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Étude comportementale du cuivre dans les verres fluorozirconates et fluoroindates

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Academic year: 2021

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(1)

Étude comportementale du cuivre dans les verres

fluorozirconates et fluoroindates

Mémoire

Michel Jean

Maîtrise en chimie

Maître ès sicence (M.Sc.)

Québec, Canada

(2)

Étude comportementale du cuivre dans les verres

fluorozirconates et fluoroindates

Mémoire

Michel Jean

Sous la direction de :

(3)

Résumé

L’intérêt pour les verres fluorés n’a cessé de croître depuis leur découverte en 1974. De nombreux travaux ont traité des diverses matrices vitreuses à base de fluorures dans le but d’exposer au maximum leurs propriétés prometteuses. Néanmoins, bien peu d’études portent sur le comportement des métaux de transition dans ces verres mise à part à titre d’impuretés. C’est pourquoi ce projet propose d’être une étude comportementale du cuivre dans des matrices fluorozirconates et fluoroindates. À la vue de certains paramètres clés, les matrices fluorées devraient être de bonnes candidates pour la formation de nanoparticules de cuivre. Un verre contenant de telles espèces pourrait, entre autres, servir d’amplificateur de signaux lumineux grâce à la fluorescence émise par les terre-rares via un couplage plasmonique. À plus long terme, ce type de matériau composite vitreux pourrait devenir un outil efficace pour la détection du glucose.

La formation de nanoparticules s’étant déjà observée pour les verres fluorozirconates, l’objectif principal du présent projet de maîtrise est de former des nanoparticules de cuivre dans un verre fluoroindate. La caractérisation des verres dopés au cuivre en proportions diverses n’a pas démontré de résultats probants allant dans le sens des objectifs. Ainsi, plusieurs hypothèses sont proposées pour mieux comprendre l’incapacité apparente des fluoroindates à précipiter le cuivre à l’échelle nanométrique.

(4)

Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... iv

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des abréviations ... xi

Remerciements ... xiv

Chapitre 1 — Introduction ... 1

1.1 — Historique ... 1

1.1 — Le cuivre à l’état nanométrique ... 3

1.3 — État de l’art sur l’incorporation de cuivre ... 4

1.4 — Motivations et objectifs du projet ... 7

1.4.1 — Motivations ... 7

1.4.2 — Objectifs spécifiques ... 8

Chapitre 2 — Théorie ... 9

2.1 — Généralités sur les verres ... 9

2.1.1 — Solides non-cristallins : verre ou solide amorphe ? ... 10

2.1.2 — La transition vitreuse ... 11

2.1.3 — La vitesse de refroidissement ... 15

2.1.4 — La classification des composants d’un verre ... 16

2.2 — Verres fluorés ... 18

2.2.1 — Rétrospective ... 18

2.2.2 — Verres fluorozirconates (ZBLAN) ... 19

2.2.3 — Verres fluoroindates ... 20

2.2.4 — Transparence infrarouge ... 22

2.2.5 — Pertes optiques ... 25

2.3 — Basicité optique ... 30

2.4 — Le cuivre dans un verre ... 34

2.4.1 — Mécanisme de formation des NP ... 34

2.4.2 — Les degrés d’oxydation ... 35

2.4.3 — Signatures spectrales ... 36

(5)

2.5.1 — Principes ... 39

2.5.2 — Fluorescence des ions de terre-rares ... 41

2.5.3 — Plasmonique ... 41

Chapitre 3 — Partie expérimentale ... 43

3.1 — Les verres fluorozirconates (ZBLAN) ... 43

3.1.1 — Composition chimique ... 43

3.1.2 — Protocole de synthèse ... 45

3.2 — Les verres fluoroindates ... 47

3.2.1 — Composition chimique ... 47

3.2.2 — Protocole de synthèse ... 48

3.3 — Techniques de caractérisation ... 49

3.3.1 — Spectroscopie UV-vis et proche infrarouge (NIR) ... 49

3.3.2 — Mesure de l’indice de réfraction ... 49

3.3.3 — Calorimétrie différentielle à balayage ... 50

Chapitre 4 — Résultats ... 52

4.1 — Traitements thermiques : résultats préliminaires ... 52

4.1.1 — Verres fluorozirconates ... 52

4.1.2 — Verres fluoroindates ... 55

4.1.3 — Étude systématique ... 57

4.2 — Caractérisation systématique fluorozirconate ... 58

4.2.1 — Spectroscopie UV-vis-NIR ... 58

4.2.2 — Dispersion chromatique ... 60

4.2.3 — Étude calorimétrique ... 61

4.3 — Caractérisation systématique fluoroindate ... 62

4.3.1 — Spectroscopie UV-vis-NIR ... 63

4.3.2 — Dispersion chromatique ... 64

4.3.3 — Étude calorimétrique ... 64

Chapitre 5 — Discussion et applications potentielles ... 66

5.1 — Interprétation des résultats ... 66

5.1.1 — Réduction du cuivre ... 66

5.1.2 — Auto-diffusion ... 69

5.2 — Applications potentielles ... 72

5.2.1 — Filtre optique ... 72

(6)

Chapitre 6 — Conclusion ... 76 Bibliographie ... 78

(7)

Liste des tableaux

2.1 — Pertes intrinsèques optiques théoriques et calculées par rapport au minimum de

la courbe en V ... 26

2.2 — Impuretés les plus communes et leurs maximums d’absorption sur un spectre

pour les verres fluorés ... 29

2.3 — Temps caractéristiques des différentes étapes d’excitation et de relaxation des

électrons présentées dans le diagramme de Jablonski ... 40

4.1 — Paramètres cristallins du cuivre ... 55 5.1 — Basicités optiques obtenues par calcul à l’aide de données empiriques ... 67

(8)

Liste des figures

1.1 — Vitrail de la cathédrale de Tour, en France ... 5 1.2 — Illustration schématique du mécanisme enzymatique de la transformation du

glucose en acide gluconique pour des fins de colorimétrie (a) et résultats démontrant la sélectivité par rapport à différents sucres (b). La 3,3’-5,5’-tétraméthylbenzidine (TMB) est illustrée en (c) ... 6

2.1 — Représentation schématique d’un réseau cristallin SiO2 (a) et d’un réseau non-cristallin SiO2 (b). Les deux réseaux sont présentés en deux dimensions ... 10

2.2 — Schématisation de la transition vitreuse. Comportement du volume molaire ou

de l’enthalpie en fonction de la température ... 12

2.3 — Évolution de la température de transition vitreuse en modifiant la vitesse de

refroidissement (v1 > v2 > v3) ... 13

2.4 — Comportement de l’entropie configurationnelle en fonction de la température

pour un cristal et un verre ... 15

2.5 — Exemples de courbes de vitesse de nucléation (I) et de vitesse de croissance (U)

pour deux matrices vitreuses différentes ... 16

2.6 — Classification des constituants d’un verre selon son pourcentage d’ionicité basé

sur la différence d’électronégativité ... 17

2.7 — Réseau vitreux présentant l’incorporation de modificateurs. Les cations

formateurs sont représentés par les cercles noirs et les anions formateurs par les cercles blancs. Les cercles blancs avec un point au centre représentent les anions non-pontants. ... 18

2.8 — Représentation schématique du partage d’un doublet d’électrons libres d’un

fluorure avec une orbitale vide de l’indium, Ce partage mène à l’apparition d’une liaison covalente de coordinence ... 21

2.9 — Transmission optique dans l’infrarouge représentée selon la matrice vitreuse.

