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Entrainer des athlètes gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres : besoins et craintes d'entraineurs québécois

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Academic year: 2021

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Entrainer des athlètes gais, lesbiennes, bisexuels et

transgenres

Besoins et craintes d’entraineurs québécois

Mémoire

Bianka Viel

Maîtrise en psychopédagogie

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

© Bianka Viel, 2013

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NOTES PRÉLIMINAIRES

Dans cet écrit, la forme masculine a été utilisée en tant que forme générique dans le but d’en faciliter

la lecture et alléger le texte, alors elle désigne aussi bien les femmes que les hommes, sans aucune

intention de discrimination envers un groupe ou l’autre.

Ce projet de recherche a été subventionné par l’Association canadienne des entraineurs (ACE) et

constitue la première phase d’un projet plus vaste.

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RÉSUMÉ

Le présent projet de recherche vise à décrire les besoins, les craintes et les défis que rencontrent des entraineurs de haut niveau concernant l’encadrement d’athlètes LGBT. L’opinion et l’expérience de 11 entraineurs ont été partagées par le biais d’entrevues semi-structurées. Les résultats de l’étude démontrent que la question de l’orientation sexuelle en sport est rarement discutée. Cinq des 11 entraineurs ont encadré des athlètes implicitement (pour la majorité) ou explicitement sortis du placard. Les entraineurs interrogés ont dit savoir qu’ils ont entrainé plus d’athlètes LGBT que ce qui était connu. Ils ont des craintes, des inquiétudes et des questions pour intervenir auprès de cette clientèle et plusieurs se sentent démunis et non outillés pour discuter de la question. Quelques-uns d’entre eux ne voient pas l’utilité de discuter de la question et ne perçoivent pas qu’ils ont un rôle à jouer pour soutenir les athlètes LGBT ou ceux qui sont soupçonnés de l'être en posant des gestes pour améliorer le climat. La majeure partie des entraineurs de l’étude croient que de l’information est nécessaire pour en apprendre sur le sujet et qu’une formation devrait être obligatoire pour savoir comment intervenir adéquatement avec cette clientèle. Finalement, parmi les entraineurs n’ayant pas entrainé d’athlètes LGBT, nul ne savait précisément comment s’y prendre pour créer un environnement inclusif, il est donc possible de croire que le milieu sportif n’est pas encore accueillant et prêt à la diversité sexuelle.

Mots clés : formation des entraineurs, athlètes LGBT, homophobie en sport, besoins, éducation sportive, Québec/Canada

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REMERCIEMENTS

C’est après plus de trois ans que prend fin mon périple dans le monde de la recherche. Un parcours rempli de solitude, d’embuches, de compromis, de sacrifices, de chaos cognitifs, de conciliations et de préoccupations de toutes sortes. Ce mémoire m’a permis d’en apprendre énormément sur moi-même. L’ampleur du travail accompli me rend fière et prête à passer à une autre étape. Je me dois de saisir l’occasion pour remercier ma directrice Mme Guylaine Demers pour m’avoir guidée si gentiment. Guylaine, tu demeureras une grande source d’inspiration pour moi. Merci du temps que tu m’as accordé ainsi que pour ton énorme savoir-faire qui transparaît dans tout ce que tu fais. Te côtoyer m’a permis de croire à la citation: ʺNever doubt that a small

group of thoughtful, committed people can change the world. Indeed, it is the only thing that ever has." -

Margaret Mead.

Je tiens à remercier l’Association canadienne des entraineurs pour leur soutien financier et pour m’avoir permis de prendre part au congrès national Leadership sportif qui fût une expérience d’envergure. Merci au Département d’éducation physique pour son appui et pour fournir un environnement stimulant et coopératif. Un merci tout spécial à Marie pour son fantastique travail et sa générosité. Puis, il est essentiel de remercier sincèrement les entraineurs participants d'avoir partagé leur vécu et leurs opinions avec nous pour le mieux-être des athlètes.

Le temps est venu de remercier infiniment ceux de me proches qui ont été là pendant cette période : mes amis, mes colocataires, ma famille, etc. Plus particulièrement, je remercie mon conjoint Louis, avec qui j’aimerais partager le reste de ma vie, pour son accompagnement, ses encouragements, ses précieux conseils, ses attentions et, plus encore, sa compréhension à travers ce projet que j’avais entamé. Les pauses qu’il m’a imposées ont été essentielles à mon équilibre de vie et sa philosophie m’a permis de trouver une paix intérieure permettant la réalisation du travail à accomplir. Finalement, je me dois de souligner le soutien inconditionnel de mes parents, leur dévouement, leur écoute… Merci d’avoir toujours cru en moi ainsi, me permettant de me développer et d’aspirer à devenir la personne que je veux être. Peu importe où je me trouve dans le monde et ce qui m’arrive, vous avez toujours été là pour moi. Je suis reconnaissante de votre appui de mes tout premiers pas dans mon aventure en sport jusqu’à aujourd’hui. J’ai conscience de la chance que j’ai de vous avoir tous dans ma vie. Vous êtes et vous serez toujours en permanence dans ma tête et mon cœur.

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TABLE DES MATIÈRES

NOTES PRÉLIMINAIRES ... iii

RÉSUMÉ ... v

REMERCIEMENTS ... vii

TABLE DES MATIÈRES ... ix

LISTE DES FIGURES ... xiii

LISTE DES TABLEAUX ... xv

CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE ... 1

1.1 Problème de recherche ... 1

1.2 Modification du comportement face à la menace de l’homophobie et conséquences sur la personne ... 4

1.3 Le milieu n’est pas préparé, ni outillé ... 5

1.4 Les constats de la recherche ... 6

1.5 L’entraineur dans tout cela ... 7

1.6 La formation des entraineurs ... 8

1.7 But et objectifs de la recherche ... 8

CHAPITRE 2 : REVUE DE LA LITTÉRATURE ... 11

2.1 Les concepts d’homophobie, d’hétérosexisme et d’identité de genre ... 11

2.2 L’existence du phénomène de l’homophobie ... 12

2.3 Description de l’expérience vécue en sport par les personnes LGBT ... 13

2.3.1 Accès et qualité de l’environnement ... 14

2.3.2 Harcèlement, violence homonégative, discrimination. ... 15

2.3.3 Soutien de l’entourage ... 17

2.3.4 Stratégies d’adaptation des individus LGBT ... 17

2.3.5 Isolement, dépression, suicide ... 23

2.4 Les acteurs de l’organisation du sport ... 26

2.4.1 Le manque d’information en général ... 26

2.4.2 Inaction et manque de « leadership » ... 27

2.4.3 Rôle de l’entraineur ... 27

CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE ... 30

3.1 Stratégie de recherche ... 30

3.2 Participants à la recherche ... 30

3.2.1 Caractéristiques des participants ... 30

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3.3.1 Conception du guide d’entrevue ... 31

3.3.2 Réalisation des entrevues ... 33

3.3.3 Journal de bord ... 33

3.4 Méthodes d’analyse des données ... 33

3.5 Limites de l’étude ... 34

3.6 Éthique ... 35

CHAPITRE 4 : RÉSULTATS ET DISCUSSION ... 36

4.1 Encadrement d’athlètes LGBT ... 36

4.1.1 Dévoilement de l’identité... 36

4.1.1.1 Modalités de sortie du placard ... 36

4.1.1.2 Sortie du placard auprès de qui ... 37

4.1.1.3 Réaction des gens ... 38

4.1.1.4 Caractéristiques et nombre des athlètes qui sortent du placard ... 39

4.1.2 Raisons qui expliquent le nombre restreint de sortie du placard ... 41

4.1.3 Interventions ... 43

4.1.3.1 Aucune action ... 43

4.1.3.2 Actions réactives et proactives ... 44

4.1.3.3 Limites de l’entraineur ... 45

4.1.3.4 Lignes de conduite ... 45

4.1.4 Retour réflexif. ... 46

4.1.4.1 Moments difficiles à gérer. ... 46

4.1.4.2 Homophobie selon les entraineurs. ... 47

4.2 Craintes, appréhensions et interrogations des entraineurs ... 47

4.2.1 Nature des craintes, appréhensions et interrogations. ... 48

4.2.2 Ce qui explique ces craintes, appréhensions et interrogations. ... 49

4.2.3 Impact de la présence d’un athlète LGBT. ... 50

4.2.4 Réactions des entraineurs à la présence d’un couple homosexuel. ... 51

4.2.5 Actions pour améliorer la situation. ... 52

4.2.6 Hétérosexuels et homosexuels, même intervention? ... 53

4.3 Éléments facilitant l’encadrement d’athlètes LGBT ... 54

4.3.1 La formation des entraineurs et leurs connaissances. ... 54

4.3.2 L’accès à des personnes LGBT ou à des intervenants dans son entourage personnel. ... 55

4.3.3 Le contexte du sport. ... 55

4.3.4 Le climat créé par l’entraineur. ... 56

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4.4 Rôle de l’entraineur ... 57

