissant, le réseau constituant une modalité d’intervention fortement revendiquée dans l’approche de la question sociale. Une simple observation des repères théorico-pratiques constitutifs des contextes d’intervention suffisait à mesurer la progression de la figure du réseau et du travail en réseau : le mot
« réseau » était en effet retenu pour la dénomination de certaines structures (Réseaux d’Aide et de Suivi des Elèves en Difficulté, Réseau d’Ecoute d’Appui et d’Accompagnement des Parents, etc.). Il apparaissait très fréquemment mentionné dans la presse spécialisée (Addiction et précarité : un réseau pour une prise en charge cohérente de l’usager 4 ; Tutelles : un réseau pour aider les personnes âgées
1Parrochia (1993, p. 10).
2 Jean-Claude Kaufmann (2005, p.5-11) regrette que le chercheur « artisan », principalement préoccupé par le résultat final de ses travaux, prive souvent le lecteur des prémices de sa recherche, lesquelles occupent pourtant une place conséquente dans la genèse de la réflexion et de l’élaboration de l’objet de recherche.
3 Educateur spécialisé de 1987 à 2011 en Maison d’Accueil Spécialisée (MAS), Institut Médico-Professionnel (IMPro), Foyer d’Accueil et d’Orientation pour adolescents délinquants, Service d’écoute téléphonique anonyme Parents/Enfants, Service d’Action Educative en Milieu Ouvert (SAEMO), Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS), Service d’Investigation et d’Orientation Educative (SIOE).
4 ASH, n°2293, janvier 2003.
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protégées5, etc.). Il se retrouvait au centre de publications à visée méthodologique (Dumoulin, Dumont, Bross et Masclet, 2003) et faisait dorénavant l’objet de formations contenues : « Le travail en réseau. Méthode appliquée au travail social »6, «Travail en réseau, la participation active de tous les acteurs »7. Dans le même temps, le travail en réseau endossait une caractéristique identitaire pour plusieurs métiers du secteur social, étant notifié dans les référentiels professionnels des Educateurs Spécialisés, des Assistants de Service Social, des Conseillers en Economie Sociale et Familiale, et des Techniciens d’Intervention Sociale et Familiale8.
Cette insistance autour du travail en réseau apparaissait correspondre à sa considération en tant qu’idéal-type caractérisant l’ensemble des interventions construites sur les dynamiques de coopération ou sur la mobilisation de collectifs. De simple « habitude » de travail, le travail en réseau semblait accéder à une reconnaissance et un statut, devenant par l’entremise de la sphère législative une pratique à développer : « (…) le modèle du réseau au sens large, en raison de ses potentialités, reste (…) un modèle à promouvoir » (Daniel, Delpal et Lannelongue, 2006, p.62) et un objectif à atteindre :
« La complémentarité des actions conduites par les différents professionnels auprès des enfants et adolescents ou de leur environnement passe par le développement du travail en réseau »9.
Cette évolution générale est venue interroger notre conception alors simpliste du travail en réseau, la définition que nous lui prêtions se résumant à une modalité de coopération interinstitutionnelle et interprofessionnelle, définition commune avec celle du partenariat, la principale différence entre les deux démarche résidant dans une proximité avec les acteurs beaucoup plus présente dans le travail en réseau que dans le partenariat. Les réseaux de type affinitaires représentaient en effet une réalité dans l’exercice des missions, les « coups de mains », les « bons plans », les « filières », les « carnets d’adresses », la confiance accordée à tel partenaire, la défiance opposée à tel autre, fonctionnant tels des outils à l’efficacité souvent constatée dans la résolution des problématiques rencontrées. Le
« bricolage » évoqué par Autès (1999) était répandu, à défaut d’être reconnu par les instances décisionnelles, toléré à défaut d’être encouragé : « (…) on ne peut qu’être frappé par l’abondance des
« trucs », des techniques que le travail social est capable d’utiliser. Tout est bon puisque (…) l’essentiel n’est pas dans le rapport à la technique. » (p.258).
La mise en regard de l’importance prise par le travail en réseau dans les secteurs social et médico- social avec notre difficulté à définir cette pratique de façon explicite a constitué le point de départ de la recherche, recherche également motivée par le constat d’une évolution sociétale largement traversée par la figure du réseau.