Ces transmittances sont valables pour des échantillons massiques d’environ 3 mm d’épaisseur ... 22

2.10 — Spectres de transmission représentés pour différentes familles de verres. Le

spectre correspond à des échantillons massiques d’une épaisseur de 3 mm ... 24

2.11 — Profil des pertes théoriques des verres oxyde, chalcogénure et halogénure selon

la longueur d’onde (a). Plus spécifiquement, les pertes calculées pour la silice et le ZBLAN (b) ... 25

2.12 — Absorption dans l’infrarouge des bandes OH pour la silice ... 28 2.13 — Exemples pour les acides et les bases de Lewis dans un verre ... 31

(9)

2.14 — Absorptions expérimentales obtenues pour l’ion Pb2+ dissolu dans un verre

borate contenant 20% de Na2O (a) et dans de l’acide chlorhydrique 11 M (b) ... 32

2.15 — Diagramme pour un ion Pb2+ libre (a) et un ion Pb2+ ayant reçu des charges négatives de son environnement (b) ... 33

2.16 — Exemple de verres dopés au cuivre donnant lieu à la croissance de NP et produisant une couleur rubis ... 36

2.17 — Configuration électronique 3d10 du Cu+ ... 36

2.18 — Configuration électronique 3d9 du Cu2+ ... 37

2.19 — Distorsions de Jahn-Teller axiales (a)et équatoriales (b) ... 38

2.20 — Diagramme des transitions permises pour une distorsion de Jahn-Teller (a) et exemple de déconvolution du pic obtenu par cet effet (b) ... 38

2.21 — Diagramme de Jablonski illustrant les différents mécanismes pouvant inter-venir de l’absorption à la désexcitation ... 39

2.22 — Schéma d’un plasmon localisé de surface oscillant selon un champ électrique ... 42

3.1 — Photographie montrant un mortier en ZrO2 (a), un tube de synthèse en platine/or 95/5 (b) et un four vertical sous une hotte chimique (c) ... 45

3.2 — Programme de température utilisé pour la synthèse d’un verre fluorozirconate ... 46

3.3 — Programme de température utilisé pour la synthèse d’un verre fluoroindate ... 48

3.4 — Schéma du couplage entre un échantillon massif (bulk) et le prisme (a) et effet de l’angle critique (θc) sur la mesure obtenue par l’appareil (b) ... 50

3.5 — Représentation schématique des informations pouvant être extraites d’une courbe DSC ... 51

4.1 — Résultat d’un traitement thermique pour un verre fluorozirconate dopé avec 1% de CuF2. Le verre de gauche n’a subi aucun traitement alors que celui de droite a été chauffé à 270°C pendant 3h ... 52

4.2 — Diffractogramme DRX du verre ambre (enregistré par M. Jean Frenette, Université Laval) ... 53

4.3 — Image MET confirmant la présence de NP (cercles noirs). Les petits grains sont des pièces de verre (Image prise par M. Richard Janvier, Université Laval) ... 54

4.4 — Image MET confirmant la présence de NP dans le volume (a) et image de la diffraction des électrons qui confirme les paramètres cristallins du cuivre (Image MET prisent par M. Mathieu Allix, CNRS Orléans, France) ... 55

4.5 — Changements observables lors des traitements thermiques. Le premier échantillon n’a pas subi de TT. De gauche à droite, la température du TT a été augmentée ... 56

(10)

4.6 — Graphique présentant l’effet sur la Tx avec différents temps de TT pour les matrices

fluoroindate et ZBLAN ... 57

4.7 — Série de verres ZBLAN contenant 0%, 0,5%, 1,0%, 1,5% et 2,0% molaire de

CuF2, respectivement de gauche à droite ... 58

4.8 — Spectres UV-vis-NIR pour une série de ZBLAN dopés au CuF2. Le blanc est représenté par la courbe verte ... 59

4.9 — Spectres UV-vis-NIR pour une série de ZBLAN dopés au CuF2 après TT (rouge). Le blanc est représenté par la courbe verte. Les courbes grises représentent les échantillons avant TT ... 60

4.10 — Indices de réfraction des ZBLAN dopés au CuF2 (vert). Le blanc est représenté par les points noirs ... 60

4.11 — Indices de réfraction des ZBLAN après TT et dopés au CuF2 (rouge). Le blanc est représenté par les points en noir et les mesures avant TT en grises. ... 61

4.12 — Stabilité thermique des verres ZBLAN par rapport au pourcentage molaire en

CuF2 (vert). En orangé, les mêmes verres après un TT ... 62

4.13 — Série de verres fluoroindates contenant 0%, 0,5%, 1,0%, 2,0%, 3,0% et 4,0%

de CuF2, respectivement de gauche à droite ... 63

4.14 — Spectres UV-vis-NIR pour une série de fluoroindates dopés au CuF2 (vert). Le blanc est représenté par la courbe en noir ... 63

4.15 — Indices de réfraction des fluoroindates dopés au CuF2 (vert). Le blanc est représenté par les points noirs ... 64

4.16 — Stabilité thermique des verres fluoroindates par rapport au pourcentage

molaire en CuF2 ... 65

5.1 — Superposition des spectres UV-vis-NIR d’un ZBLAN et d’un fluoroindate

(InF3) qui contiennent 1,0% molaire de CuF2 ... 68

5.2 — Comparaison du comportement de la viscosité d’un ZBLAN et d’un verre à

base de silice ... 70

5.3 — Comparaison de la densité pour les verres ZBLAN et fluoroindates ... 70 5.4 — Dispersion des constituants pour les compositions des verres ZBLAN en rouge

et fluoroindates en bleu (InF3) ... 71

5.5 — Schématisation d’un scénario idéal pour que l’auto-diffusion ait lieu (a) et

courbe de potentiel de Lennard-Jones (b) ... 72

5.6 — Cliché d’un essai en tant que filtre optique (a) et résultats obtenus pour les

différents dopages en cuivre (b) ... 73

5.7 — Diagramme présentant les niveaux énergétiques du Cu+ et du Nd3+. Les flèches horizontales et verticales correspondent à des relaxations radiatives et non-radiatives, respectivement ... 74

(11)

Liste des abréviations

cal Calorie

Cp Capacité calorifique à pression constante

ΔT Stabilité thermique ; ΔT = Tx-Tg

D Coefficient d’auto-diffusion

dB Décibel

DRX Diffraction des rayons-X

DSC Differential scanning calorimetry

𝛆𝟎 Constante diélectrique dans le vide

η Viscosité

e Charge de l’électron

γn Paramètre de basicité optique

G Énergie libre de Gibbs

k Constante de Boltzmann

GOx Glucose-oxydase

I Vitesse de nucléation

IC Conversion interne

IR Infrarouge

ISC Croisement inter-système

Λ Basicité optique

µ Masse réduite

M Molaire (équivalent à mol/L)

me Masse de l’électron

Mx+ Métal

MET Microscopie électronique à transmission

υ Fréquence

n Indice de réfraction

Ne Densité électronique

NC Nanocristaux

(12)

NP Nanoparticules

ωp Fréquence d’oscillation plasmonique

OCD Ordre à courte distance

Pa Pascal

𝐫𝟎 Rayon de l’atome

R Réflexion de Fresnel

RMN Résonance magnétique nucléaire

RPE Résonance paramagnétique électronique

Sconf Entropie configurationnelle

Sn État singulet (0, 1, 2, …, n)

Sv Entropie vibrationnelle

θc Angle critique (réflexion totale interne)

Tam Température ambiante

Tf Température de fusion

Tg Température de transition vitreuse

TK Température de Kauzman Tn État triplet (0, 1, 2, …, n) Tx Température de cristallisation TMB 3,3’-5,5’-tetramethylbenzidine TT Traitement thermique U Vitesse de croissance

u.a. Unité arbitraire

UV Ultra-violet

V0 Volume de l’atome

vis Visible

Xn Fraction molaire

XPS X-Ray photoelectronic spectroscopy

(13)

« Avec effroi, je me rappelai le fameux axiome zen :

Quand tu parviendras au sommet de la montagne, continue à monter. »

— Jack KEROUAC « Le bateau est en sécurité dans le port. Mais ce n’est pas pour cela que les bateaux ont été construits. » — Paulo COELHO

(14)

Remerciements

Merci à tous mes collègues. Un merci particulier à Maxime Rioux, Matthieu Chazot, Guillaume Marcotte, Yannick Ledemi et Olivier Ratelle pour leurs contributions, leurs personnalités authentiques et leurs idées originales. Merci à Mickaël Blais-Roberge pour les mêmes raisons et pour toutes les fois où il a oublié son lunch. Merci à Mathill pour son rôle primordial dans nos quêtes du méthanol…

Merci au Professeur Younès Messaddeq, mon directeur de recherche, pour m’avoir donné accès aux installations de son laboratoire et au financement nécessaire à l’accomplissement de mes travaux. Merci aussi pour la grande latitude face au projet qui permet de développer une bonne autonomie. Dans ces conditions, le sentiment d’accomplissement est ressenti au centuple.

Un énorme merci à mes amis proches, mais surtout à Stéphanie Poirier, pour le soutien constant. Merci à mes parents, Raymonde Amiot et Yves-Marie Jean, qui ont toujours su m’épauler dans la réalisation de mes projets. Un merci spécial à Denis Boudreau de m’avoir ouvert la grande porte de la recherche universitaire.