4.4.1 Perception du rôle de l’entraineur. ... 57

4.4.2 Les défis liés à l’encadrement d’athlètes LGBT. ... 59

4.4.3 La manière d’agir avec les athlètes LGBT... 60

4.4.5 La capacité d’intervenir des entraineurs. ... 61

4.5 Connaissances et suggestions des entraineurs ... 62

4.5.1 Connaissances des entraineurs concernant l’expérience des athlètes LGBT. ... 63

4.5.2 La formation des entraineurs. ... 63

4.5.2.1 Contenu des formations. ... 65

4.5.2.2 Le format des formations. ... 65

4.5.3 Les ressources disponibles et connues. ... 66

4.5.3.1 Règlementation et politique anti-discrimination. ... 67

4.5.3.2 Contrat avec les athlètes. ... 68

4.5.4 Questions pour la création d’un environnement inclusif. ... 68

CONCLUSION ... 71

Bibliographie ... 73

ANNEXE A ... 79

ANNEXE B ... 81

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 Continuum de dévoilement de l’identité p. 34

Figure 2 Lesbian Coaches’ Identity-Management Strategies p. 35 Figure 3 Continuum de la réaction face à la sortie du placard p. 36

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 Caractéristiques des participants de l’étude p.29

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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE

1.1 Problème de recherche

Le projet actuel est inspiré des conclusions d’études portant sur l’expérience sportive des personnes LGBT1

qui ont permis de constater que l’homophobie est présente et continue d’être reproduite dans le monde du sport (Brackenridge, Rivers, Gough, & Llewellyn, 2007; Demers, 2010; Symons, Sbaraglai, Hillier, & Mitchell, 2010). Aux fins de la réalisation de notre recherche2, la définition de la Commission des droits de la personne

du terme homophobie a été retenue : «l’homophobie… englobe toutes les attitudes négatives pouvant mener au rejet et à la discrimination, directe et indirecte, envers les gais, les lesbiennes, les personnes bisexuelles, transsexuelles et transgenres, ou à l’égard de toute personne dont l’apparence ou le comportement ne se conforme pas aux stéréotypes de la masculinité ou de la féminité.» (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), 2007, p.12).

Le Canada a fait des pas de géant pour rendre le sport plus inclusif en encourageant et en favorisant l’accès à la pratique sportive pour les filles et les femmes, pour les personnes avec un handicap physique ou mental, pour les autochtones, pour les personnes à faible revenu et pour les minorités visibles. Malgré les bénéfices importants liés à la pratique sportive et les efforts investis pour faire du sport un milieu inclusif et positif, le sport n’est pas toujours accueillant pour les personnes LGBT (Fusco, 1997; Griffin, 1998; Lajeunesse, 2008; Lenskyj, 2003; Pronger, 2000). Le trop peu d’attention portée jusqu’à maintenant à l’homophobie en milieu sportif peut être lié, en partie, à l’ignorance ou à la méconnaissance de la problématique de l’homophobie et de ses effets, notamment sur les jeunes (Chamberland, 2010; Demczuk, 2003). Les malaises et les préjugés d’une partie des membres des organisations sportives constituent aussi des freins à la lutte contre l’homophobie. Dans notre société, l’homophobie est liée à l’hétérosexualité obligatoire et à l’hétérosexisme comme étant d’importantes structures de la culture occidentale dominante (Baks et Malecek, 2004). L’hétérosexisme est l’affirmation de l’hétérosexualité comme norme sociale ou comme étant supérieure aux autres orientations sexuelles. Ce terme est donc associé à la croyance répandue que tout le monde est ou devrait être hétérosexuel et cette croyance renforce l’homophobie. L’hétérosexisme est présent à tous les niveaux du sport, de l’initiation à l’élite (Brackenridge, Aldred, Jarvis, Maddocks, & Rivers, 2008; Symons et

al., 2010). Alors que nous avons fait de nombreux gains en rendant nos écoles, nos institutions et nos milieux

1 LGBT : acronyme utilisé pour nommer les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres. L’acronyme habituellement utilisé est LGBTQ, le Q représentant les personnes queer ou en questionnement. Ce même acronyme inclut les individus « bispirituels » (mot-cadre utilisé par certains peuples des Premières nations pour désigner un ou une Autochtone qui s’identifie comme gai ou lesbienne). Nous avons retenu ici LGBT puisqu’il est représentatif de nos résultats.

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de travail plus accueillants face à la diversité, il y a encore très peu de discussions autour de la création d’un monde sportif plus inclusif face à la diversité sexuelle. En fait, parce que l’hétérosexualité est la norme présumée, l’existence des personnes LGBT en sport est rarement reconnue. La plupart du temps, lorsqu’il est fait mention de la présence de gais ou de lesbiennes en sport, c’est de façon négative. Plusieurs personnes LGBT choisissent de ne pas s’engager en sport à cause de cet environnement hostile et négatif (Demers, 2006, 2010; Lajeunesse, 2007).

En 2007, l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique (ACAFS) a développé un atelier de sensibilisation à l’homophobie pour les organisations sportives. Le problème majeur que l’ACAFS rencontre est la peur que possèdent les organisations à offrir ce type de formation, car elles se sentent menacées: si elles offrent la formation, les gens vont croire qu’il y a des personnes LGBT qui pratiquent leur sport. L’autre problème concerne les organisations qui disent ne pas avoir besoin de cette formation parce qu’il n’y a pas d’athlètes ou d’entraineurs LGBT dans leur sport, ce n’est donc pas une problématique à considérer. Les athlètes LGBT sont donc confrontés à ce que Baks et Malecek (2004) appellent le dilemme du prisonnier : les athlètes ne sortent pas du placard3 donc l’homosexualité n’est pas un

thème abordé dans les organisations sportives; les organisations sportives ne connaissent peu ou pas du tout la norme hétérosexiste qui existe dans leurs organisations, car les athlètes demeurent dans le placard. Il est donc essentiel d’étudier l’homophobie dans le contexte sportif afin de documenter le phénomène, sortir de ce dilemme et décrire de façon empirique la réalité des athlètes et entraineurs LGBT.

Le monde du sport est encore très homophobe et cette homophobie affecte l’expérience sportive de nombreuses façons (Symons et al., 2010). Au Canada, où les homosexuels ont les mêmes droits que les hétérosexuels et où il est régulièrement question des gais et des lesbiennes dans la société en général, le sujet de l’homosexualité en sport est rarement discuté. Les lesbiennes et les gais en sport sont pratiquement invisibles, leur existence étant rarement reconnue. Dans de rares situations où un athlète ou un entraineur sort du placard, les réactions sont plutôt négatives et ces personnes reçoivent peu ou pas de soutien des différents intervenants sportifs qui les entourent. Plusieurs intervenants et athlètes sont inconfortables et ne parlent pas d’homophobie en sport (ACAFS, 2006; Demers, 2010). Pour plusieurs d’entre eux, il est plus facile de nier, d’ignorer ou d’utiliser l’humour pour parler de cette problématique. Avec cette absence de discussions ouvertes sur le sujet, les mythes et les préjugés persistent. Une de mes premières motivations à soumettre ce projet est ma préoccupation face aux organisations sportives qui ne sont pas encore outillées adéquatement pour gérer la diversité des orientations sexuelles. Ce projet est conçu pour comprendre et faciliter la création d’environnements sportifs sécuritaires, accueillants et inclusifs pour les personnes LGBT en préparant les intervenants sportifs à la gestion de cette problématique. Pour ce faire, nous devons d’abord comprendre ce

