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CHAPITRE 4 : RÉSULTATS ET DISCUSSION

4.3 Éléments facilitant l’encadrement d’athlètes LGBT

4.4.1 Perception du rôle de l’entraineur

Plusieurs entraineurs rencontrés perçoivent qu’ils ont un rôle de premier ordre quant à l’encadrement des personnes LGBT évoluant en sport ou des membres d’autres groupes marginalisés. Le type de rôle perçu a été décrit par les entraineurs. Ceux-ci le voient comme un rôle d’écoute, d’accompagnement, d’encadrement et de catalyseur pour structurer les entrainements. Ils considèrent aussi devoir faire régner le respect, faire des interventions de groupe lorsque nécessaire ou encore préparer le groupe à une sortie du placard. Bref, il faut être créateur du climat tel que l’expliquait Édouard : « Le climat part de moi, de mes comportements, de mes attitudes, de la façon dont je vais gérer les différences ». Pour finir, ils voient un rôle d’éducateur également comme le réalisait Silvain en disant : « Au fond, je réalise que j’ai été obligé d’expliquer c’est quoi la religion musulmane, le ramadan, parce qu’il y a des gars qui capotaient (…) ».

Les entraineurs interviewés expliquent le rôle qu’ils croient avoir de plusieurs façons. Les raisons qu’ils évoquent sont les suivantes : les athlètes doivent se sentir acceptés peu importe leurs différences, et

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l’entraineur doit s’assurer que tous les athlètes respectent les différences. Aussi, selon les entraineurs, eux- mêmes doivent être des modèles, des personnes ressources accessibles prêtes à venir en aide aux athlètes et ils doivent savoir que leur inaction peut avoir de graves conséquences sur les athlètes dans le besoin. Néanmoins, certains entraineurs perçoivent qu’ils n’ont qu’un rôle partiel par rapport aux athlètes LGBT. Ceux- ci considèrent l’orientation sexuelle comme ne faisant pas partie du sport, mais plutôt de la vie personnelle et disent ne pas vouloir se mêler de cet aspect privé, excepté dans des cas spéciaux. Ils expliquent qu’ils pourraient soutenir un athlète qui a décidé de sortir du placard, sans toutefois le comprendre, sans l’aider à prendre sa décision ou sans être proactif pour sensibiliser les athlètes à cette différence. Puis, ils précisent qu’ils créent un contexte confortable pour tous, c’est pourquoi ils ne tiennent pas à discuter de l’orientation sexuelle, mais seulement de l’acceptation des différences.

Enfin, deux entraineurs, Jérémie et Benoît, ne se sentent pas le besoin de poser des gestes face aux athlètes LGBT. Ils disent ne pas pouvoir changer l’orientation sexuelle de l’athlète ou ne pas avoir ce rôle, ça ne leur appartiendrait pas. Donc, ce ne serait pas leur travail d’intervenir par rapport aux problèmes ou difficultés que cette différence pourrait engendrer.

Quant au rôle de l’entraîneur dans le « coming out » des athlètes spécifiquement, les opinions sont quelque peu différentes. Trois entraineurs expliquent qu’ils sentiraient qu’ils ont un rôle dans certaines conditions seulement et deux autres croient qu’ils n’ont pas du tout à se mêler de la sortie du placard des athlètes. Pour illustrer cela, notons entre autres les entraineurs François et Benoît qui expliquent qu’ils n’interviendraient jamais sans sollicitation de la part de l’athlète concerné. François ajoute que : « Ça dépendrait, ça fait combien de temps qu’il [l’athlète] est avec l’équipe […] je ne sais pas si c’est la dynamique d’équipe, mais à la première année, c’est difficile de faire partie un peu de la gang ». Ensuite, les entraineurs (Édouard et Jérémie) ne voient pas pourquoi ils aideraient un athlète LGBT à sortir du placard et l’entraineur (Julien) amène le point que : « Si j’ai des doutes [pour un athlète], je n’interviendrai absolument pas, parce que et encore je n’ai jamais vécu la situation, je n’ai pas, en toute honnêteté, pensé à cela ». Ce dernier dit toutefois qu’il pense qu’il appuierait si l’athlète venait le voir pour annoncer son orientation sexuelle à l’équipe, il ajoute qu’il y aurait sûrement une discussion à savoir si c’est vraiment important pour ce joueur et si oui, il serait avec lui. Aussi, il y a Édouard qui semble croire que rien de spécifique ne doit être fait pour un athlète LGBT : « Je pense que ça peut être fait en vivant sa vie normalement et qu’à un moment donné, les gens se rendent compte que la personne est homosexuelle ».

En revanche, tous les autres répondants (n=7) seraient prêts à poser des gestes pour faciliter la sortie du placard d’un athlète. À ce sujet, la littérature démontre que non seulement les entraineurs ont un rôle primordial à jouer dans le « coming out », mais le plus important est qu’ils doivent prendre leurs

59 responsabilités d’agir pour favoriser un climat adéquat (Barber & Krane, 2007; Demers, 2006). Cet aspect de responsabilité est repris par d’autres auteurs dont Griffin qui le détaille en explicitant que la responsabilité d’un éducateur est de démontrer un respect des différences, d’influencer positivement sa communauté en étant un meneur positif qui a le potentiel de transformer puis de démontrer que l’environnement sportif est sécuritaire. À ce moment, son rôle serait de retirer la peur et l’ignorance de l’environnement en rendant visibles les gens LGBT de sa communauté, de permettre aux gens de développer une attitude et des croyances basées plutôt sur le respect des différences, de faire preuve de responsabilité légale (devoir d’agir) en utilisant les ressources en place pour lutter contre la discrimination et le harcèlement et, finalement, il est de son devoir d’être certain que ses actions et ses paroles ne l’amèneront pas ou n’amèneront pas la fédération qu’il représente dans des poursuites d’ordre légal. Pour terminer, une des tâches importantes pour un éducateur serait de fournir un environnement d’apprentissage sécuritaire, confortable pour tous les apprenants. Morrow et Gill (2003) soulignent que, malheureusement, les questions qui seraient négligées en éducation physique sont l’homophobie et l’hétérosexisme et leurs effets potentiellement néfastes sur les individus LGBT ou ceux qui sont soupçonnés de l’être. Ensuite, il serait essentiel pour des jeunes d'identifier le personnel adulte de soutien affilié à une institution autour d’eux (Maurer-Starks et al., 2008). D’ailleurs, les entraineurs se doivent d’être des modèles pour leurs apprenants (Barber et Krane, 2007) et un facteur décisif au sujet de la pédagogie globale concernant l’homophobie et l’hétérosexisme est l’intervenant lui-même (Little & Marx, 2002). Pourtant, dans la littérature très peu de données existent à notre connaissance concernant l’important du rôle à jouer perçu par les entraîneurs face à la sortie du placard des athlètes ou même face à l’homophobie.