Ce document scelle l’accomplissement d’un projet de vie qui me tenait à cœur, il y a maintenant quelques années. Ce document referme ladite grande porte.

(15)

Chapitre 1 — Introduction

1.1 — Historique

Le XXe siècle a largement été marqué par l’influence des télécommunications sur la société. Il suffit de penser à l’apparition de la radio, du téléphone, de la télévision et, plus récemment, d’internet. Ces innovations ont mis de l’avant l’importance du développement de matériaux pouvant transporter l’information à des vitesses de plus en plus rapides pour un meilleur rendement. Sachant que ce qui voyage le plus rapidement est la lumière, la volonté d’utiliser des matériaux transparents sous forme de fibre pour faire transiter l’information lumineuse entre deux points éloignés est grandement justifiée. Au moment d’écrire ces lignes, on dénombre plusieurs milliers de kilomètres de câbles de fibres optiques transocéaniques qui permettent de relier les réseaux internet, téléphoniques et télévisuels des différents continents de la planète. En 2006, ce réseau traitait 99% des échanges numériques internationaux. Le 1% restant est acheminé par satellite. Aujourd’hui encore, le seul continent isolé de ce réseau filaire est l’Antarctique.

Avant le XXe siècle, du point de vue scientifique, le développement des matériaux vitreux était majoritairement motivé par l’amélioration constante de la qualité des pièces optiques (lentilles, miroirs, etc.) servant à l’astronomie, à la microscopie ou encore à l’optométrie. L’objectif était d’obtenir des matériaux transparents dans le visible contenant le moins possible d’impuretés diffusantes. C’est en 1966, suite aux travaux de Charles Kao, qu’on voit s’accroître l’intérêt pour le développement de dispositifs optiques fibrés visant principalement des applications en télécommunication.1,2 La première fibre optique avec des

(16)

pertes optiques négligeables fut développée en 1970 par Corning et brevetée en 1973.3 Jusqu’en 1974, les matériaux à base de silice (SiO2) demeurent les plus étudiés.

En 1974, un groupe de recherche français de l’université de Rennes travaille sur les différentes phases cristallines du fluorure de zirconium (IV) en présence d’autres fluorures.4,5 Comme pour plusieurs grandes découvertes historiques, ils réalisent par hasard que leurs compositions présentent des températures de transition vitreuse (Tg) — ce qui est propre à un matériau vitreux. Ils étaient donc en présence d’une nouvelle famille de verre à base de ZrF4. Ce type de verre, une fois fibré, montre une transparence plus étendue dans la région de l’infrarouge moyen (entre 3 et 5 µm) par rapport à la silice limitée à 2 µm sous forme de fibre. Autre caractéristique importante des verres fluorés, ils peuvent dissoudre une quantité relativement grande de terre-rares par rapport à la silice. Les terre-rares permettent des applications en amplification optique.6 Aussi, les verres fluorés présentent une excellente résistance à la solarisation, autrement dit, ils ont un seuil de dommage élevé vis-à-vis de l’exposition laser. On peut ainsi les utiliser avec des lasers haute puissance.6 De surcroit, les pertes optiques sur une longue distance, dues principalement à la diffusion, seraient théoriquement bien en-deçà de celles mesurées pour la silice. Il est important de spécifier qu’elles sont théoriques puisque, encore aujourd’hui, il n’est pas possible d’atteindre une valeur comparable à la silice. Advenant le cas où ce minimum théorique serait atteint, on pourrait croire que les verres fluorés viendraient remplacer la silice dans certaines applications. Ceci dit, l’hygroscopicité inhérente à ce type de matrice limite grandement les applications. Ainsi, pour certains domaines d’envergure à cette époque, les matériaux vitreux à base de fluorures demeurent dans la catégorie des matériaux émergeants.7,8

À la fin des années 1990, on enregistre déjà un nombre considérable d’applications commercialisées. Tout d’abord, les fibres fluorées ont permis l’utilisation de lasers opérants dans l’infrarouge, ce qui n’était pas possible auparavant. On peut penser, par exemple, à des lasers au monoxyde de carbone qui opèrent entre 4,8 µm et 5,5 µm ou encore aux Er:YAG à 2,94 µm.6 Aussi, avec ce genre de fibres, il est possible de chauffer une zone restreinte à l’aide d’un rayonnement infrarouge dans le but d’effectuer de la polymérisation localisée.9

Les terre-rares étant souvent utilisées pour leurs propriétés en luminescence, c’est donc un avantage non-négligeable de pouvoir en dissoudre des quantités supérieures. Ce sont

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les propriétés de luminescence qui permettent l’amplification optique. Parallèlement, l’incorporation de cérium (Ce3+) est profitable aux verres à scintillation pour l’instrumentation analytique utilisée en radioactivité. Finalement, les verres fluorés servent de pièces usuelles pour les montages sur table optique de recherche ou commerciale.6,10

En se focalisant sur les terre-rares, on peut s’intéresser à la possibilité d’augmenter le rendement de fluorescence de celles-ci. On sait par exemple qu’il est possible d’améliorer le rendement de fluorescence d’un fluorophore quelconque par un couplage plasmonique. Cette technique, qui est expliquée plus en détail dans ce mémoire, est basée sur l’exploitation du plasmon localisé de surface de nanoparticules métalliques contenues dans un milieu diélectrique.

1.1 — Le cuivre à l’état nanométrique

La nanoscience est l’une des disciplines scientifiques s’étant le plus démarquée au cours des dernières décennies. Au fil du temps, les diverses synthèses de nanoparticules, qui étaient réputées comme étant de la recherche fondamentale, ont rapidement trouvé application dans plusieurs domaines pour en exploiter les propriétés électriques, optiques, magnétiques et chimiques.11

Les nanomatériaux les plus étudiés sont ceux de la famille du cuivre (groupe IB), mais plus particulièrement ceux à base d’or et d’argent. L’avantage principal dans l’utilisation de l’or est qu’il montre une résistance particulièrement élevée à l’oxydation. Évidemment, la valeur monétaire de ce métal limite considérablement son utilisation. Au niveau de l’argent, on évoque plutôt des propriétés plasmoniques qui sont de loin supérieures à ses homologues de la même famille. Cependant, l’argent demeure toxique en milieu biologique (cytotoxicité), ce qui met un frein à certaines possibilités médicales in vitro.12

Pour sa part, le cuivre à l’état nanométrique contient son lot d’avantages et d’inconvénients. Par exemple, le prix du métal est beaucoup moins élevé que ceux de l’or et même de l’argent. Les nanoparticules de cuivre montrent un plasmon localisé de surface presque aussi intense que celui de l’or, sans toutefois pouvoir rivaliser sérieusement avec l’argent.12 Toutefois, il est facilement oxydable, tout comme l’argent, mais n’est pas cytotoxique.11,13,14

(18)

On pourrait ainsi proposer le cuivre comme compromis intéressant à l’or et l’argent. Outre ces caractéristiques, il est un bon conducteur thermique et électrique. De plus, des comportements intéressants en mimétique enzymatique ont récemment été mis au jour.15 Néanmoins, certains inconvénients subsistent tels que le contrôle difficile au niveau de la taille lors de la synthèse ainsi que la forte tendance à l’agrégation.11 En plus de l’oxydation très favorable, ces inconvénients restreignent la volonté d’utiliser le cuivre à l’état nanométrique.

Les désagréments mentionnés précédemment rendent la fabrication de ces nanomatériaux à base de cuivre extrêmement compliquée et surtout très instable pour la conservation dans des conditions normales. Pour donner une idée de l’ampleur du problème, en 2011, les nanoparticules de cuivre se vendaient à un prix légèrement plus élevé que celles d’argent, soit 14,80 $US contre 13,40 $US par once, respectivement.12

1.3 — État de l’art sur l’incorporation de cuivre

L’insertion de cuivre dans une matrice vitreuse avec pour objectif la nucléation à l’ordre nanométrique n’est pas une nouveauté. Au Moyen-Âge, on connaissait déjà les propriétés colorantes de certains métaux servant à donner une panoplie de couleurs aux vitraux des cathédrales européennes sans réellement en comprendre l’origine. Par exemple, dans la cathédrale de Tours, en France, il a été démontré par diverses méthodes analytiques que la couleur des pièces rouges était causée par un effet plasmonique dû à la présence des nanoparticules de cuivre (Figure 1.1).16

L’intérêt porté à la maîtrise de la chimie du cuivre pour un verrier de l’époque était très attrayant puisqu’on pouvait obtenir une gamme de couleurs très variée. Selon les degrés d’oxydation en présence, leurs concentrations respectives et la nature de la matrice, on obtenait des couleurs passant du jaune au rouge ou encore du vert au bleu.