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3 que vivent ces personnes. L’objectif principal de ce projet est donc de décrire et comprendre les expériences sportives vécues par les athlètes et les entraineurs LGBT. On ne peut plus continuer et faire comme si le phénomène n’existait pas. Tous les intervenants sportifs qui encadrent des athlètes ou qui travaillent avec des entraineurs qui sont peut-être LGBT doivent saisir l’importance de leur rôle dans la lutte contre l’homophobie. Lorsqu’un athlète ou un entraineur se confie et dévoile son orientation sexuelle, la réaction du confident est déterminante dans la vie de cette personne (Demers, 2006). La sortie du placard est extrêmement difficile si la réaction est négative et peut avoir des conséquences désastreuses. Rappelons que le taux de suicide chez les adolescents homosexuels est de 10 à 12 fois plus élevé que chez les adolescents hétérosexuels (Paul, 2002). En présentant les expériences, les barrières et les éléments facilitant la pratique sportive des personnes LGBT dans le système sportif canadien, les résultats de ce projet pourront être utilisés pour mieux préparer l’ensemble des intervenants sportifs à interagir avec la population sportive LGBT et augmenter leur participation en sport. Ce projet sera la première étude descriptive à large échantillon sur la réalité des athlètes et entraineurs LGBT canadiens et fournira un riche aperçu des défis à surmonter dans la lutte contre l’homophobie en sport.

Le monde du sport semble être un des milieux les plus résistants au changement. Une multitude de règles non écrites dictent les comportements des participants à l’intérieur du milieu sportif. Les membres de la communauté LGBT sont alors confrontés à des croyances et valeurs conservatrices et aliénantes. La plupart des participants n’ont pas conscience de ce qui est véhiculé et reproduit de jour en jour dans la pratique de leur sport et tout autour. Au Canada, comme ailleurs, les comportements des sportifs qui sont perçus comme des modèles de société semblent être difficilement remis en questions. Pourtant, l’homophobie est un de ces éléments véhiculés et pour plusieurs raisons, ce phénomène dévastateur peut poursuivre son ascension ou du moins persister et ainsi demeurer présent. Hemphill et Symons (2009) ont identifié le sport et les institutions d’éducation comme des sites où l’homophobie est répandue, avec des conséquences nocives pour la santé et le bien-être des athlètes LGBT, des étudiants et également des entraineurs et des enseignants. Intimement liée à l’hétérosexisme, l’homophobie en sport demande encore d’être démystifiée et étudiée de sorte qu’il soit possible de faire le point sur l’ampleur et les mesures à prendre pour contrer cette menace pour les participants.

Ce phénomène est caractérisé par des comportements discriminatoires, harcelants et violents envers les individus LGBT ou tous ceux dont la sexualité est considérée comme ambigüe. De lourdes conséquences sont notables chez le participant en sport qu’il soit un homme ou une femme ainsi que chez son entourage, mais également pour tous ceux qui évoluent en sport et en activité physique. Plusieurs études ont démontré que la présence d’hétérosexisme et d’homophobie cause un large spectre d'expériences négatives, qui s’accumulent et qui créent une sensation indésirable et inconfortable pour le participant (Kirby, Demers & Parent, 2008),

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Les questions touchant les personnes LGBT sont plus fréquemment abordées dans la société qu’en sport, ce qui n’est pas sans conséquence. Étant donné que le sujet n’est que rarement discuté en sport, une certaine ignorance ou méconnaissance du sujet plane, ce qui permet le maintien de préjugés et de stéréotypes archaïques destructeurs. D’ailleurs, les attitudes sociales et le manque d’informations sont des facteurs qui influencent la discrimination et le harcèlement (Brackenridge et al., 2008). Par conséquent, le peu de discussion qui s’ensuit contribue au maintien d’un environnement hostile où il y a présence de peur et d’incompréhension à propos des différentes orientations sexuelles menant au harcèlement, à l’inconfort, à l’isolement et à la violence (CDPDJ, 2007). Pourtant les sujets de cet ordre ne devraient pas être évités, mais plutôt intégrés aux discussions étant donné leur importance capitale.

Les individus LGBT subissent une forte pression pour demeurer dans le placard. Ils sont littéralement invisibles et leur présence est rarement reconnue. Ils ressentent la peur du rejet, du ridicule, de la violence si quelqu’un devait apprendre leur orientation sexuelle. Ainsi, la plupart des athlètes LGBT gardent leur orientation sexuelle cachée (Ollis, Mitchell, Watson, Hillier, & Walsh, 2009). Ils sont alors pris dans un cercle vicieux que Baks et Malecek (2004) nomment le « dilemme du prisonnier » qui est caractérisé par l’existence d’une norme quasi inébranlable au sein d’un milieu conservateur accompagnée de la crainte d’être ostracisé ou exclu.

1.2 Modification du comportement face à la menace de l’homophobie et conséquences sur la

personne

Comme peu d’actions sont mises de l’avant pour remédier à l’homophobie en sport (Brackenridge et al., 2008), les individus touchés modifient leur comportement (Sartore & Cunningham, 2009). Cette réaction est fréquemment causée par la décision de garder son identité cachée. Ce secret ainsi gardé a pour effet de cultiver la crainte de dévoiler son identité sexuelle en sport. Dans la mesure où les personnes qui ont une orientation sexuelle non traditionnelle désireraient sortir du placard, il y a de fortes chances qu’elles se sentent mal dans leur peau, qu’elles aient de la difficulté à s’accepter telles qu’elles sont, etc. Cela s’ajoute au fait de vivre plusieurs autres conséquences de l’attitude négative des autres à leur égard. Les athlètes LGBT sont d’ailleurs considérés comme un groupe à risque quant aux effets pernicieux de l’homophobie (Hemphill & Symons, 2009). Ensuite, il semble difficile de prendre la décision de sortir du placard sans connaitre d’individus LGBT et conséquemment sans avoir de modèle à qui s’identifier. Selon Griffin (1998), le choix des athlètes de vivre ouvertement leur orientation sexuelle constitue pourtant une action puissante et est probablement la plus persuasive à l’intérieur du processus de changement social. Dans le cas contraire, la norme hétérosexuelle est renforcée par le silence qui plane sur les questions d’orientation sexuelle. À l’instar de Griffin, Clarke (1998) argumente en disant qu’il faut briser cette conspiration du silence qui entoure la question de l’homosexualité en sport, avoir le courage de commencer un dialogue ouvert et reconnaitre les

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5 préjugés et la discrimination que nos athlètes LGBT doivent quotidiennement gérer pour survivre dans un monde hétérosexiste et homophobe.

Tel qu’il a été mentionné, il est connu que non seulement les athlètes, mais les entraineurs, administrateurs, bénévoles et autres intervenants souffrent également de la loi du silence et le phénomène de l’homophobie pousse, voire oblige certains à cesser d’évoluer au sein du milieu sportif pour ne pas vivre d’expériences traumatisantes. D’ailleurs, plusieurs personnes LGBT choisissent de ne pas s’engager en sport à cause de cet environnement hostile et négatif (Demers, 2006, 2010; Lajeunesse, 2008).

Forbes, Lathrop et Stevens (2002) abondent en ce sens en ajoutant que le monde du sport est extrêmement homophobe, que l’homophobie affecte l’expérience sportive de façon négative et qu’il est difficile de dire jusqu’à quel point. Ce que nous connaissons actuellement concerne l’expérience des athlètes. Cet aspect est relativement bien documenté. En effet, il est bien connu que ce que vivent les individus LGBT en sport n’est guère réjouissant et souvent ceux-ci ne trouvent que très peu de soutien en cas de besoin. Pourtant, ce soutien serait un élément clé pour les inciter à sortir du placard (Flink, Burton, Farrell, & Parker, 2012). Plusieurs auteurs précisent que c’est l’expérience générale de tous les athlètes qui est envenimée par le phénomène de l’homophobie (Elling & Janssens, 2009; Demers, 2006; Griffin, Perrotti, Priest, & Muska, 2002) et non seulement celles des personnes LGBT.