La figure du réseau s’est en effet progressivement imposée dans l’organisation, la compréhension et la représentation des échanges matériels, humains, virtuels, et ce dans des domaines aussi diversifiés que la communication, la technologie, les transports, la technologie, l’informatique, les sphères amicales, familiales, professionnelles, etc., au point d’être érigée en tant que symbole de l’organisation du monde contemporain (Castells, 2001). L’interpénétration du travail social et de l’évolution sociétale inaugure une réalité des interventions des travailleurs sociaux traversées et influencées par le « tout- réseau » (Castells, 2001). L’importance conférée aux dynamiques réticulaires dans ce secteur
5 ASH, n°2298, février 2003.
6 Cinq journées organisées par l’ITSRS de Montrouge en 2003.
7 Ecole des parents, 2005.
8 La finalité des référentiels d’activités, de compétences, de formation et de certification de l’ensemble des diplômes de travail social a été engagée dans le cadre du schéma national des formations sociales 2001-2005.
9 Circulaire DGS/DGAS/DHOS/DPJJ n°2002-282 du 03 mai 2002 relative à la prise en charge concertée des troubles psychiques des enfants et adolescents en grande difficulté.
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d’activité peut être interrogée tant au niveau des motifs ayant procédé à son émergence qu’au niveau des effets sur l’organisation des institutions et des positionnements professionnels.
L’approche du réseau et de son corollaire expérientiel, le travail en réseau, se révèle complexe, étant doublement marquée par une certaine évidence quant à sa mise en œuvre et par une définition finalement peu assurée en lien avec le caractère pluri sémantique du terme « réseau » : les Assistants de Service Social interrogés dans le cadre d’une recherche préalable à la thèse (Tourte, 2004) ont sans exception posé le travail en réseau comme étant indéfectible de l’action, les professionnels ne pouvant réfléchir et agir seuls sans recourir à la dimension pluridisciplinaire des équipes et au partenariat interinstitutionnel. Dans le même temps, l’activation régulière de cette démarche peinait à se structurer dans les discours sur la base d’une définition précise et singulière, le travail en réseau étant soit confondu avec le partenariat, soit décrit comme une de ses composantes sans que la distinction entre les deux modalités de coopération soit nettement définie.
Ce rapport paradoxal entre caractère habituel d’une pratique et difficultés d’en proposer une définition spécifique nécessite d’être approfondi. En effet, l’absence de clarification de ce rapport est susceptible de diluer le travail en réseau dans une définition générique, de le résumer à un "fourre-tout"
définitionnel en le laissant confondu avec les notions de partenariat, de coopération, de collaboration et d’articulation, à travers une économie de réflexion quant à son sens, sa portée et ses enjeux.
L’hypothèse d’une réduction du terme « réseau » à un « sac à métaphores »10 se pose, l’évidence spontanément attachée à son évocation et à son utilisation dans les pratiques des travailleurs sociaux n’étant peut-être finalement que le résultat d’une absence ou d’une insuffisance de conceptualisation11. La pratique consensuelle du travail en réseau à travers sa considération générique, générique dans le sens d’une approche définitionnelle minimale, peut autoriser l’ensemble des acteurs à s’en prévaloir : l’absence dans les discours d’une association du travail en réseau avec une technicité spécifique qui conditionnerait son emploi en le réservant par exemple à certaines professions participe en effet à sa considération comme un outil d’intervention répandu, commun, voire banal, et finalement peu structuré sur des repères conceptuels clairement établis.
Ce risque d’une réduction du travail en réseau à un outil familier car partagé sans retenue par les différents acteurs intervenant dans le domaine du travail social constitue un motif de fragilité conceptuelle, l’approche analytique des dynamiques réticulaires risquant de se limiter à leur considération en tant qu’organisation fonctionnelle consensuelle à même de rassembler les intervenants dans une approche similaire des problématiques à traiter : « (…) par delà leurs différences, tous les travailleurs sociaux se reconnaissent dans un mode d’intervention qui leur est grosso modo commun » (Ion, 2000, p.84).
Structurée sur une nécessité de questionner les évidences, notre approche du travail en réseau s’inscrit dans une recherche d’ordre conceptuel, à partir d’une analyse praxéologique - entendue au sens philosophique comme une démarche d’analyse du sens de l’action - du travail en réseau en lieu et place d’une considération technique de ses conditions de mises en œuvre. Sens et action représentent deux dimensions interdépendantes mais la clarification définitionnelle constitue un préalable nécessaire à toute pratique de travail en réseau par les Assistants de Service Social. La dimension
10 Expression employée par Jean-Marc Offner et Pierre Musso dans leurs productions sur le réseau.
11 Cette hypothèse a été renforcée par notre participation en 2002 à un Diplôme Universitaire « Psychopathologie des adolescents difficiles ». Volontairement inscrits sous le signe du développement du travail en réseau entre professionnels, les enseignements évoquaient régulièrement, et avec pertinence, l’intérêt d’une approche réticulaire de l’adolescence en grande difficulté sans toutefois en apporter une définition précise.