Plus récemment, des travaux portant sur la précipitation de nanoparticules de cuivre dans les verres ont mené à l’exploitation des propriétés optiques d’intérêt parmi lesquelles on retrouve la plasmonique pour amplifier la conversion ascendante (ou upconversion), le dichroïsme et le thermochromisme.17–19 Ces trois concepts sont brièvement définis dans les lignes suivantes.

(19)

Figure 1.1 — Vitrail de la cathédrale de Tours, en France20

La fluorescence consiste à exciter un fluorophore à une longueur d’onde particulière afin de réémettre de la lumière à une longueur d’onde plus grande (moins énergétique). La conversion ascendante est la combinaison de deux photons qui vise la réémission de lumière à une longueur d’onde plus énergétique que celle de l’émission. Ce processus est assez bien connu pour les terre-rares. Par contre, le rendement de fluorescence de ce mécanisme s’avère être assez faible. C’est là que la plasmonique pourrait être intéressante. Par définition, la plasmonique permet l’augmentation d’un rendement de fluorescence d’une espèce avec un couplage du plasmon de surface d’un groupe de nanoparticules métalliques. Cet aspect est discuté plus en détail à la section 2.5 du chapitre 2. On y discutera entre autres de l’influence qu’a la taille d’une nanoparticule sur ce processus.

Le contrôle de la taille et l’uniformité des nanoparticules entrent également en jeu dans le cas du dichroïsme. Le dichroïsme permet de laisser passer une longueur d’onde particulière à travers un médium et d’en réfléchir une autre. Cet effet est dû à un enchaînement d’interférences constructives et destructives. Les filtres dichroïques sont très utilisés dans les montages de fluorescence pour discriminer des événements uniques.

De son côté, le thermochromisme se définit par un changement de la longueur d’onde transmise par rapport à une variation de la température d’un verre. Ce phénomène trouve quelques applications d’intérêt dans le domaine des capteurs utilisant la luminescence.

(20)

En 2013, on rapporte pour la première fois la mimétique enzymatique des nanocristaux (NC) de cuivre dans le cycle de transformation du glucose en acide gluconique dans un médium liquide à pH neutre (Figure 1.2a).15 Plus spécifiquement, les NC de cuivre se comportent de façon similaire à la peroxydase. L’enzyme glucose-oxydase (GOx) en présence de glucose dans l’eau produit du peroxyde d’hydrogène (H2O2). Ce dernier, avec des NC de cuivre agissant comme catalyseurs, favorise l’oxydation du 3,3’-5,5’-tetraméthylbenzidine, abrégée TMB (Figure 1.2c). L’oxydation de la TMB produit une coloration bleue.

Cette technique d’analyse colorimétrique permet une détection indirecte du glucose, c’est-à-dire que c’est le peroxyde d’hydrogène produit qui est détecté. Ce dernier est produit par la dégradation du glucose en acide gluconique. Cette méthode demeure très prometteuse étant donné le faible coût engendré, la bonne sélectivité (Figure 1.2b), la réponse rapide, la stabilité des NC à pH neutre et la possibilité de réutilisation du capteur. À terme, cette technologie pourrait remplacer le système à bandelettes jetables actuellement utilisé pour la

(a) (b)

(c)

Figure 1.2 — Illustration schématique du mécanisme enzymatique de la transformation du

glucose en acide gluconique pour des fins de colorimétrie (a) et résultats démontrant la sélectivité par rapport à d’autres sucres (b).15 La 3,3’-5,5’-tétraméthylbenzidine (TMB) est illustrée en (c).

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surveillance du taux de glucose chez les diabétiques. Le défi majeur consiste à contourner la forte tendance à l’oxydation du cuivre.

La précipitation de nanoparticules de cuivre dans une matrice de verre pour catalyser en surface la réaction illustrée à la Figure 1.2a serait une avenue intéressante à explorer. Une autre possibilité, cette fois-ci dans le domaine de l’industrie alimentaire, serait la mesure d’une différence de polarisation de la lumière d’une fibre optique dopée aux NP de cuivre et immergée dans des produits alimentaires liquides contenant du glucose.

1.4 — Motivations et objectifs du projet

Cette section présente les motivations relatives à l’inclusion du cuivre dans des verres et plus spécifiquement dans une matrice à base de fluorures.

1.4.1 — Motivations

Tout d’abord, pourquoi voudrait-on inclure du cuivre dans une matrice vitreuse ? Que cela peut-il apporter de plus qu’un médium liquide ?

 On peut prétendre avoir un meilleur contrôle sur la croissance des nanoparticules. En effet, il existe beaucoup moins de paramètres à contrôler pour la synthèse de NP dans un verre que dans un liquide. Dans un verre, la production de nanoparticules dépend surtout du traitement thermique (TT). Ainsi, il suffit de bien respecter la température et la durée du TT. L’autre paramètre à contrôler, c’est la nature de la matrice vitreuse. Il est plus que probable que ce ne soit pas toutes les matrices qui puissent mener à la réduction du cuivre ionique en cuivre métallique.

 Puisqu’une matrice vitreuse possède une grande viscosité à une température donnée, de l’ordre de 1013 Pa∙s, on peut supposer que l’agrégation de NP à des températures ambiantes normales ne sera pas favorisée.

Ceci amène à se poser une seconde question : pourquoi inclure le cuivre dans une matrice fluorée plutôt qu’une autre ?

 Le fluor est l’élément le plus électronégatif du tableau périodique. Du point de vue de la basicité optique, une matrice fluorée possède un caractère fortement

(22)

électronégatif et ce dernier devrait alors favoriser les degrés d’oxydation les plus faibles du cuivre, soit les niveaux Cu0 et/ou Cu+ par rapport à Cu2+. En d’autres mots, on pourrait limiter grandement l’oxydation des NP de cuivre en plus de favoriser leur formation.

 Le grand potentiel de dilution d’ions de terre-rares est une caractéristique très importante à considérer pour des applications en augmentation de rendements de fluorescence.

 La transparence dans le visible et l’infrarouge est très étendue. Plusieurs transitions d’ions de terre-rares se font dans le proche infrarouge.

 La bonne résistance à la solarisation fait des verres fluorés de bons candidats pour des applications lasers.

1.4.2 — Objectifs spécifiques

À la lumière des motivations étayées précédemment, il devient essentiel de spécifier les objectifs spécifiques de ce projet qui peuvent être définis de la manière suivante :

 Production des verres fluorozirconates et fluoroindates dopés au cuivre dans le but de faire précipiter ce dernier sous forme de nanoparticules métalliques ;  Caractérisation thermique et optique des verres dopés ;

(23)

Chapitre 2 — Théorie

Ce chapitre traite des aspects théoriques nécessaires à la bonne compréhension des différents concepts utilisés dans ce mémoire. Il se divisera en cinq grandes parties afin de couvrir les principes portant d’abord sur les verres en général et plus spécifiquement sur les verres fluorés. Une section portera sur la basicité optique et l’impact de celle-ci sur le cuivre. La compréhension actuelle des mécanismes menant à la formation in situ de nanostructures métalliques suite à l’incorporation de cuivre dans des matrices vitreuses sera également discutée. Enfin, une courte introduction aux notions de fluorescence et de plasmonique sera présentée.

2.1 — Généralités sur les verres

D’un point de vue scientifique, il n’est pas simple de définir la nature d’un verre. Il existe actuellement une multitude de définitions dont certaines sont plus complètes que d’autres. C’est notamment le cas de celle avancée par Jerzy Zarzycki en 1982 et qui est la plus soutenue par la communauté scientifique verrière. Elle définit le verre comme étant : « […] un solide non-cristallin présentant le phénomène de transition vitreuse ».2

Pour bien comprendre cette définition, il est nécessaire de clarifier les termes qui la composent. L’état solide de la matière implique des liaisons chimiques relativement fortes qui permettent au solide d’avoir une forme et un volume bien définis. Ceci n’est pas le cas des autres états (gaz & liquide) dont les atomes sont nettement plus éloignés les uns des autres et constamment en mouvement.