Tel que l’explique Griffin et al. (2002), ce qui est vécu par les individus LGBT nuit au sport en créant des environnements sportifs non sécuritaires qui gênent l’apprentissage, affectent l’amitié et blessent des équipes aussi bien que des athlètes et des entraineurs. Il est ainsi possible de percevoir les conséquences de l’homophobie. En outre, certaines femmes ainsi que certains hommes en sport peuvent être étiquetés LGBT et faire l’expérience de préjugés et de discrimination, car le stigmate associé au fait d’être LGBT ou d’être perçu comme tel serait le plus puissant et pervers stigmate dans la société (Sartore & Cunningham, 2009).

1.3 Le milieu n’est pas préparé, ni outillé

Bien que le système sportif canadien ait fourni des efforts pour inclure plusieurs types de populations dans la pratique sportive, il n’en demeure pas moins qu’en ce qui concerne les athlètes LGBT, la situation n’évolue que très peu. Les dirigeants des différentes organisations sportives n’ont pas conscience de la norme hétérosexuelle qui est omniprésente, réitérant eux-mêmes souvent cette norme. Comme l’expliquent Kirby, Demers, & Parent (2008), il y a un manque au point de vue des connaissances quant au danger de harcèlement sexuel et d’abus auxquels font face les individus LGBT dans le sport. Il y a un manque dans les politiques de prévention et dans les programmes qui existent au Canada et au Québec. Il semble que les organisations sportives locales et régionales n’ont pas encore été suffisamment outillées pour instituer des

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mesures préventives pour contrer les effets pervers de l’homophobie. En outre, certains dirigeants d’organisations ou d’organismes ne désirent pas avoir d’atelier ou de formation sur le sujet, car ils affirment qu’il n’y a pas d’individus LGBT dans leur sport. Cette réaction de leur part laisse croire qu’un profond inconfort plane à ce sujet et qu’il en est de même pour plusieurs intervenants sportifs. Par conséquent, les organisations ne possèdent ni l’expertise ni les outils, les connaissances et les ressources pour intervenir adéquatement lorsque des problèmes d’exclusion ou de discrimination en relation avec l’orientation sexuelle font surface. Lorsqu’un athlète ou un entraineur sort du placard, les réactions sont souvent négatives et ces personnes reçoivent peu ou pas de soutien des organisations sportives qui chapeautent leur sport. Pourtant, un soutien personnel et professionnel doit être disponible pour les athlètes LGBT comme pour les autres. Les individus concernés, dont l’intégrité physique et psychologique est souvent atteinte, se heurtent alors à une résistance importante du milieu qui n’est visiblement pas prêt ou apte à agir pour le bien-être des participants. C’est d’ailleurs ce que rapportent les études traitant de la question (Brackenridge et al., 2007; Demers, 2010; Symons et al., 2010) qui dénotent toutes la persistance de l’homophobie dans la sphère sportive malgré certaines mesures entreprises.

1.4 Les constats de la recherche

La première étape d’une étude sur l’homophobie en sport est de rendre visibles le phénomène ainsi que d’autres formes de discrimination (Hemphill & Symons, 2009). Les études sur l’homophobie dans le sport se multiplient. La recherche sur l’homophobie en sport s’est développée de façon plus rapide ces dernières années; toutefois de nombreuses données sont toujours manquantes et la question de l’orientation sexuelle en sport demeure peu investiguée. Certains chercheurs la qualifient même encore de tabou (Demers, 2006). Par contre, les études sont encore lacunaires en ce qui concerne les changements à mettre en place, les résistances à de tels changements, les politiques et programmes pour opérer de tels changements, les besoins de formation. Alors, des indices sur l’état actuel de la situation ainsi que le type d’interventions possibles sont manquants.Le President’s Council on Physical Fitness and Sports (1997) est d’accord pour dire que d’autres études sont également nécessaires pour améliorer l’étendue des sujets à l’étude de manière à être plus inclusif et afin de connaitre les obstacles au plein développement des participants en sport comme de comprendre comment ce contexte devient le site d’une telle résistance ou opposition au bien-être des athlètes (Clarke, 1998). Les premières études réalisées ont consisté à documenter l’existence et les manifestations de l’homophobie, la discrimination vécue, etc.

De nouvelles études permettraient de combler les manques dans la littérature concernant l’éducation, la défense des intérêts et assurer la protection de tous les athlètes (Kirby et al., 2008). En 2008, Brackenridge et al. ont présenté leur cadre conceptuel « Challenging the status quo : steps to converting awareness into

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7 practice in achieving sexual orientation equality in sport ». Ils y présentent l’état des connaissances à l’aide d’un continuum allant de la prise de conscience jusqu’au changement. Le manque de connaissances y est illustré et permet de justifier la pertinence de notre étude. Ces auteurs précisent qu’il y a un manque dans la littérature quant aux produits pédagogiques ou éducationnels et quant à la formation sur l’orientation sexuelle en sport, spécialement pour les dirigeants et le personnel des organisations sportives. Notons aussi une nécessité quant à un soutien pratique pour les athlètes LGBT, de l’information sur leurs droits, ainsi qu’une structure de compétition qui s’adapte et satisfait la diversité en matière d’orientation sexuelle.

1.5 L’entraineur dans tout cela

Dans la configuration d’un environnement sportif favorisant le développement optimal de la personne et l’excellence athlétique, l’entraineur est directement en contact avec les athlètes et a de l’influence sur l’environnement. Son influence sur les athlètes est souvent sous-estimée et pourtant son rôle est de premier ordre auprès de ces derniers. À ce sujet, la recherche sur l’homophobie et l’hétérosexisme chez les étudiants et les athlètes fournit des preuves quant à l’importance de lutter contre ces phénomènes, ce qui devrait encourager tous les professionnels à améliorer l’environnement dans lequel les athlètes étudiants apprennent et rivalisent (Maurer-Starks, Clemons & Whalen, 2008). Clarke (1998) renchérit en affirmant qu’en tant qu’éducateurs, il est nécessaire d’examiner le contenu du programme enseigné et celui plus caché (« hidden curriculum ») qui est aussi un indicateur sur ce qui est valorisé de façon implicite. Ainsi, il serait possible de commencer à défier les mythes et les stéréotypes concernant les individus LGBT. Les éducateurs devraient se sentir moralement obligés d’appuyer leurs décisions pédagogiques ainsi que leur philosophie sur la science concernant les meilleures pratiques, les besoins des étudiants. La façon dont les questions sont posées communique de puissants messages quant à ce qui est valorisé et dévalorisé par l’entraineur (Anderson, 1999). Comme il est celui qui dirige les activités et est responsable de mettre des conditions en place pour que le plus grand nombre de participants possible aient l’opportunité de vivre une expérience positive, il peut, sans contredit, prévenir l’existence d’un environnement hétérosexiste, homonégatif et hostile.

Ce sont donc les gestes, le langage et l’attitude de l’entraineur qui indiqueront à l’athlète s’il est en sécurité et s’il peut être lui-même (en dévoilant son orientation sexuelle dans le contexte sportif dans lequel il évolue, par exemple). Tel que Osborne et Wagner (2007) l’affirment, un entraineur devrait travailler à créer des normes qui incluent les athlètes de toutes les orientations sexuelles ainsi qu’une politique de tolérance zéro pour ceux qui ne les respectent pas. D’ailleurs, si une personne prend la décision de sortir du placard, la réaction de son entraineur ou d’un autre confident est déterminante dans la vie de cette personne (Demers, 2006). La sortie du placard étant extrêmement difficile, si l’entraineur réagit négativement ou s’il ne fait rien, cela fournira des messages très clairs à l’athlète et les conséquences peuvent être désastreuses. À ce propos, les athlètes

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LGBT courent un risque plus élevé d’avoir des problèmes de santé physique ou mentale (White, Oswalt, Wyatt, & Peterson, 2010). D’ailleurs, les athlètes LGBT savent pertinemment que sortir du placard peut entrainer la perte d’amis, de partenaires d’entrainement, l’exclusion de l’équipe, l’isolement, des problèmes financiers causés par la privation de commanditaires, etc. L’environnement sportif dépend alors de ce que l’entraineur fera ou ne fera pas.

1.6 La formation des entraineurs

Étant donné le nombre grandissant d’entraineurs et l’impact qu’ils ont sur les athlètes, El Hlimi (2011) affirme qu’ « afin de fournir un encadrement approprié et de qualité aux participants, l’implication des entraineurs est primordiale » (p.1). À ce propos, de nombreux auteurs s’entendent pour dire que la formation des entraineurs doit être améliorée, car il est possible, entre autres, que ceux-ci reproduisent des normes hétérosexistes qui perpétuent la discrimination envers les individus LGBT (Hemphill & Symons, 2009). En outre, selon ces mêmes auteurs, il y aurait beaucoup plus à faire par les organismes de sport pour conscientiser les gens concernant la question de l’orientation sexuelle en sport et pour former les entraineurs à faire une bonne utilisation des ressources éducatives disponibles dans les écoles et la communauté. D’ailleurs, le sport profiterait de l’injection de ressources et d’un certain leadership pour aider les futurs entraineurs à faire face aux effets sournois de l’homophobie. Notre société s’attend de plus en plus à ce que toutes les personnes LGBT soient en mesure d’apprendre dans un environnement sûr qui les soutienne (Hemphill & Symons, 2009). Il en est de même avec les professionnels de l’entrainement, à qui on demande d’être culturellement compétents, c’est-à-dire capables de répondre avec tact et efficacité aux gens LGBT, aux questions qui s’y rapportent et aux pratiques communautaires qui leur sont propres (Hemphill & Symons, 2009). Frey (2003), cité dans Meier (2005), précise que ces formations d’entraineurs devraient inclure un module sur le genre pour augmenter la conscience des participants concernant la socialisation spécifique au genre et les stéréotypes qui s’y rapportent. Bref, il semble toujours que l'on puisse faire mieux quant aux formations dispensées aux entraineurs pour gérer les questions relatives à l’orientation sexuelle.

1.7 But et objectifs de la recherche

Considérant les entraineurs de tous les niveaux comme les acteurs de changement dans la lutte contre le phénomène de l’homophobie, il nous apparait essentiel de travailler de concert avec eux pour trouver les meilleurs moyens de favoriser un climat d’entrainement sain. Cette étude cherche à identifier et à comprendre l’expérience des entraineurs de haut niveau de la région de Québec quant à l’intervention auprès de la clientèle LGBT ou leurs hypothèses d’action face à des situations impliquant des individus LGBT. Nous visons à mettre en lumière les situations qu’ils ont vécues en relation avec des soupçons ou le dévoilement de

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9 l’orientation sexuelle d’un athlète, comme les barrières ou les éléments qui facilitent leurs interventions. Ainsi, nous croyons qu’il sera possible de connaitre et comprendre leurs besoins de formation.

Ce projet s’inscrit dans une perspective de promotion d’environnements accueillants et inclusifs dans une optique de développement optimal pour tous. Cette étude a donc pour objectif principal d’identifier les besoins des entraineurs pour l’encadrement d’athlètes qui ont une sexualité non traditionnelle. Les objectifs spécifiques sont d’identifier les craintes, les inquiétudes et les appréhensions des entraineurs, de dresser un portrait de leurs connaissances et de leurs expériences en encadrement d’athlètes LGBT ainsi que le rôle qu’ils s’attribuent face aux questions d’orientation sexuelle en sport. Pour notre part, il nous semble essentiel d’étudier ces éléments afin d’avoir de nouvelles connaissances qui permettront le développement d’un atelier de formation pour mieux préparer et outiller les entraineurs à intervenir adéquatement auprès des individus LGBT. Le but ultime de l’étude est de réduire les conséquences négatives de l’homophobie et de rendre l’environnement sportif plus accueillant et inclusif et conséquemment l’expérience sportive des individus LGBT meilleure.

L’identification de moyens concrets pour aider les entraineurs à créer un environnement accueillant pour les participants LGBT vise à mieux les préparer. En décrivant également les manifestations de l’homophobie et la réaction de l’entraineur dans l’encadrement d’athlètes LGBT, nous souhaitons améliorer la compréhension de la portée du phénomène et surtout comment il est vécu et géré par les entraineurs. Nous aspirons à ce que ces nouvelles connaissances servent à l’amélioration de la situation de sorte que les entraineurs deviennent plus à l’aise avec les questions d’orientation sexuelle non traditionnelle. D’ailleurs, ce projet s’inscrit bien dans les recommandations actuelles pour la recherche et les orientations futures ciblées par Brackenridge & al. (2008) dans leur revue de littérature selon laquelle il est nécessaire de cibler des recherches qualitatives sur l’expérience des sportifs bisexuels, des entraineurs et autres acteurs qui ont un rôle de soutien pour les athlètes LGBT. Comme les entraineurs sont les acteurs sociaux principaux susceptibles de créer des environnements d’entrainement sécuritaires et inclusifs, il semble légitime de les étudier. Considérant les réactions de l’entraineur et l’environnement qu’il crée pour les individus LGBT qui évoluent en sport, il apparait primordial d’outiller et de former adéquatement les futurs entraineurs à intervenir comme guide, facilitateur et modèle auprès d’une clientèle de plus en plus diversifiée avec laquelle ils doivent travailler tous les jours.

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CHAPITRE 2 : REVUE DE LA LITTÉRATURE

Cette étude vise à décrire et comprendre les besoins et les craintes des entraineurs face à l’encadrement d’athlètes lesbiennes, gais, bisexuels et transgenres (LGBT) afin de créer des environnements sportifs sécuritaires, accueillants et inclusifs. Ce projet s’inscrit dans un courant de recherche qui porte sur l’homophobie en sport. La littérature sur ce sujet a permis de mettre en lumière une multitude de problématiques entourant la participation des personnes allosexuelles4 en sport dont celles concernant plus

spécifiquement les athlètes et les entraineurs. Les différentes études consultées afin d’élaborer ce projet confirment que l’homophobie est présente et continue d’être reproduite dans le monde du sport (Brackenridge et al., 2007; Demers, 2010; Symons et al., 2010).

Après avoir défini les principaux concepts d’homophobie, d’hétérosexisme et d’identité de genre, je présenterai d’abord les conclusions d’études portant sur le phénomène de l’homophobie en sport. Dans un second temps, il sera question de l’expérience des athlètes LGBT dans les sports organisés féminins et masculins. Je terminerai en présentant le rôle des acteurs des organisations sportives et de ce qui freine l’évolution de la situation vers un milieu plus positif et inclusif pour les athlètes LGBT.

2.1 Les concepts d’homophobie, d’hétérosexisme et d’identité de genre

Les concepts clés abordés dans cette étude sont l’homophobie, l’hétérosexisme et l’identité de genre. Ces concepts sont en relation étroite et ils sont parfois confondus. Ils représentent tous des phénomènes qui affectent négativement l’expérience des participants en sport. Aux fins de la réalisation de mon projet, la définition du terme homophobie de la Commission des droits de la personne a été retenue :

«L’homophobie… englobe toutes les attitudes négatives pouvant mener au rejet et à la discrimination, directe et indirecte, envers les gais, les lesbiennes, les personnes bisexuelles, transsexuelles et transgenres, ou à l’égard de toute personne dont l’apparence ou le comportement ne se conforme pas aux stéréotypes de la masculinité ou de la féminité.» (CDPDJ, 2007, p.12). L’hétérosexisme fait référence au système de croyances négatives, d’attitudes et de dispositions institutionnelles qui renforcent l’affirmation que tous devraient être hétérosexuels, que l’hétérosexualité est la seule forme d’expression sexuelle valide et la seule qui doit prévaloir et que les relations entre des gens de sexes opposés sont considérablement supérieures à tous les autres modes de vie, que ce soit d’être lesbienne, gai, bisexuel ou célibataire (CDPDJ, 2007). Ces manifestations sont, entre autres, à l’origine du comportement hostile envers les participants qui ne sont pas conformes à cette norme établie et reproduite en

4 Allosexuelles : Personnes appartenant à la diversité sexuelle qui inclut donc les personnes gaies, lesbiennes, bisexuelles, transgenres et transsexuelles.

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société. Le terme identité du genre se définit, quant à lui, comme la perception qu’une personne a de sa propre identité dominante comme étant féminine, masculine, entre les deux genres ou changeante (Symons et al., 2010). Celle-ci est évidemment différente de l’orientation sexuelle qui fait plutôt référence à la direction d'un désir érotique ou sexuel d’une personne, souvent exprimée sur un continuum.