Un solide possède deux possibilités d’arrangement : ordonné ou désordonné, c’est-à-dire cristallins ou non-cristallins. Un solide cristallin se caractérise par un réseau d’atomes répétant régulièrement le même patron en coordination et en translation, c’est-à-dire à courte

(24)

et à grande distance, respectivement (Figure 2.1a). À l’opposé, le solide non-cristallin démontre plutôt une absence de périodicité sur de grandes distances tout en conservant un ordre à courte distance (Figure 2.1b). Dans les deux cas, les cations (noir) sont toujours entourés de trois ou quatre anions (blanc) alors que les anions sont entre deux cations : c’est l’ordre à courte distance. La formation d’un solide non-cristallin est fortement favorisée en présence de liaisons fortes.21

(a) (b)

Figure 2.1 — Représentation schématique d’un réseau cristallin SiO2 (a) et d’un réseau

non-cristallin SiO2 (b).22 Les deux réseaux sont présentés en deux dimensions.

Certains auteurs, dont Arun K. Varshneya, résument ce phénomène en stipulant qu’un verre possède la structure d’un liquide à l’état solide.21 Cette définition affirme assez bien la non-cristallinité du verre mais ne permet de les distinguer des matériaux amorphes. Les solides non-cristallins se divisent en deux grandes familles : les solides amorphes et les verres. Il est donc pertinent de démontrer la différence entre ces deux familles qui sont pourtant très proches l’une de l’autre. Il est à noter que la différenciation entre ces deux familles de solides non-cristallins demeure très délicate encore aujourd’hui.

2.1.1 — Solides non-cristallins : verre ou solide amorphe ?

En 1996, un article de P.K. Gupta propose de faire la lumière sur les deux différentes classes de matériaux non-cristallins en se basant sur des concepts topologiques édifiés par Zachariasen en 1932.21 Plus spécifiquement, ces concepts sont fondés sur la comparaison des ordres à courte distance.

(25)

Pour qu’une substance particulière soit un bon formateur non-cristallin, elle doit former un réseau tridimensionnel sans périodicité à l’infini et posséder une énergie de réseau comparable à celle du cristal correspondant.23 Pour que cette énergie de réseau soit dite comparable, il faut que la coordination, donc l’ordre à courte distance (OCD), soit comparable. On préfère généralement utiliser le terme OCD puisqu’on s’en remet à une moyenne de coordination plutôt qu’à une coordination précise. En se basant sur la différenciation qui a été faite précédemment entre le solide cristallin et le non-cristallin, ainsi qu’avec la condition proposée par Zachariasen, on peut énoncer les règles suivantes :

(1) OCD (solide non-cristallin) = OCD (cristal) ; (2) Le réseau d’un solide non-cristallin est désordonné.

Si les conditions (1) et (2) ne sont pas respectées, le solide sera cristallin. Les critères de la non-cristallinité d’un solide étant maintenant établis, on peut mettre l’accent sur la différenciation d’un verre et d’un solide amorphe. Toujours d’un point de vue topologique, le verre doit aussi respecter une troisième condition supplémentaire :

(3) OCD (verre solide) = OCD (verre liquide).

Cette dernière condition est assez intuitive lorsqu’on considère un verre obtenu par la technique de fusion/refroidissement. Celle-ci implique le figeage dans le temps de la structure et des contraintes d’un liquide menant à un état métastable. La condition (3) s’observe aussi pour les verres formés par déposition en phase vapeur ou encore en sol-gel. Dans le cas où la troisième condition ne serait pas respectée, on parlerait alors d’un solide amorphe, soit :

(4) OCD (solide amorphe) ≠ OCD (masse fondue).

2.1.2 — La transition vitreuse

En plus des phénomènes topologiques présentés à la section précédente, on observe également le phénomène de la transition vitreuse dans un verre. Indépendamment de la technique de synthèse, tous les solides non-cristallins entretiennent un surplus d’énergie par rapport à la phase cristalline de la même composition. C’est un état métastable (hors équilibre) de la matière.

(26)

Pour un solide amorphe dont la température augmente, on observe une cristallisation très rapide et hautement favorisée. Pour sa part, le verre a la possibilité de réduire de plus en plus sa viscosité lorsqu’on augmente sa température. Ce qu’il y a de particulier ici, c’est qu’on puisse revenir à la température initiale sans cristalliser. Ceci permet une bonne malléabilité du verre et rend possible les diverses techniques de formation de pièces sans modifier la structure interne du verre. Cette zone de travail, qui correspond à une viscosité d’environ 103 Pa∙s est caractéristique du verre et est possible en raison du domaine de transition vitreuse.2 À titre comparatif, la Tg et la Tf coïncident avec des viscosités de l’ordre de 1013 Pa∙s et de 101 Pa∙s, respectivement.

Figure 2.2 — Schématisation de la transition vitreuse. Comportement du volume

molaire ou de l’enthalpie en fonction de la température.24

En se référant à la Figure 2.2, lorsqu’un liquide, refroidi à une vitesse normale, atteint la température de fusion (TF), il présente une chute drastique du volume molaire qui est en lien avec la réorganisation du réseau. D’un point de vue thermodynamique, pour qu’un changement de phase s’effectue, en l’occurrence liquide vers solide, il y a nécessairement des changements enthalpiques et volumiques abrupts qui doivent être observés en fonction de la température en raison du réarrangement structurel. Cette réorganisation mène directement à la cristallisation. À l’opposé, si la vitesse de refroidissement est suffisamment élevée, on peut dépasser la température de fusion sans toutefois observer la formation du cristal. C’est à ce moment qu’on est en présence d’un liquide métastable. En continuant le refroidissement, la viscosité se voit augmentée et ceci limite de plus en plus l’ampleur des

(27)

changements de volume jusqu’à l’obtention d’un verre. La zone où la pente change est le domaine de transition vitreuse. En extrapolant les deux pentes, on retrouve à la rencontre des deux courbes la température de transition vitreuse (Tg).24

Étant donné que le verre est dans un état hors équilibre qui dépend de la vitesse de refroidissement, la température de transition vitreuse est donc considérée comme un paramètre cinétique. Autrement dit, la Tg sera légèrement différente selon l’histoire thermique du matériau. Comme il est illustré à la Figure 2.3, plus élevée sera la vitesse de refroidissement et plus élevée sera la Tg. C’est pourquoi on préfère habituellement parler d’un domaine de transition vitreuse tel qu’indiqué sur la Figure 2.2.

Figure 2.3 — Évolution de la température de transition vitreuse en modifiant la vitesse

de refroidissement (v1 > v2 > v3).24

Pour résumer, la transition vitreuse est « un phénomène d’ordre cinétique correspondant au gel des atomes dans une configuration donnée ».24 Elle ne peut être interprétée de la même façon qu’une transition de phase normale, donc d’ordre thermodynamique. Par exemple, la transition liquide-cristal affecte des grandeurs thermodynamiques, comme le volume spécifique à pression constante (Équation 2.1), et donne lieu à une transition de premier ordre faisant intervenir l’énergie libre de Gibbs (G) et la température.

𝑽 = (𝝏𝑮 𝝏𝑻)𝒑

(28)

Par opposition, la transition vitreuse fait plutôt intervenir des grandeurs dérivées comme la capacité calorifique à pression constante (Équation 2.2). À Tg, on observe une discontinuité dans la capacité calorifique (Cp) et c’est pourquoi on suggère souvent la possibilité d’une pseudo-transition de phase de deuxième ordre. Par contre, la Tg n’étant pas une valeur fixe à cause de son caractère cinétique, ceci l’empêche d’être considérée comme une véritable transition de phase d’un point de vue thermodynamique.21

𝑪𝒑= −𝑻 (𝝏 𝟐𝑮 𝝏𝑻𝟐)

𝒑

(2.2)

On parle habituellement d’entropie résiduelle pour caractériser la transition vitreuse. Dans un verre, les contributions à l’entropie globale sont de deux types : l’entropie configurationnelle (Sconf) et l’entropie vibrationnelle (Sv). La portée de celles-ci dépend de la température. Les deux types d’entropie peuvent être mises en relation avec l’Équation 2.3.

𝑺(𝑻) = 𝑺𝒄𝒐𝒏𝒇(𝑻) + 𝑺𝒗(𝑻) (2.3) L’entropie vibrationnelle est directement reliée à la capacité calorifique (Cp) selon l’Équation 2.4.

𝑻𝒅𝑺𝒗 = 𝑪𝒑𝒅𝑻 (2.4)

Pour un cristal idéal, l’entropie globale de l’Équation 2.3 doit normalement atteindre une valeur nulle à une température de 0 K. Ceci est dicté par la troisième loi de la thermodynamique, également connue sous le nom de principe de Nernst.2,22,24 Par contre, lorsqu’on soumet un verre à une température de 0 K, on mesure tout de même une entropie résiduelle. Par exemple, cette valeur est de 4 J/mol∙K pour la silice. C’est à partir d’ici que le concept d’entropie configurationnelle prend toute son importance.

L’entropie configurationnelle correspond au désordre relié directement avec la structure non-cristalline du réseau (Figure 2.1b). En figeant la configuration lors du refroidissement rapide d’un liquide, on gèle du même coup son entropie configurationnelle. C’est pour cette raison que la variation d’entropie configurationnelle (la pente) d’un verre devient nulle à des températures en-deçà du domaine de transition vitreuse (Figure 2.4).

(29)

Figure 2.4 — Comportement de l’entropie configurationnelle en fonction de la

température pour un cristal et un verre.24

On remarque également sur la Figure 2.4 la présence de TK qui correspond au prolongement de la pente du liquide surfondu. C’est la température de Kauzman. En admettant qu’il soit possible de refroidir un liquide très lentement, on devrait s’attendre à ce que le verre atteigne une entropie équivalente à celle du cristal pour une même température, soit TK. Ce constat thermodynamique est identifié comme étant le paradoxe de Kauzman. Il n’est jamais observé puisque la transition vitreuse est un phénomène cinétique qui intervient toujours pour conserver un surplus d’entropie. Un refroidissement trop lent mènerait plutôt à la formation d’un solide cristallin.

2.1.3 — La vitesse de refroidissement

Phénoménologiquement, la vitesse de refroidissement vient faire concurrence à la cinétique de nucléation qui forme les premiers germes menant à la cristallisation. Le verre étant dans un état métastable, pour empêcher l’apparition de l’état cristallin qui serait thermodynamiquement plus stable, il faut à tout prix éviter la formation de germes. C’est pourquoi il est important d’avoir une vitesse de refroidissement maximale. Telles qu’illustré à la Figure 2.5, la vitesse de nucléation (I) et la vitesse de croissance (U) sont maximales pour des températures propres à chaque type de matrice. La formation de cristaux passe tout d’abord par la nucléation et ensuite par la croissance de ces derniers.

La facilité de croissance d’un état cristallin dépend en grande partie de la région de température où il y a chevauchement des deux courbes. Par exemple, la Figure 2.5a montre

(30)

une superposition qui favorise peu la cristallisation étant donné que cette dernière n’est pas située sur des vitesses de nucléation et de croissance très importantes. Plus le chevauchement est important (Figure 2.5b) et plus il sera difficile de former un verre ; c’est-à-dire que la nucléation et la croissance se feront de façon instantanée.24 Un scénario comme la Figure

2.5b nécessite une vitesse de refroidissement extrêmement grande pour former un verre.

(a) (b)

Figure 2.5 — Exemples de courbes de vitesse de nucléation (I) et de vitesse de croissance (U)

pour deux matrices vitreuses différentes.24

Mêmes si ces notions théoriques ne permettent pas de quantifier la vitesse de refroidissement qu’il faut appliquer pour former un verre, elles facilitent la compréhension du phénomène de la cristallisation. Dans le cas de la formation de cristaux menant à des vitrocéramiques, c’est-à-dire la coexistence d’une phase vitreuse et de cristallites, les phénomènes de nucléation et de croissance doivent être bien connus. Pour faire le rapprochement avec le présent projet, ces cristaux pourraient être, par exemple, des nanoparticules métalliques.

2.1.4 — La classification des composants d’un verre

Il existe différents critères pour prédire si les composants en jeu formeront un verre ou pas. Les plus connus sont ceux proposés par Zachariasen en 1932.2,22,23,25 Les conditions de Zachariasen, qui sont d’ordre topologique, s’appliquent comme suit :

(1) Tout anion se lie seulement avec deux cations ;

(2) Chaque cation est entouré d’un nombre d’anions plus petit ou égal à quatre ;

(3) Le polyèdre de coordination correspond à un patron de base anion-cation. Ceux-ci ne

(31)

(4) Les polyèdres de coordination partagent des sommets avec au moins trois voisins

différents.

Pour former un verre, toutes les conditions doivent être réunies. Certains auteurs considèrent que ces règles sont universelles alors qu’en réalité elles ne s’appliquent presque exclusivement aux verres à base d’oxydes.

La fabrication d’un verre nécessite un réseau dont les liaisons seront directionnelles afin de permettre une certaine rigidité structurale. Les constituants remplissant ces conditions ont habituellement un caractère covalent et sont classés comme formateurs. La Figure 2.6 montre l’impact d’une différence d’électronégativité sur les constituants d’une matrice vitreuse. Une faible différence d’électronégativité représente un caractère covalent qui caractérise le formateur de réseau.

Figure 2.6 — Classification des constituants d’un verre selon son pourcentage d’ionicité

basé sur la différence d’électronégativité.2

D’un autre côté, les modificateurs montrent plutôt un caractère ionique qui brise des liens d’un réseau pour venir s’y insérer. Autrement dit, dans le cas d’un verre à base d’oxydes, les oxygènes pontants deviennent non-pontants. On assiste donc à une dépolymérisation du réseau qui a pour conséquence d’abaisser la Tg. Autre effet important, l’augmentation de la teneur en oxygène non-pontant se traduit par une augmentation de la polarisabilité de la matrice. Cette augmentation signifie que les interactions de la lumière avec la matrice seront plus importantes. Ainsi, en augmentant la polarisabilité, on augmente du même coup l’indice de réfraction d’un verre, en considérant la densité inchangée.

(32)

 3RXUODFODVVHLQWHUPpGLDLUHFHVRQWGHVFRQVWLWXDQWVTXLSRVVqGHQWXQFRPSRUWHPHQW DPELYDOHQWTXLGpSHQGJUDQGHPHQWGHO¶HQYLURQQHPHQWGDQVOHTXHOLOVVRQW   /HGpVRUGUHMRXHXQU{OHFUXFLDOGDQVOHVYHUUHV/HVPRGLILFDWHXUVV¶LQVqUHQWGDQVOD PDWULFHHWHQWUHWLHQQHQWFHGpVRUGUH3DUH[HPSOHHQDMRXWDQWSOXVLHXUVPRGLILFDWHXUVDYHF GHVDWRPHVGHWDLOOHVGLIIpUHQWHVRQSHXWHVSpUHUDXJPHQWHUVLJQLILFDWLYHPHQWOHGpVRUGUHHW DLQVLVWDELOLVHUOHYHUUH²F¶HVWO¶HIIHWG¶REVWUXFWLRQ/DUHSUpVHQWDWLRQVFKpPDWLTXHG¶XQH PDWULFHYLWUHXVHFRQWHQDQWEHDXFRXSGHPRGLILFDWHXUVHVWSUpVHQWpHjOD)LJXUH  )LJXUH²5pVHDXYLWUHX[SUpVHQWDQWO¶LQFRUSRUDWLRQGHPRGLILFDWHXUV/HV FDWLRQVIRUPDWHXUVVRQWUHSUpVHQWpVSDUOHVFHUFOHVQRLUVHWOHVDQLRQVIRUPDWHXUV SDUOHVFHUFOHVEODQFV/HVFHUFOHVEODQFVDYHFXQSRLQWDXFHQWUHUHSUpVHQWHQWOHV DQLRQVQRQSRQWDQWV

 ,O D pWp GpPRQWUp TX¶LO pWDLW DVVH] GLIILFLOH G¶REWHQLU XQ YHUUH XQLTXHPHQW DYHF XQ IRUPDWHXU HW HQFRUH PRLQV DYHF VHXOHPHQW XQ PRGLILFDWHXU &¶HVW HQWUH DXWUHV SRXU FHWWH UDLVRQTXHODSRVVLELOLWpGHIDLUHGHVYHUUHVjEDVHGHIOXRUXUHVQ¶DYDLWSDVpWpSUpGLWHDYDQW OHXUGpFRXYHUWHIRUWXLWH/HVIOXRUXUHVSRVVqGHQWXQFDUDFWqUHWUqVLRQLTXH

²9HUUHVIOXRUpV

²5pWURVSHFWLYH

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(33)

être possible d’en tirer autre chose que des matériaux cristallins. Avant cette année clé, on connaissait seulement deux types de verres qui étaient généralement relégués au titre de curiosité scientifique : les verre fluorobéryllates et fluoroaluminates.