2.2 L’existence du phénomène de l’homophobie

Bien que la manifestation ou la nature de l’homophobie varie d’un contexte à un autre, Demers (2004) affirme que «ce qui est certain, c’est que le phénomène existe, qu’il existe dans tous les sports, qu’il est vécu autant chez les athlètes masculins que féminines et qu’il s’applique aussi bien aux entraineurs qu’aux administrateurs sportifs» (p.3). Actuellement, il est difficile, voire impossible, de quantifier le phénomène de l’homophobie de façon précise étant donné sa nature perverse et taboue qui provoque l’isolement des victimes. D’ailleurs, selon Veri (1999), l’homophobie et l’hétérosexisme peuvent être considérés comme la dernière forme acceptable de discrimination sociale aux États-Unis. Cette auteure ajoute que cette forme de discrimination est plus insidieuse lorsque nous l’autorisons à pourrir le sport organisé dans les écoles, les universités et les rangs professionnels.

La difficulté à déterminer le nombre d’individus LGBT en sport est due en grande partie à l’étendue de la victimisation qui ne peut être précisée avec certitude (Tucker et PotockyTripodi, 2006). Puisqu’il y a présence d’homophobie, peu de statistiques sont disponibles sur l’étendue du phénomène, ne permettant pas de connaitre le pourcentage d’individus LGBT dans la population en général ou à l’intérieur de la sphère sportive (Anderson, 2009). Tel que précisé par Kirby et al. (2008) «No data could be found regarding the participation of LGBT athletes in organized sport games» (p. 415). Dans un milieu qui réprime la présence d’athlètes ou d’entraineurs LGBT, il y a de fortes chances pour qu’une personne mente au sujet de son orientation sexuelle, et ce, tant et aussi longtemps qu’il y aura présence d’homophobie dans notre culture (Anderson, 2009). La question de l’orientation sexuelle en sport, qui est relativement récente (étant apparue un peu avant les années 1990), semble avoir été évitée par les autorités sportives. La citation suivante illustre bien ce dont il est question:

«Like the ostrich burying its head in the sand, “sport” did not want to know. While there is no reason to expect that the proportion of homosexuals and heterosexuals in sport will be any different from the proportions in the larger society, there has been an assumption at work in sport that all athletes are heterosexual. » (Donnelly, 2000, p.89)

Au contraire de l’orientation sexuelle qui, lorsqu’inconnue des participants, est présumée d’emblée comme étant hétérosexuelle, il est bien connu dans le milieu sportif que les individus dont le genre ne concorde pas

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13 avec leur sexe biologique sont au cœur des discussions et font l’objet de remarques et d’attitudes homophobes. Par exemple, un garçon à qui l’on attribue des attitudes dites féminines sera très souvent présumé gai et insulté par le biais d’un langage très homophobe (fif, tapette). Notons que l’initiateur de ces comportements homophobes serait plus fréquemment de sexe masculin (Osborne & Wagner, 2007). Cette relation entre le genre et l’homophobie, qui est soutenue empiriquement, est souvent gardée dans l’ombre. Mis à part le fait que la recherche sur l’homophobie et l’hétérosexisme soit récente, il n’en demeure pas moins que jusqu’au moment où les consciences se seront élevées davantage et que la compréhension des conséquences de ces phénomènes sera améliorée, l’intervention demeurera difficile. En effet, comme la question de l’orientation sexuelle en sport est encore taboue à plusieurs endroits sur le globe, relativement peu est connu concernant la participation en sport et la sexualité (Elling & Janssens, 2009). Lorsque comparée à d’autres formes d’abus, il semble évident que l’homophobie est dans une classe à part. En effet, elle est habitée par un élément de crainte et de défensive qui la rend particulière en comparaison aux autres questions d’égalité. L’homophobie semble toujours être différente de l’ethnicité, du genre et de l’invalidité (Brackenridge et al., 2008).

2.3 Description de l’expérience vécue en sport par les personnes LGBT

Le sport organisé est le berceau d’expériences positives et négatives pour les sportifs qui font partie de la communauté LGBT. Le manque de structures départementales, de politiques ou de programmes (le manque général de soutien) va à l’encontre d’un objectif d’inclusion et d’acceptation des étudiants-athlètes qui sont LGBT. Ces lacunes ont résulté en une large disparité d'expériences (Flink et al., 2012). Même si des expériences sont davantage positives, il n’est plus à prouver que les phénomènes de l’homophobie et de l’hétérosexisme séparent les participants/athlètes entre eux. Clarke (1998) ajoute qu’il est clair que ces deux phénomènes sont mutuellement dépendants et servent d’outil oppressif pour marginaliser la participation des femmes et des hommes homosexuels en sport et en éducation physique. De plus, les lesbiennes et les gais sont ostracisés par leurs coéquipiers et leurs entraineurs (Griffin, 1994). Pourtant, la discrimination contre les athlètes ou entraineurs gais ou lesbiennes est souvent non abordée parce que ceux-ci ont peur de protester ou bien parce qu’il n'y a aucune protection légale en place (Griffin, 2005). Malgré les agressions et le harcèlement qui sont communs envers les participants LGBT, peu est fait pour transformer l’univers sportif. C’est ce que suppose Brackenridge et al. (2007) lorsqu’ils précisent que les lesbiennes et les gais font partie du système sportif depuis des années, système qui a pourtant fait peu pour s’attaquer à leur exclusion sociale. D’ailleurs, plusieurs auteurs s’entendent sur le fait qu’une proportion alarmante de cette population est sujette à de la discrimination, à du harcèlement et à de la violence. Il faut dire que l’environnement dans lequel ils évoluent leur rend la tâche plus difficile. Il sera question de l’expérience des athlètes LGBT en ce qui concerne

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l’accès et la qualité de l’environnement, le harcèlement, la violence homonégative et la discrimination, le soutien de l’entourage, les stratégies d’adaptation puis l’isolement, la dépression et le suicide.

2.3.1 Accès et qualité de l’environnement

Il est faux d’affirmer que les LGBT jouissent des mêmes opportunités en sport que leurs confrères hétérosexuels. C’est souvent de façon subtile et habile que les athlètes/participants LGBT reçoivent le message qu’ils n’ont pas leur place dans telle ou telle discipline sportive. Leur bien-être physique et mental est souvent affecté par ce sentiment d’exclusion. La liberté de choix dont bénéficient des individus possédant une orientation sexuelle dite traditionnelle est restreinte du côté des individus LGBT. Pour ceux et celles qui décident tout de même de s’impliquer dans la sphère sportive, les épreuves quotidiennes et les tensions qui en découlent pour ces sportifs peuvent être dommageables pour leur bon fonctionnement, leur plaisir, les possibilités d'avancement et les récompenses monétaires, forçant plusieurs à demeurer dans le placard (Hemphill & Symons, 2009). En effet, ce n’est pas tous les milieux qui permettent aux athlètes LGBT de vivre librement leur orientation sexuelle en la dévoilant au grand jour.

L’expérience des athlètes LGBT serait différente non seulement quant au type de sport pratiqué, mais il semblerait que le contexte, sport individuel ou collectif, aurait aussi une incidence sur le vécu des individus. Selon Griffin et al. (2002), les participants en sport collectif subiraient les contrecoups des questions d’unité d’équipe déterminante dans ce type de sport. Conséquemment, les athlètes en sport individuel pourraient ne pas avoir à gérer la dynamique d’équipe. De plus, ces derniers seraient plus ouverts aux différences, car ce contexte ne requerrait pas autant de conformité pour démontrer une unité d’équipe telle que c’est le cas en sports d’équipe.