On sait depuis les années 1930 qu’on peut obtenir un verre à partir du fluorure de béryllium sans trop de difficulté. Le BeF2 forme un verre sans avoir besoin de lui ajouter d’autres constituants. Sa structure est similaire à celle de la silice, soit une configuration tétraédrique. C’est également le seul verre fluoré qui respecte les règles de Zachariasen. Des travaux ont démontré que le BeF2 est particulièrement résistant à la cristallisation. Ainsi, la vitesse de refroidissement n’a pas besoin d’être extrême pour éviter la formation de nucléi.26

Les verres fluorobéryllates possèdent l’indice de réfraction (n) le plus bas connu pour un solide, soit (1,275). Ce verre comporte certains avantages intéressants comme une résistance aux lasers à haute puissance ainsi qu’une transparence étendue de l’UV jusque dans l’IR. La transparence IR est légèrement plus élevée que celle de la silice qui peut aller jusqu’à 4 µm. Étant donné sa forte hygroscopicité et sa toxicité élevée (bérylliose), les applications demeurent très limitées.7,26

Concernant les verres fluoroaluminates, ils sont connus depuis 1949.27 Le fluorure d’aluminium est un acide de Lewis, c’est-à-dire qu’il peut former des liaisons covalentes de coordinence. Un acide de Lewis attire un doublet d’électrons libres pour combler une orbitale vide. De cette façon, l’aluminium fournit l’orbitale et quant aux fluorures, ils fournissent le doublet d’électrons. La possibilité d’avoir des liaisons covalentes augmente la stabilité du verre. Ceci dit, pour un verre composé uniquement de AlF3, cette stabilité est insuffisante pour dominer les processus de dévitrification. La vitesse de refroidissement nécessaire pour surpasser l’état cristallin est très élevée et le verre obtenu demeure très hygroscopique.7

2.2.2 — Verres fluorozirconates (ZBLAN)

L’année 1974 est une année pivot pour les verres fluorés puisqu’un groupe de recherche français rapporte pour la première fois une composition stable (Section 1.1).4 Un constat important a été fait à cette époque ; la stabilité d’un verre fluoré s’accroît avec l’augmentation du nombre de constituants dû à l’effet d’obstruction.28 Pour les fluorozirconates, les verres obtenus les plus stables ont généralement un minimum de quatre

(34)

composants.7 Le premier verre stable obtenu en laboratoire est celui à base de fluorure de zirconium (IV), nommé fluorozirconate ou encore ZBLAN. Le terme ZBLAN est l’acronyme des premières lettres des fluorures inclus dans la matrice vitreuse et dont la composition est :

53 ZrF4 — 20 BaF2 — 4 LaF3 — 3 AlF3 — 20 NaF (% molaire)

Cette composition est la plus utilisée et, surtout, la plus étudiée. Les quantités indiquées sont des pourcentages molaires. Elle fait exception aux règles de Zachariasen étant donné qu’elle présente des nombres de coordination élevés se situant entre 6 et 8.29 Cette variabilité intrinsèque de la coordination de la structure compte assurément pour beaucoup dans sa facilité à former un verre.26 Il existe quelques propositions de modèles de structures dans la littérature, mais encore aujourd’hui l’information structurale demeure fragmentaire. Par exemple, en 1987, on proposait un modèle à partir d’un réseau de ZrF7. Ces travaux supposaient un partage du côté des polyèdres de coordination favorisant la formation de chaînes polymériques. Les sommets demeurent partagés entre les différents polyèdres selon le ratio Zr:F.30

La stabilité thermique (ΔT) d’un verre correspond à la différence entre la température de cristallisation (Tx) et la Tg. Le ZBLAN possède une stabilité thermique suffisamment grande pour permettre le fibrage, soit environ 90°C.31 L’avènement du ZBLAN sous forme de fibre a permis entre autres d’étendre la plage usuelle de transmission dans l’infrarouge jusqu’à environ 4-5 µm. Sous forme d’échantillon massique, on peut atteindre entre 6 et 7 µm, selon l’épaisseur (Figure 2.9). Autre point intéressant, les pertes optiques sur de grandes distances devraient en théorie être moins importantes que pour la silice.7 Ces aspects seront détaillés dans les sections subséquentes.

2.2.3 — Verres fluoroindates

Le verre fluoroindate, à base de fluorure d’indium (InF3) comme son nom l’indique, a été reporté pour la première fois dans la littérature en 1983. À cette époque, tous les verres obtenus étaient plus ou moins stables.29 Ce n’est qu’en 1989 qu’est reportée pour la première fois une composition stable.32 Les constituants de cette dernière se retrouvent dans pratiquement toutes les compositions développées par la suite. Du moins, c’est le cas des plus stables.

(35)

40 InF3 — 20 ZnF2 — 20 BaF2 — 20 SrF2 (% molaire)

Tout comme pour le fluorure d’aluminium, le fluorure d’indium se comporte comme un acide de Lewis (Figure 2.8). Ceci a pour conséquence de former des liaisons covalentes de coordinence qui renforcent le réseau. Ainsi, on observe pour cette matrice un plus grand ΔT pouvant atteindre les 130°C, dans certains cas.31

Figure 2.8 — Représentation schématique du partage d’un doublet

d’électrons libres d’un fluorure avec une orbitale vide de l’indium. Ce partage mène à l’apparition d’une liaison covalente de coordinence.

Il subsiste toutefois un problème non-négligeable pour ce genre de matrice. En fait, l’enthalpie de cristallisation du InF3 est plus élevée que celle du ZrF4, ce qui rend moins favorable les possibilités de fibrage.31 Il n’est pas question d’une impossibilité ici, mais plutôt de difficultés supplémentaires par rapport aux verre fluorozirconates.33

En revanche, le fluoroindate montre aussi plusieurs avantages par rapport au ZBLAN. Par exemple, sa transmission s’étend légèrement plus loin dans l’infrarouge : entre 7 et 8 µm (Figure 2.9). De plus, le fluoroindate serait moins hygroscopique, donc il a une meilleure résistance chimique. Les techniques usuelles pour mesurer la résistance chimique à l’aide d’une différence de masse du verre ne peuvent s’appliquer pour les verres fluorés. Lorsqu’on plonge un verre fluoré dans l’eau, on permet la substitution de F- par des OH-. Il s’avère que ces deux entités ont pratiquement la même masse molaire. Pour surmonter ce problème, un groupe de chercheurs australiens a utilisé des mesures de pH pour quantifier leur résistance chimique. Sachant que le pH de l’eau pure est neutre (pH=7,00), lorsqu’une molécule d’eau laisse un OH- s’insérer dans le verre, il y a libération de F- par le verre et des traces de H+ résiduels. L’acide fluorhydrique (HF) étant un électrolyte faible, sa formation sera favorisée. On peut alors mesurer le pH de la solution et connaître la concentration exacte en fluorures

In

F

F

F

In

F

F

(36)

Figure 2.9 — Transmission optique dans l’infrarouge représentée selon la

matrice vitreuse. Ces transmittances sont valables pour des échantillons massiques d’environ 3 mm d’épaisseur.31

2.2.4 — Transparence infrarouge

La transparence dans l’infrarouge d’une matrice vitreuse est très importante pour les technologies de pointe opérant dans cette région spectrale. La Figure 2.9 montre qu’il est impossible d’aller au-delà d’environ 4 µm pour un échantillon massif de SiO2. Pour une fibre, on parle plutôt de 2 µm. Les causes relatives aux pertes pour des échantillons fibrés seront détaillées à la Section 2.2.5.8

En attendant, cette section propose de comprendre ce qui limite directement la transparence dans l’infrarouge. On appelle ce phénomène l’absorption multiphonon, terme souvent utilisé par les physiciens. En chimie, on peut considérer le phonon comme étant la fréquence de vibration d’une liaison chimique. Cette absorption provient donc de la contribution globale de toutes les fréquences de vibration présentes dans la matrice.

Pour avoir une transparence la plus étendue possible dans l’IR, il suffit de réduire ces dites fréquences de vibration. Pour y parvenir, deux paramètres doivent être contrôlés : la force des liaisons et la taille des atomes.