Ensuite, la qualité de l’environnement qui est offerte aux athlètes LBGT diffère en comparaison avec les individus hétérosexuels. Lorsqu’il est question de qualité, cela réfère à un environnement sain, inclusif et sécuritaire visant le développement optimal de la personne. Dans la sphère sportive, les athlètes lesbiennes, gais ou bisexuels peuvent ne pas se sentir physiquement en sécurité, entre autres à cause du harcèlement physique qui a souvent lieu et qui coexiste avec le harcèlement verbal (Maurer-Starks et al., 2008). La sécurité fait référence non seulement à la sécurité physique, mais aussi au sentiment de se sentir menacé (ordre du psychologique) à cause d’un climat d’homophobie (Walsh, Symons, & Hemphill, 2006). Dans le même ordre d’idées, Ollis et al., (2009) précisent que le climat d’homophobie est une cause de préoccupation importante pour le bien-être des jeunes attirés par des gens du même sexe qu’eux et ils ajoutent que se sentir en sécurité est essentiel au bien-être d’une personne et nécessite plus que l’absence de tort physique. Il semble alors évident que le climat d’affirmation par excellence pour les athlètes lesbiennes et homosexuels soit une atmosphère où l’inclusion et la franchise coexistent. Dans l’optique de décrire le climat, Griffin (1998) a

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15 développé un continuum des climats sociaux (hostile, conditionnellement tolérant puis ouvert et inclusif) pour les sportifs LGBT et les acteurs sociaux dans les organisations sportives. Hemphill et Symons (2009) ont démontré plus tard qu’il était possible d’adapter les types de climats à la majorité des contextes sportifs. Il a été démontré que le climat fournit un guide utile quant à l’expérience et aux défis auxquels font face les participants LGBT en sport et ceux qui y sont impliqués (c'est-à-dire les bénévoles, les officiels, les entraineurs et les directeurs ou administrateurs) (Symons et al., 2010).

Dans plusieurs études, il est possible de constater que le climat varie non seulement d’un endroit à un autre, mais les mêmes lieux sont ciblés lorsqu’il est question de la sécurité des personnes LGBT. Avec les écoles et le sport comme sites majeurs de comportements homophobes (notamment les plateaux sportifs), les vestiaires et les évènements sportifs seraient des endroits susceptibles d’être menaçants pour les individus. Il est important que le cadre pour l’enseignement du sport et de l’éducation physique soit sécuritaire et inclusif et que de la formation des professionnels et le comportement des participants en sport en soient le reflet (Walsh et al., 2006). Ces éléments font qu’il est impossible d’affirmer que les individus LGBT profitent d’un environnement d’une aussi bonne qualité que ceux qui sont hétérosexuels.

2.3.2 Harcèlement, violence homonégative, discrimination.

Le harcèlement réduit les chances que des athlètes LGBT commencent, demeurent ou réussissent dans le sport (Brackenridge et al., 2006). De surcroit, pour les individus qui demeurent impliqués en sport, ils se voient souvent confrontés à un large spectre d’expériences négatives. Dans le rapport de consultation du groupe de travail mixte contre l’homophobie nommé: De l’égalité juridique à l’égalité sociale : Vers une stratégie nationale de lutte contre l’homophobie de la CDPDJ (2007), il est expliqué que la peur et le manque de compréhension à propos des différentes orientations sexuelles mènent au harcèlement, à l’inconfort, à l’isolement et à la violence. L’aspect négatif attaché à une orientation sexuelle non traditionnelle est également perceptible par l’abus et la discrimination vécus par les individus LGBT.

L’homophobie prend donc différentes formes. En premier lieu, il y a le harcèlement qui peut se déguiser en commentaires négatifs de toute sorte, dont les insultes, les farces de mauvais gout, les injures et autres paroles offensives contre les gens LGBT. À ce sujet, il est à noter que lors de certains rituels sportifs ou initiations, les athlètes sont parfois confrontés à des propos sarcastiques à connotation homosexuelle et forcés de se livrer à des activités sexuelles homosexuelles, ce qui ne peut que rendre encore plus mal à l’aise les individus pour qui l’identité ou l’orientation sexuelle sont ambigües. À l’intérieur de l’univers sportif, l’homophobie est apprise et jouée. Les athlètes LGBT ou qui sont accusés de l’être sont ridiculisés dans les vestiaires, entre autres, où sont communiqués des messages tels que les lesbiennes et les homosexuels sont

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stupides, malades, dégoutants, inférieurs, etc. Ça ne s’arrête pas là, ces derniers sont même sujets à des agressions.

En deuxième lieu, il y a la violence dirigée vers les individus LGBT. Comme l’expliquent Foster & Fritz (2004), l’homophobie en sport promeut la violence sous plusieurs formes, la violence des hommes contre les femmes, des hommes contre les hommes et des hommes envers eux-mêmes. Parmi les jeunes, certains comportements sont même normalisés alors que ça ne devrait pas être le cas, car il y a une menace réelle pour la communauté des LGBT. D’ailleurs, les personnes LGBT, soit dans l’environnement sportif ou dans d’autres contextes sociaux, sont vulnérables à l’abus et aux mauvais traitements (Kirby et al., 2008). À ce propos, ces mêmes auteures précisent que si l’identité de l’individu LGBT est entrecroisée avec d’autres facteurs dits de vulnérabilité (être pauvre, avoir un handicap, etc..), cela les met dans une situation où ils sont plus à risque encore. Enfin, bien que cette violence soit présente chez les adolescents, elle serait aussi répandue et visible sur les campus des établissements d’enseignement supérieur (Rogers, McRee, & Arntz, 2009). Néanmoins, certains préjudices sont plus subtils et voient le jour sous forme de discrimination plus ou moins directe.

En troisième lieu, nous retrouvons les différentes formes de discrimination auxquelles les athlètes ou autres acteurs du milieu sportif font face. Il n’est plus à prouver que les athlètes professionnels qui sortent du placard prennent des risques importants pour leur carrière (perte de commanditaires, perte de soutien de leurs proches, etc.) et rencontrent souvent des obstacles (non-acceptation au sein d’un groupe, impossibilité d’amener leur conjoint lors d’évènements, etc.). D’un autre côté, demeurer dans le placard n’est souvent pas plus avantageux (Tucker et al., 2000), vivre dans le secret et cacher son identité véridique ne favoriserait pas le développement holistique de la personne. Refouler ainsi son orientation sexuelle serait un poids supplémentaire que les athlètes LGBT ne devraient pas avoir à traîner. Néanmoins, la prudence de ne pas révéler son orientation sexuelle est fondée. Être victime de pratiques discriminatoires directes dans les organisations sportives est encore d’actualité. Comme le précise Lenskyj (2003), cela peut prendre la forme de discrimination dans l’embauche ou le congédiement du personnel. Le plus souvent, les individus LGBT en sport ressentent une pression pour ne pas dévoiler leur identité sexuelle. Tandis qu’ils ont plus de chances d’être victimes de violence que leurs confrères hétérosexuels, il peut alors être attendu d’eux qu’ils hésitent plus à dénoncer des actes de discrimination et de harcèlement vu la situation dans laquelle ils se trouvent et le rapport de pouvoir qui est perçu. Par exemple, selon Come out to play, une importante étude australienne, 3 % des participants ont rapporté une expérience d’agression physique à un moment donné lors de leur expérience sportive. De ce nombre, la moitié a rapporté qu’ils n’ont rien fait et seulement 16.7% ont dénoncé les comportements sexistes dirigés vers eux (Symons et al., 2010). Par conséquent, plusieurs individus LGBT évoluent dans un environnent sportif homophobe et sont susceptibles de vivre du harcèlement, de la violence

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17 homonégative et de la discrimination sont présents. Selon Kirby et al. (2008), il y a existence d’une culture sportive d’exclusion marquée par l’absence de respect, par le paternalisme et par la tolérance d’inconduites, c’est-à-dire une culture dans laquelle les vulnérabilités du participant peuvent être créées et augmentées.

2.3.3 Soutien de l’entourage

Un élément qui est jugé primordial est le soutien des amis, de la famille et des coéquipiers. Dans une étude sur la sortie du placard des athlètes féminines de niveau collégial, Flink et al. (2012) concluent qu’un soutien social positif de différentes formes et degrés a eu un énorme impact sur la décision des participantes de dévoiler leur identité sexuelle. Selon eux, ce soutien est venu de la part de coéquipières vétéranes principalement qui servent de pionnières et également des autres coéquipières. Ces jeunes femmes ont fourni aux athlètes LGBT dans le placard une compréhension du processus de dévoilement de leur identité. Bien que le parcours en question soit parsemé d’incertitude et de craintes, les athlètes avaient ainsi un aperçu de ce à quoi s’en tenir soit, ce qui faciliterait leur expérience. Le soutien des autres femmes en sport dont il est question ici est similaire aux résultats d’autres spécialistes dont Griffin (1998) qui spécifie que la présence d’autres femmes lesbiennes en sport servant de modèles est la clé pour que les autres se sentent confortables et développent une identité sexuelle positive. En plus, il est très aidant de posséder un modèle à suivre pour être guidé dans le processus de sortie du placard si telle est la décision de la personne. De plus, avoir une personne dans son entourage qui a dévoilé son orientation sexuelle et a réussi dans la vie en étant épanouie, acceptée et bien dans sa peau est un facteur incontestable pour le mieux-être de l’individu en question.

De plus, la recherche a aussi démontré que la réaction et le soutien des acteurs du milieu ont un impact critique sur les participants. Toutefois, la réalité est que plusieurs athlètes n’ont pas le soutien nécessaire qui leur permettrait de se sentir suffisamment bien pour prendre la décision de sortir du placard. Ajouté à cela, il n’existe pas de pairs servant de modèles dans tous les clubs sportifs ou équipes sportives et cette carence en sport est plus prononcée du côté masculin. Ce manque résulte en un soutien parfois déficient pour les athlètes LGBT qui choisissent d’autres solutions que la sortie du placard, meilleures selon eux, étant donné que leur situation ne leur permet pas de vivre librement leur orientation sexuelle.

2.3.4 Stratégies d’adaptation des individus LGBT

La pression de se conformer aux diktats ou aux attentes de ses pairs se transforme souvent en pression de demeurer dans l’ombre quant à son orientation sexuelle. Cette autocensure serait plus présente du côté

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masculin que féminin. En effet, les athlètes masculins vivent des situations de violence s’ils sont ouvertement gais ou s’ils sont soupçonnés de l’être (Plummer, 2001; Sartore & Cunningham, 2009). Selon plusieurs auteurs (Brackenridge & al., 2008; Hemphill & Symons, 2009), le sport serait plus accueillant pour les lesbiennes. Toutefois, Brackenridge et al. (2008) précisent qu’aucune preuve quantitative n’existe pour supporter l’hypothèse que le sport soit plus sécuritaire pour celles-ci. Une des constantes dans la littérature scientifique se rapportant aux LGBT est que les hommes exprimeraient plus de préjugés basés sur le sexe ou l’orientation sexuelle que ne le feraient les femmes. Ce type d’attitude est observé dans des études sur des parents de participants en sport (Sartore & Cunningham, 2009). Voyons maintenant ce qui distingue les expériences des femmes et des hommes LGBT en sport.

Les femmes

Selon ce que proposent Connell (1995), Jackson (2006) et Rich (1980) (cité dans Sartore & Cunningham, 2009), la définition d'hétérosexualité sert de principe d'organisation et de mécanisme régulateur de contrôle autant pour les hommes que pour les femmes de toutes les orientations sexuelles. D’ailleurs, la pression sociale que ressentent les personnes LGBT est reliée à cette norme sociale de l’hétérosexualité, c’est pourquoi les athlètes LGBT développent une variété de stratégies d’adaptation de sorte qu’ils puissent tenter d’éviter les conséquences négatives qui peuvent être reliées à leur orientation sexuelle. Plusieurs auteurs sont d’accord pour dire que les athlètes LGBT utilisent des stratégies pour éviter d’être stéréotypés (Griffin, 1998; Kauer & Krane, 2006; Brackenridge et al., 2006; Lenskyj, 2003). À ce propos, les lesbiennes et les bisexuelles seraient engagées dans des stratégies additionnelles pour ainsi dissimuler leur identité sexuelle afin d’éviter d’être catégorisées (Kauer & Krane, 2006). La nature des stratégies étant variable, notamment pour dissimuler leur identité sexuelle LGBT, les athlètes utilisent un langage vague, mentent en se disant hétérosexuels, limitent les informations personnelles qu’ils partagent avec les gens, etc. (Kauer & Krane, 2006). Ces dernières chercheuses développent en disant que toutes les femmes impliquées en sport, à un certain moment dans leur carrière d’étudiante collégiale ou universitaire, ont utilisé une stratégie de dissimulation qui consiste à parler des hommes et à faire des commentaires sur des hommes séduisants. La prudence semble une fois encore être de mise pour s’assurer d’éviter les soupçons. Ces femmes vivent avec certaines restrictions: elles doivent agir d’une façon spécifique (éviter de prononcer ou modifier le nom de la personne de qui elles sont amoureuses, éviter de lui prendre la main en public, etc.) afin de ne pas vivre de répercussions négatives d’être étiquetées LGBT. Malgré ces précautions, plusieurs vivent tout de même de malheureuses situations. Le niveau de prudence et l’hésitation d’une personne à révéler son orientation sexuelle sont donc dus à une menace psychologique et physique bien réelle tel que discuté précédemment.

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19 En ajout au risque plus élevé de vivre du harcèlement, de la violence et de la discrimination, il serait probable que certaines conséquences reliées au fait d’être LGBT nuiraient à la capacité de réussir à l’école ou feraient abandonner les études et les rendraient anxieux. En somme, ces éléments constitueraient une barrière particulièrement importante chez les jeunes (Ollis et al., 2009). De plus, cela provoque une perte d’énergie (Griffin, 1998), une diminution de leur estime de soi, une faible confiance en soi et un haut niveau de stress

(Demers, 2004). À ce propos, Griffin explique que des femmes qu’elle a interviewées ont mentionné qu’une partie de leur motivation pour dévoiler leur identité était que demeurer dans le placard leur demandait trop de travail ; elles avaient besoin d’être constamment sur leurs gardes, veiller à ne pas se mélanger dans leurs mensonges, rechercher de nouveaux mots à utiliser qui ne dénotent aucune indication de leur orientation sexuelle (pour ne pas qu’il y ait de soupçons sur elles), essayer de déterminer en qui on peut avoir confiance et, à l’opposé, de qui il faut se méfier, etc. En addition à ces éléments, pour certaines femmes, la motivation de sortir du placard se trouve dans leur expérience passée : elles ont « survécu » à un incident lors duquel elles ont été harcelées ou discriminées à cause qu’elles étaient lesbiennes ou considérées comme telles, et ce, tout en n’ayant pas révélé leur identité de lesbienne. Cet incident critique a poussé ces femmes à se rendre compte qu’être dans le placard n’offrait aucune protection de toute façon (Griffin, 1998).

Toutefois, pour plusieurs membres de la communauté LGBT, ce serait toujours une nécessité de rester dans le placard. D’après Scraton et Flintoff (2002), il serait apparent qu’à tous les niveaux de la participation sportive, les lesbiennes sentent le besoin de demeurer invisibles si elles veulent survivre. Comme stratégie de premier plan, il y a alors « vivre dans le secret » ou passer inaperçue (Brackenridge et al., 2003). Ce besoin de protection est une pièce importante de l’histoire des lesbiennes en sport, constat partagé par plusieurs auteurs selon Demers (2004). Cette stratégie serait utilisée par les athlètes, les entraineures, les administratrices du sport, les enseignantes d’éducation physique, etc. Ce choix que Lenskyj (2003) nomme le code du silence serait un des problèmes sociaux les plus omniprésents dans le sport féminin. De plus, la rhétorique du sport institutionnalisé associe le lesbianisme à une menace pour les participants et c’est à travers le silence et l’ostracisation que ce climat d’exclusion des individus LGBT est maintenu (Veri, 1999). En vue d’en connaitre davantage sur le sujet, Griffin (1998) a interviewé des athlètes lesbiennes qui ont décrit plusieurs stratégies de gestion d’identité qu’elles utilisent pour surmonter les manifestations tant internes qu'externes de l'homophobie et de l’hétérosexisme qu’elles vivent. Cette étude lui a permis de catégoriser les stratégies d’adaptation comme suit : 1) antihomosexuels/déni (« antigay/denying »), 2) amis spéciaux/ « honteux » et haine envers soi-même (« special friends/ashamed and self-hating »), 3) membre d’un « club secret » (« member of a secret “club” »), 4) Prudent et fier (« prudent and proud ») et 5) sorti du placard et fier de son orientation sexuelle (« out and proud »). L’auteure précise néanmoins que même les individus qui cadrent dans la dernière catégorie choisissent les situations où elles s’affichent en tant

Figure

Figure 1. Continuum de dévoilement de l’identité
Figure 2. Lesbian Coaches’ Identity-Management Strategies (Griffin, 1998, p.135)

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