La force d’une liaison a un effet direct sur sa fréquence de vibration. En effet, si l’on diminue la force d’une liaison, il est plus facile de faire vibrer cette dernière. Ainsi, l’énergie

(37)

nécessaire pour cette vibration est significativement réduite, donc elle est située plus loin dans l’IR.

Du côté de la taille des atomes, on peut se référer à la formule de l’approximation de l’oscillateur harmonique (Équation 2.5), dans le cas d’une molécule constituée de deux atomes A et B. 𝝊 = ( 𝟏 𝟐𝝅) √ 𝒌 𝝁 (2.5)

Dans cette formule, k représente la constante d’un ressort et µ la masse réduite du composant telle que décrite à l’Équation 2.6. La masse réduite se calcule à partir des masses atomiques respectives de A et B.

𝝁 = 𝒎𝑨∙ 𝒎𝑩 𝒎𝑨+ 𝒎𝑩

(2.6)

Évidemment, en plus d’être une approximation, l’Équation 2.5 n’est pas la plus représentative puisqu’elle ne tient pas compte de l’anharmonicité qui représente mieux les systèmes réels. Par contre, pour visualiser l’effet qu’à la masse des atomes sur la plage IR d’un verre, c’est suffisant. Ainsi, en augmentant la masse des atomes, on augmente du même coup la masse réduite. En insérant cette masse réduite dans l’Équation 2.5, on peut s’attendre à une diminution de la fréquence de vibration. En calculant cette fréquence pour SiO2, ZrF4 et InF3, on obtient 1100 cm-1, 580 cm-1 et 510 cm-1, respectivement (Figure 2.9). Le verre à base de fluoroindate présente donc une transparence IR légèrement supérieure à celle du ZBLAN principalement en raison de la plus grande masse de ses constituants.

En dehors de la silice et des fluorures, il existe aussi d’autres candidats pour des applications en infrarouge. Par exemple, les verres à base d’éléments chalcogènes (soufre, sélénium et tellure), souvent combinés à des éléments du groupe VB (arsenic et antimoine), peuvent atteindre une transparence IR largement supérieure à celle des verres fluorés. Ceci est illustré sur la Figure 2.10.22 Ainsi, il est légitime de se demander quelles sont les raisons qui favorisent le choix des verres fluorés plutôt qu’une matrice chalcogénure pour ce projet.

(38)

Figure 2.10 — Spectres de transmission représentés pour différentes familles de

verres. Le spectre correspond à des échantillons massiques d’une épaisseur de 3 mm.22

Tout d’abord, le pourcentage de transmittance d’un verre chalcogénure est largement plus faible par rapport à ses homologues (Figure 2.10). Ceci est dû à son indice de réfraction qui est très élevé, soit d’environ 2,43 pour une matrice As2S3. Un tel indice produit des pertes non-négligeables qui se produisent lors du passage de la lumière aux interfaces de l’air et du verre. Elles proviennent de la réflexion en surface qui est trop importante lorsque l’indice est trop grand. On les appelle les pertes ou les réflexions de Fresnel (R) et elles peuvent être évaluées selon l’Équation 2.7. Avec une incidence à 90°, il en résulte des pertes aux alentours de 17,4% pour chacune des interfaces d’un verre As2S3, donc une transmittance aux alentours de 65,2%. On peut réduire ces pertes en déposant des couches minces antireflets en surface. Cependant, les couches minces permettent seulement d’aller chercher des zones spécifiques du spectre. Il est difficile, voire impossible dans certains cas, d’obtenir une bonne transmittance dans tout le spectre.

𝑹 = (𝒏𝒗𝒆𝒓𝒓𝒆− 𝒏𝒂𝒊𝒓 𝒏𝒗𝒆𝒓𝒓𝒆+ 𝒏𝒂𝒊𝒓)

𝟐 (2.7)

Il existe d’autres problèmes qui limitent l’utilisation de ce genre de verre. Leur forte toxicité, en lien avec les éléments impliqués, empêche la plupart des applications biologiques

in vitro. Ils n’ont pas de transparence dans le visible, pour la plupart. La Tg de ce type de verre étant très basse, il s’y produit souvent des dommages irréversibles lorsqu’ils sont

(39)

exposés à des lasers haute-puissance. C’est ce qu’on appelle un seuil de dommage très bas `s l’exposition laser.

2.2.5 — Pertes optiques

L’ultime but du développement des verres fluorés est le fibrage pour l’utilisation dans la plage optique entre 3 et 5 µm. Comme exprimé en introduction, plusieurs lasers nécessitent des médiums opérant dans l’infrarouge. On peut penser au laser Er:YAG opérant à 2,94 µm ou encore le laser au monoxyde de carbone qui lui émet entre 4,8 et 5,5 µm.6

Actuellement, la fibre ZBLAN demeure la plus utilisée commercialement. La fibre fluoroindate est beaucoup moins utilisée étant donné les difficultés pour la produire.

Cependant, deux problèmes doivent être surmontés avant d’espérer pouvoir un jour utiliser une fibre fluorée sur de grandes distances à des fins de télécommunication. Le premier est son hygroscopicité. La plupart des fluorures sont sensibles à la présence d’eau. Il a été démontré qu’en ajoutant du fluorure de calcium au verre fluoroindate, on pouvait espérer augmenter la résistance à l’humidité de manière significative.34

(a) (b)

Figure 2.11 — Profil des pertes théoriques pour des verres oxyde, chalcogénure et halogénure

selon la longueur d’onde (a).7 Plus spécifiquement, les pertes calculées pour la silice et le

ZBLAN (b).8

Le second problème est un peu plus complexe, il concerne les pertes optiques sur de grandes distances. Il existe deux types de pertes, soit les pertes intrinsèques et extrinsèques.

(40)

Théoriquement, le ZBLAN devrait avoir des pertes nettement inférieures à celles habituellement mesurées pour la silice.

La Figure 2.11a illustre les courbes en V pour les trois familles de verre d’intérêt dans le domaine IR. Chacun des minima représente l’intersection des pertes dues à la diffusion Rayleigh et de la coupure d’absorption dans l’infrarouge (Section 2.2.4) ; ce sont les pertes intrinsèques. La Figure 2.11a ne permet pas de voir jusque dans l’UV, mais on peut également compter la coupure UV, ou coupure Urbach, parmi les pertes intrinsèques. Celles-ci dépendent de façon générale de la composition et de la densité de la matrice vitreuse. La Figure 2.11b rapporte les pertes intrinsèques théoriques typiques de la silice et d’un ZBLAN.8

L’importance des pertes intrinsèques est rarement mise en évidence pour des échantillons massifs de faibles épaisseurs. En fibrant un verre, on augmente la distance à parcourir par la lumière, ce qui implique une manifestation plus importante des pertes. On observe alors une réduction de la plage de transmittance (coupures UV et IR) en plus d’une augmentation de la diffusion Rayleigh. Par exemple, pour la silice sous forme d’échantillon massif d’une épaisseur 3 mm, on peut atteindre 4 à 5 µm. Cependant, une fois l’échantillon fibré, on ne dépasse pas les 2 µm (voir Figures 2.9, 2.10 & 2.11b).

Tableau 2.1 — Pertes intrinsèques optiques théoriques et calculées

par rapport au minimum de la courbe en V.8 Type de matrice Théorique (dB/km) Mesurée (dB/km)

SiO2 (1,55 µm) 0,14 (1,55 µm) 0,16

ZBLAN (2,55 µm) 0,01 (2,3 µm) 0,45

Jusqu’à aujourd’hui, il n’a pas été possible d’obtenir des pertes intrinsèques expérimentales aussi basses que les théoriques pour le ZBLAN. Le Tableau 2.1 étaye les données observées actuellement et celles connues théoriquement. On remarque qu’avec des pertes de l’ordre de 0,45 dB/km, il n’est pas tellement avantageux de remplacer la silice pour des applications à grandes distances. L’atteinte de pertes de l’ordre de 10-2 dB/km —

Figure

Figure 2.1 — Représentation schématique d’un réseau cristallin SiO 2  (a) et d’un réseau non- non-cristallin SiO 2  (b)
Figure 2.2 — Schématisation de la transition vitreuse. Comportement du volume  molaire ou de l’enthalpie en fonction de la température
Figure 2.3 — Évolution de la température de transition vitreuse en modifiant la vitesse  de refroidissement (v 1  > v 2  > v 3 )
Figure 2.4 — Comportement de l’entropie configurationnelle en fonction de la  température pour un cristal et un verre
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